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    Rollon (Rollo en latin) est parfois appelé Robert Ier le Riche, Robert étant le nom qu'il reçut à son baptême. Les historiens normands le nomment volontiers Rhou ou Rou, qui résulte de l'évolution phonétique régulière de Hrólfr en dialecte normand, selon le schéma suivant: Hrólfr > Rolf > Rouf

     

    (cf. les noms de famille normand en -ouf) > Rou (voir également Osouf, variante Auzou ou Ingouf, variante Ygout).

     

    On trouve aussi une variante à partir du nom équivalent issu du germanique continental latinisé Rodulfus (Rodolphe), et une autre variante latinisée Radulfus (Ralf, Ralph), d'où son autre nom de Raoul.

     

    Plus souvent, on le surnomme « Rollon le Marcheur »

     

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    (Göngu-Hrólfr en vieux norrois),  car la légende raconte qu'aucune monture n'a jamais été capable de porter son imposante stature de plus de deux mètres

    pour plus de cent quarante kg.

     

    Pour d'autres, la légende devait montrer Rollon comme un géant puisqu'il était puissant et redouté. De son côté, Régis Boyer, professeur de langues, littératures et civilisation scandinaves à l'université de Paris-Sorbonne, avance que ce surnom fait référence à ses multiples voyages, à son extraordinaire périple (göngu viendrait en fait de göngumadr,

    à savoir le vagabond).

     

     

    Selon Adigard des Gautries, Hrólfr est la contraction de Hróó/ulfr, signifiant « renommée/loup »

    Les pérégrinations d'un chef viking

     
    Le périple de Rollon.

    L'histoire de Rollon est assez incertaine, notamment ses origines. L'historien Lucien Musset fait remarquer que « le succès de sa dynastie (Rollon est à l'origine de la lignée des ducs de Normandie) a créé autour de lui un halo de légendes »5. De plus, les sources qui évoquent ce personnage sont presque toutes tardives.

    Certaines d'entre elles (notamment danoises) racontent qu'il serait né au Danemark en 845. Les sagas islandaises du xiiie siècle le présentent plutôt comme un Norvégien. C'est cette dernière thèse qui semble emporter l'adhésion aujourd'hui. Ces mêmes sagas expliquent que Rollon est le fils de Rognevald6, un jarl (comte) de la région de Møre og Romsdal, dans le centre-ouest de laNorvège2. Les ruines de son château se trouveraient dans la banlieue sud d'Ålesund. Comme beaucoup d'autres Scandinaves, il est finalement contraint à quitter son pays et à parcourir les mers. L'Heimskringla raconte qu'il est banni de Norvège par le roiHarald à la belle chevelure pour s'être livré à des actes de pillage dans le pays7.

    Selon toute vraisemblance, il prend la tête d'une bande de Vikings, essentiellement des Danois et quelques Norvégiens, s'attaque principalement aux côtes de la mer du Nord et de la Manche. Dudon de Saint-Quentin, historien du début du xie siècle, ajoute plusieurs détails, invérifiables8 : après son bannissement de Norvège, Rollon trouve refuge auprès du roi anglo-saxon Alstelmus9. Ce dernier lui confie une petite troupe d'Anglais, et le Viking part ainsi avec sa bande anglo-scandinave ravager la Frise, l'embouchure du Rhin et de l'Escaut.

    Dudon de Saint-Quentin place l'arrivée de Rollon dans le royaume franc en 876, année d'une importante incursion viking sur la Seine10. Là encore, aucune preuve ne permet de vérifier cette affirmation. Aujourd'hui, plusieurs historiens, comme Jean Renaud ou Lucien Musset avant lui, doutent de l'exactitude de cette date, et proposent une datation plus tardive (890-905)

     

    Rollon (mort entre 928 et 933) est le chef viking

    à l'origine du duché de Normandie.

     

    En 911, en contrepartie de l'arrêt de ses pillages,

    il reçoit du roi Charles le Simple un territoire autour de Rouen.

     

     

    Environ cent ans plus tard, cette concession

    deviendra le duché de Normandie.

     

    Il est assez difficile de fixer la trame de la vie de Rollon, car elle est également l'objet de récits légendaires.

     

    Blason des ducs de Normandie

     

     

    En ce qui concerne l’ascendance de Rollon, les sources nordiques sont plus prolixes que les sources normandes.

     

     

     

     

    Le Landnámabók, ou livre de partages des terres en Islande, permet de construire l’arbre généalogique 

     

     

    Si l’on suit le récit de Dudon de Saint-Quentin, Rollon a eu un frère, Gurim, qui trouva la mort dans une bataille contre le roi des Danois ; ce, avant que Rollon quittât son pays natal.

     

     

    L’une de ses frilla (épouse à la manière danoise) les plus connues fut Poppa, fille du comte franc Bérenger de Bayeux, tué lors de la prise de la ville par les Vikings de Rollon

     

    Après son baptême, Rollon aurait reçu une épouse officielle, Gisèle, fille du roi Charles le Simple, princesse carolingienne âgée au plus de quatre ans, mais cela n'est confirmé par aucun document contemporain.

     

     

    Son fils Guillaume lui succède aux environs de 927.

     

    Sa fille Gerloc devient plus tard l’épouse de Guillaume Tête-d’Étoupe,

    comte de Poitiers et duc d’Aquitaine.

     

     

    Rollon, jarl des Normands

    Considéré par les historiens comme le premier duc de Normandie et le fondateur du duché normand, il ne porte pourtant pas le titre de duc de Normandie mais seulement celui de jarl des Normands, l'équivalent du français Comte.

     

    Aussi les textes latins le qualifient-ils très souvent de princeps, autrement dit de prince. Il hérite aussi de la charge carolingienne de comes Rothomagensis, comte de Rouen ou de marchiones, marquis, titre de celui qui défendait la Seine contre les incursions vikings.

     

    L'installation de Rollon en Normandie[modifier | modifier le code]

     
    Statue de Rollon, à Rouen, parArsène Letellier (jardins de l'Hôtel de Ville).

    Premiers contacts avec la Normandie[modifier | modifier le code]

    En tout cas, quelle que soit la date, Rollon aborde la Francia par la Seine. Il découvre une région (la future Normandie) pillée régulièrement depuis 841 par ses compatriotes vikings. Sa bande s'installe à l'embouchure de la Seine et de là lance différents raids dans le royaume franc. Notre principale source, Dudon de Saint-Quentin, rapporte que Rollon participe au siège de Parisentre 885-887, puis part pour Bayeux entre 886 et 890. Battu par le roi breton Alain le Grand, il se serait replié pour hiverner à Noyon10.

    L'historien Pierre Bauduin défend la thèse d'une installation précoce de Rollon en Normandie, installation suffisamment longue pour que le chef viking noue des contacts avec les représentants du pouvoir carolingien et de l'Église. N'épouse-t-il pas, more danico (et certes de force), Poppa, la fille du comte de Bayeux Bérenger, après la prise de la ville et après avoir tué celui-ci ? Rollon développe sûrement des alliances avec les autorités en place, de telle manière qu'au début des années 910, il n'est plus un obscur chef de bande.

    Gouvernement de Rollon

    Il restaure la paix et la sécurité en Normandie. Une légende raconte que Rollon suspendit pendant trois ans un anneau d'or à un arbre de la forêt de Roumare sans que personne ose le voler. À Heuland, il existe une croix appelée Croix de Rollon à laquelle on prétend qu'il accrochait des joyaux et des bracelets d'or pour prouver qu'il n'y avait aucun voleur en son duché.

     

    Le jarl s'appuie sur l'archevêque de Rouen pour relancer l'Église séculière et rétablir la vie monastique.

     

    Les moines de Saint-Ouen de Rouen osent revenir avec leurs reliques.

     

    La normalisation sur le plan religieux reste toutefois à ses prémices.

     

    Rollon bouleverse-t-il le gouvernement de la région par rapport à ses prédécesseurs carolingiens ?

     

    S'inspire-t-il par exemple des institutions scandinaves pour réformer son nouvel État ? Les sources à notre disposition ne permettent pas de répondre.

     

    Il faut attendre les successeurs de Rollon pour comprendre l'administration du jeune duché.

    Chef viking ou prince chrétien ?

     
    Rollon

    L'installation de Rollon à Rouen n’inaugure pas la colonisation scandinave dans l’actuelle Normandie. Elle la renforce. En effet, selon Jean Renaud, des Danois s’étaient déjà installés à l’embouchure de la Seine, sans compter la colonisation régulière et indépendante sur les côtes du Cotentin.

     

    Rollon partage la terre « entre ses chevaliers et des étrangers » précise Guillaume de Jumièges. Au vu de la toponymie, les colons s'établissent près des côtes et en Basse-Seine. Mais le pays est loin d'avoir été déserté par la population locale.

     

    Celle-ci avait fui les affrontements, mais une fois la paix rétablie et les nouveaux seigneurs installés, la vie reprit son cours normal.

     

     

    Après le traité de Saint-Clair-sur-Epte, Rollon poursuit ses expéditions de pillage ou ses tentatives plus ou moins réussies d'extension territoriale. Il fait également preuve de sévérité à l’égard des hommes du roi, comme le souligne Dudon de Saint-Quentin.

     

    L’anecdote qui suit est décrite comme étant légendaire par les historiens, mais elle marque le rejet de toute ingérence royale dans les affaires de Rouen. Donc, en 922, deux chevaliers sont envoyés par Charles le Simple afin de s’assurer de la sécurité de sa fille Gisèle, qu'il avait promise comme épouse au jarl des Normands.

     

    Ces deux chevaliers ne sont pas présentés à Rollon, et circulent sans autorisation dans le comté.

     

    Lorsque celui-ci apprend leur existence, il les fait capturer, et les amène sur la Place du Vieux-Marché de Rouen pour les décapiter aux yeux de tous.

     

    Cet épisode représente pour Dudon de Saint-Quentin et Guillaume de Jumièges le début de la dégradation des rapports entre le comte et le roi Charles.

     

     

    Lors de la déposition momentanée de Charles le Simple, les Normands de Rouen lui restent fidèles.

     

    Conformément aux clauses du traité, aucune flotte scandinave ne remonte la Seine pour piller le royaume franc. Mais les annales nous précisent qu'en 923, Rollon et ses hommes trahirent leur serment de 911. Selon Flodoard, Ragenold, chef des Vikings de la Loire, convainc « ses compatriotes de Rouen » de mener une entreprise de pillage jusqu’à Beauvais, ce qu’ils firent.

     

     

    Le chroniqueur insiste sur le nombre de captifs francs, mille au total, ce qui justifia la réaction de 924 du comte Herbert II de Vermandois et du roi Raoul, mandé par Hugues le Grand, fils du roi Robert Ier, le prédécesseur de Raoul. Ces deux personnages menèrent une expédition punitive

     

    sur le comté de Normandie.

     

     

    Rollon réagit à cet affront en poussant son armée cette fois-ci bien au-delà de l’Oise.

     

     

    Pour trouver une issue favorable, la diplomatie prit à ce moment-là toute son importance, et ce furent les ambassadeurs normands qui eurent le dernier mot, puisque le roi fut contraint de payer un tribut aux Normands.

     

     

    Rollon reçut également en réparation les régions duBessin et de l’Hiémois.

     

    Il ne faut pas oublier que la population continuait de payer le danegeld au comte, et ce jusqu’en 926.

     

    D'après les Annales de Flodoard, chanoine de Reims, en 924, le jarl des Normands obtint du pouvoir carolingien Cinomannis et Baiocae

    (Le Mans et Bayeux), c'est-à-dire le Maine et le Bessin.

     

    Lucien Musset juge improbable la concession de tout le comté et propose plutôt de parler de la région de l'Hiémois.

     

     

    En 925, Flodoard retrace dans ses chroniques le parcours de Rollon sur les terres franques, qui rompit du même coup la paix de 924.

     

    Avec son armée, il prit position dans le comté de Flandre ; les villes de Beauvais, d'Amiens, d'Arras et enfin de Noyon furent tour à tour pillées et incendiées. Face à cette incursion, le comte Herbert et le roi Raoul allièrent de nouveau leurs forces pour piller le comté de Normandie.

     

    L’armée de Rollon les repoussa, mais le comte dut faire face à une révolte des gens du Bessin, qui refusaient certainement la nouvelle tutelle comtale.

     

    La répression franque ne s’arrêta pas pour autant, puisqu’un second assaut se prépara contre la jeune Normandie. Arnoul Ier de Flandre s'empara de Bresles, et dirigea l’ensemble de ses forces sur la forteresse normande d’Eu. Rollon y envoya des renforts, que Flodoard estime à mille hommes. Mais quel que fût leur nombre, les Francs eurent raison de la forteresse, qui tomba sous leur contrôle, et finit par être brûlée avec ses occupants. C’est grâce à l’intervention de Hugues le Grand que les hostilités cessèrent. Les Normands acceptèrent les termes de l’accord et rendirent les terres qu'ils venaient fraîchement de conquérir. Les fils de Baudouin II le Chauve, Arnoul Ier de Flandre et Adolphe de Boulogne, reprirent leurs possessions. Raoul de Gouy et Helgaud de Ponthieu en firent autant. Cette défaite normande ne fut pas cuisante puisque le comté de Normandie ne fut amputé d’aucune concession territoriale.

    Ces affrontements au niveau de la Picardie se placent dans un contexte d'effondrement du pouvoir royal dans cette région (le carolingien Charles le Simple est renversé par Raoul). La Picardie devenait à partir des années 920 « le terrain où se heurtaient les appétits des principaux dirigeants de la France du Nord19 » (jarl des Normands,comte de Flandre, duc des Francs et comte de Vermandois). Avec pour enjeu principal : le contrôle des contrées littorales du pays. D'où des conflits autour des forteresses d'Eu et de Montreuil.

    La fin incertaine de Rollon[modifier | modifier le code]

     
    Gisant de Rollon (Rollo, en latin), dans la cathédrale de Rouen.

    La date et les circonstances du décès du premier jarl des Normands restent incertaines. D'après Richer de Reims, Rollon le Marcheur meurt en 925, lors du siège du château d'Eu, conduit par Herbert II de Vermandois et Arnoul, comte de Flandre20. C'est, en effet, possible, puisque, en 927, on voit son fils Guillaume Longue-Épée prêter serment de fidélité pour les Normands. Toutefois,Flodoard, dans un passage ambigu, sous-entend que Rollon vivait encore en 92821. Surtout, selon Dudon de Saint-Quentin, le premier jarl n'aurait pas été tué : il aurait abdiqué en faveur de son fils, et vécu ensuite cinq ans encore.

     

    L'historiographie actuelle reprend généralement ce récit, et place la mort de Rollon vers 932-933.

     

    Par contre, l'historien anglais David Douglas ne croit pas à cette période de transition, et croit plutôt à une date de décès autour de 925-927.

     

     

    Selon Adémar de Chabannes, Rollon aurait pratiqué des sacrifices humains en l'honneur des dieux païens peu de temps avant sa mort, en 932-933, tout en faisant des dons aux églises normandes.

     

    Cette anecdote est douteuse !!!!.

     

     

    Selon le père Anselme, il est inhumé dans la cathédrale de Rouen, puis sa dépouille est transférée à l'abbaye de Fécamp dans la seconde moitié du xe siècle, sous le principat de Richard Sans-Peur, son petit-fils.

     

     

    Le gisant de Rollon, situé dans le déambulatoire sud de la cathédrale, est une copie du xixe siècle du gisant d'Henri le Jeune.

     

    Il a été installé à son emplacement actuel en195o. Jusqu'en 1944, le gisant de Rollon était placé dans la chapelle du petit Saint-Romain (collatéral sud).

     

    Proche stylistiquement du gisant de son fils, il devait dater de la même période, troisième quart du xive siècle, mais l'original a été détruit

     

     

     

    Sur le socle, se trouve une épitaphe :
    « IN.SINU.TEMPLI.ROLLO.QUIESCIT
    A.SE.VASTATAE.CONDITAE.NORMANNIAE.PATER.AC.PRIMUS.DUX
    LABORE.QUI.FRACTUS.OCCUBUIT.OCTOGENARIO.MAIOR.AN.CM.XXXIII »
    (Traduction : Au sein de ce temple, repose Rollon,
    père et premier duc de la Normandie, investie et relevée par lui.
    À bout de force de ce labeur, il succomba en 933, âgé de plus de 80 ans.)

     

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    LES MATIERES

    Au Moyen Age, le coton est inconnu, on utilise le lin, qui est tissé plus ou moins finement selon le rang et la laine que les riches font teindre.

     

     

    Au XIIIe siècle, on commence à intégrer le velours et

    le cuir est très apprécié.

     

    Les vêtements d'hiver sont doublés de fourures, une fourure que l'on utilise aussi comme ornementation. Les nobles et les riches marchands font orner leurs vêtements de motifs brodés.

     


    Les croisades ont fait découvrir à l'Europe les matières luxueuses comme la soie largement utilisée dans les habits de fête.

     



    Il ne faut pas oublier qu'il n'aurait pas suffit de sa vie entière pour un simple paysan (la majorité de la population) pour se payer une étoffe luxueuse comme la soie ou le velour.

     

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    Leurs vêtements étaient faits de lin épais et

    ils les gardaient souvent toute leur vie.


     

     

    LES VETEMENTS DES PAYSANS


    Le vêtement typique du paysan au Moyen-Age est composé d'un chaperon posé sur la tête et maintenu par une cape qui est accrochée autour du cou.
     

     

    La tunique, sorte de pull trés long (jusqu'aux genoux) se porte que des braies (sortes de pantalons).

     

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    Ils sont chaussés de housseaux, fabriqués en peau de mouton, qui tiennent avec des cordes nouées jusqu'en dessous des genoux.

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    Un chaperon

    Pour les femmes, les robes paysannes comportaient souvent des pièces rapportées ou supprimées au fil des saisons.

     


    En effet, la gent paysanne ne possédant que quelques pièces de vêtement, il était courant de rajouter notamment des manches, au moyen de liens, à une robe, afin de pouvoir en user été comme hiver.

     

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    LES VETEMENTS DES HOMMES



    Dans les derniers temps du Moyen Age, les chausses se confondent avec les braies, un caleçon s'attachant à la ceinture et descendant aux genoux.
     

     

    Au XVe siècle, les braies disparaissent presque complètement, remplacées par les chausses et le haut-de-chausses.

     

     

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    S'attachant d'abord entre elles à l'entre-jambes, elles ont ensuite été pourvues d'un triangle généralement fait de la même étoffe,

     

    la future braguette.



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    Giovanni_Battista_Moroni_009.jpg

     

     

     

     

    Le chainse, long vêtement de lin ou de chanvre,

    ordinairement blanc, est en quelque sorte l'ancêtre de notre chemise actuelle.

     

     

     

    La longueur seule distinguait les chainses d'homme de ceux de femme : genou pour les sieurs, cheville pour les dames.

     

     

     

    Le col gansé était fermé par un lien ou par un bouton.

     

    Portée à même la peau, son encolure ronde est pourvue d'un amigaut pour faciliter le passage de la tête.

     

    Au fil des siècles, il s'est raccourci dans le costume masculin, suivant l'évolution du pourpoint.



    Le doublet est un vêtement en toile doublée, rembourré de coton et piqué.

     

    Il se portait directement sur la chemise.

     


    Au départ vêtement de dessous, il s'est peu à peu rembourré et substitué à la cotte et au surcot.



    Les hommes ont adopté dès le XIVe siècle ce type de vêtements courts, ajustés à la taille, boutonnés, agrafés ou lacés sur le devant.

     

    La mode des habits courts a perduré pendant tout le XIVe siècle et suivants.



    Vêtement d'homme, le pourpoint est apparu dès la fin du XIIIe siècle, mais n'était pas encore très utilisé, du moins chez les damoiseaux à la mode.
     

     

    Surtout en faveur à partir de 1440, il remplace corset et cotte à la fin du XVe siècle.

     


    Vêtement souvent très riche, serré à la taille, il était porté par les hommes élégants.

     

     



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    LES VETEMENTS DES FEMMES



    Au Moyen Âge, le costume des femmes était ordinairement moins extravagant que celui des hommes.
     
    La pièce de vêtement principale était la robe, aussi appelée "cotte", qui était ajustée sur le buste et qui s'élargissait en une jupe à
    plis amples sous la taille.
     




    Le costume féminin au Moyen Age présentait certaines caractéristiques générales : le haut du corps était gainé tandis que le bas était allongé par la traîne, la silhouette cambrée au niveau des reins, large sur les hanches, ajusté sur le buste.
     
     



    Les coutures cintrées affinaient la taille.
     
     
    Petit à petit, les détails se multiplièrent :
    décolleté, coiffure, coudières et découpures...

    Le décolleté, d'abord largement arrondi, devint triangulaire
    au cours du 15ème siècle.


    Une mode venue d'Allemagne consistait à décorer le bas des robes, les extrémités des cornettes, de déchiquetures en lambeaux feuillus
    nommés "à la façon d'Allemagne".
     
    Cette nouveauté arriva en France vers 1430.
     


    A la fin du 14ème siècle, une coiffe de soie ou une résille perlée recouvrait l'ensemble des cheveux.
     
    Dessus était posé un voile qui formait sur la tête une sorte d'auvent,
    la huve.
     

    Ces coiffes à cornes variaient par leur forme et leur dimension.



    A la fin du 15ème siècle, cette coiffe était surmontée d'un fin bourrelet. Rapidement, il augmenta de proportion et devint plus haut. Elle étaient souvent ornées d'un long voile.
     
     
    Elles pouvaient mesurer jusqu'à 1m. Les femmes rasaient les cheveux qui en dépassaient au dessus du front en laissant juste une petite pointe de cheveux dépasser.



    Elle furent à la mode jusque dans les années 1480.
    Elles sont souvent appellées "hennin"mais il faut savoir que c'est en fait un dénomination satirique de ces coiffures.


    A Noter : Les dépenses vestimentaires des femmes, même celles concernant les reines et les princesses étaient toujours moins importantes et moins fréquentes que celles des hommes du même rang social.


     
     
    Agnolo Bronzino, Lodovico Capponi, 1550-1555, New York, Frick Collection
     
    LES ACCESSOIRES

    Les chaussures :

    Les chaussures à la mode de l'époque sont les poulaines.
     
    Elles existent déjà depuis plusieurs siècles.
     
    Elles sont devenues bien plus pointues au XVé siècle.
    Peu pointues elles signalent l'absence de noblesse de celui qui les porte.
     
     
    Plus la pointe est allongée plus le rang de noblesse de celui qui
    les porte est élevé.



    Au 15ème siècle, les femmes portaient tout comme les hommes des poulaines, mais aussi des patins dont la destination était de protéger les chaussures légères et fragiles lorsqu'elle sortaient.

     
     


    L'aumônière :

    D'usage quotidien, l'aumônière, également appelée escarcelle ou gibecière, se pendait à la ceinture.
     
    Contenant les objets dont on se servait habituellement, ainsi que de la monnaie, elle était portée indifféremment par les hommes et les femmes.
     
     
    Fermée au départ par un noeud coulant, l'aumônière a ensuite évolué vers des fermoirs apparents en fer, argent ou or.
     
     
    On peut aujourd'hui en voir quelques exemplaires au musée de Leeds (Angleterre).
     
     
     


    mode medievale Bouvignes

     
     
    Autres Accessoires


    Les hommes et les femmes fortunés du Moyen Âge aimaient porter des bijoux : bagues, boucles d'oreilles, broches…
     
     

    Les bijous étaient portés par de rares personnes au moyen age :
     
    rois princes, nobles ou riches marchands.
     
     
     
     
    Le bijou est avant tout un symbole de pouvoir.
     
    En se démocratisant peu à peu il devient aussi un symbole d'amour.



    Les ceintures sont des accessoires indispensables au vêtement médiéval qui ne comporte presque aucune poche.
     
    Aussi la ceinture permet-elle de suspendre les clefs, les petits sacs, les armes ou certains outils.
     
    Richement ornée elle peut prendre une grande valeur esthétique.

    La bague et la ceinture sont des objets souvent échangés par les amoureux.
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
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  • Histoire de la mode — Le sac à main

    Le sac a main a vécu bien des vies :

    retour sur l'histoire pas banale de cet accessoire pratique, porté depuis plus longtemps qu'on ne le croit !


     

    Le sac à main est un accessoire que beaucoup de femmes utilisent de façon quotidienne.

     

    À la fois pratique et parfait pour sublimer une tenue, c’est un objet qui existe depuis l’Antiquité, avant de traverser les âges et de se retrouver dans nos placards !

     

     

    Retour sur cette histoire pas banale que celle du sac à main.

    De l’Antiquité au Moyen Âge, des accessoires pratiques

     

     

    Pendant l’Antiquité, les premiers sacs à mains étaient utilisés par les esclaves, qui rassemblaient les affaires de leur maître dans des bourses plus ou moins grandes faites en poil de chèvre.

     

    Le comble du chic à cette époque est donc de voyager les mains vides.

     

    Cet accessoire a, jusqu’au Moyen Âge, un usage purement pratique.

     

    À cette époque, les voyageurs vont y transporter leur nourriture, les travailleurs y ranger leurs outils, les ecclésiastiques stockent des pièces de monnaie destinées aux nécessiteux dans un sac que l’on appellera l’aumônière (aussi utilisée par les riches, pour le même usage)… Chaque corps d’activité a donc sa bourse attitrée.

    paysans01

    Des paysans travaillant au champ, leur bourse à la taille.

    Ces petits objets très pratiques seront arborés autant par les femmes que par les hommes, car les vêtements ne sont pas encore dotés de poches. Les sacs s’attachent à la taille ou à la ceinture, et contiennent toutes sortes de choses !

    Chez les plus riches, un accessoire ressemblant à notre besace actuelle et appelé l’escarcelle était très à la mode. Elle était souvent dotée d’une serrure, car servait surtout à transporter de l’argent ou des bijoux.

    Bref, jusqu’au XVIIIème siècle, les ancêtres des sacs à main n’étaient en rien une coquetterie, ils avaient seulement un aspect pratique bien défini. Mais avant d’arriver à son stade d’accessoire de mode, il a quelque peu disparu de la circulation…

    Au cours de la Renaissance, le sac à main disparaît presque

    À partir du XVIème siècle, date à laquelle la période de la Renaissance s’empare de toute l’Europe, les différents sacs commencent peu à peu à disparaître — victimes de la mode, au sens propre du terme.

    Car les vêtements de l’époque, aux tissus bouffants et aux formes imposantes, permettent d’ajouter des sortes de poches en-dessous des jupons. On attache donc à la taille, sous les robes des dames et les culottes des messieurs, des sacs de toile ouverts sur le dessus, accessibles depuis l’extérieur par des fentes.

    Cet ancêtre de nos poches actuelles permet donc aux élégant•e•s de se débarrasser des sacs, qui ternissaient l’équilibre de la silhouette.

    elisabeth

    C’est clair qu’il y a de quoi ranger des tas de choses là-dessous — même des gens, je suis sûre.

    On porte à la main ce qui est nécessaire, et on range le reste sous ses jupons. Les plus riches et les membres de la cour, eux, ont bien évidemment des domestiques pour transporter les affaires dont ils ont besoin.

    Il revient à la mode à la fin du XVIIIème siècle

    Ce n’est qu’au XVIIIème siècle que l’on va recommencer à s’intéresser aux anciennes bourses et sacoches, pour les rattacher à sa taille. En plus des petites poches portées sous les vêtements, dans la haute société, on va se mettre à porter des châtelaines.

    Les châtelaines sont des accessoires en argent ou en or, que l’on attache à la taille, et sur lesquels des pendants sont agencés, afin d’y accrocher ce que l’on veut : des objets utiles comme de la décoration pure et simple. Il s’agit ici d’un premier pas dans la coquetterie des sacs à mains. Enfin, d’un de ses ancêtres !

    chatelaine

    Une caricature d’une femme portant une châtelaine

    Les premiers sacs à mains tels qu’on les connaît eux, vont (re)faire leur apparition au cours du XIXème siècle, petit à petit. En effet, dans les années 1800, au cours du Premier Empire, la mode est aux robes d’inspiration antique. Elles se resserrent, se simplifient, la taille est rehaussée : il est donc impossible pour les dames de continuer à mettre des poches sous leur jupes, et de porter des châtelaines à leur ceinture.

    mode-empire

    Un tableau retranscrivant bien la mode de cette époque.

    Les élégantes se munissent alors de sacs à mains assortis à leur tenue, dans lesquels elles mettent ce dont elles ont besoin, que ce soit à la maison (un nécessaire à couture, par exemple), ou dehors (un porte-monnaie, un éventail, des jumelles pour l’opéra…). Ces pochettes sont souvent rondes, parfois carrées, et ornées de pierres. Ce sont de véritables bijoux, et, comme ceux-ci, ils permettent de montrer à quel rang social on appartient !

    Les hommes, dans tout ça, gardent leurs pantalons à poches, et délaisseront les bourses d’années en années, pour ne plus en porter du tout.

    A la fin du XIXème, et jusqu’à aujourd’hui, il devient un accessoire féminin indispensable

    Peu à peu, les femmes ne peuvent plus se passer du sac à main, qui devient un accessoire indispensable, aussi coquet que les robes et les chaussures. Ils sont petits, et toujours parfaitement assortis à la tenue, voire coupés dans le même tissu.

    De plus en plus, la bourgeoisie développe un vif intérêt pour le voyage, que ce soit en train ou en bateau. Il faut donc produire des accessoires pour transporter les affaires des usagers. Le comble du chic est d’acheter des bagages personnalisés et luxueux, pour changer un peu des valises simples et sans design.

    harry-edwige

    Hedwige est blasée de ne pas voyager en cage Louis Vuitton

    D’ailleurs, Louis Vuitton fera fortune en devenant la marque fétiche d’Eugénie, la femme de Napoléon III. Peu à peu, les sacs à mains s’agrandissent, en s’inspirant de cette bagagerie de luxe. Ils sont pensés pour contenir plus qu’un éventail et un miroir de poche : on emporte avec soit de quoi s’occuper pendant le voyage.

    Cet accessoire connaît ensuite bien des fluctuations pendant le siècle, en fonction de la mode et de l’économie.

    Dans les années 1920, il se fait petit, pour ne contenir qu’un rouge à lèvres et un paquet de cigarette : parfait pour danser toute la nuit sur des musiques endiablées, pendant cette ère du charleston !

    Au cours de la décennie 1930, la minaudière est à l’honneur : petit sac rigide, elle est comme un bijou dans lequel on range peu de choses. Très élégante, elle est surtout réservée aux sorties.

    minaudière-rétro

    Un exemple de minaudière rétro, trouvée sur La Modeuse.

    Pendant les années 1940, la Seconde Guerre Mondiale fait rage. Les femmes délaissent leur traditionnel sac à main en cuir, porté quotidiennement depuis plusieurs années maintenant, pour les envoyer aux services militaires, où ils seront transformés pour renforcer les uniformes des soldats. Le tissu sera le matériau maître des sacs de dame jusque dans les années 1950, date à laquelle le cuir reviendra sur le devant de la scène.

    Au cours de cette seconde partie du XXème siècle, cet accessoire de mode restera privilégié par la plupart des femmes, que ce soit pour son côté pratique ou son côté esthétique.

     

     

    Quelle que soit la mode, il continue de sublimer bien des tenues, et que l’on aime notre sac grand, petit, en bandoulière ou porté au bout des anses, le moins que l’on puisse dire,

     

    c’est qu’il revient de loin !

     

     

    SOURCES

     

    http://www.madmoizelle.com/histoire-mode-sac-a-main-347119

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    Manoir de Canapville par M. Le Courtois Du Manoir

     

    Manoir de Canapville
    par
    M. Le Courtois Du Manoir
    Ancien président de la Société des Antiquaires de Normandie

    ~*~

    La présente édition, entièrement conforme à la première (1894),
    a été faite en mémoire de l'Auteur décédé le 9 octobre 1906.

     

     Afficher l'image d'origine

    L'été attire chaque année sur les côtes du Calvados, et surtout à Trouville, un grand nombre de baigneurs, de curieux et d'artistes.

    La plupart d'entre eux ne se contentent pas d'admirer les splendeurs de la mer et les élégantes villas qui la bordent, de Cabourg à Honfleur ; ils veulent connaître le pays où ils viennent chercher le repos et la santé, admirer ses sites gracieux, ses verdoyants paysages, étudier son industrie, ses moeurs, ses monuments, son histoire.

     

     

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    Aussi les voyons-nous parcourant en voiture les routes qui sillonnent la contrée, ou s'égarant à pied dans les sentiers ombreux, en quête de quelques traces d'un passé qui va chaque jour s'effaçant.

     

    Leurs regards sont particulièrement attirés par ces vieilles maisons en colombages dont les formes irrégulières et bizarres, dont les minces murailles de bois et de terre, dont les toits en tuiles ou en paille forment un si frappant contraste avec les constructions modernes en pierre et brique aux formes carrées et solides, à l'intérieur confortable et qui auront bientôt partout remplacé les habitations originales et traditionnelles du pays d'Auge.

     

    splendide-CPA-Canapville-Ancien-Manoir-des-Eveques-de-Lisieux

     

    Cette transformation prouve les progrès accomplis par la richesse publique, le développement du bien-être étendu même à la classe ouvrière, et réjouit l'économiste et le moraliste.

     

     

    remarquable-CPA-Canapville-Manoir-ancienne-Residence-des-Eveques-de-Lisieux

    Mais l'artiste, l'antiquaire, le simple touriste lui-même, gardent au fond du coeur quelque regret de ce passé si pittoresque et qui semblait s'adapter si bien à ce cadre de verdure calme, où des boeufs lents et pesants protestent en quelque sorte contre l'activité, je voudrais presque dire la nérvosité moderne.

     

     

    1925-MANOIR-DE-CANAPVILLE-G809

     

     

    L'un des restes de cette ancienne architecture normande les plus faciles à visiter est le vieux Manoir de Canapville, situé sur le bord de la grande route de Pont-l'Évêque à Trouville, à peu prés à égale distance de ces deux villes.

     

     

     

     

    Aussi beaucoup de promeneurs s'arrêtent-ils en passant, les uns pour jeter un coup d'oeil à ces vieilles murailles branlantes, les autres pour les dessiner, les autres enfin pour les étudier et en reproduire quelques motifs dans les plans de villas modernes qu'ils se proposent d'élever plus tard dans nos élégantes watering-places.

     

    Photo du Monument Historique Manoir des Evêques de Lisieux situé à Canapville

     

     

    Ce Manoir de Canapville date du milieu du XVe siècle. Il en est fait mention dans les termes suivants dans un acte de vente passé en 1448 entre Benoît de
    Launoy et Guillaume de Berteville. « A tous ceux qui ces lettres verront ou oiront Iehan le Conte vicomte d'Auge salut, savoir faisons que par devant lehan Mauvoisin clerc tabellion juré et établi en ladite vicomté et siège du Pont-lévesque ainsi qu'il nous a témoigné fut présent Benest de Launoy conseiller en cour laye, demeurant à Clermont, lequel vendit et transporta afin d'héritage à Guillaume de Berteville demeurant audit lieu de Pont-lévesque, c'est à savoir une franche vavassorerie séante en la paroisse de Canapville avec l'hostel, la cousture dauprès ledit hostel et toutes les autres terres labourables, plantays et pasturages et les preys au-dessous y celui hostel qui furent appartenant à feu Loys Despassans et qui par ledit Benest ont été acquis tant par décret que autrement au deça du Moustier dudit lieu de Canapville au costé devers Pont-lévesque au-dessous du quemin passant devant le dit Moustier et l'hostel ..., avec toutes autres dignités, franchises, libertés, rentes, reliefs treisiemes, hommes, hommaiges et autres revenues à icelle vavassorerie et hostel appartenant sans aucune réservation et retenue et fut la vente faite par le prix de deux cent soixante livres tournois....

     

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    Ce fut fait et passé le huitième jour d'avril l'an de grace 1448 avant Pâques Presents ; Guillaume Vipart, écuyer, Estienne du Fossey et maistre Guillaume Gamare, syrurgien, témoings. »

    Deux ans plus tard, le 19e jour d'avril 1450, avant Pâques, Guillaume de Berteville vendit et transporta à vénérable et discrète personne, maistre Jehan du Fossey, maistre ès arts et bachelier en laye, tout et tel droit d'acquisiiion comme il en avait acquis de Benest de Launoy, de Clermont, de l'hostel, terre, vavassorerie et domaine assis en la paroisse de Canapville, qui fût et appartint à feu Loys Despassans, dont plus ample desclaration est faite aux lettres de ce faites et baillées audit maistre Jehan pour annexer se mestier est. Cette vente est faite par le prix et somme de 300 livres tournois.

    Un peu plus tard, Jehan du Fossey, par suite de lots et arrangements de famille, céda et abandonna à son frère Estienne, écuyer, la vavassorerie de Canapville, qualifiée aussi de vavassorerie de Manneville. Le 26 juin 1484, Estienne du Fossey, âgé de plus de soixante ans, obtint du roi Charles VIII des lettres patentes pour le dispenser de venir en personne prêter en ses mains ou en celles de son chancelier les foi, hommage et serment de fidélité dont il était tenu pour ladite vavassorerie, et il fut autorisé à prêter ledit serment aux mains du bailli de Rouen ou de son lieutenant en la vicomté d'Auge. La vavassorerie, domaine et manoir de Canapville passèrent successivement à Jean du Fossey, fils d'Estienne ; à Pierre, fils de Jean, et à Jacques, fils de Pierre.

    Le 20 septembre 1565, Jacques du Fossey déposa entre les mains de Jean Aymar, écuyer, sieur de la Roche, commissaire député par monseigneur le duc de Montpensier, pair de France, pour recevoir les foi, hommage et serment de fidélité des seigneurs, gentilshommes et autres tenants de la vicomté d'Auge, son aveu signé et scellé du scel de ses armes pour la noble et franche vavassorerie de Canapville, mais ledit aveu ne fut reçu que sous réserve et à charge, par ledit Jacques du Fossey, d'apporter le dénombrement et les preuves de ses prétentions. Or, le 12 septembre, aux assises tenues à Pont-l'évesque par le Doulcet, lieutenant du bailly de Rouen en ladite vicomté pour le Roy, et pour monseigneur le duc de Montpensier, propriétaire de la vicomté d'Auge, lesdites preuves furent apportées tant par titres que par témoins, et, après une longue et minutieuse enquête, l'aveu de Jacques du Fossey fut reconnu bon et valable, et toutes ses prétentions furent admises et tenues pour justifiées.

    Entre autres choses, il est établi par l'enquête que les du Fossey de père en fils habitaient leur manoir de Canapville, et se faisaient enterrer dans l'église de la paroisse. On cite même cette particularité que Pierre du Fossey et sa femme Marie Pierre de Montpongnant décédèrent et furent inhumés le même jour et mis dans la même fosse. Il est établi aussi qu'ils jouissaient de droits importants dans la forêt de Touques, qu'ils acquittaient de nombreuses charges et impositions, et notamment qu'ils durent payer la redevance d'un dixième de leur revenu pour la délivrance du roi François Ier ; enfin que la vavassorerie de Canapville avait toujours été appelée noble.

    Jacques du Fossey agrandit considérablement le domaine que son père avait laissé dépérir. Son fils Daniel lui succéda et continua à arrondir son domaine, notamment par l'achat de l'aînesse de la vavassorerie de la Fosse Monfort qui, depuis lors, n'a cessé d'appartenir aux seigneurs de Canapville ou à leurs cohéritiers.

    A Daniel succéda son fils Jean, dont la veuve, Esther du Quesnoy, vendit en 1648 pour le prix de 22.000 livres à François de Bailleul, sieur de Bellengreville, le domaine du Vey, propriété de feu son mari. Je cite ce détail pour montrer l'importance et l'opulence même des châtelains de Canapville, qui ne dédaignaient pas depuis deux siècles d'habiter un manoir dont se contente à peine aujourd'hui un gardien d'herbages. Déjà auparavant, le 8 juillet 1635, le capitaine Jehan du Fossey avait reçu du roi une commission pour lever et mettre sur pied cent hommes de guerre et les conduire au duc d'Epernon. Dans un acte du 17 novembre 1660, Esther du Quesnoy, dame de Canapville, se qualifie de veuve de Jean du Fossey, chevalier, seigneur de Canapville, et elle continue à agrandir ce domaine par des acquisitions tant en son nom qu'au nom de son fils Henri.

    Mais avec Henri du Fossey s'éteint cette famille, ou du moins la branche des seigneurs de Canapville. Il laisse, en effet, en 1677, pour seuls héritiers ses soeurs : 1° Esther, épouse de Louis le Cloustier, sieur de Bouthemont, et leurs enfants ; 2° Catherine, épouse d'Isaac de Varignon, écuyer, sieur de Grées, et leurs enfants ; 3° Judith, épouse de Nicolas de Carel, écuyer, sieur de Cresseveuilles ; 4° Jeanne, lesquelles acceptent, pour le règlement de leurs droits dans la succession d'Henri du Fossey, l'arbitrage de Daniel de Bras de Fer, écuyer, sieur de Fontenelle, et du sieur de Prétot, écuyer.

    Malgré cette convention, un accord parfait ne semble pas avoir régné dans la famille, et nous voyons les nombreux neveux de Henri du Fossey se partager et se repartager la succession de leur oncle jusqu'à ce qu'enfin le domaine de Canapville soit attribué pour une partie aux sieurs et demoiselle de Mathan, descendants de Catherine du Fossey, dame de Varignon, et, pour l'autre partie, à Nicolas-François de Costart, seigneur de la Chapelle et patron de Mery, descendant de Judith du Fossey, dame de Carel et de Cresseveuilles.

    En 1738, au mois de décembre, MM. Gabriel-Auguste de Mathan, chevalier, et Joseph de Mathan, écuyer, tant en leur nom qu'au nom de leur sieur, cédèrent à Nicolas-François de Costart tout ce qui leur était dévolu du domaine de Canapville. De la sorte, le domaine entier se trouva réuni dans la même main et demeura la propriété de M. de Costart, qui en bailla aveu le 5 mars 1749 au duc d'Orléans, et reconnut tenir de son Altesse Sérénissime une vavassorerie qui relève de plein relief par dix sols, nommée la vavassorerie de Canapville. Depuis lors, ce domaine est passé successivement par héritages, partages et rachats entre cohéritiers, dans les familles de Tesson, Subtil de Franqueville et Le Courtois du Manoir. Il appartient maintenant à Charles-Gaston Le Courtois du Manoir, treizième descendant d'Estienne du Fossey, frère de Jean du Fossey, l'acquéreur primitif de 1450.

    Après avoir passé en revue les propriétaires, que dirons-nous de l'habitation elle-même?

    Un dessin la fera mieux connaître que n'importe quelle description ; essayons cependant d'en dire quelques mots : le corps principal de logis se compose de deux bâtiments élevés à droite et à gauche d'une masse considérable de maçonnerie en pierre, qui consiste en trois cheminées colossales accolées les unes aux autres et en une tourelle d'escalier. A gauche de ce noyau central se trouve, au rez-de-chaussée, une cuisine avec ses dépendances et une de ces larges cheminées dans l'intérieur desquelles on s'assoit pour se chauffer. A droite, et légèrement en contre-bas du sol de la cour, se voit une cave spacieuse. Les murs de la cuisine en colombages s'appuient sur des fondations en pierre, élevées jusqu'à un mètre environ au-dessus du sol. Les murs de la cave, au contraire, sont en pierre jusqu'à la hauteur du premier étage, et présentent à leur partie supérieure cette particularité qu'ils sont formés d'un carrelage de carreaux blancs et rouges, disposés en damier. La cuisine et la cave sont surmontées chacune d'une grande chambre dont les murs sont en colombages. Ces deux chambres sont pourvues chacune de sa vaste cheminée, semblable à celle de la cuisine et s'y adossant. Au-dessus de la cave et de la chambre qui la surmonte, on remarque un second étage éclairé par une large lucarne formant fronton. Un grenier règne d'ailleurs sur tout l'édifice, à droite comme à gauche du noyau central de maçonnerie, mais à des hauteurs inégales.

    Cette partie de l'édifice me semble la plus ancienne, et doit remonter à la première moitié du XVe siècle. Ce doit être là l'hostel dont il est parlé dans l'acte de 1448.

    A ce logis primitif, du côté de la route (du quemin, comme on écrivait alors et comme on prononce encore aujourd'hui dans nos villages) se trouvait un pressoir ou du moins un bâtiment qui sert aujourd'hui de pressoir. Quel pouvait être l'usage de ce bâtiment à l'origine ? Je ne le sais. Ce qui est certain, c'est que l'édifice actuel, malgré son aspect si pittoresque et si original, est de date plus récente que la construction primitive. Avant la restauration que j'ai dû entreprendre il y a quatre ou cinq ans, il était facile, en regardant la charpente, de constater que le bâtiment primitif était beaucoup plus étroit que celui qui lui avait succédé, et qu'à une époque, que j'essaierai tout à l'heure de préciser, on avait remplacé l'ancienne façade par une nouvelle. On avait reporté celle-ci près de deux mètres en avant dans la cour, en raccordant tant bien que mal l'ancienne charpente avec la nouvelle, ce qui donnait à la toiture une forme étrange et curieuse. Dans la restauration rendue nécessaire par l'état de vétusté de la charpente, j'ai pu conserver la forme extérieure absolument intacte. La façade est identiquement la même que l'ancienne ; les quelques parties qu'il a fallu démonter, pour remplacer les tenons et les chevilles pourries, ont été replacées telles qu'elles étaient. A peine deux ou trois pièces importantes ont-elles été remplacées par des bois neufs taillés et moulés d'après les anciens, avec la plus grande exactitude. J'ai eu la chance de trouver dans la localité même, pour exécuter ce travail, un habile charpentier, M. Léon Moutier, qui a compris l'intérêt archéologique qui s'attachait à ce vieux reste de l'ancienne architecture locale. Malheureusement, ce qui a pu être fait pour la façade ne pouvait l'être pour la charpente intérieure. Les bois étaient tellement vermoulus et pourris qu'il était impossible de les conserver. On a dû faire une charpente neuve, en ayant soin toutefois de reproduire exactement la forme de l'ancien toit.

    A quelle époque ce pressoir a-t-il été construit avec son aspect et ses dimensions actuelles ? J'inclinerais à croire qu'il fut l'oeuvre de Jacques du Fossey, ou de son fils Daniel, qui travaillèrent avec persévérance à reconstituer un domaine que la négligence de Pierre du Fossey, faible d'esprit, dit-on, avait laissé dépérir. Cela ferait remonter cet édifice à la seconde moitié du XVIe siècle. Ce qui me le ferait croire encore, c'est le soin que mit Jacques du Fossey à faire valoir et reconnaître le droit qu'il avait de prendre, dans la forêt de Touques, du bois pour l'entretien de son domaine. Cela d'ailleurs ne s'accorderait-il pas avec la tradition qui fait remonter à cette époque le grand développement de la culture du pommier à cidre en Normandie.

    L'ensemble des bâtiments que nous venons de décrire présente une longue façade dont l'aspect a quelque chose de bizarre et d'étrange, surtout à raison des trois corps avancés qui en coupent la ligne droite à intervalles inégaux : la tourelle d'escalier en pierre, le porche en colombages qui donne accès dans la cave, et l'escalier en bois qui monte au grenier du pressoir. En face de ces bâtiments s'étend une cour carrée, défigurée aujourd'hui, malheureusement, par des constructions modernes qui lui ont enlevé beaucoup de l'intérêt qu'elle présentait encore dans mon enfance.

    Le long de la route et du côté du jardin, il ne reste presque plus rien d'ancien, si ce n'est dix ou douze mètres de cette singulière suite de logettes à volailles et à lapins qui jadis régnait sur tout un côté de la cour, le long du mur qui la séparait du jardin. Ces logettes, hautes de deux pieds environ, sont surmontées d'une sorte d'abri ou hangar dont l'épaisseur ne dépasse pas un mètre, et qui est supporté par une charpente assez prétentieusement travaillée, soutenue elle-même par une véritable colonnade en bois, formée de piliers s'espaçant à une distance irrégulière de un à deux mètres. Les quelques mètres qui restent encore de cette singulière construction permettent de se rendre compte de l'effet que produisait la colonnade entière.

    Le côté de la cour opposé à la route a conservé, au contraire, sa physionomie ancienne.

    A gauche, se voit encore une vieille grange sans caractère particulier ; mais, à droite de la barrière qui donne accès aux herbages, s'élève un bâtiment qui n'a qu'un rez-de-chaussée et un grenier. Celui-ci est éclairé par une lucarne formée de quatre baies ou fenêtres étroites, dont les parties supérieures sont à jour, mais dont les parties inférieures sont fermées par une sorte de croisillon en forme d'X qui donne à l'édifice un aspect relativement élégant.

    Aussi les gens du pays appellent-ils ce bâtiment la Vieille Maison. J'ai cependant beaucoup de peine à croire que ce soit la partie la plus ancienne du Manoir ; d'abord cela ne pouvait pas constituer une maison d'habitation à cause de son exiguïté : le grenier, malgré sa lucarne prétentieuse, n'a jamais pu être autre chose qu'un grenier fort étroit et sans accès ; enfin l'élégance même de la lucarne me porterait à lui attribuer plutôt une date postérieure.

    Quoi qu'il en soit de l'âge exact de la Vieille Maison, ce qui est certain, c'est qu'à une époque relativement récente, au XVIIe siècle je crois, les propriétaires y aménagèrent pour leur usage une petite salle ou salon avec une cheminée dont la décoration de bon goût a été conservée ou plutôt reproduite lors de la dernière restauration.

    Il ne me reste plus à parler que du colombier qui s'élève au milieu de la cour. Celui-ci est carré, les murs jusqu'à deux mètres et demi du sol sont en pierre, mais la partie supérieure est en colombages. Le toit, élevé et pointu, était naguère encore surmonté de deux élégants épis en faïence. M. de Franqueville les a enlevés il y a une quinzaine d'années, et les garde comme un souvenir de ce vieux domaine de ses aïeux dont il m'a abandonné sa part presque en totalité. Ce colombier ne doit pas remonter au delà du XVIe siècle.

    M. de Caumont s'est occupé, en passant, du Manoir de Canapville. Il ne lui attribue pas de date précise, que je sache, mais il le cite comme un type curieux des habitations rurales en Normandie aux XVe et XVIe siècles. L'artiste anglais qui en a publié une esquisse dans le n° du 22 mars 1890 de The Illustrated London News le considère également comme un spécimen caractéristique des manoirs franco-normands du XVIe siècle.

    C'est en somme à cette date qu'il faut, je crois, rapporter la construction de la presque totalité de cette résidence jadis seigneuriale, si l'on en excepte le corps principal de logis groupé autour du noyau central de maçonnerie comprenant la triple cheminée et la tourelle de l'escalier, qui existait déjà en 1448.

    Cette notice, beaucoup trop longue pour les curieux qui ne veulent que jeter un coup d'oeil rapide sur le pays à travers lequel ils passent, pour les artistes qui ne veulent que croquer un joli motif d'aquarelle ou d'eau-forte, intéressera peut-être quelque bon Normand du pays d'Auge qui, dans ses longs loisirs, au milieu du calme des champs et des prairies, voudra connaître ce que furent pendant quatre siècles la vie et des habitants et des habitations de son pays.

    LE COURTOIS DU MANOIR.


    Manoir de Canapville, pl.1 Manoir de Canapville, pl.2 Manoir de Canapville, pl.3

     


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    table des auteurs et des anonymes 

     

    SOURCES

     

    http://www.bmlisieux.com/normandie/manoir01.htm

     

     

     

     

     

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    HISTORIQUE

    1097 Construction d'une motte castrale et d'un château en bois par Robert II de Bellême pour Guillaume le Roux.
    1120 Robert de Chandos résiste à une attaque des seigneurs Normands.
    1123 Reconstruction du château (donjon en pierre) ordonnée par Henri Ier.
    1158 En attendant le mariage entre Marguerite de France, et le fils d'Henri II, le château est confié à la garde des Templiers.
    1160 Le château passe sous tutelle Anglaise.
    1193 Philippe Auguste prend le château et le fait remanier.
    1314 Sert de Prison au templiers et en particulier à Jacques de Molay, dernier grand Maître.
    1419 Pris par les Anglais pendant la Guerre de cent ans .
    1449 Charles VII reprend le château aux Anglais.
    1591 Le château est abandonné.
    1809 Acheté par la ville de Gisors .
    1851 Fouilles et restauration du château.
    1862

    Classé monument historique.

    XXe Destruction du logis royal.

     

     

     

     

     

     

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    Dans les pays industrialisés, une des transformations majeures dans les moeurs du XIXème siècle fut le changement de comportement aussi bien en terme de salubrité publique

    que d’un point de vue personnel.

     

    En effet il faut comprendre que pour les siècles précédents l'hygiène n'était pas une priorité.

     

    L'odeur émanant des rues était atrocement nauséabonde.

     

    Et pour cause : les déchets jonchaient ces rues, les pots de chambre étaient jetés par les fenêtres.

     

    Les rats, friands de la saleté, et porteur de maladies, vivaient en osmose avec l'Homme.

     

    Par ailleurs, jusqu’au XVIIème siècle, l’eau n’est pas considérée comme un élément "bienfaiteur" et on se trouve dans une logique de propreté sèche :

     

    on se lave les mains et le visage à l’aide de linges humides et parfumés. Parfum, maquillage et coiffure sont autant d’artifices permettant de masquer les odeurs et de pallier au manque d’hygiène.

     

    La propreté passe désormais par le changement régulier du linge de corps et par la blancheur des parties visibles de ce linge (col et manche).

    Le XIXème siècle, lui, est celui de la révolution hygiénique. On vante les vertus du bain, on rouvre les bains publics qui avaient disparus au XVIème siècle.

    Ce changement de comportement est aidé des travaux de Pasteur qui démontrent l’existence des microbes, ceux-ci proliférant sur un terrain non hygiénique, faisant le lit de nombreuses maladies.

    La propreté permettrait d’éradiquer les maladies.

    A la fin du XIXème siècle, le triomphe de la révolution sanitaire est maximal.

     

    Alors que l'on note deux épidémies de choléra durant le milieu du XIXème, ces épidémies deviennent de plus en plus rares, notamment grâce à l'apparition des vaccins, mais aussi, et surtout, grâce aux mesures d'asepsie qui sont désormais prises.

     

    La durée de vie augmente de façon radicale.

     

    De même une baisse de la mortalité infantile est observée en cette fin de siècle.

    Le grand gagnant de cette révolution sera le savon.

     

    Celui-ci est connu depuis longtemps mais il a connu un essor exceptionnel au XIXème siècle grâce d’une part à la révolution industrielle (de nouveaux procédés de fabrication sont mis au point par exemple) et à ces nouveaux comportements en matière de propreté.

    A partir de 1880, des manufactures sont capables de produire plus de

    12 500 tonnes de savon par an.

     

    L'hygiène au XIXème siècle

     

    Mais revenons à notre toilette individuelle : le XIXème remet donc l’eau au goût du jour.

     

    Cette eau tant méprisée par l’Eglise car permettant la luxure et le plaisir via notamment les étuves.

     

    Cette eau qui fait peur car elle véhiculerait les maladies en dilatant les pores de la peau.

    Bref, le Siècle des Lumières sera plus lucide et donnera une nouvelle vision du rapport à l’eau et imposera un retour à la nature. Exit les fards, les poudres et autres pommades parfumées.

    Retour aux ablutions dans le cabinet de toilette, à l’abri des regards et ce, dès le XVIIIème siècle.

     

     

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    La toilette devient une affaire en effet plus intime (n’oublions pas que Louis XIV allait « sur le trône » si je puis dire devant des privilégiés de la Cour !).

     

     

    L’aristocratie s’empare de ce renouveau du bain et les premiers cabinets de toilette apparaissent à Versailles. Les baignoires font leur apparition dans de nouvelles pièces dédiées à la propreté et au soin du corps.

     

    L'hygiène au XIXème siècle

    Au 19ème siècle, la salle de bain se démocratise dans les appartements bourgeois des villes. Une salle est dédiée entièrement aux ablutions. Les progrès technologiques (eau courante et gaz) vont accélérer cette progression. Soyons réaliste toutefois, la toilette se fait pour la plupart des gens, les moins aisés, les ouvriers, les employés, dans la chambre ou dans la cuisine pour avoir un peu de chaleur, avec une bassine et un broc ou dans un tub. Pas de salle de bains encore pour eux.

    La baignoire du XIXème siècle est en bois, en fer blanc ou en zinc, ; on commence à importer des USA la baignoire en fonte émaillée et de l’Agleterre la baignoire en terre cuite émaillée.

    Elle est encore profonde et étroite et surtout elle est mobile (on peut d’ailleurs louer une baignoire).

    Dans la mesure où elle est mobile, la baignoire n’a à cette époque ni robinet ni écoulement. On la dispose sur le tapis dans la chambre à coucher, près de la cheminée si possible. La femme de chambre fait chauffer l’eau, la transporte et la verse dans la baignoire.

    Ce nouvel engouement pour la baignoire va ainsi permettre durant la seconde partie du 19e siècle le développement de l’activité des porteurs d’eau : la baignoire à remplir dans les appartements parisiens (et en province). Le livreur transporte des seaux d’eau chaude sur une charrette, les monte à l’étage, redescend chercher l’eau froide dans la cour. « Il n’a pas le droit de rester dans l’appartement pendant le bain et se repose sur le palier ». Puis il vide l’eau sale dans la cour ; si par malheur, il renverse une goutte d’eau, il perd son pourboire.

    Ça c’est pour le remplissage et l’écoulement et la solution trouvée reste peu pratique. On va essayer de trouver autre chose mais il n’y a pas 36 solutions : il va falloir mettre de la plomberie autour de la baignoire ; elle va donc devenir immobile et on va devoir dorénavant lui trouver une place pérenne d’où l’invention de la salle de bain.

    Et là les architectes et industriels (anglais surtout) vont rivaliser d’imagination pour créer des pièces luxueuses avec motifs peints ou encastrés dans la boiserie avec tout le confort moderne : baignoire, lavabo, bidet, wc. Les Américains vont simplifier tout ça en adoptant un plan rationnel sur une surface réduite sans ornementations superflues : les pieds de la baignoire disparaisent, la plomberie du lavabo est englobée dans son support, carrelage au mur et au sol, couleur blanche. La salle de bain ne va malgré tout pas envahir les habitats populaires de suite. Elle reste un luxe réservé à des familles aisées.

    L'hygiène au XIXème siècle

    L'hygiène au XIXème siècle

     

    Quid maintenant du chauffage de l’eau ? On va chercher à chauffer l’eau sur place : un petit fourneau portatif à pétrole , gaz ou charbon est installé à proximité. On essaie aussi de placer des brûleurs à gaz sous la baignoire. En 1868 le geyser à gaz est inventé : l’eau est chauffée dans un réseau de circulation en serpentin).

    Ce qui reste curieux est que l’on va d’abord chercher à chauffer l’eau pour se laver avant de chauffer l’eau de la cuisine. En 1921 par exemple, les appartements ouvriers du Pré d’Ouchy à Lausanne disposent d’un chauffe eau à gaz dans la salle de bain tandis qu’il n’y a que de l’eau froide dans la cuisine !

    Il est à noter que César Ritz est le premier hôtelier à prévoir une salle de bain et un WC par chambre dans son tout nouvel établissement, le Ritz, place Vendôme à paris, ouvert en 1898. Comble du luxe à l’époque.

    Nous avons vu plus haut que la salle de bain était essentiellement réservée aux gens aisés. En 1954 par exemple, la moitié des logements français ont l’eau courante, mais seuls 25% d’entre eux possèdent une salle de bain. En 1962, le taux d’équipement des salles de bain passe à 30%, et en 1992, 93,4%. En 1973, 70% des logements ont un wc intérieur. Il faut attendre la fin des années 1980 pour que la quasi-totalité des Français bénéficie de l'eau courante à domicile.

    Mais qu’à cela ne tienne : pas besoin de salle de bain pour se laver ! Un manuel d’économie domestique « Chez nous » publié en 1933 précise : « il ne faut pas prétexter pour se dispenser de cette toilette qu’on a pas la douche ou le tub ou la chambre de bains nécessaire ! Pas besoin de tout cela. Il suffit d’une lavette trempée dans une cuvette pleine d’eau et passée rapidement sur tout le corps ».

    Le terme « rapidement » est là très important : on ne doit pas se laver n’importe comment, morale oblige !

    L'hygiène au XIXème siècle

    Et que dire du bidet ? Cette chose un peu bizarre et finalement peu utilisée de nos jours … Ce n’est que progressivement que le bidet va entrer dans les mœurs et ceci, grâce à deux catégories de personnes : les courtisanes (des plus raffinées aux maisons closes) et l’aristocratie.

    On retrouve dans les deux cas le même souci de l’hygiène de ce que l’on ne nomme pas à l’époque ou par périphrase : les parties honteuses, les parties à la base du corps, les parties réputées les plus sales...

     

    L'hygiène au XIXème siècle - 1

    La toilette intime ou la Rose effeuillée de Louis Léopold Boilly

    Mais attention, le bidet, en plus d’être un objet utile, nécessaire à l’hygiène, doit être un bel objet, aristocratie oblige …. Et bidet va progressivement trouver ses lettres de noblesse grâce à la révolution hygiénique/hygiéniste. Mais cela ne sera pas malgré tout du goût de tout le monde !

    Au XIXème siècle en effet le bidet semble entrer dans les mœurs : Napoléon lui-même en détient plusieurs spécimens, dont on trouvera mention dans le testament qu’il dresse à Saint Hélène.

    Mais s’’il devient évident qu’une bonne hygiène passe par le bain, celui des parties génitales reste encore un tabou.

    Ce sont les ouvrages qui traitent des relations du couple qui en parlent le plus. Ils sont spécialisés dans l’hygiène du mariage et prodiguent des conseils pour éviter la désunion. Parmi les raisons identifiées de celle-ci, la mauvaise hygiène des femmes : « Que de femmes ne doivent leur abandon qu’à cette négligence des soins du corps ! » (Dr Degoix, Manuel d’hygiène du mariage, vers 1850).

    Mais le bidet est décrié justement pour cet usage ! C’est dans les milieux conservateurs voire dévots que l’on y trouve ses plus ardents opposants. On trouve parmi les avis médicaux des affirmations relatives à la nocivité des rapports sexuels (le bidet est donc lié aux ablutions post-coïtales). Ces rapports, par la perte du liquide séminal, affaiblirait l’homme. Trop de rapports sont donc à proscrire. Et c’est là un des arguments les plus modérés à l’encontre de l’hygiène intime !

    L'hygiène au XIXème siècle

    Prenons l’éducation des jeunes femmes, confiées aux ordres religieux en bonne partie durant le premier XIXème siècle. Les anecdotes sont nombreuses, révélant que les jeunes filles ne se lavent quasiment pas et surtout pas les parties honteuses, même lorsqu’elles ont leurs menstrues. Par ailleurs, le bidet, par la toilette intime qu’il permet, est considéré comme un instrument de contraception et ce, dès le début. En effet, dans les maisons de charme, il est très rapidement imposé à chacune des pensionnaires.

    Mais ce dont on a surtout peur au XIXème siècle, c’est de l’onanisme, qui selon les règles de l’Église est un péché puisque le rapport sexuel n’a pour fonction que la reproduction. Le plaisir solitaire est donc le comble de la luxure. Les femmes sont, dans leur pratique hygiéniste, ici particulièrement visées puisque la position sur le bidet, les gestes nécessaires à la toilette développent envies et appétits… Pour conforter cette vision, on trouve dans la littérature érotique voire grivoise et plus populaire, nombreux récits mentionnant le bidet comme instrument érotique (scènes classiques de la toilette assistée par une servante ou une amie qui s’attarde plus que nécessaire..).

    Le bidet, plus qu’un objet, est finalement le révélateur des valeurs morales qui traversent la société.

    L’assiette au beurre ne s’y trompe pas, nous livrant une caricature de Jossot (1907), représentant un ecclésiastique en arrêt devant la vitrine d’un herboriste dans laquelle figure un bidet . Celui-ci s’exclame "Faut-il être sale pour se laver le derrière !".

    Dans le même temps les pouvoirs publics investissent dans de nouvelles infrastructures dédiées à l’hygiène du corps. Les établissements de « bain douches » se multiplient partout en France à l’initiative des municipalités ou d’entreprises paternalistes soucieuses de mettre à disposition de leurs ouvriers des lieux dédiés à la propreté. Sous la Deuxième République, l’hygiène est encore une notion balbutiante : les Français de l’époque goûtent encore rarement aux délices du bain, avec une immersion tous les… deux ans en moyenne. Mais l’hygiène publique est en effet l’affaire de tous. En témoignent les premières publicités pour le savon, la multiplication des manuels d’hygiène et l’instauration de cours d’hygiène obligatoires à l’école.





    L'hygiène au XIXème siècle un balayeur en 1900

     

    Les bains douche ne seront bien sûr pas suffisants.



    Dans sa Topographie médicale de Paris de 1822, le Dr Claude Lachaise suppose que « les émanations qui s’élèvent de rues étroites, bourbeuses et encombrées » et « l’accumulation de familles nombreuses dans la même maison, souvent dans la même pièce » sont des causes spécifiques à la ville susceptibles d’influer sur sa salubrité.



    Pour la première fois, on considère les cloaques à ciel ouverts que sont encore les égouts parisiens comme des problèmes sociaux et médicaux. C’est toute l’architecture et l’organisation des villes qui est à revoir (percement de grandes artères, tout à l’égout, eau courante …).

     

    Quid de l’hygiène buccale ? Les premières recommandations hygiéniques de la bouche apparaissent à partir du 18ème siècle ainsi que la production industrielle des eaux dentifrices et la diffusion de la brosse à dent. Celle-ci existe depuis 1498 mais il faut attendre le règne de Louis XV pour qu’elle fasse son apparition à la Cour. Elle va connaître un véritable essor grâce à Bonaparte qui se brossait régulièrement les dents et imposa la brosse à dents dans le paquetage des soldats en 1790, développant ainsi sa commercialisation.

     

    Mais ne nous y trompons pas, du 17ème au 19ème siècle, l’hygiène bucco-dentaire est réservée à une minorité de privilégiés. En 1800, à Paris seuls quarante dentistes reconnus sont recensés pour une population de 700 000 habitants.

    Comment les hommes se rasaient ?

    Se raser est un acte de propreté spécifiquement masculin qui porte le nom de pogonotomie, terme inventé par le créateur du rasoir à rabot, ancêtre du rasoir de sureté, Jean-Jacques Perret.

     

    L'hygiène au XIXème siècle





    Un nécessaire de toilette pour le rasage est composé d’un bassin ou d’un plat à barbe, d’une boîte à éponge, d’une boîte à savon, d’un blaireau, d’un rasoir et d’un cuir pour l’affûtage. On utilise une brosse pour appliquer le savon à barbe à partir du 18ème siècle.

    Le premier coupe-chou à lame pliante dans le manche serait apparu au 17ème siècle.

     

    À l'origine, le mot désignait un sabre court à lame pliable utilisé dans l'infanterie. Il deviendra l’instrument de rasage par excellence touchant toutes les classes sociales.

     

    En 1904, l’américain King Camp Gillette brevète un système plus hygiénique de rasoir à lame jetable.



    Le rasoir électrique quant à lui est mis au point par Jacob Schick dès 1928.

     

    En conclusion,

    L'hygiène au XIXème siècle

     

    Sources

    Le propre et le sale de Georges Vigarello

    Propre en ordre :

    habitation et vie domestique 1850-1930 :

    exemple vaudois de Geneviève Heller

     



    SOURCES



    http://magenealogie.eklablog.com/l-hygiene-au-xixeme-siecle-1-a126421650

    Le confident des dames de Julia Csergo et Roger Henri Guerrand

     

     

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  • La France au XVIe siècle par Jean Jolivet cartographe.

    Mots français d'origine francique

     

     

    Avant-propos -

    Héritage des Francs 

    L'essentiel de la culture héritée des Francs se trouve dans l'ouest de Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique (Flandre et Wallonie), au Luxembourg et dans le nord-est de la France tant dans l'architecture que dans la littérature ou les langues.

     

    • Un exemple frappant est l'architecture urbaine qui est restée proche de celle du Moyen Âge grâce aux Ernhaus que l'on retrouve dans de nombreuses communes de Thuringe, de Hesse ainsi que dans les régions du Rhin inférieur.
    • Les langues sont souvent présentes sous formes de dialectes substrats de l'allemand ou du néerlandais dont l'origine est la même que la langue jadis parlée par les Francs. Le francique peut être divisé en plusieurs sous-groupes, le bas francique (sud des Pays-Bas et Flandre), le moyen francique (Luxembourg,Communauté germanophone de Belgique, Sarre, Moselle, Rhénanie et Palatinat) et le francique méridional (nord de l'Alsace, nord du Pays de Bade et Hesse).

     

    Les mots réintroduits diffèrent des originaux parce que leur signification est plus spécifique et limitée.

     

    L'origine purement francique de certains mots est parfois discutée.

     

    Elle pourrait être germanique, bien que la différence n'est pas grande. Néanmoins, le néerlandais moderne compte pas mal de mots originaux qu'on ne retrouve pas en allemand.

     

    Pour le détail : on a compté plus de 750.000 mots en néerlandais, non compris les mots apparus depuis 1920.

     

    Ainsi le néerlandais compterait plus de mots que l'anglais.

     

    Pourtant, le nombre de mots d'origine étrangère est nettement plus limité qu'en anglais.

     

    Il est probable que les Francs avaient déjà une grande richesse de vocabulaire.

     

     

     

    Voici quelques mots que le français a emprunté à l'ancien francique, la langue des Francs.

     

    • ban et ses dérivés (bannir, banal) < ban, territoire soumis à une autorité, interdiction, déclaration publique
    • éperon < *sporo (ancien francique, cf. l'allemand Sporn)
    • hêtre < *haistr (ancien francique)
    • fauteuil < faldistôl (francique, cf. l'allemand falten « plier » et Stuhl « chaise »)
    • jardin < *gart ou gardo (ancien francique, cf. l'allemand Garten et l'anglaisgarden), « clôture », mais aussi « épine »…
    • heaume < helm (francique casque, cf. l'anglais helmet et l'allemand Helm)
    • marais < *marisk (ancien francique, cf. l'anglais marsh et l'allemand Marsch (land))
    • marque (de marquer) & marche (frontière)< *marka (ancien francique, cf. l'anglais mark et l'allemand Mark)
    • rang < *hring « anneau, cercle, assemblée militaire » (ancien francique, cf. l'allemand Ring)
    • harangue < *harihring littéralement « troupe, armée (hari) & assemblée (hring) »
    • trêve < *treuwa « contrat, convention » (ancien francique, cf. l'allemand Treue)
    • haubert < halsberg littéralement « cou (hals) & protection (berg) »
    • beffroi < bergfrid littéralement « veille, protection (berg) & paix (frid) »
    • bleu < blao (cf. l'allemand blau)

     

    Le francique moderne a un autre nom: le néerlandais. NL = mot moderne en néerlandais, D = mot moderne en allemand. (liste non exhaustive)

     

     

    • abandonner (de bannjan = bannir) NL, D = bannen, verbannen
    • astiquer (de steken = pousser, utiliser un bâton pointu, relaté à stakka)
    • NL = poetsen (faire briller) mais aussi steken, D = putzen (briquer)
    • bâtir, bastille (de bast = écorce, écorce de bouleau en lamelle, ficelle, matériel de construction) NL = bast (écorce) bouwen (bâtir), D = Bast (écorce) bauen (bâtir)
    • bière (de bera) NL, D = bier
    • blanc (de blinken = briller) NL = blink (cirage) blinken, D = blinken (luire)
    • bleu (de blao) NL = blauw, D = blau
    • bordure (de boord = bord) NL = boord
    • brun (de bruin) NL = bruin, D = braun
    • chic (de schikken = bien ranger, donc être valable) NL = schikken, D = schicken (adresser qc.) schicklich (bienséant)
    • choc, choquer (de scoc, schok = secousse) NL = schok, D = Schock
    • cresson (de kresso = plante signifiant nourriture) NL = waterkers, D = Kresse
    • dard (de darod = lance à jeter) NL = (mot disparu, cf. l'anglais Darts))
    • détacher, attacher, tailler, étal (de stakka = pieu, bâton pointu) NL = stok, D = Stock
    • écran (de scherm = protection) NL = scherm, D = Schirm
    • épieu, pieu (de speut = pointu) NL = spie, D = spitz
    • épier (de spieden) NL = spieden, D = spähen
    • escarmouche, escrime (de skirmjan = défence limitée) NL = schermen, D = schirmen
    • étale, étalage, étable (de stal = construction où l'on 'case' un animal) NL = stal, D = Stall
    • fief (de fehu, vee = troupeau de bovins) NL = vee, D = Vieh
    • fouquet (de fulko = écureuil) NL = eekhoorn (de eik = chêne, donc qui mange des glands de chêne /en anglais: acorn), D = Ecker
    • frais (de frisk, fris) Nl = fris, D = frisch
    • framboise (de braam bes = mûre + baie) NL = framboos (mot réintroduit)
    • fauteuil (de faldistôl = chaise stôl pliable faldi) NL = vouwstoel
    • galop(er) (de walalaupan, wel lopen = bien courir) NL = gallopperen (mot réintroduit), D = galoppieren
    • gant (de want) NL = want
    • garant (de warand, ware hand = vrai (et en) main) NL, D = garant (mot réintroduit)
    • garçon (de wrakjo = diminutif de wraker = tueur, donc: petit guerrier ) NL = jongen, D = Junge(n)
    • garde, gardien (de warding, dérivé de wachten = attendre, observer, surveiller, se tenir prêt) NL = wachter, D = Wächter
    • gaspiller, gaspillage (de wostjan, woest = rendre sauvage , sauvage) NL = woest (sauvage) verspillen (gaspiller), D = Wurst (sauvage) verspielen (gaspiller, perdre au jeu/la partie)
    • grappe (de greip, greep, grip = prise par une main, poignée) NL = greep (d'une main), tros (de raisins)
    • gris (de grîs, grau = brillant mais foncé) NL = grauw, grijs, D = grau
    • guerre (de werra, war = confusion) NL = oorlog (le mot war n'est qu'utilisé dans l'expression in de war = être confus), D = Wehr (barrage, défense)
    • haïr (de hatjan) NL = haten, D = hassen
    • hardi (de hard = dur, solide) NL = hard - le surnom de Charles, duc de Bourgogne, n'était pas "le téméraire" mais "le hardi"
    • honnir (de haunjan) NL = honen
    • jardin (de gaarden, dérivé de wachten (surveiller) = (plur.) les parcelles gardées, entourées d'une protection) NL = gaard, tuin, D = Garten
    • landes (de land= terre sableuse) NL, D = land (pays)
    • loge(r) (de laubja) NL = loge (mot disparu, mais réintroduit)
    • marche(r) (de marka = frontière, marque, marquer d'un pas) NL = merk, marcheren (mot réintroduit), D = marschieren (marcher)
    • marque (de marka = signe, signe d'une délimitation, frontière) NL = merk, D = Marke (marque)
    • marquis (de marka = région frontalière) NL = markgraaf (graaf = comte), D = Markgraf
    • maréchal (de marhskalk= gardien skalk des juments maren royales) NL = maarschalk (rang militaire), merrie (jument), D = Marschall
    • randonnée (de rant, rand = coté) NL = rand, trek (le voyage), D = Rand (coté)
    • rang (de hring = chaînon, anneau) NL = rang (mot réintroduit), NL, D = ring (anneau, route périférique)
    • saisir (de sakjan = revendiquer) NL = zaken (affaires) verzaken (renoncer), D = Sachen (affaires) entsagen (renoncer)
    • standard (de stand-hard = tenir debout fermement) NL, D = standard (mot réintroduit), stand, hard (dur)
    • trot(ter) (de trotton = mouvement de haut en bas) NL, D = trotten

     

     

    Les mots réintroduits diffèrent des originaux parce que leur signification est plus spécifique et limitée.

     

    L'origine purement francique de certains mots est parfois discutée.

     

    Elle pourrait être germanique, bien que la différence n'est pas grande. Néanmoins, le néerlandais moderne compte pas mal de mots originaux qu'on ne retrouve pas en allemand.

     

    Pour le détail : on a compté plus de 750.000 mots en néerlandais, non compris les mots apparus depuis 1920.

     

    Ainsi le néerlandais compterait plus de mots que l'anglais.

     

    Pourtant, le nombre de mots d'origine étrangère est nettement plus limité qu'en anglais.

     

    Il est probable que les Francs avaient déjà une grande richesse de vocabulaire.

     

     

    sources

    http://beornings.over-blog.com/pages/LES_FRANCS-1690103.html

     

     

     

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  •  

    Mutilation de l’Histoire de France :
    détruire le passé pour glorifier le monde nouveau

    (Histoire vraie » (Tome 1), paru en 1911)

     

     

    Voici un siècle, dans son oeuvre en 4 volumes intitulée Histoire partiale, histoire vraie, l’historien Jean Guiraud, spécialiste de l’histoire de l’Église et professeur d’histoire et de géographie de l’Antiquité et du Moyen Âge à l’université de Besançon, dénonce les erreurs et mensonges historiques que renferment les manuels scolaires :

     

    l’Histoire la plus généralement admise enseigne selon lui ce qui est faux, et induit un désamour de notre passé doublé d’une haine de l’Ancien Régime, afin de mieux glorifier une République

     

    « donnant au monde la paix et la liberté ».

     

     

    Aperçu des méthodes visant à mutiler le Moyen Age et la féodalité...

     

     

    Pour Jean Guiraud, la plupart des faiseurs de manuels d’histoire pèchent par une instruction superficielle qui leur a dispensé

     

    « quelques clartés de tout » sans leur permettre de rien approfondir et étudier par eux-mêmes, leur donnant à la fois un simple vernis de culture et une foi imperturbable en leur modeste bagage scientifique, fait uniquement d’emprunts et de connaissances livresques.

     

     

    De là une facilité toute particulière à se lancer dans des inductions dont ils ne soupçonnent pas la témérité ou la fausseté, une tendance fâcheuse aux généralisations les plus aventureuses, fruit naturel d’esprits simplistes et niaisement sûrs d’eux-mêmes.

     

    Compilateurs sans originalité, ils manquent d’un sens critique qu’on n’a pas cultivé au contact des textes ; et ainsi, leur documentation est faite sans discernement, selon le hasard, ou, ce qui est encore plus grave, d’après les passions politiques et religieuses du jour.

     

     

    Sous leur plume se pressent les affirmations les plus fantastiques et les assertions les plus naïves, d’un pessimisme farouche, quand l’époque décrite a le malheur de leur déplaire, d’un optimisme rêveur et béat, lorsqu’elle a la bonne fortune de leur agréer.

     

    D’un côté, aucun trait pour corriger d’une teinte claire la noirceur du tableau ; de l’autre, aucune ombre pour souligner la splendeur de l’ensemble ; ici le noir est sans mélange ; là on nage en plein azur !

     

    Le Moyen Age représenté comme une époque de misère et de désespoir
    Notre historien prend l’exemple du célèbre manuel d’histoire de l’époque édité par la librairie Delaplane, signé J. Guiot — professeur d’école normale, directrice de l’école annexe à l’école normale d’Aix — et F. Mane — professeur de septième au lycée de Marseille.

     

    Voyez quelle sombre description elle nous trace

    du Moyen Age, nous dit Guiraud :

    Page 81, du Cours supérieur, elle noue parle d’une

    « Marseillaise du désespoir entonnée par cent mille affamés ».

     

    Quelle était cette Marseillaise, où a-t-elle été chantée, quels étaient ces cent mille affamés ? M. Mane ne nous le dit pas, pour une raison bien simple, c’est que cette Marseillaise n’a existé que dans son imagination de Marseillais et que ces cent mille affamés sont aussi réels que la sardine monumentale qui, toujours à Marseille, bouchait jadis l’entrée du Vieux Port !

     

    Représentation du fléau de la famine au Moyen Age

    Page 35, du Cours moyen, Guiot et Mane nous décrivent la féodalité,

     

    « cette époque excessivement malheureuse..., cet affreux régime »

     

    où le seigneur est un guerrier brutal, cruel, ignorant (p. 36),

    foulant les moissons dorées (p. 37).

     

    Plus loin :

     

    « Le Moyen Age est l’époque des épouvantables famines ; alors sur les chemins les forts saisissent les faibles, les déchirent et les mangent !

    Quelques-uns présentent un fruit à un enfant, ils l’attirent à l’écart pour le dévorer ! »

     

     

    Représentation du fléau de la famine au Moyen Age

     


    Page 34, du Cours élémentaire, on lit :

     

    « Le seigneur est constamment en guerre, ses plaisirs sont cruels..., le Moyen Age est l’époque des affreuses famines : le paysan mange l’herbe des prairies, les forts saisissent les faibles, les déchirent et les dévorent..., bien peu d’enfants reçoivent l’instruction..., plaignons les écoliers ; ils sont constamment battus de verges (p. 35)...

     

    Que font ces enfants à l’école ? Tous pleurent ! »

     

    Et le résumé affirme gravement qu’ « au Moyen Age le sort du paysan est affreux : il vit dans l’épouvante et travaille gratuitement pour le seigneur..., dans les rares écoles les enfants sont constamment fouettés.!!

     

     

    Enfin le Cours préparatoire écrit (p. 30) :

     

    « Qu’il est triste le village d’il y a mille ans ! C’est la misère noire..., le paysan pleure et se désole à la vue du château qui lui rappelle qu’il est serf... Ses enfants ne lui appartiennent pas ; ils peuvent être vendus, le fils est séparé de son père, et la fille de sa mère. »

     

     

    A quel homme tant soit peu instruit, ou simplement à quel homme de bon sens fera-t-on admettre que les choses se passaient ainsi, « il y a mille ans » ?

     

    Dans quel pays, si déshérité qu’on le suppose, tous les enfants, sans exception, pleurent-ils dans les écoles, parce qu’ils sont sans cesse battus de verges ?

     

    Concevez-vous une école où le maître passe tout son temps — sans en distraire une minute — à fouetter les enfants et où tous les enfants sont uniquement occupés à pleurer ?

     

    Mais quand donc le maître enseignait-il ?

     

    Quand donc les enfants faisaient-ils leurs devoirs et récitaient-ils leurs leçons ?

     

    C’est ce que nous racontent Guiot et Mane : « tous les enfants pleurent..., parce qu’ils sont constamment battus de verges ! »

     

     

    Ce n’est pas de l’histoire de France, c’est plutôt une histoire de loup-garoudestinée à effrayer les petits enfants !

     

     

    A quel homme raisonnable fera-t-on croire que dans ce pays, que la poésie populaire du Moyen Age a appelé la « douce France », TOUS les paysans pleuraient devant le château du seigneur, comme leurs enfants sous le fouet du maître (que de larmes !), qu’ils ne se nourrissaient QUE D’HERBE et

    qu’ils étaient dépouillés de leurs fils vendus comme esclaves ?

     

    A qui fera-t-on croire que la France du Moyen Age était un pays de cannibales où les forts, au lieu de manger la viande des moutons ou des bœufs, absorbaient la chair des faibles, où, dès qu’un enfant sortait sur la route, on lui présentait une pomme pour l’attirer à l’écart, et le manger !

     

    C’est là une histoire d’ogres et non une histoire de France !

     

     

    Remarquez d’ailleurs que les documents protestent contre les traits d’un pareil tableau. Nous avons des inventaires de granges, de fermes, de maisons de paysans au Moyen Age.

     

    Le dénombrement de leurs provisions nous prouve qu’ils vivaient non d’herbe — à moins que ce ne fût, comme de nos jours, de la salade ! — mais de viande de mouton et de porc — plus rarement de bœuf — de veau quand on était malade, de salaisons, de poissons frais ou salés, et de légumes.

     

    Le château féodal

    Nous avons plusieurs lois des empereurs chrétiens du IVe siècle interdisant formellement de séparer un esclave de sa femme et de ses enfants.

     

    Quant à la famille du serf, un tout petit raisonnement aurait prouvé à Guiot et Mane qu’elle ne pouvait pas être dispersée par le seigneur, puisqu’elle était attachée à la glèbe, et que, par conséquent, s’il ne lui était pas permis de quitter la terre où elle vivait, on n’avait pas non plus le droit de l’en détacher, et d’en vendre isolément les membres.

     

     

    Enfin, M. Luchaire, professeur à la Sorbonne et membre de l’Institut, déclare avec raison dans la grande Histoire de France de Lavisse, qu’à la fin du XIIe siècle, c’est-à-dire en pleine féodalité, il n’y avait que peu de serfs et qu’en tout cas, ils ne devaient pas tout leur travail au seigneur.

     

    « On constate qu’au début du XIIIe siècle, les affranchissements individuels ou collectifs ont diminué beaucoup le nombre des serfs.

     

    Les terres, qui ont la malheureuse propriété de rendre serfs ceux qui les habitent, ont été graduellement absorbées par les terres libres.

     

    L’hérédité même du servage est atteinte.

     

    Des provinces entières, la Touraine, la Normandie, la Bretagne, le Roussillon, plusieurs régions du Midi semblent ne plus connaître le servage, ou être en très grande partie libérées.

     

    Dans les pays où il subsiste, par exemple le domaine royal et la Champagne, même quand les propriétaires ne se relâchent pas facilement de leurs droits, la condition servile est devenue moins intolérable.

     

    La taille arbitraire n’existe plus en beaucoup d’endroits ; le formariage, la main-morte sont souvent supprimés. Nombre de paysans ne sont plus soumis qu’à la capitation, impôt de trois ou quatre deniers. »

     

    Ainsi, au Moyen Age, la plupart des paysans étaient libres, les serfs étaient l’exception.

     

    Une ville au Moyen Age


    Le château féodal :


    Au XIVe siècle, le mouvement vers la liberté s’accentua dans des proportions considérables ; en 1315, Louis X affranchissait tous les serfs du domaine royal et de la Champagne qui avait résisté jusque-là au mouvement d’émancipation.

     

    Quant aux paysans libres, c’est-à-dire à la presque totalité de la population

    rurale !!

     

    « les concessions de privilèges et d’exemptions leur sont vraiment prodiguées

    (au XIIe siècle) par les seigneurs du temps de Louis VII et de Philippe-Auguste.

     

     

     

    C’est l’époque de la grande diffusion  de la charte de Lorris.

     

    A l’exemple de Louis VII et de son fils, les seigneurs de Courtenay et de Sancerre et les comtes de Champagne la distribuent assez libéralement aux villages de leurs fiefs.

     

    Même quand cette charte n’est pas octroyée intégralement et d’une manière explicite, son influence se fait sentir, surtout par l’abaissement du taux des amendes judiciaires, dans la plupart des contrats qui intervenaient alors, de plus en plus nombreux, entre les seigneurs et leurs paysans.

     

    « En 1182, l’archevêque de Reims, Guillaume de Champagne, concéda à la petite localité de Beaumont-en-Argonne une charte qui allait servir de modèle à la plupart des chartes d’affranchissement accordées aux localités rurales des comtés de Luxembourg, de Cheny, de Bar, de Réthel, et du duché de Lorraine.

     

    En Champagne, elle fit concurrence à la charte de Soissons et à la loi de Verviers.

     

    Elle ne donnait pas seulement aux villageois des franchises étendues, elle leur concédait une apparence d’autonomie, des représentants librement élus, les échevins, un maire et le libre usage des bois et des eaux... D’autres constitutions, moins répandues que celles de Lorris et de Beaumont, transformaient peu à peu l’état civil et économique des campagnes...

    Le village ne formait pas une personne morale, mais il était représenté par un maire. »

     

     

    (Histoire de France, Lavisse)

     

     

     

    Des paysans signant des contrats librement débattus avec leurs seigneurs, recevant d’eux pour leurs villages des constitutions et des chartes où leurs droits étaient nettement précisés, élisant leurs maires et s’administrant eux-mêmes, comme les habitants de nos communes, vivaient-ils sans cesse dans l’épouvante, comme l’écrivent Guiot et Mane ?

     

    Le seigneur avait-il tout pouvoir sur eux, et en particulier celui de leur saccager leurs moissons dorées ? Les documents disent précisément tout le contraire.

    Mais alors Guiot et Mane sont-ils des faussaires ?

    Certes non.

     

     

    Ce sont tout simplement des esprits insuffisamment renseignés qui ont généralisé des cas particuliers, en les grossissant démesurément par ignorance, excès d’imagination et passion.

     

     

     

    Ils ont trouvé, dans quelques histoires, des citations de Raoul Glaber ou de tel autre chroniqueur du Moyen Age, signalant, à une date donnée et dans tel pays, une famine ou même simplement un renchérissement des vivres, quelques actes criminels suggérés par la misère ; ailleurs, ils ont vu un seigneur abusant de son pouvoir et imposant à ses paysans des vexations arbitraires ou des impôts écrasants.

     

    Ils ont accepté ces faits sans les contrôler — car, en bons « primaires », ils manquent de critique — ils n’ont pas vu, par exemple, avec M. Gebhart — professeur de la Sorbonne et membre de l’Académie française — que Raoul Glaber avait une imagination débordante poussant tous les faits au drame, et que par conséquent, il faut se défier de ses affirmations.

     

     

    Bien plus, ces faits admis, ils ne se sont pas demandé s’ils étaient signalés précisément parce qu’ils étaient exceptionnels ; ils n’ont pas vu qu’ils avaient produit, sur l’esprit du chroniqueur qui les rapporte, une impression d’autant plus profonde qu’ils étaient rares et monstrueux. Et par une induction prématurée et dès lors antiscientifique, ils ont fait de l’exception la règle.

     

    Raoul Glaber cite comme un événement particulièrement abominable et inouï qu’un jour par misère un brigand a tué un homme et l’a mangé ; Guiot et Mane écrivent que, pendant tout le Moyen Age, tous les forts mangeaient les faibles et que les enfants qui acceptaient d’un passant un fruit étaient attirés à l’écart, dépecés et mangés sans poivre ni sel !

     

    Voilà la généralisation hâtive dans toute sa fausseté.

     

     

    Et voilà l’histoire qu’au nom de l’Etat, on enseigne de force aux enfants pour les délivrer de tout préjugé et libérer leur esprit !

     

    Méconnaissance du rôle de la féodalité dans l’évolution des sociétés
    La féodalité est parée de tous les défauts.

     

    Elle est tyrannique ; elle exploite par la violence le travail du peuple :

     

    « Le pauvre paysan, dit Calvet dans son Cours préparatoire, travaille toujours ; s’il refuse, on le met en prison, on le bat, on lui coupe le nez et les oreilles, on lui arrache les dents, on lui crève les yeux... Les rois protégeaient les pauvres gens à peu près de même que les bergers gardent les brebis du loup, pour pouvoir traire leur lait et vendre leur laine ».

     

     

     

     

    Il nous parle de serfs qui « se lassèrent d’être sans cesse pillés,

    battus, emprisonnés, pendus » ;

     

    il nous montre les marchands, tapis de peur dans leur ville et leurs sombres boutiques.

     

     

    Quant au paysan, disent Louis-Eugène Rogie et Paul Despiques, il vivait dans une cabane « dont les murs étaient faits de lattes entremêlées de torchis...

    le toit de chaume, le parquet de terre battue, le plus souvent sans fenêtre ».

    Aucun de ces auteurs ne se pose même cette question :

    « Comment un régime que l’on nous dit aussi affreux a-t-il duré plusieurs siècles ? »

     

     

    Une ville au Moyen Age /


    Encore moins nous exposent-ils la raison que nous en a donnée Taine : si dans toute l’Europe du Moyen Age la féodalité est restée puissante et a été acceptée pendant plusieurs siècles, c’est parce qu’elle répondait à une nécessité sociale, que cette organisation convenait le mieux à ces temps-là et que, pendant l’anarchie que les invasions et la dissolution de l’empire carolingien avaient déchaînée, les paysans et les habitants des villes avaient été heureux de trouver dans les seigneurs de puissants protecteurs, derrière les murs de leurs châteaux un asile, dans leur épée une sauvegarde pour la sécurité de leurs récoltes, de leur industrie et de leur commerce.

    Méconnaissance du rôle historique de la royauté

    La royauté est la négation de la République ! pour les républicains !

     

    les auteurs de manuels s’efforceront en conséquence de démontrer qu’elle a eu tous les vices, exercé toutes les tyrannies, qu’elle s’est opposée à l’instruction, faisant de l’ignorance la complice de son despotisme, explique Jean Guiraud.

     

    Dans un de ses exercices, M. Calvet demande à ses élèves de prouver qu’un « roi absolu à qui rien ne résiste est incapable de bien gouverner » (Cours élémentaire, p. 117),

     

     

    comme si des souverains absolus tels que Pierre le Grand en Russie, Frédéric II en Prusse, Henri IV en France n’avaient pas bien gouverné leurs Etats. Pour Brossolette,

    « Louis XI ne fut ni plus fourbe ni plus méchant que les princes ses contemporains »

     

     

    (Cours moyen, p. 143) ;

     

    ce qui revient à dire qu’au XVe siècle TOUS les princes sans exception  étaient fourbes et méchants, même quand ils s’appelaient le « bon roi » René.

     

     

    Pour nous faire connaître le « peuple sous Louis XIV », le même auteur, qui nous indique à peine d’un mot les efforts souvent couronnés de succès que fit Colbert pour diminuer les impôts par la réforme de la taille, trouve plus scientifique de résumer tout le règne en quatre faits mis en images :

     

    la révolte des Boulonnais contre les receveurs de l’impôt, une sédition à Rennes, une scène purement fantaisiste de famine, et l’histoire de M. de Charnacé abattant d’un coup de fusil un couvreur qui travaillait sur un toit.

     

     

    En admettant que tous ces faits soient exacts et que la royauté ait commis ou approuvé toutes sortes de crimes, écrit Guiraud, il est une vérité qui a son importance et que passent sous silence tous les manuels, sauf celui de Calvet, c’est qu’elle a fait la France.

     

    N’est-ce pas elle qui a réuni patiemment au domaine royal toutes les provinces qui s’étaient enfermées si longtemps en elles-mêmes ?

     

    Par un travail persévérant de plusieurs siècles, elle a reformé en une seule nation la poussière d’Etats qui était sortie du chaos des invasions, et donné à la race française, avec l’unité, la prépondérance politique et économique dans l’Europe du Moyen Age, sous saint Louis, dans l’Europe du XVIIe siècle, avec Louis XIV. Un pareil rôle ne méritait-il pas d’être rappelé ?

     

     

    Mais en le signalant, on aurait montré aussi la part qu’ont prise à la formation et à la gloire de la patrie des tyrans qui n’étaient ni révolutionnaires ni laïques ; on a préféré passer ces grands faits et mutiler l’histoire.

     

    SOURCES /  Mutilation de l’Histoire de France :
    détruire le passé pour glorifier le monde nouveau

     

    http://www.france-pittoresque.com/spip.php?article12686

     

     

     

     

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    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     

       Marques de Tacherons, compagnon du Devoir.

    On y distingue un compas et une équerre, non entrelacés, autour de la lettre K.

    Une estampille indiquait sur une autre partie du meuble le nom de l'artisan.

    Seules les dernières lettres sont lisibles : CKLE.

    Elles sont précédées de trois ou quatre autres lettres, illisibles.

    http://compagnonnage.info/ blog/blogs/blog1.php/2009/ 11/03/ marque-compas-equerre-ebeni ste

      

      

      

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

      

    Beaumont-du-Ventoux

    Franc-maçon : L’erreur serait à cet égard d’interpréter l’expression Franc-maçon comme impliquant une notion de franchise, c'est-à-dire un statut particulier. L’explication serait d’origine anglaise, en relation avec la terminologie concernant le métier des carriers, ceux qui extraient les pierres dans les carrières. On aurait distingué ceux qui travaillaient les roches plus tendres. Les premiers seraient les hard hewers, les autres les freestone masons. Les freestone masons seraient des sculpteurs tandis que les rough masons ne seraient que des tailleurs de pierre. Par contraction, l’expression serait devenue free mason, traduit en français lors de l’introduction de la franc-maçonnerie spéculative en France, en 1725, par franc-maçon. D’une manière générale, en terme de métier, on utilise encore le qualificatif « franc » pour désigner une pierre de bonne qualité ; On parle de « franc biais », de « franc banc », ou encore de coupe franche, de « bord franc ».Suivant les régions, de nombreux dessins tournent autour de sujets typiques : les sujets religieux : croix, église, I H S, etc; les représentations en rapport avec les métiers : instruments, bateaux, poisson, chaussure...

     

    IMPORTANT, à lire avant de regarder les photos.. pour mieux comprendre..

    http://www.ot-aiguesmortes .fr/FR/Tacherons.htm

     

     

     

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     

     

    Une marque de tâcheron est un signe géométrique (voire une lettre ou un monogramme) gravé dans la pierre de taille

    par un tailleur de pierre.

    Autrefois, chaque tailleur de pierre possédait sa marque qui lui servait de signature de manière à recevoir son salaire à la fin d'une semaine de travail, en fonction du nombre de pierres taillées, les tailleurs de pierre étant payés à la tâche.

    Parfois, l'ouvrier a inscrit sa marque sur le manche de ses outils.

    Les marques de tâcheron ne doivent pas être confondu avec les signes conventionnels de reconnaissance des faces de la pierre de taille qui permettent de placer une pierre dans un appareil.

     

     

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     


    Des marques de tâcherons pour des métiers sous la protection de Saints Patrons

    Au Moyen Age, l’habitude est de placer une action et en particulier un métier sous la protection d’un saint. Les maçons qui ont le triangle pour emblème, symbole de la Trinité, ont choisi pour patron un grand nombre de saints. Le plus caractéristique paraît être Saint Thomas souvent représenté avec une équerre, instrument de l’architecte qu’il aurait été au service d’un roi de l’Inde, au cours de son périple en Orient. On cite aussi Saint Blaise, Saint Etienne, à cause de sa lapidation, et même Saint Louis, bâtisseur de la Sainte Chapelle. Pour les tailleurs de pierres, c’est Saint Ambroise ou Saint Silvestre, le pape bâtisseur, qui étaient invoqués à côté des saints protecteurs des maçons.

     

     

     

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     

     

     

    Dans le Languedoc, les confréries qui regroupent des gens de métier sous la protection d’un saint patron sont assez nombreuses et prennent un caractère nettement professionnel après 1250. Ce sont des groupements à caractère spirituel et moral visant à créer une solidarité de corps entre les membres, qu’il ne faut toutefois pas confondre avec les « confraternités » ou « conjurations » qui ont un caractère plus politique ou religieux que professionnel, étant œuvres de dévotion ou de charité. Une étude précise de ces différentes organisations dans le Languedoc médiéval fait apparaître que, si les corps de métiers sont dès le XIIIème siècle bien organisés à Narbonne, Béziers, Montpellier ou Nîmes, les tailleurs de pierres et maçons y apparaissent peu.

    Ce sont surtout les métiers de l’alimentation et du vêtement qui témoignent d’une certaine cohésion. Les maçons sont rarement cités dans les registres des diocèses d’Agde ou d’Albi et les tailleurs de pierres tiennent une place prépondérante dans l’activité des chantiers. Ce sont le plus souvent eux qui font office de maîtres d’œuvre et il leur arrive même de diriger plusieurs chantiers à la fois. Tel est le cas d’Eudes de Montreuil, architecte du roi, ou de Pierre d’Angicourt qui fut successivement tailleur de pierres, maçon, puis architecte principal de Charles d’Anjou qu’il suivit jusqu’à Naples.

     

     

     

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     

    Les marques de tâcherons

    Parmi les indices pouvant nous aider à mieux connaître ces milieux professionnels qui par le caractère secret de leurs associations demeurent d’une approche difficile, il faut compter en premier lieu ces marques qui apparaissent en grand nombre sur les pierres taillées qui ont servi à bâtir l’enceinte d’Aigues-Mortes. On s’est beaucoup interrogé sur l’origine et la signification de ces marques. Même si l’on en trouve dont l’inspiration peut-être religieuse, il faut y voir des marques permettant d’identifier l’auteur de l’ouvrage qui en garantit ainsi la qualité. Il semble bien que ce soit là la principale interprétation qu’il faille en donner. Il n’en reste pas moins que cette pratique comporte des implications adjacentes, sur lesquelles il convient de s’arrêter en raison de la complexité quelles laissent entrevoir.

     

     

     

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     


    Il n’est guère douteux que ces marques aient eu une valeur professionnelle voire symbolique.

     

    On sait qu’elles se transmettaient de père en fils et qu’elles contribuaient à établir des sortes de filiations permettant sans doute à des ouvriers de se reconnaître par ces signes qui nous paraissent aujourd’hui naïfs ou mystérieux.

    On sait par ailleurs que ces marques permettaient d’effectuer le comptage en fin de journée en vue de procéder à la paie des ouvriers.

     

    En effet, dans les chantiers itinérants ou lorsqu’il fallait faire appel à un grand d’ouvriers pour un gros chantier comme Aigues-Mortes, on recrutait des ouvriers à la journée que l’on payait à la tâche.

     

    La cité est un exemple particulièrement signalé pour le nombre des marques observables.

     

    Dans les chantiers stables, comme ceux des grandes cathédrales du Nord, les équipes étaient plus sédentaires, les ouvriers mieux connus étaient payés à la journée et avaient moins de raisons de marquer leurs pierres.

     

    A Aigues-Mortes, les maçons auraient reçu pour l’achèvement des travaux de l’enceinte un salaire de quatre livres et dix sous par canne de mur construit, une canne

    valant environ 1.92m.

     

     

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     

     

    Marques de tâcherons sur une tour du château de Coucy, Picardie, France

     


    Du fait du caractère initiatique que ces marques tendent à conférer à la vie professionnelle et de la solidarité corporative qu’elles contribuent à renforcer par le code de reconnaissance secrète qui s’établit par ce moyen de chantier en chantier, on a parfois eu tendance à y voir un des signes génétiques de la franc-maçonnerie.

     

    On considère généralement qu’elle est une institution qui est apparue en Angleterre au XVIIIème siècle.

     

     

    Il est cependant vraisemblable que, dès le Moyen Age, les organisations spécifiques des gens de métier aient pu créer un esprit de corps dont on puisse dire qu’il a servi de point de départ à ce que l’on appelle la franc-maçonnerie.

     

     

    Cette évolution s’est faite en Angleterre. Il ne semble pas que l’on puisse en trouver des résurgences médiévales dans l’Europe méditerranéenne.

     

    l'HISTOIRE des TACHERONS.. LES TAILLEURS de PIERRE...

     

     

     



    Marque de tâcherons de l'Abbaye de Fountains, Angleterre


    Pour comprendre son nom, il faut le décortiquer.
     

     

    Le mot « tâcheron »
    désigne un personne travaillant à la tâche par rapport à la quantité de son travail.

     

     

    En clair, plus il produit, plus il est payé.

     

     

     

    Les « marques de tâcherons » sont donc les marques faites par les tâcherons dans le but de reconnaissance de son auteur et de calculer la production de celui-ci.

     

     

    A la fin de chaque semaine, les pierres étaient comptabilisées et on décernait les marques de chaque tailleur pour lui payer son dû.

    A défaut de retrouver ces marques sur les pierres, on pouvait également en trouver sur les outils des tailleurs.

     

     

    Ces petits détails gravés étaient très utiles et sont véritablement devenus une marque de fabrique .

     

     

    Marque de tâcheron sur le manche d'une polka


    --------------------------
    ◊ Formes et symbolique
    --------------------------


    •••••••••◊ Véritables symboles ◊•••••••••

    Bien que la plupart des marques soient faites de formes géométriques , on en retrouve aussi sous l’aspect de lettres ou de monogramme .
    L’évolution des signes est aussi à retenir.

     

    Il varie alors selon la région, la période, le chantier.
    Les formes sont imprégnées de spécificités locales.

     

     

    Tantôt faites d’incisions ou de griffures, tantôt faites de simple traçage à base de colorant qui ne résisteront que peu au temps.

    Plus tard, certaines de ces marques lapidaires seront associées à des symboles que l’on connaît pour des sujets positifs ou négatifs.

     

    Mais ils prendront pratiquement tous une nouvelle signification.

     

    Symboles répertoriés dans divers pays

     

     




     

     

    Il fallait surtout espérer que 2 tailleurs de pierres n’utilisent pas le même symbole !

     

    Du moins, pas sur le même chantier…!!

     

     



    D’ailleurs, en scrutant les sites de plus près, on peut en venir à se demander pour quelle raison on voit plus de traces sur certains sites, alors que sur d’autres ils sont quasi invisibles.
    Il faut se dire qu’à l’époque il existait des chantiers dits stables et d’autres itinérants.

     

     

    Dans les premiers, on rencontrait des ouvriers embauchés pour la totalité de la construction.

     

     

    Comme pour les chantiers des grandes cathédrales du Nord. Ils n’avaient donc pas vraiment le besoin de marquer leur travail.

     


    Contrairement aux chantiers itinérants, où l’on engageait parfois des tailleurs à la journée.

     

     

    La marque était le moyen le plus facile pour reconnaître leur taux de production.

    Mais certains chantiers s'approvisionnent chez les tailleurs des environs.

     

    Les pierres sont acheminées jusqu’au chantier et le marquage fera donc office de lot de fabrication et/ou de livraison.

    Chantier de construction


    •••••••••◊ Une histoire de famille ◊•••••••••

    Il est difficile de faire une étude sur ces marques.

     

    A vrai dire le métier de tailleur de pierres n’était que fort peu répertorié et il se faisait surtout en famille ou en confrérie.


    Ainsi, on on peut affirmer que la marque se transmettait de père en fils et qu’elle a crée tout un réseau local, voire national selon les voyages et chantiers entrepris.

     

    Tailleur de pierres
     

    En viennent alors les questions sur le côté secret de ce corps de métier.

     

    Où marques évoquent un caractère initiatique et une forme de solidarité corporative dont personne ne doit véritablement parler.

     


    C’est donc sans difficulté que l’on associa tout ceci à la Franc Maçonnerie.

    •••••••••◊ Protection des Saints ◊•••••••••

    Les mâçons ont choisis un grand nombre de saints pour représenter ou protéger leur métier. Régulièrement, on retrouve le triangle qui représente la Trinité, ou une autre représentation de l’équerre de Saint Thomas.



    Marque de tâcherons sur une tour du château de Coucy


    On pourra citer Saint Blaise, Saint Etienne ou encore Saint Louis

    (bâtisseur de la Sainte Chapelle).

     


    Mais rien n’y fait, chez les tailleurs de pierres on prie Saint Ambroise ou Saint Sylvestre (pape bâtisseur).

    Certaines confréries se créent sous l’image d’un Saint Patron et forment alors des groupes professionnels que l’on répertorie vers 1250.

     

     

    SOURCES http://mesnie-acre.forumactif.com/t46-les-marques-de-tacheron

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    Les tailleurs de pierre étaient des tâcherons. 

     

    Ils travaillaient à la tâche, c’est-à-dire qu’ils étaient payés en fonction de ce qu’ils produisaient. 

     

    Il fallait donc qu’en fin de semaine leur travail soit marqué afin qu’ils soient rémunérés proportionnellement à leur travail.  

     

     

    LES MARQUES DES TACHERONS

    Ils recevaient donc un salaire en fin de semaine en fonction du nombre de pierres taillées et installées. 

     

     

     

     

     

    Chacun se choisissait une « signature » sans équivoque, soit un signe géométrique, une lettre ou un monogramme.

     

     

    LES MARQUES DES TACHERONS

     

     

    Une marque de tâcheron est un signe géométrique (voire une lettre ou un monogramme) gravé dans la pierre de taille par un tailleur de pierre.

    Autrefois, chaque tailleur de pierre possédait sa marque qui lui servait de signature de manière à recevoir son salaire à la fin d'une semaine de travail, en fonction du nombre de pierres taillées, les tailleurs de pierre

    étant payés à la tâche.

    Parfois, l'ouvrier inscrivait sa marque sur le manche de ses outils.

    Les marques de tâcheron ne doivent pas être confondues avec les signes conventionnels de reconnaissance des faces de la pierre de taille qui permettent de placer une pierre dans un appareil.

     

    On sait qu’elles se transmettaient de père en fils et qu’elles contribuaient à établir des sortes de filiations permettant sans doute à des ouvriers de se reconnaître par ces signes qui nous paraissent aujourd’hui naïfs ou mystérieux. 

     

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    Il était gravé dans la pierre de taille par le tailleur de pierre.

     

    Parfois, l'ouvrier inscrivait sa marque sur le manche de son outil. 

     

    Les murs de pierre de l’ancienne prison de Blaye, réaffectée à un usage de boulangerie au XIXe siècle puis de musée aujourd’hui, conservent la signature visible des artisans qui la bâtissent en 1677.

    Plus de quatre cent ans après l’édification de la citadelle et de ses bâtiments, il est difficile d’évaluer le travail que ce vaste chantier peut représenter, le nombre d’ouvriers employés ainsi que le volume et le poids de la pierre taillée à la main par des artisans.

     

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    On en rencontre un peu partout sur les édifices religieux, les châteaux et les forteresses, comme sur les fortifications de la muraille construite par Philippe Auguste entre 1190 et 1220. 

     

    LES MARQUES DES TACHERONS

     

     

    Sur les vestiges situés rue des Jardins Saint Paul dont la tour Montgomery, on en trouve de nombreux, Z, croix, flèche, N inversé. 

     

    L'étude des marques de tailleurs de pierre s'appelle la glyptographie

     

    Les marques de tâcheron ne doivent pas être confondues avec les signes conventionnels de reconnaissance des faces de la pierre de taille qui permettent de placer une pierre dans un appareil.

     

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    Les photos des marques de tacherons ont été prises sur les vestiges

    de la Muraille Philippe Auguste, rue des Jardins-Saint-Paul, Paris 4ème. 

     

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    La Muraille Philippe Auguste, est un circuit au cours duquel des marques de tacherons peuvent être recherchées et vues.

     

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    Wikipedia
    Curiosités parisiennes
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    Sources / http://www.paristoric.com/index.php/paris-d-hier/marques-et-plaques/92-les-marques-des-tacherons

     

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  • La Queue du diable
     
    LA QUEUE DU DIABLE
    Conte du Bocage Normand
    par A. Almagro
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    Lecteur bénévole et charmante lectrice, je viens vous raconter une histoire qui vous semblera peut-être un conte, tant elle est invraisemblable, mais qui doit être vraie de tout point, car je l’ai tirée d’un recueil d’anciennes légendes, et je suis persuadé que le pieux anonyme qui nous les a transmises pour notre instruction et notre édification était un homme véridique, qui n’aurait jamais voulu compromettre le salut de son âme en cherchant à nous faire prendre les vessies pour des lanternes.
     
     
     
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    La légende étant écrite dans un style vieillot et peu intelligible, je me suis dit qu’il serait utile de lui donner une forme plus jeune et de la traduire dans le style du jour ; et c’est ici qu’a commencé mon embarras.
     
    Quel genre de style devais-je adopter ?
     
    Le genre sentimental, vaporeux et nuageux ?
     
    Il est quelque peu démodé et j’aurais ennuyé mes lecteurs qui ont bien assez de sujets d’ennui. Le genre réaliste ?
     
    J’aurais fait rougir les dames.
     
    Un instant je me suis arrêté à l’idée de recourir au genre décadent, aujourd’hui fort en vogue et qui se glisse comme un serpent sous la prose fleurie de maint auteur de talent.
     
     
    En mettant mon esprit à la gêne, je serais parvenu, moi aussi, à trouver de ces phrases péniblement niaises, de ces tours inattendus et de ces locutions extravagantes, qui font les délices du décadent qui les écrit et causent au profane qui ose les lire un étonnement voisin de la stupéfaction.
     
     
     
    Toutefois, si séduisant que fût ce projet, j’ai dû y renoncer par crainte qu’on ne crût que je parlais charabia, ce qui m’eût profondément humilié.
     


    Tout bien pesé, j’ai pris le parti de revenir au chemin battu, qui est le bon, et de me servir du style pédestre, simple et uni, parlant comme tout le monde pour que tout le monde me comprenne.

    Ceci dit en guise de préface, j’entre en matière.


    I

    Il y avait une fois, au pays bas-normand, une veuve et sa fille qui vivaient pauvrement dans une pauvre maisonnette, aux murs de torchis et au toit de chaume, comme toutes celles de la campagne d’alentour.
     
     
    Une petite vache, des poules, un cochon, sauf votre respect, un courtil peu étendu, un jardinet et quelques pommiers formaient tout leur avoir, auquel s’ajoutait le mince produit de leurs fuseaux qui tournaient, tournaient sans cesse.
     
     
     
     
     
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    Grâce aux indications de l’anonyme, je puis préciser l’endroit où s’élevait la maisonnette de la veuve ; c’était dans l’un des hameaux qu’on voit éparpillés à travers la verdure sur les pentes méridionales du mont de Cérisy, à une faible distance de la célèbre abbaye de Belle-Etoile et à quelques milles des murs de Tinchebray, qui, soit dit en passant, était alors une petite ville assez malpropre, mais ne fut à aucune époque une caverne de voleurs, ainsi qu’on l’a faussement prétendu.
     
     
     


    Notre veuve portait gaillardement ses cinquante-cinq hivers.
     
     
    Elle n’avait rien d’attrayant, je dois le confesser ; elle était longue et maigre comme le carême, laide comme le péché et mauvaise comme la lèpre ; quant à son caractère, c’était le plus maussade, hargneux et acariâtre que le ciel eût jamais créé dans son juste courroux.
     
    On l’avait surnommée la mère Rabat-Joie, parce que sa seule présence suffisait pour rabattre et éteindre toute joie et tout contentement.
     
     


    Son mari, qu’on appelait le père Mathieu, succomba à dix de mariage qui furent dix ans de lente torture ; il expira en bénissant la mort qui le délivrait de sa femme.
     
     
     
    Le curé de la paroisse était très attaché au père Mathieu qui avait été son chantre et son sacriste ; il annonça en chaire qu’il dirait un certain nombre de messes pour le repos de cette âme en peine ; mais le père Mathieu revint tout exprès de l’autre monde pour le prier de n’en rien faire, assurant qu’il n’avait besoin de rien, que son âme était en repos et qu’il était allé tout droit en paradis, ayant fait son purgatoire ici-bas.
     
     


    Si la mère Rabat-Joie fut méchante et dure envers son mari, on s’imagine aisément qu’elle ne le fut pas moins envers sa fille, laquelle avait nom Mariette et semblait  prédestinée au même sort que son père.

    Mariette était alors dans tout l’éclat et toute la fraîcheur de la jeunesse.
     
     
     
    Elle était bonne comme la manne du ciel, belle et radieuse  comme une aube de mai, chaste et pure comme le lis du vallon, modeste, recueillie et obéissante comme une nonne ; avec cela très dévote à la bienheureuse Vierge Marie, à l’archange saint Michel, vainqueur du démon, et aux saints Anges, gardiens et protecteurs de sa vertu.
     
     
     
     
     
    Sa bonne grâce, son air candide et son angélique patience lui avaient gagné tous les cœurs ; chose à peine croyable : elle n’avait jamais donné le moindre signe de coquetterie. Bref, elle était, au physique et au moral, tout l’opposé de sa mère, et l’on se demandait par quel caprice ou quel prodige de la nature une si vilaine chouette avait pu mettre au monde une si douce, tendre et innocente colombe.
     
     
     
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    Dans l’opinion du peuple Mariette passait pour une sainte, une vraie sainte du paradis, ce qui alors n’était point rare, mais ne se voit plus depuis longtemps.
     
     
     
    Cette auréole de sainteté, loin de toucher l’âme de son odieuse mère, ne fit que l’exciter à redoubler de mauvais traitements. Grondée, accablée d’injures, souvent battue, la pauvrette souffrait en silence, offrant ses peines au Seigneur en expiation de fautes qui n’étaient pas les siennes.
     
     
     
    Tandis que d’autres jeunes filles, fières de leur bonheur, traversaient joyeusement la vie, la chanson aux lèvres et le front couronné de roses et de myrte, elle s’y traînait douloureusement, courbée sous sa lourde croix et le front couronné d’épines.

     
     
     
     
    Parmi les jeunes gens les plus huppés et les plus riches de la contrée, plus d’un, ému de son malheur et séduit par ses charmes, eût volontiers tenté de l’arracher à son dur esclavage en se l’attachant par les liens de l’hyménée ; plus d’un même fut assez téméraire pour aller demander sa main.
     
     
     
    Mais la mère Rabat-Joie rabattit leur ardeur amoureuse ; l’accueil fut si brutal qu’ils durent fuir à toutes jambes et s’estimèrent heureux d’avoir sauvé leurs yeux des griffes du monstre.
     
     
     


    Cet exemple refroidit le zèle des autres prétendants qui, de guerre lasse, renoncèrent à une poursuite par trop dangereuse. Evidemment, pour dompter ou endormir le dragon redoutable qui veillait à la garde d’un si précieux trésor, il n’eût fallu rien moins que le diable, le diable lui-même.
     
    La jeune victime fut donc abandonnée à son triste sort et se vit irrévocablement condamnée à mourir vierge et martyre.
     
     
     


    Mariette était aussi laborieuse que bonne ; c’était une excellente ménagère et une fileuse incomparable. Entre ses doigts de fée le chanvre disparaissait si vite que les gens du pays croyaient que les anges descendaient du Ciel pour l’aider à filer sa quenouillée. Elle était propre, soigneuse, et lorsqu’elle ne filait pas, on la voyait vaquer avec ardeur aux soins multiples du ménage : elle cousait, lavait, repassait, nettoyait la maison, apprêtait les repas, trayait la petite vache, sa seule amie dans cette solitude, battait le beurre et en faisant de si exquis qu’il eût pu figurer sur la table du pape.
     
     
     


    Sa mise était toujours d’une extrême simplicité ; pas de colifichets, ni de parures, ni aucun de ces riens coûteux, inventés pour la perdition des femmes. Elle ne paraissait jamais aux assemblées ; elle n’allait à aucune noce, quoiqu’elle en fût souvent priée. Sa seule sortie était pour se rendre à l’église, où elle priait avec une ferveur exemplaire. Notre siècle corrompu ignore, hélas ! ces vertus simples et rustiques.
     
     
     
     
    La perversité des villes a envahi les campagnes et en a altéré les traditions et les mœurs.
     
     
     
    L’innocence primitive s’est enfuie, la face voilée, vers d’autres sphères, et le mal, qui jadis était partiel et passager, est devenu général et durable. Il est aisé de voir que nous approchons de la fin du monde.
     
     
     
     


    Un soir, à la veillée, Mariette préparait le souper et étendait la pâte grise de sarrasin sur la galettoire de terre cuite que chauffait un feu clair. Ce n’était pas la galette du riche, mince, légère, où abondaient le beurre et les œufs frais, mais la galette du pauvre, lourde, massive, sans œufs,  et presque sans beurre.
     
     
     
     
     
    Le matin, un amoureux s’était présenté ; il fut reçu, cela va sans dire, en ennemi, et ce fut un miracle s’il ne laissa pas sa peau sur le champ de bataille.
     
     
     
    L’humeur de la mère Rabat-Joie s’en était ressentie ; ce n’était plus du vinaigre, c’était du vitriol.
     
     
     
    Mariette fut injuriée tout le jour et souffletée à plusieurs reprises ; comme si c’était un crime pour une jeune fille charmante et malheureuse d’inspirer la pitié et l’amour !
     
     
     


    Le soir, l’orage grondait encore et la grêle menaçait toujours. Mariette tremblait comme la feuille ; sa main était mal assurée et, en voulant retourner la galette, elle la laissa maladroitement tomber dans les cendres.
     
     
    A la vue de cette catastrophe, la mégère pousse un cri de rage. « Coquine, hurle-t-elle, ribaude, dévergondée, tu n’en fais jamais d’autres ; je voudrais que le diable t’emporte ! » Et elle répète par trois fois d’une voix stridente :
     
     
    « Oui, je voudrais que le diable t’emporte ! »
     
     


    Fatale imprudence ! Par le plus grand des hasards, à cet instant même, le diable rôdait aux alentours, étant venu dans le pays pour aider un baron de ses amis à délivrer une jolie nonnain enfermée contre son gré dans un moutier du voisinage.
     
     
     
    Le cri de la mère Rabat-Joie, retentissant dans les ténèbres, parvient à son oreille ; il reconnait sa voix, entend son vœu impie et fait un bond de joie si violent qu’il casse comme un fêtu, avec son crâne, une grosse branche de pommier sous laquelle il passait à ce moment.
     
     
     
     


    D’ordinaire il ne prêtait aucune attention aux souhaits de cette sorte ; s’il lui fallait emporter tous ceux dont on lui fait don ou qui se donnent à lui, son temps si précieux n’y suffirait point. Mais cette fois le cas est bien différent ; il ne s’agit pas d’une proie vulgaire ; il s’agit bel et bien d’une sainte, d’une véritable sainte.
     
     
     
     
    Quel triomphe pour ce maudit si, à la barbe du Tout-Puissant, il emportait une sainte au séjour des damnés ! Tout l’enfer serait dans l’allégresse et l’on devine sans peine ce que peut être l’allégresse de l’enfer.
     
     
     
    Les gazetiers de là-bas lui consacreraient des articles élogieux et menteurs où l’enthousiasme déborderait à tant la ligne ; les poètes lui dédieraient des strophes enflammées ; les hauts dignitaires lui liraient des adresses et baiseraient avec respect ses pieds de bouc ; les garde-chiourmes l’acclameraient à grand bruit de chaînes ; on lui élèverait des arcs-de-triomphe faits d’ossements humains, et sa gloire éclipserait celle des plus fameux conquérants, qu’il connaissait tous intimement, puisqu’ils logeaient chez lui.
     
     
     


    Pour dire le vrai, il se méfiait de la mère Rabat-Joie. Elle ne lui était pas inconnue et il ressentait même pour elle de l’estime et de l’amitié, à preuve qu’il lui réservait une chaudière d’honneur ; mais enfin il s’en méfiait et ne comptait guère qu’elle accomplit religieusement sa promesse. Il comptait plutôt sur lui-même et sur l’abondante provision de ruses, de pièges et de stratagèmes qu’il portait toujours dans son bissac.
     
     
     
    Aussi, sans s’amuser aux bagatelles, conçut-il sur-le-champ un projet machiavélique et diabolique qu’il n’allait pas tarder à mettre à exécution et dont nous verrons plus loin les fâcheuses suites.
     
     
     
     


    Le roi des damnés avait raison de se méfier de la mère Rabat-Joie, car elle ne songeait nullement à lui livrer sa fille, laquelle, après tout, était le sang de son sang et la chair de sa chair.
     
     
     
    Elle avait été trop vive, c’est évident, elle avait parlé sans réfléchir, dans un accès de colère.
     
     
     
    La visite intempestive de l’amoureux, puis la vue de la galette renversée dans les cendres l’avaient mise hors des gonds et lui avaient fait oublier les règles de la civilité ; mais un chrétien n’est pas tenu d’accomplir une promesse imprudente.
     
     
     
    Jarnicoton ! donner sa fille à Satan ! Jamais de la vie.
     
     
    Et qu’il ne s’avisât pas de venir la réclamer, car, foi de normande, elle lui casserait les cornes.
     
     


    A cet endroit du récit, l’auteur anonyme de la légende, qui était très probablement un moine de l’abbaye  de Belle-Etoile et paraît avoir beaucoup connu la mère Rabat-Joie, entre à son sujet dans des détails curieux et instructifs dont je me ferais un scrupule de priver mes lecteurs.
     
     
     
    A l’en croire, la veuve du père Mathieu était une femme de principes austères auxquels elle conformait tous ses actes, et elle avait des idées très personnelles sur une foule de questions. Elle en avait, par exemple, sur l’éducation des filles et avait imaginé un système éducatif qui reposait tout entier sur l’antique maxime :
     
     
     
    Qui aime bien, châtie bien. Elle prenait la maxime à la lettre et appliquait son système dans toute sa rigueur. C’est parce qu’elle aimait sa fille qu’elle la châtiait sans l’ombre d’une raison, et c’est parce qu’elle l’aimait beaucoup qu’elle la châtiait sans miséricorde.
     
     
    Qui aime bien, châtie bien. C’était logique, mais très désagréable pour la pauvre Mariette.
     
     


    Ses idées sur la propriété n’étaient pas moins dignes de remarque. « Ma fille, disait-elle, est ma propriété, mon bien, ma chose, puisque c’est moi qui l’ai faite (elle oubliait le père Mathieu, mais passons). Quiconque, sous prétexte de mariage, s’introduit chez moi et cherche à me la ravir, attente à ma propriété ; c’est un voleur, un pirate, un scélérat, et je lui briserai les reins, jour de Dieu ! Au surplus, ajoutait-elle, je ne veux pas qu’elle se marie, et elle ne se mariera pas, car tel est mon bon plaisir.
     
     
     
    On est mère ou on ne l’est pas. » C’est ainsi que la mère Rabat-Joie comprenait la propriété ; il est douteux que les prétendants à la main de Mariette la comprissent de la même façon.

    L’opinion qu’elle professait sur les hommes en général était tout à fait singulière. Pour elle l’humanité n’était qu’une immense fourmilière de petits êtres vicieux, difformes et ridicules qui passaient tout leur temps à se contredire et à s’entre-dévorer.
     
     
     
    C’était une espèce plus nuisible qu’utile et dont la perte affligerait plutôt le diable que le bon Dieu.
     
     
    Conclusion : l’humanité est haïssable, il faut la haïr ; et toujours conséquente, elle détestait cordialement l’humanité qui le lui rendait avec usure.
     
     
     


    Mais ce qu’elle détestait par-dessus tout, c’était le diable ; elle lui avait juré une haine farouche, implacable ; il était sa bête noire et son cauchemar. Dans ce sentiment il entrait de la jalousie de métier et une peur atroce d’aller bouillir dans la grande chaudière.
     
     
     
    Autant elle exécrait le diable, autant, par une conséquence naturelle, elle admirait et révérait l’archange saint Michel qui l’avait combattu et vaincu.
     
     
     
    Il existait dans sa paroisse une confrérie d’hommes qui avait saint Michel pour patron et qui chaque année accomplissait un pèlerinage au mont béni où trône le glorieux archange. La mère Rabat-Joie ne manquait jamais d’en faire rapporter par quelque pèlerin des médailles de plomb à l’effigie du saint et de menus objets de piété qu’elle conservait comme un talisman.

     
     
     
     
    Cette confrérie possédait sa chapelle dans l’église paroissiale, avec un autel spécial surmonté d’un groupe, œuvre d’un moine sculpteur de l’abbaye de Belle-Etoile et qui représentait saint Michel terrassant le démon. Rien de si noble, de si animé et de si harmonieux que ce groupe où le génie de l’humble religieux avait mis comme un souffle de vie.
     
     
     
    Le guerrier céleste se dressait superbe, faisant flamboyer dans sa main l’épée vengeresse, tandis que l’éternel révolté se tordait en rugissant sous son pied vainqueur.
     
     
    Des cierges brûlaient devant la sainte image, et la mère Rabat-Joie y avait toujours le sien.
     
     


    C’est là qu’elle venait faire ses dévotions accoutumées, profitant du moment où l’église était déserte, afin, disait-elle, d’avoir moins de distractions. Agenouillée devant l’autel, elle priait d’abord le saint longuement et avec humilité ; puis, sa prière faite, elle sautait sur ses pieds et, menaçant du poing le démon, elle l’apostrophait ainsi :
     
     


    « Vilain sire, tu es laid comme Judas Iscariote, noir comme la conscience d’un procureur, barbu comme un bouc, cornu comme un mari trompé, et tu portes des griffes sales et crochues que t’envierait un usurier juif.
     
     
     
    Tu fais une grimace aussi drôle que celle du braconnier Jean Le Borgne, que les archers emmenèrent et que je vis pendre à Domfront. Tu es plus méchant que moi, vieux loup-garou. Je voudrais te voir rôtir à la broche dans ta cuisine d’enfer et je t’arroserais de grand cœur avec du plomb fondu.
     
     
     
    Si je te tenais, bandit, canaille, hérétique, je t’arracherais la queue, je t’arracherais les griffes et les cornes, puis je te tordrais le cou comme à un poulet. Ainsi soit-il. »

    Le démon ne répondait pas, et la mère Rabat-Joie, ayant débité son chapelet d’injures qu’elle appelait l’oraison au diable, s’en retournait triomphante et satisfaite.


    II

    Peu de temps après la soirée orageuse où la mère Rabat-Joie entra en si belle fureur et fit si beau tapage pour une galette mal retournée, il vint au pays un étranger qui excita partout sur ses pas la plus vive curiosité.
     
     
     
    C’était un de ces chanteurs nomades, connus sous le nom de trouvères ou troubadours et qui s’en allaient de ville en ville et de château en château, déclamant ou chantant leurs vers où ils célébraient les exploits des preux et la beauté des dames.
     
     
     


    Celui-ci n’avait pas la mine famélique ni le costume râpé de ses confrères ; on l’eût pris plutôt pour un gentilhomme. Il était grand, élancé, d’élégante tournure, avec des traits expressifs, un teint bistré et comme brûlé, une barbe rousse en pointe et des yeux dont on avait peine à soutenir l’éclat. Son accoutrement était aussi riche que fantastique ; tout y était rouge, depuis la fine chaussure de cuir de Cordoue jusqu’à la toque de velours que surmontait une plume écarlate.
     
     
     
    Par un singulier caprice, cette toque était comme soudée à son front ; jamais on ne le vit tête nue. Il fut surnommé l’Homme-Rouge, et lorsqu’il s’avançait d’un pas rapide et que le vent secouait les rouges plis de son manteau, on l’eût cru enveloppé de flammes.

    Il jouait de tous les instruments et chantait agréablement d’une voix vibrante qui avait quelque chose de métallique.
     
     
     
    On avait remarqué que jamais il ne franchissait le seuil d’une église ni d’un lieu consacré, et l’on en conclut qu’il devait être maure ou païen ; bien certainement il n’était pas juif, car il se montrait large jusqu’à la profusion et généreux jusqu’à la prodigalité.
     
     
     
     
    On en fut quelque peu surpris, les disciples de la gaie science n’ayant pas l’habitude de rouler sur l’or : art et pauvreté sont frère et sœur.
     
     
    Du reste, quelle que fût la source de ses richesses, qu’elles vinssent du ciel ou de l’enfer, le fait est qu’elles lui attirèrent une grande considération et lui firent de nombreux amis.

     
     
    On ignorait son nom et sa patrie.
     
     
    Aux curieux qui l’interrogeaient sur ce dernier point, il se contentait de dire que son pays était très loin, très loin, qu’il y faisait très chaud, très chaud, qu’on y arrivait par des routes fleuries, que les gens de toute condition s’y précipitaient par milliers et qu’aucun n’en sortait, tant ils s’y trouvaient bien. Ceux qui l’écoutaient auraient voulu vivre dans ce pays-là.

     
     
     
    Quoiqu’il fût, à n’en pas douter, de haute origine, il n’avait pas de morgue et frayait familièrement avec tout le monde. Il avait un entrain endiablé et de l’esprit comme un démon. Il buvait aux assemblées autant que quatre normands et n’en était pas plus gris ; il dansait ou faisait danser des journées et des nuits entières et n’en était pas plus las ; il restait à table, selon l’us et coutume de Basse-Normandie, huit heures consécutives et n’en était pas plus repu. C’était le boute-en-train de toutes les fêtes, de toutes les noces, et il n’y avait pas de bonne partie sans le gai et amusant compagnon qui s’appelait l’Homme-Rouge.

     
     
     
     
    Il advint sur ces entrefaites que le seigneur de Briouze songea à marier sa fille, jolie personne, quoique boulotte et marquée de taches de rousseur ; le prétendu était un grand benêt dont le père, autre seigneur du voisinage, n’en ayant pu rien faire, avait pris le parti extrême de le marier dans l’espoir que sa femme en ferait quelque chose. Le seigneur de Briouze était de la première noblesse, car il se vantait de descendre du bâtard d’un bâtard de je ne sais quel duc de Normandie ; il était très instruit, à preuve qu’il savait lire et signer son nom. Il avait un beau château, une belle meute, de beaux étangs et de beaux domaines tellement vastes, qu’il s’y perdait chaque fois qu’il allait les visiter. Mais ce qu’il avait de plus beau, c’était son bourg de Briouze.
     
     


    Ce n’est pas que les chemins qui y menaient fussent moins effondrés que partout ailleurs, ni les masures moins sordides, ni les échoppes moins puantes.
     
     
    Sa beauté consistait dans la façon originale et neuve dont les habitations étaient groupées.
     
     
    D’ordinaire, lorsqu’un bourg se bâtit, les maisons se rangent tant bien que mal le long des chemins et finissent par former des rues et des places.
     
     
     
    A Briouze rien de pareil : ni places, ni rues ; les maisons étaient jetées çà et là à travers le terrain, se présentant sous toutes les faces, les unes par devant, d’autres par derrière, d’autres de côté, dans la plus complète indépendance et sans le moindre souci de la géométrie.
     
     
     
    On eût dit qu’elles étaient tombées du ciel et qu’elles s’étaient fichées dans le sol au hasard de la chute.
     
     
     
    Depuis lors la civilisation a passé par là, escortée d’ingénieurs des Ponts et Chaussées et d’agents voyers, et elle a mis de l’ordre dans ce beau désordre ; mais si Briouze y a gagné, le pittoresque y a beaucoup perdu.
     


    Les gars de Briouze étaient de fort braves gens, élevés dans la crainte de Dieu et de leur seigneur, qui était un maître débonnaire et doux, et dont ils conservèrent la mémoire en mettant sa figure moustachue, sculptée sur pierre, au-dessus du portail de leur église, où on la voit encore. Ils n’avaient qu’un défaut ou plutôt qu’une passion : ils aimaient à boire. Dans ce bienheureux pays il régnait une soif inextinguible ; les femmes y buvaient comme des hommes, et les hommes comme des trous. Le café était alors inconnu ; l’eau-de-vie était un remède d’apothicaire et le vin réservé à la table des riches ; mais il restait le gros cidre et le poiré, et le diable n’y perdait rien.
     
     
     
    Chaque maison était un cabaret ; au-dessus de chaque porte verdissait la branche de houx qui chuchotait à l’oreille du passant : Ici l’on boit. Et le passant entrait, s’attablait et buvait ; et tous les assoiffés de la campagne environnante accouraient là par bandes pour se désaltérer.

     
     
     
    On conçoit, d’après ces goûts bachiques, avec quels transports fut reçue la nouvelle du mariage seigneurial, qui promettait des noces splendides et de franches lippées. Le seigneur était puissamment riche et aussi libéral que riche ; il invita, outre les parents et les amis, ses vassaux, ses tenanciers, tous ceux qui dépendaient de lui, c’est-à-dire le pays tout entier.
     
     
     
    D’immenses tentes avaient été dressées pour abriter le populaire, pendant que la gent blasonnée s’ébaudirait dans la grande salle du château.
     


    Ainsi qu’il fallait s’y attendre, on fit venir l’Homme-Rouge pour entretenir la gaîté et dégourdir les jambes de la jeunesse. Il fut jovial, infatigable, pétillant de verve, étourdissant, cynique. Il chanta devant les nobles invités une sorte d’épithalame émaillé de termes équivoques et de facéties plus que libres, qui faisaient rougir la mariée et rire aux éclats son imbécile d’époux. Il poussait à boire, portait des défis aux plus intrépides buveurs et buvait lui-même comme s’il eût voulu éteindre un incendie intérieur.
     
     
    Onques on ne vit si monstrueuse ripaille ; elle dura sept jours et sept nuits, pendant lesquels on mangea des troupeaux et l’on but la récolte de cidre d’une année.

    A la fin, le diable s’en mêla. Le vin aux épices et les flots de cidre pur avaient à tel point échauffé les têtes, qu’une sorte de délire furieux s’empara de tous les convives, nobles et manants.
     
     
     
    L’époux gifle sans égard sa tendre moitié, qui tombe en pâmoison ; le beau-père saute à la gorge de son gendre ; les épées sortent du fourreau ; les rustres brandissent leurs gourdins ; la mêlée est épouvantable ; chacun frappe au hasard, pris d’une rage aveugle ; ce ne sont que cris de détresse, injures, imprécations et blasphèmes ; vaisselle, brocs,  gobelets, écuelles, débris de tables et de bancs volent de toutes parts.
     
     
     
    Dans cette effroyable bagarre, il y eut des membres brisés, des crânes fendus, des côtes enfoncées, des morts laissés sur le carreau parmi des flaques de sang et dans une inondation de cidre. Le banquet de noces, commencé dans la joie, se termina comme le festin des Lapithes, et l’Homme-Rouge s’en alla en pouffant de rire.
     


    Le lecteur aura deviné que l’Homme-Rouge n’était autre que l’esprit malin, lequel, venu sous un déguisement pour rendre visite à la mère Rabat-Joie, son ennemie intime, avait voulu tout d’abord s’amuser un brin, en jouant aux gars de Briouze, moins malins que lui, un tour de sa façon dont ils se souviendraient dans les siècles des siècles.
     
     
    Il se disposa, aussitôt ce bel exploit accompli, à exécuter le noir dessein qui lui avait fait entreprendre son voyage terrestre.
     
     
     
    Son but était de s’introduire chez la mère Rabat-Joie sous prétexte de lui demander la main de sa fille, de gagner ses bonnes grâces à force de bassesse ; puis, un beau jour, d’emporter l’infortunée Mariette en laissant là sa respectable mère à laquelle il ne tenait pas.
     
     
     
    Le plan, comme on voit, était aussi simple qu’infâme et n’eût pas été indigne d’un baron de grands chemins. Malheureusement pour l’auteur de cette trame infernale, la mère Rabat-Joie avait aussi son idée qu’elle mûrissait dans l’ombre et le mystère.
     
     
    C’était une rusée commère, dissimulée comme pas une, et qui, en fait de roueries, eût rendu des points à toute la robinaille de Domfront et au diable lui-même.
     
     
     
    Elle l’avait du premier coup dévisagé et reconnu, et se tenait sur le qui-vive, prête à lui rendre embûche pour embûche.

     
     
     
    Un matin, l’Homme-Rouge se présente chez elle, la bouche en cœur, sémillant, pomponné, mis à la dernière mode qu’il eût inventée, et inondé d’eaux de senteur pour masquer certaine odeur sulfureuse qui se dégageait de sa personne. Sa vue fait sur Mariette l’effet de celle du loup sur l’innocente brebis.
     
     
     
    Saisie d’une terreur subite, elle s’enfuit toute tremblante dans le coin le plus éloigné de la demeure et, tombant à genoux, prie avec larmes le saint archange Michel et les saints anges gardiens d’écarter d’elle le péril qu’instinctivement elle sent suspendue sur sa tête.

     
     
     
     
    La mère Rabat-Joie ne se déconcerte pas et reçoit le visiteur d’un air gracieux et affable. « Bonjour, cousine », lui dit-il à brûle-pourpoint. Elle fait un geste de surprise, mais l’Homme-Rouge lui déroule une interminable généalogie, où le diable seul comprendrait quelque chose, et qui prouve clair comme le jour qu’ils ont pour auteur commun un certain Caïn, mort depuis très longtemps et qui tua son frère par mégarde.
     
     
     
    La veuve semble flattée d’une si illustre origine et accepte d’autant plus volontiers le cousinage, que dans ce pays-là on cousine jusqu’au trentième degré de parenté. Il la complimente alors sur sa réputation de femme à principes, sur son système d’éducation et sur ses opinions philosophiques qui étaient aussi les siennes. Il se décide enfin à fondre la cloche et lui dépeint en termes éloquents la violence de l’amour que lui ont inspiré les charmes de Mariette.
     
     
    « J’ose espérer, ajoute-t-il, chère cousine, que vous voudrez bien donner votre consentement maternel à cette union qui comblera tous mes vœux. »
     


    La chère cousine d’abord ne répond ni oui ni non, selon l’usage de Normandie, et comme l’amoureux insiste de plus belle, elle finit par se rendre et dit franchement oui. « Mais Mariette, interroge-t-il avec anxiété, est-elle disposée à consentir » ?
     
     
     
    « Ma fille, répond gravement la mère Rabat-Joie, consentira du moment que je consens. Grâce à mon système d’éducation, et je vous le recommande, mon gendre, quand vous aurez des enfants, grâce à ce système je l’ai rendue souple comme un gant et docile comme un agneau. Ma volonté est la sienne, et elle acceptera de ma main un borgne, un bossu, un bancal, le diable même, à plus forte raison un gentil cavalier tel que vous. N’ayez souci, j’en fais mon affaire. Adieu, mon gendre ».
     
     
    « Adieu, belle-maman », répond l’Homme-Rouge, et il se retire joyeux et fier du rapide avancement qu’il avait obtenu, puisque de cousin il était passé gendre en quelques instants.

     
     
     
     
    Le lendemain et le surlendemain nouvelle visite, nouveaux compliments et nouvelle disparition de Mariette qui s’évanouissait comme une ombre, dès que l’Homme-Rouge montrait son nez à l’horizon.
     
     
     
     
    Il en fut d’abord surpris, puis contrarié et s’en ouvrit à la mère. « Ma fille, dit-elle, est timide et farouche ; elle a été élevée dans les bons principes, et la vue d’un homme, surtout d’un bel homme tel que vous, alarme toujours sa pudeur.
     
     
    Mais n’ayez souci ; je lui ferai la leçon.
     
     
     
    Revenez demain soir entre chien et loup, et je vous réponds qu’elle vous accueillera comme vous le méritez. Adieu, mon gendre ».
     
     
     
    L’homme-Rouge s’en retourna  en se frottant les mains et résolu à profiter de l’occasion pour frapper le grand coup et s’emparer de sa proie.
     
     


    Le jour d’après la mère Rabat-Joie fut fort occupée à des préparatifs qui n’étaient pas ceux des fiançailles :
     
     
    elle boucha avec soin la cheminée ainsi que toutes les ouvertures de l’unique pièce du rez-de-chaussée, ne laissant libre que la chatière pratiquée au bas de la porte.
     
     
     
    Dans l’angle le plus sombre était placé un vase plein d’eau bénite où trempait un rameau de buis.
     
     
    Mariette avait un rôle à jouer dans ce drame, rôle si effrayant, qu’aux premiers mots de sa mère elle devint pâle comme la mort et faillit lui désobéir pour la première fois de sa vie. Il ne fallut rien moins, pour l’encourager et la décider, que le serment qu’elle lui fit sur le crucifix de lui permettre, en récompense de sa docilité, d’aller s’enfermer dans un cloître, ce qui était depuis longtemps son désir le plus ardent.
     
     
     


    A l’heure convenue, l’Homme-Rouge, je veux dire le diable, arrive fringant et guilleret. La diablesse, je veux dire la mère Rabat-Joie, se tenait sur le seuil aimable, souriante et empressée.
     
    « Entrez, entrez, mon gendre, dit-elle ; ma fille est prête à tout ; vous n’aurez pas lieu de vous plaindre de son accueil. »
     
     


    Il entre sans méfiance, pendant que la mère Rabat-Joie, restée dehors, ferme derrière lui la porte à double tour. Mariette, debout dans un coin, le rameau de buis à la main, attend l’assaut, ferme et intrépide, car l’archange saint Michel la couvrait de son divin bouclier et lui inspirait un courage au-dessus des forces de son sexe.
     
     
     
     
    Au moment où le diable fond sur elle, il est accueilli par une aspersion d’eau bénite qui retombe sur lui comme une pluie de métal en fusion. Il pousse un rugissement de douleur et de rage, recule effaré, voyant trop tard le piège où il est tombé, et cherche anxieusement une issue pour échapper à l’averse de feu dont l’inonde le rameau bénit.
     
     
    Il court à la porte, elle est fermée à clé ; il vole aux fenêtres, elles sont barrées ; il s’élance vers la cheminée, elle est bouchée.
     
     
     
    Tout à coup, il aperçoit la chatière, se félicite de cet oubli providentiel, et se croit sauvé. Il se fait tout petit, tout petit, se pelotonne, passe comme un trait par l’étroite ouverture et tombe dans un sac que l’astucieuse commère y tenait étroitement collé du dehors. En un tour de main, la bouche du sac est liée, et voilà messire Satan pris comme une souris dans une souricière.
     
     


    Pour plus de précaution, la mère Rabat-Joie enroule solidement tout autour une forte corde, qui ôte tout mouvement au captif et ne lui laisse libre que la langue, dont il se sert pour menacer, jurer, sacrer et blasphémer. Elle ne s’en émeut guère et le regarde d’un air de mépris triomphant.
     
     
     
    Ah ! traître, s’écrie-t-elle, vil hypocrite, abominable imposteur ! Tu as cru me jouer et c’est moi qui t’ai mis dedans. Tu ne connaissais pas, malgré toute ta science, la mère Rabat-Joie ; il y a plus de malice dans son sac qu’il n’y eut jamais de tours et de diableries dans ton bissac. Ah ! tu voulais, serpent, emporter ma Mariette qui est la consolation et la joie de mes vieux jours ! On t’en fricassera des Mariettes.
     
     
     
    Quel joli gendre j’avais là et comme c’eût été honorable et distingué pour une femme à principes comme moi ! Attends, attends un peu ! je vais t’appliquer mon système d’éducation, car ta mère t’a bien mal élevé, sacripant ! » Et empoignant un manche à balai, elle décharge sur le sac et son contenu une si furieuse grêle de coups, qu’elle eût tué le diable, si le diable pouvait être tué. Malheureusement, il est immortel comme le mal.

    La nuit était tombée. La mère Rabat-Joie charge sur ses épaules encore solides son incommode prisonnier qui frétillait comme une anguille et criait à s’enrouer. Le mont de Cérisy était tout proche ; c’est là qu’elle dirige ses pas. Ce mont était alors couvert d’une végétation tellement dense et touffue, qu’elle n’eût jamais réussi à y pénétrer, si l’archange saint Michel ne lui avait pas ouvert la voie avec son épée pour la récompenser de la première et unique bonne œuvre qu’elle eût faite en sa vie. Elle atteint, hors d’haleine, le sommet aride et nu, où ne se posait nul pied humain, y dépose son fardeau et l’entoure de grosses pierres de peur d’accident.

    Le diable, dans cette fâcheuse extrémité, devient humble, doucereux et insinuant ; il appelle la mère Rabat-Joie sa chère amie et s’efforce de l’attendrir par les plus touchantes supplications. Autant eût valu chercher à attendrir un tigre. La chère amie hausse les épaules et lui jette ces mots ironiques : « Adieu, mon gendre, je vous souhaite une bonne nuit de noces. Heureux coquin ! que d’agrément vous allez avoir et comme vous allez faire des jaloux ! Adieu, amusez-vous bien et tâchez de ne pas vous enrhumer ». Puis elle dévale par le même sentier, sans plus se soucier de sa victime dont les mésaventures ne devaient pas se borner, ainsi qu’on le verra dans le cours de ce véridique récit.

    Le lendemain, la mère Rabat-Joie alla s’agenouiller devant l’autel de saint Michel et y consacra le rameau de buis bénit, qui avait mis en déroute le roi de l’abîme. La figure de l’archange lui parut illuminée de rayons et il lui sembla que le démon faisait une plus laide grimace et de plus affreuses contorsions qu’à l’ordinaire : cela ne la surprit pas. L’orgueil et l’ivresse de la victoire adoucirent un instant sa nature indomptable, et elle n’hésita pas à tenir son serment en permettant à sa fille de se donner à Dieu.

    Quelques semaines plus tard, Mariette entrait comme novice dans un monastère des environs. Mais les jours de la jeune vierge étaient comptés et la terre fuyait déjà sous ses pas. Cette fleur d’innocence et de pureté, qui languissait et s’étiolait dans notre atmosphère empestée, ne devait briller de tout son éclat et répandre tout son parfum que dans les jardins du Ciel. Le long martyre enduré sous une mère barbare avait miné ses forces ; les austérités du cloître achevèrent de les user. Elle s’éteignit doucement, au bout de peu de temps, en pardonnant à sa mère, et les anges fidèles, qui l’avaient consolée et soutenue dans le dur chemin de la vie, l’emportèrent morte sur leurs blanches ailes et la déposèrent au pied du trône de Dieu : il y avait une sainte de plus au Paradis.


    III

    Abandonné sans secours sur le sommet désert d’un mont, étroitement serré et emmailloté, exposé nuit et jour à la rigueur des intempéries, le diable se trouvait dans la situation la plus critique et la plus humiliante où fût jamais tombée une puissance déchue. Il pestait, maugréait, enrageait, pleurait, grinçait des dents, gémissait, se désespérait, séchait d’ennui, crevait de dépit, suffoquait de colère et de honte, et ne se soulageait un peu qu’en maudissant mille et mille fois toute l’engeance des filles d’Ève, toutes les normandes de Normandie et en premier lieu, la mère Rabat-Joie, ce monstre, cette harpie qui avait si indignement abusé de sa confiance et violé dans sa personne les droits sacrés de l’hospitalité.

    A l’aversion profonde qu’elle lui inspirait, se joignait maintenant, tout diable qu’il était, une frayeur extrême. La terrible volée de bois sec dont elle l’avait régalé, lui cuisait sur tout le corps, et il tremblait qu’elle ne revînt lui en servir une autre, celle-là de bois vert, très abondant en ces parages, pour qu’il pût faire la comparaison et juger de la différence. Mais elle s’en abstint par générosité naturelle et par grandeur d’âme.

    Quoiqu’elle affichât en toute occasion la haine et le mépris des hommes, la mère Rabat-Joie leur avait rendu, sans le vouloir, un inappréciable service, en les délivrant de leur plus cruel ennemi, de celui qui fut dès le principe l’auteur de tout mal, le tentateur des faibles, le corrupteur des bons, le grand semeur de zizanie, le fauteur des passions et des vices, l’instigateur des méfaits, le boute-feu des séditions et des guerres. Aussi, dès qu’il eût été réduit à l’impuissance et éloigné du théâtre de ses hauts faits, vit-on se produire, dans les idées, les sentiments et les mœurs, une transformation si générale et si merveilleuse, qu’il semblait qu’on retournât vers l’âge d’or. On eût dit le coup de baguette d’une bonne fée venant détruire l’œuvre perverse d’un mauvais génie.

    Les hommes cessèrent tout à coup d’être intempérants, dissipés et joueurs, les femmes d’être légères, médisantes et coquettes. L’union régna dans les familles, les hameaux, les cités. La fidélité conjugale, la pureté des mœurs, le respect pour les parents, le désintéressement, la bonne foi, la probité ne furent plus de vains mots. Les différends s’arrangèrent à l’amiable ; et même en Basse-Normandie, terre promise des gratte-papier et des plaideurs, on n’entendit plus parler de procès. Les juges oisifs baillaient d’ennui comme s’ils eussent été encore sur leurs sièges ; les avocats, condamnés au silence, se firent chartreux, et tous les suppôts de la chicane accomplirent des œuvres pies en expiation de leurs péchés.

    Plus de crimes, de vols, de guet-apens, de brigandage des gens de guerre, de tyrannie féodale, de révolte de serfs poussés à bout ; tout au plus, de loin en loin, quelque larcin commis par inadvertance ou quelque coup porté dans les ténèbres sans intention de nuire.

    A Domfront, ville de malheur pour ceux qu’on menait pendre, car on leur accordait à peine une heure pour se lester l’estomac avant d’entreprendre le grand voyage, à Domfront, dis-je, la potence devint un ornement inutile et les corbeaux des clochers et des tours y cherchèrent vainement leur pâture accoutumée.

    Le bourreau de Domfront, dont j’ai oublié le nom, était un homme doux, serviable, de joyeuse humeur et ami de la plaisanterie. Il se disait maître de danse, parce qu’il apprenait à ses clients à danser sous la corde dans la perfection ; il prétendait que sa potence l’emportait sur tous les pommiers et poiriers du Bocage, parce que ceux-ci ne donnaient des fruits qu’en automne, tandis que l’arbre de justice en portait de très mûrs en toute saison.

    Quand la besogne lui fit complètement défaut, ce brave homme perdit sa gaité et tomba dans la plus noire mélancolie. Il eût pu vivre honnêtement du métier de rebouteux où il était très habile ; mais il aimait passionnément son art, il regrettait ses chers pendus, et son désespoir fut tel qu’il se pendit lui-même.

    De même que les pendards manquèrent aux gibets, de même aussi les prétextes de guerre manquèrent à l’ambition des princes. Il soufflait de toutes parts comme une brise tiède de pacification et de concorde. Les épées rentrèrent au fourreau et les mains désarmées s’unirent dans une fraternelle étreinte. Les conquérants cessèrent de ravager et d’ensanglanter la terre, et la terre cessa de célébrer les exploits et la gloire des conquérants. Plus de tueries héroïques, de villes réduites en cendres, de troupeaux humains emmenés en servitude ; plus de soldatesque effrénée se ruant, comme une horde de démons, sur les populations inoffensives.

    On fut alors témoin d’un événement unique dans l’histoire, le règne trop court, hélas ! de la paix universelle. Ce beau rêve, qui ne prit corps que cette fois-là, a été depuis le thème de bien des discours, le sujet de bien des discussions, et il s’est trouvé récemment des esprits généreux et candides pour tenter d’en faire une réalité. Rien assurément n’est plus digne d’encouragement et d’éloges ; mais, tout en rendant hommage aux efforts et aux intentions de ces philanthropes émérites, je me permettrai de leur dire qu’ils n’atteindront jamais leur but par les moyens dérisoires et puérils qu’ils préconisent. Il n’y a, d’après mes faibles lumières, qu’un moyen pratique et sûr d’y parvenir, c’est celui qui fut imaginé par la mère Rabat-Joie et qu’elle sut appliquer avec autant d’à-propos que de succès.

    Le diable étant, en effet, l’éternel perturbateur de la paix entre les hommes, il importe avant tout, si l’on veut obtenir une paix durable, de le mettre dans l’impossibilité de la troubler. Je conseillerai donc aux vénérables apôtres de la paix universelle et perpétuelle, au lieu de s’attarder à des minuties, d’aborder la difficulté de front, de prendre le diable par les cornes, de le fourrer dans un sac et de l’y tenir dans une rigoureuse captivité. Mais surtout qu’ils veillent à ne pas le laisser échapper, car il recommencerait à faire des siennes et ce serait peut-être pis qu’auparavant.

    L’heureuse métamorphose qui s’était opérée dans les conditions morales de l’humanité, ne pouvait manquer de causer un juste étonnement et de mettre en éveil la curiosité publique. Tout le monde, en effet, fut frappé d’un changement si subit et si en dehors du cours naturel des choses, et chacun à l’envi tendait son esprit et aiguisait ses facultés pour tâcher de pénétrer la cause de ce phénomène psychologique. Mais ce fut en vain ; on eut beau hasarder des conjectures, former des hypothèses, on ne trouva aucune solution satisfaisante et il fallut jeter sa langue aux chiens.

    Afin de sortir d’embarras, on alla consulter les sophistes, gens très ferrés sur la métaphysique et qui dissertaient à ravir sur les effets et les causes. Les sophistes pérorèrent douze heures de suite sans reprendre haleine, parlèrent grec, latin et bas-normand, argumentèrent en *darii*, en *baroco*, en *baralipton*, remuèrent une montagne de textes, citèrent Aristote, Platon, Averrohès, Tertullien, Moïse, Hésiode, David et la Sibylle, l’Écriture et les Pères, la Loi et les Prophètes. Pour finir, car tout a une fin, même les divagations d’un sophiste, ils fournirent des explications tellement obscures, confuses, embrouillées, enchevêtrées, biscornues, stupéfiantes et abracadabrantes, que les auditeurs se sauvèrent, à moitié idiots, en se bouchant les oreilles.

    Il fut déclaré par sentence rendue dans les formes que les sophistes étaient des ânes bâtés, bons à porter les sacs au moulin, et qu’ils recevraient chacun une botte de foin à titre d’honoraires. Après quoi, l’on décida de s’adresser aux sorcières, personnes tenues en très haute considération, car elles passaient aux yeux du vulgaire pour savoir beaucoup plus que les sophistes et un peu moins que le diable qui avait été leur maître d’école.

    Les sorcières, s’étant fait payer d’avance en bonne monnaie ayant cours, se mettent vivement à la besogne ; elles rôtissent force balais, éventrent force crapauds, vont cueillir, au clair de lune, des herbes mystérieuses et des os de mort dont elles composent une étrange salade, marmottent des paroles cabalistiques et célèbrent des cérémonies bizarres pour lesquelles elles se font livrer une quantité fabuleuse de poules noires qu’elles mangent de fort bon appétit. Malheureusement pour ces filles d’enfer, elles avaient compté sur le diable pour les inspirer et leur dicter une réponse, et le diable étant empêché, comme on sait, elles ne firent que balbutier, bredouiller, ânonner, bafouiller, et restèrent honteusement à court. Convaincues de supercherie, de mensonge et d’imposture, elles furent rudement fessées, mais on leur fit grâce du fagot, ce qui était un signe non équivoque de l’adoucissement des mœurs.

    Après ce double échec, on fit partir des messagers pour aller interroger un vieil astrologue qui habitait près de Tinchebray une vieille tour en ruine, en compagnie des chats-huants et des chauves-souris. C’était l’homme le plus savant de ce temps-là et sa réputation était européenne, car elle s’étendait jusqu’à Falaise. L’astrologue, ayant caressé sa longue barbe blanche, commence par observer longuement les espaces célestes ; il se plonge dans de longs calculs, trace des figures avec un long compas et déclare d’un ton d’oracle que le phénomène sur lequel on l’interroge est dû à l’influence des astres et qu’il a pour cause première une conjonction favorable de je ne sais quelles planètes.

    Cette réponse est pour les messagers comme un trait de lumière ; ils demeurent en extase devant une science si profonde ; puis chacun s’en va répétant : « Il a raison ; ce doit être l’influence des astres ; c’est certainement l’influence des astres. » Et bientôt, de tous côtés, on n’entend que ces mots : « C’est l’influence des astres. »

    Pauvres gens qui, ayant le malheur de vivre à une époque d’ignorance et de barbarie, attribuaient aux astres une prétendue influence sur les choses d’ici-bas et allaient chercher très loin, au plus haut de la voûte des cieux, la raison d’un phénomène dont la cause était là, tout près d’eux, sans qu’ils eussent l’air de s’en douter !

    La mère Rabat-Joie dut bien rire en entendant vanter l’influence des astres, elle qui savait de quoi il retournait et qui eût pu, dès le premier jour, déchiffrer l’énigme mieux que tous les sophistes, toutes les sorcières et tous les astrologues ; mais elle était trop madrée pour en souffler mot, craignant non sans sujet que quelque curieux malavisé ne vînt rendre la liberté au vilain oiseau qu’elle avait tant d’intérêt à garder en cage.

    L’oiseau finit pourtant par en sortir, ou plutôt il en fut tiré, dans des circonstances peu ordinaires, par un personnage que je dois d’abord présenter au lecteur. Il se nommait le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille ; c’est ainsi du moins que le désigne l’anonyme, lequel ne fait pas difficulté d’avouer que ce n’était là qu’un sobriquet ou nom de guerre donné au Chevalier par ses compagnons de débauche ou de combat. Quant au vrai nom et au vrai titre, il refuse de les faire connaître par des motifs respectables de prudence et par égard pour la famille qui était l’une des plus puissantes de la noblesse normande.

    Le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille était un terrible sire, un colosse pour la taille, un Samson pour la force, et son aspect était si truculent qu’à l’exemple de certain gascon de Gascogne, il ne pouvait se regarder dans un miroir sans se faire peur à lui-même.

    Il ne fut pas toujours sans sou ni maille ; il avait été au contraire extrêmement opulent ; mais, si grande que fût sa fortune, ses passions et ses appétits étaient plus grands encore et l’entraînèrent à toute sorte d’excès, de prodigalités et de désordres. Le vin, le jeu et les filles étaient la seule trinité à qui il rendît assidûment hommage. Il mangeait son blé en herbe, ses bois jusqu’à la racine, ses villages morceau par morceau et dissipait en quelques semaines le revenu d’une année.

    Il existait alors en Normandie un vieux proverbe à l’usage de la bourgeoisie et des petites gens, lequel disait : Qui paie ses dettes s’enrichit. Le Chevalier, en avance sur son temps de plusieurs siècles, y avait introduit une très légère variante et lui fit dire : Qui s’endette s’enrichit. C’était presque la même chose, mais c’était tout le contraire.

    Je sais fort bien que la maxime : Qui s’endette s’enrichit, malgré son air absurde et paradoxal, forme aujourd’hui la base du système économique des nations civilisées. Toutes la mettent en pratique, empruntant à outrance, afin de s’enrichir sans mesure, et l’on en voit qui, chargées d’une dette écrasante, marchent aussi allègrement que le géant Atlas, lorsqu’il portait la Terre sur ses robustes épaules. Seulement, gare à ne pas broncher, car toute chute serait mortelle.

    Ce système, excellent pour les nations, parce qu’elles ont les reins solides et des grâces d’état qui leur sont spéciales, ne vaut absolument rien pour un particulier, fût-il baron ou duc, et notre imprudent Chevalier ne tarda pas à en faire la triste expérience. Il n’eut pas de peine à trouver des prêteurs, car s’il n’existait pas encore des banquiers israélites, il y avait à foison des usuriers juifs, gens forts expéditifs à plumer tout volatile qui s’abattait à portée de leurs mains rapaces.

    Il put donc s’endetter à son aise ; mais, chose surprenante, il n’en devenait pas plus riche. Bien au contraire, il s’appauvrissait de plus en plus, laissant chaque jour quelque plume grosse ou petite aux doigts crochus des fils d’Abraham : c’était un champ, un pré, un moulin, un coin de forêt, une métairie ou quelque autre lambeau de ses vastes domaines. A dire vrai, il n’y songeait guère et ne s’en inquiétait pas, tellement il était occupé à mener un train d’enfer et une vie bruyante et folle, tant il était absorbé par les plaisirs et les fêtes, par les parties de chasse, le jeu et les orgies.

    Enfin vint le moment fatal où, tout le reste ayant été dévoré, il lui fallut aliéner le dernier débris de son opulence, le château de ses nobles ancêtres, qui durent tressaillir d’horreur dans la tombe. Il se trouvait désormais entièrement ruiné, dépouillé, mis à nu, et cet aigle féodal, naguère effroi des campagnes, présenta l’aspect lamentable d’un grand oiseau déplumé à qui il ne restait qu’un bec énorme et des serres démesurées.

    Bec et serres ne demandaient qu’à s’enfoncer  dans une proie vivante et le Chevalier résolut de se servir de ces armes redoutables pour regagner sur les chrétiens ce que lui avaient pris les juifs.
     
    Sentant renaître en lui les instincts belliqueux de sa race, il recrute une bande d’aventuriers, de malandrins et de désespérés, tous gens de sac et de corde disposés à devenir des héros, se met à leur tête, dit adieu à son ingrate patrie et s’en va au loin offrir ses services aux rois et aux princes engagés dans des guerres.

    Aux combats et aux assauts il déploie une bravoure extraordinaire, toujours le premier à l’attaque, toujours le premier sur la crête du mur assailli.
     
    Le Chevalier et sa troupe passent comme une trombe à travers la bataille, renversant tout ce qui leur résiste et jonchant le sol de morts et de mourants.

    Après la victoire, le butin. Malheur aux populations qui se trouvent sur le passage de la bande infernale ! Elle ne respecte rien, ne connait ni amis ni ennemis, met tout à feu et à sang, viole, dévaste, massacre, emporte ce qu’elle peut et détruit le reste. La terre sur ses pas se change en désert.

    Cependant, contre toute attente, l’heure de la pacification générale a sonné. Il faut, la rage au cœur, s’arracher à la curée, renoncer aux combats et aux conquêtes, plier bagage et reprendre le chemin oublié de ses foyers.
     
    C’est ce que fait le Chevalier qui, parti pauvre pour la guerre, revenait aussi pauvre qu’il était parti ; et ce n’était pas, croyez-le bien, faute d’avoir volé, pillé et saccagé autant et plus que n’importe quel chef de bande, mais parce que l’or se fondait comme la neige entre ses mains prodigues.

    Voyageant à pied, car il s’était vu réduit à vendre son cheval, il se dirige vers le pays de Tinchebray, où il espérait trouver un asile, et arrive un beau matin au pied du mont de Cérisy qui, dressant sa masse sombre, lui barrait audacieusement  la route.
     
     
    Tout autre l’eût contourné, en prenant à droite ou à gauche ; mais le fougueux Chevalier abhorrait les détours, ne reculait devant rien et s’irritait contre tout ce qui lui faisait obstacle. Il crie au mont de se ranger ; le mont ne bouge pas.
     
    Eh bien, qu’à cela ne tienne, il lui passera sur le corps et lui fera sentir la vigueur de son bras ; il en a vu bien d’autres. Et le voilà qui se précipite sur le mont, furieux et le fer levé.

    Les fourrés impénétrables qui en hérissent les flancs ne lui opposent qu’une fragile barrière. Que pourraient-ils contre un preux habitué à traverser les forêts de lances et de piques ? Il se jette au plus épais, s’ouvre un chemin à grands coups d’épée qui retentissent jusqu’au fond de la gorge où roule le Noireau, et luttant victorieusement contre cette nature rebelle, il avance, monte, grimpe, gravit et atteint enfin le sommet, où ses regards tombent sur un objet informe qui remue et qui geint. Il s’arrête stupéfait.

    « Quelle est cette bête-là ? » se demande-t-il et, se penchant à terre, il reconnaît un sac soigneusement ficelé et quelque chose dedans qui s’agite et fait effort pour sortir. Il essaie d’entr’ouvrir le sac ; mais une vapeur méphitique qui s’en échappe, manque de le renverser et il le referme aussitôt. « Quelle est cette bête puante et nauséabonde ? » se demande-t-il de rechef. O prodige ! la bête se met à parler d’une voix dolente et faible comme celle d’un moribond. « Brave Chevalier ! murmure la voix, je t’en conjure par tout ce que tu as de plus cher sur la terre et en enfer, ouvre, ouvre vite ce sac où j’étouffe. Rends-moi la liberté et je te récompenserai dignement. »

    « Par les cornes de Belzébuth s’écrie le Chevalier, ta voix est celle d’un chrétien, mais tu ne l’es pas, je le jurerais, car un chrétien eût crevé dans une si étroite prison. Tu es certainement le diable et je suis ravi de faire ta connaissance. Mais, dis-moi, tison d’enfer ! par quel hasard es-tu ici à faire pénitence comme un anachorète, au lieu d’être à courir le monde en semant la discorde et en nous taillant de la besogne à nous autres, gens de guerre et de proie ? Qui t’a fourré dans ce sac ? »

    « Une femme, répond le captif, presque une belle-mère, car j’étais sur le point de lui donner un nom si doux. Cette créature infâme m’a tendu un guet-apens et m’a apporté garrotté dans cette solitude. Mais ouvre, ouvre vite, guerrier magnanime ! car j’étouffe. »

    Le guerrier magnanime, que cette aventure réjouissait fort, se livre à un accès de fou rire que le diable ne partage pas. « Ah ! tu t’es frotté aux femmes ! lui dit-il, il t’en a cuit et c’est bien fait. Ne savais-tu donc pas, imbécile, qu’une femme a plus de malice qu’un démon ? Et tu voulais même te marier, comme si tes cornes n’étaient pas assez longues ! Allons, je vais avoir pitié de toi et te tirer de ce mauvais pas, car tu as été diablement naïf et d’ailleurs il est écrit qu’il faut secourir ses semblables. » Et pendant que d’une main il se bouche les narines, de l’autre il coupe les cordes et ouvre le sac.

    Le diable en émerge lentement, engourdi, perclus, efflanqué, aminci, fluet, desséché, ridé, momifié, tanné, ratatiné et semblable à une de ces longues andouilles, qui pendent noires de suie aux vastes cheminées du Bocage. Il aspire l’air avec délices, s’étire, s’allonge, se secoue et tâche de dégourdir ses membres martyrisés ; sa force et son agilité reviennent par degrés ; il hasarde un pas, puis plusieurs autres, essaie une cabriole et s’apprête à prendre son vol ; mais il ne peut aller loin. Le Chevalier, qui avait son idée, l’avait saisi par la queue qu’il serrait fortement.

    - Tout doux, camarade, tout doux, lui dit-il. Ne sois pas si pressé ; on dirait que tu as le feu au derrière, toi qui le mets aux autres. J’ai infiniment du plaisir dans ta compagnie, et l’on gagne du reste à fréquenter les personnes de ta condition, quoiqu’elles ne sentent pas la rose. Avant de me priver de ta société, je dois t’adresser une prière que, je n’en doute pas, tu t’empresseras d’exaucer.

    - Fais vite et lâche-moi. J’ai hâte d’aller à mes affaires que j’ai négligées depuis un bout de temps. On me réclame de tous côtés et le monde soupire après moi.

    - Le monde soupire après toi comme l’agneau après le loup ou le débiteur traqué et aux abois après son féroce créancier ; il ne s’apercevra que trop tôt de ton retour. Ecoute-moi, voici ce que j’avais à te dire. Tu me dois de la reconnaissance, non pour t’avoir délivré, – je ne l’ai pas fait, crois-le bien, pour tes beaux yeux – mais à cause du grand nombre d’âmes que je t’ai envoyées à mainte reprise. Je conviens qu’elles étaient fort laides, car c’étaient des âmes d’aventuriers ; mais je ne pouvais mieux faire, à moins de t’envoyer la mienne dont tu n’aurais pas voulu. D’autre part, je n’ai pas à t’apprendre que je suis gueux comme le saint homme Job dont les compatriotes m’ont plumé tout vif, et tu le sais d’autant mieux que je te loge depuis longtemps dans mon escarcelle, ce dont je me serais volontiers dispensé. Fais-moi donc la grâce de me prêter sur ma mine une petite somme qui me permette de redorer mon blason et de satisfaire mes goûts qui, je t’en préviens, sont immodérés et insatiables. J’ai dit.

    - Fort bien, lâche-moi et je t’apporterai tout l’argent que tu pourras désirer.

    - Nenni, nenni ; nous sommes normands en Normandie, je veux dire méfiants et soupçonneux. Nous pratiquons le sage proverbe : Mieux vaut tenir que courir ; et puisque je te tiens par le bon endroit et que je n’ai pas envie de courir après toi, ce qui serait courir après le vent, je ne te lâcherai que quand tu auras lâché la petite somme que j’implore de ta générosité.

    - Mais que veux-tu que je te donne, bourreau ? Tu le vois, je n’ai rien ; j’ai eu des malheurs ; j’ai éprouvé de grosses pertes d’argent. Le percement du Panama infernal a percé et vidé ma bourse, et elle est restée aussi plate que si tous les juifs de l’enfer y avaient passé. Regarde-moi, ai-je l’air d’un Crésus ? Je ne suis qu’un pauvre diable sans sou ni maille comme toi.

    - A d’autres avec tes jérémiades, faux indigent ! Je n’en croirai pas un traître mot, car tu es le père du mensonge et tu mens par la gorge comme un chevalier félon. Tu dois avoir un magot quelque part, et tant que tu ne l’auras pas déposé tout entier entre mes mains loyales, je m’attacherai à ta queue et ne te lâcherai pas d’une semelle. »

    Le dialogue se poursuit sur ce ton et menace de s’éterniser. L’un exige avec arrogance, l’autre refuse avec opiniâtreté. C’est à qui n’en démordra pas, à qui montrera plus d’obstination. Jamais breton bretonnant ou mulet d’Auvergne ne fit preuve d’un entêtement pareil. Las enfin de piétiner sur place, ils se mettent en route sans but déterminé, le diable faisant des efforts inouïes pour se dégager et le Chevalier lui marchant sur les talons, la queue du prisonnier serrée dans sa main comme dans un étau, et lui caressant de temps à autre l’échine à coups de plat d’épée, qui seuls avaient le don de le ramener au calme convenable à sa situation.

    Le Chevalier avait un poignet de fer ; il eût arrêté instantanément une meule de moulin ou un attelage de six chevaux ; et d’ailleurs rien ne double les forces et l’énergie d’un homme comme le manque d’argent et le besoin impérieux de s’en procurer. Le diable ne put jamais lui faire lâcher prise, et il fallait que sa queue fût solide comme un câble pour ne s’être pas rompue dix fois sous les violentes secousses qu’elle eut à supporter.

    Tous deux errent ainsi longtemps à l’aventure. Ils vont en amont, en aval, à droite, à gauche, en avant, en arrière, décrivent des courbes et des zigzags, franchissent des rivières, traversent les hameaux et les bourgs, tandis que les bons villageois se mettent curieusement aux portes ou interrompent leurs travaux champêtres et regardent passer, tout ébahis, le Prince des ténèbres respectueusement suivi de son fidèle caudataire.

    Si l’on s’en rapporte à la tradition, c’est pendant cette pérégrination fantastique que le malin esprit creusa, par vengeance et malice, les innombrables fossés qui, dans ce pays-là, usurpaient le nom de chemins et qui, fangeux en toute saison et presque impraticables, ont fait damner durant des siècles charretiers et piétons.

    Quoiqu’il fût parti avec la ferme volonté de ne pas céder, le diable éprouva en route divers accidents qui ébranlèrent sérieusement sa résolution. A Landigou il faillit se casser le cou ; à Landisacq il perdit son bissac ; à la Lande-Patry il le retrouvit ; à Claire-Fougère il chut sur le derrière ; à Crasménil il chut sur le nombril ; à Mille-Savates il s’écorchit les pattes ; à Sainte-Honorine il faisait piteuse mine ; à Echalou il était à bout ; enfin à Monci il cria merci.

    Il était temps, car la queue, si dure, fibreuse et coriace qu’elle fût, menaçait de se détacher à force d’être secouée et tiraillée en tout sens. Et que serait devenu son prestige s’il avait eu le malheur de la perdre ? Se figure-t-on un diable sans queue ? On l’eût partout montré au doigt ; il eût été honni, déshonoré, exclu de la bonne société, livré à la risée publique, et il n’aurait eu d’autre ressource que d’abdiquer et de se faire ermite, quoiqu’il se sentît encore trop jeune pour cela.

    Il se résigna donc, fit taire son orgueil ulcéré, se rendit à discrétion et, toujours tenu en laisse, conduisit son acharné persécuteur à une carrière abandonnée du mont Crespin, entre Flers et Tinchebray, où, dans une excavation habilement dissimulée, il lui montra un trésor qui eût fait la fortune d’un monarque. C’était sa cassette particulière ; c’est là qu’il puisait, quand, pour faire réussir un plan, il avait besoin de corrompre, de suborner et de séduire. Ce trésor provenait d’un juif de Germanie qui avait été son ami intime et dont il favorisa les opérations véreuses jusqu’au jour où, le trouvant riche à point, il lui tordit le cou et s’appropria son bien.

    Le Chevalier fut ébloui à la vue de tant d’or, mais il fut surtout enchanté d’en connaître l’origine et de pouvoir prendre sa revanche sur la race papelarde et pillarde qui l’avait détroussé. Pour témoigner sa reconnaissance au diable, il lui applique plusieurs coups de pied bien pointus sur la double proéminence postérieure ; puis il le lâche. L’autre, sans demander son reste, ne fait qu’un bon jusqu’aux frontières de son empire ; mais il n’y rentre pas en triomphateur, comme il s’en était flatté, lorsqu’il espérait y emporter une sainte toute en vie. Berné et battu par la mère Rabat-Joie, battu et dévalisé par le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille, il s’y glisse tout penaud, l’oreille basse et la queue entre les jambes, et s’en va soigner son royal appendice meurtri et disloqué, ce qui donne encore quelque répit aux humains.

    Son retour dans le monde fut signalé par un coup d’État, qui mit fin au règne éphémère du bien et restaura l’empire antique du mal. Le vice reparut ; les instincts pervers se réveillèrent ; l’ambition gronda de nouveau et la discorde ralluma ses torches. Les désordres, les révolutions et les guerres reprirent de plus belle et se déchaînèrent avec une fureur croissante. Ces fléaux n’ont cessé depuis lors de désoler la terre et ils ne disparaîtront que le jour, très éloigné, je pense, où les apôtres de la paix universelle auront trouvé le secret de nous ramener l’universelle concorde, qui fait universellement défaut dans ce pauvre Univers.

    Le Chevalier se  disposait à recommencer sa vie de scandale, lorsqu’il fut tout à coup éclairé par un rayon de la grâce divine. Il se convertit et renonça à la voie de perdition pour entrer dans celle de la pénitence et du salut. Les prières d’une sainte qui, du haut du Ciel, veillait sur ceux qui, même par des moyens peu corrects, combattaient l’esprit des ténèbres, contribuèrent beaucoup à cette conversion qui fit grand bruit dans toute la chrétienté et fut mise au nombre des miracles.

    Devenu aussi humble et doux qu’il avait été orgueilleux et violent, il prit l’habit religieux dans l’abbaye de Belle-Etoile, consacrant à de bonnes œuvres et purifiant par ce pieux emploi le trésor qu’il avait extorqué au diable et qu’il n’eut garde de lui restituer. Il fit d’importantes donations à cette abbaye et de riches présents au monastère du Mont-Saint-Michel ; il bâtit des églises, créa des léproseries et des hospices, racheta des captifs et fonda sur le mont de Cérisy un ermitage en commémoration de la victoire qu’il avait remportée sur Satan et qui fut la dernière et la plus éclatante de ses victoires terrestres. Il mourut comme un saint après avoir longtemps vécu comme un damné.

    Si les prières de Mariette furent assez puissantes pour obtenir la conversion du Chevalier, elles n’eurent pas le même effet sur sa mère, dont la méchanceté, défiant la grâce et les miracles, augmentait à mesure qu’elle avançait en âge et qui de diablesse aux trois quarts devint diablesse tout-à-fait. Aussi, lorsqu’elle délivra le monde de sa présence, s’en alla-t-elle tout droit vers l’enfer, seul endroit digne de lui offrir un gîte. Mais Satan, instruit de son approche, fut saisi d’une telle épouvante, qu’il fit fermer et barrer à la hâte toutes les portes de l’infernal séjour. La mère Rabat-Joie se trouva dans le plus grave embarras. Aller au Ciel ? Il n’y fallait pas songer ; elle en eût fait un enfer, et d’ailleurs le portier saint Pierre lui en interdisait sévèrement le seuil. Retourner sur la terre ? Cela présentait des difficultés. Elle prit donc le seul parti qui restât à prendre : elle se réfugia dans le Purgatoire.

    La façon dont le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille gagna un trésor en s’attachant à la queue du diable fut d’un exemple pernicieux, car elle suscita et suscite encore une foule d’imitateurs. Tous les besoigneux, les gens criblés de dettes, les commerçants dans la détresse, les spéculateurs ruinés, les joueurs malheureux, les auteurs crottés, les viveurs sans le sou, les ménages dans la gêne, tous ceux, en un mot, que tourmente le mal d’argent, et ils se nomment légion, se sont accrochés désespérément à cette queue mirifique, dans la persuasion qu’elle les tirerait de misère et les mènerait à la fortune. Aucun n’a découvert le moindre trésor ; tous, au contraire, ont peiné comme des galériens, sué, ahané, reçu force ruades et coups de corne. Mais, en dépit des déceptions et des déconvenues, ils y reviennent sans cesse comme les mouches au gâteau de miel. Tellement est puissant et tenace l’espoir de trouver de l’argent chez eux qui en sont dépourvus !

    Et maintenant, comme à toute histoire, conte ou légende, il faut une moralité, j’énoncerai la mienne sous la forme d’un conseil amical à l’adresse de ceux qui auront eu la bonté de me lire et la patience d’aller jusqu’au bout.

    Soyez, leur dirai-je, économes, sobres et prévoyants ; ménagez vos ressources ; mesurez vos dépenses à vos moyens ; ne cédez pas aux entraînements du jeu ; fuyez les cafés, brasseries, estaminets et autres lieux de dissipation et de buverie, où s’engloutit tant d’argent péniblement gagné ; tenez-vous en garde contre les coupeurs de bourse qui vous guettent au coin d’une réclame alléchante ou d’un prospectus insidieux ; ne risquez pas votre faible nacelle sur cette mer perfide de la finance, toute peuplée d’écueils, de requins et de forbans ; ne souffrez pas que vos fils compromettent votre fortune par leurs folies, que vos femmes et vos filles vous ruinent en parures frivoles et en toilettes extravagantes ; faites enfin tout au monde pour ne pas être réduits à la tâche ingrate, fatigante, écœurante et , en somme, inutile de tirer le diable par la queue.

    A. ALMAGRO.

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    table des auteurs et des anonymes

     

     

     

    http://www.bmlisieux.com/archives/almagro.htm

     

    http://www.france-pittoresque.com/spip.php?article5635

     

     

     

     

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  • L’homme du mystère

     

    1963. Un proche de confiance d’André Malraux, André Malraux (1901 – 1976, romancier français et homme politique étonnant), alors ministre des Affaires Culturelles, aurait instruit une demande d’informations concernant des documents historiques et archives à propos du secteur de Rouen et alentours.

     

    Connu sous la référence de ‘Lazare’, ce dossier semblait tenir à cœur monsieur Malraux qui aurait souhaité la plus grande discrétion dans cette affaire. Ainsi auraient été rassemblés des écrits importants sur certains aspects du passé historique de Rouen, de ses lointaines origines jusqu’au 17e S.

    L’énigme du dossier Lazare

    Le dossier ‘Lazare’ aurait fait pour la circonstance, et c’est une innovation en la matière, partiellement appel à des archives et collections privées (Maurin, Bautre, Perchaud-Vattoux, Joceran Urachet et Cobourg). Le 24 mars 1965 l’étude documentaire fut déclarée close et le dossier ‘Lazare’ classé ‘sans suite’ brutalement sans la moindre explication… Tout aurait dû, et pu, en rester à ce constat d’archiviste. Et pourtant! Pourtant le dossier ‘Lazare’ ne sera jamais officiellement répertorié. De plus, l’identité de ce ‘proche collaborateur de confiance’ de Monsieur Malraux ne sera jamais connue. Mais plus insolite encore :

     

    les responsables chargés de constituer et instruire ce dossier fantôme, messieurs Henri Cabanaret et Christian Eylauth, semblaient être inconnus des registres du personnel des Affaires Culturelles, ni même inscrits aux intervenants extérieurs ou ponctuels. On ne retrouvera jamais leur trace… si tant est que ces identités soient réelles et bien à eux. Mais la surprise continue : le dossier ‘Lazare’ ne sera jamais retrouvé ou… accessible. ‘On’ le prétendra égaré jusqu’en 1976, puis dès le début 1977 il sera affirmé froidement que cette référence n’a jamais existé et qu’il s’agit d’une erreur d’écriture ou d’une fausse information.
    Observons qu’André Malraux décède à l’hôpital de Créteil le 23 novembre 1976. De fait plus personne, dès cette date, ne peut donc justifier les motifs troublants du dossier ‘Lazare’… et nous n’aurions, en toute logique, jamais dû, ou pu, avoir connaissance de cette histoire pour le moins curieuse. Pourtant, fort heureusement, un chercheur journaliste (D. REJU) semblait, à cette époque, avoir d’excellentes raisons de suivre toute cette affaire au plus près possible. Depuis ce qui reste de ses notes nous aborderons les aspects recherchés par A. Malraux dans l’Histoire de Rouen et faits insolites de son passé pouvant être liés au pourquoi de l’étrange dossier ‘Lazare’. Réju aurait réussi à retrouver l’intitulé d’un des documents ‘perdu’ et quelques passages recopiés en leurs temps: le fameux ‘Leg Martel’ dont nous retrouverons effectivement les références au long de ce travail. Mais alors... que cherchait donc monsieur le ministre André Malraux? Que pouvait-il y avoir de si important qui nécessite ce luxe de précautions pour le moins insolites, alors que sa fonction même lui permettait ouvertement d’aborder le sujet?

    Rouen

    L’occupation des rives de la Seine dans ce secteur remonte aux origines de l’Homme. Rotomagos, pour les Véliocasses, deviendra sous l’empire romains capitale d’une circonscription administrative connue sous le nom de ‘Seconde Lyonnaise’. Deuxième ville de France au 13e S., son Histoire plonge ses racines dans un passé tourmenté, violent, émaillé de personnages et d’événements tous plus insolites et énigmatiques les uns que les autres. Peut-être est-ce passé étrange que souhaitait étudié Monsieur Malraux?
    Mais plus intéressant encore: C’est à Rouen que Chilpéric 1er célébrait ses noces, en 560, avec Galwinte. A cette occasion il en aurait profité, selon la chronique de Dom Quarin (720), pour dissimuler des biens de grande valeur dans une abbaye locale. Ce même texte affirme que l’évêque Prétextat savait l’emplacement du royal dépôt. On peut alors se demander si Frédégonde le fera exécuter, dans sa cathédrale, pour être la seule à connaître la cache fabuleuse ou, comme le prétendent les historiens, pour avoir célébré le mariage de Sigebert et Brunehaut en 566. Détail bien sûr, mais qui pourrait avoir son importance dans d’autres affaires où Sigebert prend une place prépondérante...dans l’énigme des rois mérovingiens par exemple.
    Puis Rouen sera le théâtre de combats incessants. D’abord contre les Normands (841-876), puis sous l’autorité des Ducs de Normandie jusqu’à ce que Philippe Auguste l’enlève aux Anglais en 1204… rien n’épargnera la cité sur les murs de laquelle une multitude de noms et faits historiques s’inscriront en lettres de sang : Alain Blanchard (1419), Jeanne d’Arc (1431), Charles VII (1449), Antoine de Bourbon, Montgomery, François de Guise (1562), Henry III (1588)… et ainsi jusqu’aux redoutables bombardements de 1940. La ville se relèvera toujours avec force et courage de ces dévastations. Mais Rouen retint-il l’attention d’André Malraux pour ces seules raisons? Probablement pas. Observons, à présent, l’aspect ‘trésoraire’ de cette cité. Vers 1970, des ouvriers, à Fécamp, découvrent un vase contenant pas moins de trois mille pièces d’or. Ils viennent de mettre à jour le trésor des ducs de Normandie. Les experts supposèrent qu’il s’agissait d’un des plus importants trésors mis à jour.

    De la source Gaalor aux Nazis...

    Le donjon restera le seul vestige sous le nom de ‘Tour Jeanne d’Arc’ par analogie avec la tour (détruite) où elle était captive. On sait que le donjon contenait un puits très profond alimenté par la source Gaalor. Durant la dernière guerre la Gestapo s’installe en ces lieux et fait creuser une galerie au bas du puits… pour le raccorder aux égouts médiévaux. Cet intérêt pour les travaux d’égouts de la part des Nazis est une chose assez inhabituelle pour que l’on en cherche la véritable raison. Une réflexion simple serait à faire et qui pourrait bien apporter de nouvelles pistes à cette énigme : Superposer le vieux tracé de Château-Bouvreuil avec le cadastre actuel. Le report se trouverait dans un secteur délimité par les rues Jeanne d’Arc, Philippe-Auguste, rue du Donjon et Morand. Selon toute logique le butin huguenot pourrait se situer dans ce périmètre. Les fouilles archéologiques de 1907 mirent à jour les fondations de la ‘Tour de la Pucelle’… que l’on peut toujours voir dans la cour du 102 rue Jeanne d’Arc.
    Plus près de nous, vers 1967, des travaux de terrassement dégagèrent une galerie souterraine vers la rue du donjon. Deux ouvriers y descendront et auront le temps de remonter 2 pierres plates sur lesquelles figure la gravure de deux plantigrades tirant sur une sorte d’ovale rayonnant (Retain) ; un amateur y descendra aussi et y réalisera plusieurs clichés photographiques. Si l’on en croit le vieux texte ‘Leg Martel’, la superposition des tracés, et les découvertes fortuites dans certaines autres caves “ ly cavave ou imanse et moult thrésor pose ” pourrait se situer dans le secteur défini par la rue du Donjon et rue Philippe Auguste à une profondeur relativement accessible, et dans la direction des fameux égouts dégagés par les Nazis…

    Le savoir de Frédégonde

    A ce trésor s’en rajouterait un autre. Il serait question, en résumé, à nouveau de la cache utilisée par Chilpéric. Il est clairement précisé que ce prince usa d’une sorte de tombe royale (notons cependant qu’aucun roi ne fut enseveli officiellement à Rouen à cette époque) où se trouverait la ‘coiffe’ (ou couronne) du mythique roi ‘Artus’ (sans h). Si l ‘on considère qu’il y a analogie entre Arthus (celui des romans) et le symbole de l’Ours (plantigrade), les pierres gravées de la galerie rue du Donjon prennent ici toute leur valeur! Si la déduction est séduisante et simple, il faut pourtant reconnaître qu’aucune tradition, ou textes, ne font mention de la ‘coiffe’ d’Artus, et encore moins de Rouen dans les romans arthuriens… à moins bien sûr que cette chevaleresque relique puisse avoir un rapport avec le légendaire dépôt de Chilpéric (lien avec l’Ariège ?) dont le secret aurait été scellé par le silence de Prétextat imposé par le crime de Frédégonde? Si tel était le cas il serait possible que monsieur Malraux en ait eu connaissance par sa fonction, et qu’il ait également pu concevoir une suite sous... Gisors comme nous le verrons plus loin?

    Des souterrains ésotériques de Rouen à l’église templière de Montsaunès?

    Le tout rejoindrait-il une étrange tradition oubliée, ou occultée, liée à la ville de Rouen et qui se résumant à ceci : au début était la pierre et Mitra. Le fer des dieux traça la première église et mit sous terre la pierre mithraïque sans la détruire par l’intervention de St Marty. Puis le fer devint l’articulation d’ouverture sur la clarté divine grâce au passage obligé sous l’égide de St Christophe-Loup. Ce dernier animal totémique se superposa à l’Ours d’Artus et à sa couronne rayonnante. Avec un tel canevas rien d’étonnant si les dépôts, et la crypte de Notre-Dame, se placent sous le signe du sacré et divin. Rien d’étonnant, non plus, à ce que Chilpéric I choisisse ce lieu pour y entreposer ‘certains biens’ qui deviennent alors des ‘biens certains’; ni non plus à ce que le silence, seul, protège et recouvre ce secret à jamais enseveli… Enfin encore un petit détail : c’est le 22 mai 1814 qu’au cours de travaux, rue St Romain, fut mis à jour une sorte d’oratoire souterrain de petite dimension. Le propriétaire des lieux ne s’en émut pas outre mesure car la cavité ne contenait que peu de choses. C’est un de ses amis, E. Coudan, qui en fera un croquis complet et relèvera sur la paroi Ouest un bas-relief dont il laissera un ‘frotté’ bien lisible représentant une pesée des âmes sous la directive d’une créature à tête de chacal (avec les oreilles pointues et dressées). En France, à notre connaissance, ce serait le deuxième site religieux, avec l’église templière de Montsaunès, où cette représentation fut réalisée. Volonté d’illustrer une ‘Eglise d’Orient’, une déviation de la tradition, une fantaisie ponctuelle… ou une mémorisation d’un détail essentiel d’une connaissance gênante ou occultée ?... recherché par André Malraux!

    Le Saint Objet N° 431

    Mais ceci est une autre histoire. Une autre histoire de Rouen - recherchée pour le dossier Lazare- ayant pour dernier témoin la fameuse ‘Capsule Reliquaire’ ne contenant pas moins que les reliques : du Mont Calvaire, du Sépulcre, de la table de la cène, de la pierre du Mont Calvaire, de l’éponge, et, en rajout, de l’Irlandais St Eude ! On croit rêver devant ce reliquaire formidable d’inspiration byzantine, donc orientale, et, ajoute une autre tradition, sous l’impulsion de l’Ordre du temple. La retouche de la Capsule daterait de 1312 (Répertoire manuscrit- A. Deville – 1842) Le saint objet était toujours déposé au Musée Départemental des Antiquités en 1842 sous le n° 431. Mais à bien y réfléchir… les reliques ‘du Mont Calvaire’, ‘du Sépulcre’, ‘de la Table de la Cène’, de la Pierre du Mont Calvaire et d’un saint irlandais… ne nous font elles pas songer irrésistiblement à certains détails du passé de Périllos ?

    La veille du 13 octobre 1307

    A ce propos revenons à la veille du 13 octobre 1307. Les dignitaires de l’ordre ‘savaient’ l’arrestation massive prévue pour ce jour fatidique. Il leur fallait mettre à l’abri les documents et valeurs tenues dans l’enclos du Temple de Paris. Donc, le 12 octobre 1307, trois chariots escortés solidement de ‘cinquante chevaux’ quittent Paris en direction de la côte. Ce sont les archives et les coffres contenant le trésor du Grand Visiteur de France qui fuient vers… ‘18 navires’ de l’Ordre. Ce récit est authentifié par la déposition de Jean de Chalon du Temple de Nemours, faite devant le pape fin juin 1308. Cette déposition (archives du Vatican), porterait la cote “Register AVEN, N°48 Benedicti XII, Tome I, folio 448-45”. Si un tel sauvetage était prévu, la seule et plus rapide route vers la côte, passe par Rouen pour atteindre le Tréport. L’ordre utilisa t’il cette voie malgré les risques d’une surveillance accrue des hommes de Nogaret ? Au point où ils en étaient les Templiers pouvaient courir ce risque. Mais voilà… les chariots se volatiliseront, et nul ne saura ce qu’ils sont devenus. Deux solutions seulement, dans ce cas, peuvent être retenues. D’abord un passage en force et l’embarquement au Tréport (canton d’Eu et... retour au fameux cabochon reliquaire?) en utilisant la route templière de Rouen. Ensuite un arrêt plus sûr, et inattendu, dans le secteur de Rouen : la tradition, et Gérard de Sède, opteront pour le dépôt du trésor à Gisors, c’est à dire à peu de distance de Rouen.

    Où il est maintenant question de Gisors

    Maintenant restons à notre époque et sur une autre action du ministre A. Malraux. Arrivé à Gisors, en 1929, un certain Roger Lhomoy y conduira des recherches, certain de savoir que le formidable secret dort sous le donjon de Gisors. Ici encore les Nazis sont déjà passés et ont cherché quelque chose… En 1946 Lhomoy déclare en mairie avoir découvert une crypte contenant 30 coffres. L’homme sera renvoyé et sommé de ne plus poursuivre ses ‘délires’… Mais ce chercheur obstiné poursuit ses travaux, jugés par tous comme l’œuvre d’un déséquilibré, qu’il abandonnera définitivement un peu plus tard.. Pourtant, en 1962, les Affaires Culturelles, sur ordre de son ministre André Malraux, fait poser les scellés sur le donjon de Gisors.

    L’étrange intervention de ‘la grande muette’

    Puis fin septembre ce Ministère ordonne à un régiment du Génie d’entreprendre des fouilles pour retrouver et “mettre à jour les vestiges d’une ancienne civilisation inconnue”. Cette définition à de quoi laisser perplexe car d’une part on peut se demander ce qu’est cette dite civilisation... ensuite pourquoi, et sur quelle information, elle est qualifiée d’inconnue...car si on semble tout ignorer d’elle, comment André Malraux en sait-il l’existence???? ! La suite est remarquable et Monsieur A. Malraux suivra l’affaire avec le plus vif intérêt: les journalistes seront tenus à l’écart de certains détails et la télévision ne sera jamais autorisée à filmer les fouilles. Quant à la Franc-Maçonnerie, qui curieusement s’intéressera de très près à cette affaire, ses responsables déclareront que cette énigme ne “regarde pas le grand public” ! Sur quels critères ces dignitaires pouvaient-ils s’appuyer pour affirmer une telle chose?
    Quoiqu’il en soit le 10 février 1964 le 12e Régiment du Génie entame les fouilles du donjon et monsieur Malraux, le 12 mars, annoncera le résultat négatif des recherches. On note, dans les rapports de fouilles, que nulle part on ne retrouvera le terme ‘civilisation inconnue’. Pire encore, les résultat seront rendus de manière laconique en affirmant plus simplement ‘qu’il n’y a rien sous la motte féodale de Gisors’... On ne peut que souligner dans ces comptes rendus un nombre important d’oublis, de changement d’opinion, d’incohérences et un volonté farouche à vouloir minimiser à l’extrême ce qui aurait été découvert par ce régiment du Génie. Nous pouvons sur ce registre souligner qu’habituellement les fouilles archéologiques sont confiées à des archéologues patentés ayant obligation de rendre publique des rapports complets sur leurs travaux. Or dans ce cas on ne peut qu’être surpris que ces travaux soient réalisés par des militaires, même si ceux-ci (régiment du génie) s’en acquittent correctement sur un plan technique. Cependant la démarche prendrait tout son sens si A. Malraux veut occulter ces recherches. En effet dès l’instant où nous avons à faire à l’armée et il est évident que les officiers durant toute cette mission ne laisseront rien filtrer de ce que découvre leurs hommes... et surtout les militaires sont tenus au ‘devoir de réserve’... et les rapports seront uniquement remis à l’autorité ministérielle concernée, donc jamais divulgué aux médias! On peut affirmer qu’il y a dans cette démarche d’André Malraux une volonté implacable de conserver les découvertes pour le seul usage de l’Etat... et on ne peut que supposer des raisons très graves ou capitales pour justifier un tel luxe de sécurité!
    Dans la chronologie de son passé, et de son présent, Gisors semble bien avoir suivi les mêmes constats que certains sites de Rouen, des bijoux mérovingiens aux recherches de 1950… et c’est sans doute ce que pensera Monsieur le Ministre des Affaires Culturelles en étant très ‘bienveillant’ à propos de l’énigmatique dossier ‘Lazare’ qui concernera Rouen.

    De Gisors à Salses via Rouen ?

    Mais ce n’est pas tout... Dans la foulée monsieur Malraux, après s’être intéressé à Rouen et Gisors, s’oriente tout à coup et sans explications vers la région du Languedoc. Son intérêt se porte particulièrement sur le secteur roussillonnais et la région de Salse. Il serait allé droit au but en réclamant, sans préambule, les plan les plus anciens du château de Salse, l’un des plus remarquables ouvrage d’art militaire en matière de forteresse défensive liée à l’artillerie.
    Visiblement, les documents qu’il obtient de ses services ne semblent pas le satisfaire. Il réitère sa demande en la précisant encore plus: il souhaite les tracés souterrains des arrivées d’eau du fort. Mais ces plans n’existent plus ou restent introuvables ou très incomplets. A l’évidence monsieur le Ministre ne devrait pas avoir de difficultés en réclamant rapidement des relevés réalisés sur sa demande. Pourtant il ne pourrait s’agir, même avec la plus grande minutie, que d’un relevé ‘d’état des lieux actuels’, et visiblement ce n’est pas ce qu’il cherche. Les services compétents s’aperçoivent alors que ces archives ne furent jamais en leur possession, sans doute conservées par les autorités catalanes ou espagnoles au moment du rattachement du Roussillon à la France (17ème siècle). Aussi notre ministre en place se serait-il adressé, tout naturellement à son homologue espagnol. Mais si cette démarche semble curieuse (seul intérêt pour les arrivée souterraines d’eaux sous le château) la réponse l’est encore plus! Certes sous une forme diplomatique et courtoise, le sens général de la décision du ministère espagnol peut laisser perplexe... la réponse se résumerait à l’impossibilité de donner satisfaction en raison du fait que ces informations seraient classées ‘confidentiel défense’! Jamais monsieur Malraux n’aura ses renseignements... du moins officiellement! Cet échange est tout aussi intriguant dans le sens de la demande que de la réponse. En effet ces infos sont du seul ressort de l’archéologie et il n’y a là, du moins en apparence, rien de bien mystérieux... de plus il n’y avait plus à cette époque le moindre risque de guerre sur les lieux entre l’Espagne et la France. L’énigme resterait entière... si on ne savait pas que les adductions d’eau du fort de Salse prennent leurs sources sur le secteur d’Opoul et Périllos!.. et qu’une gigantesque résurgence, toujours près de Salse, proviendrait d’un véritable fleuve souterrain dont les sources se situeraient sous Bugarach !

    Du secret détenus par quelques personnes

    Gageons que le ministère devait avoir de sérieuses raisons de s’investir dans cette affaire... raisons qui resteront sans doute à jamais sans réponses décisives.
    On sait les expériences actuelles (le satellite KEO et l’opération CHRONODROME) près du plateau de Périllos concernant un incroyable (engagé par des scientifiques) voyage dans le temps aboutissant à un rendez-vous fixé pour 50 ans le 1er mai de chaque année... ainsi que la possible existence de plusieurs sites lié à un fabuleux secret pour lequel quelques services fonctionnaires semblent avoir une certaine attention (radar météo? transformateurs d’énergies électriques parsemés discrètement? accidents d’avions? dispersion de documents administratifs anciens? surveillance étroite?). De ces constats d’actualité peut-on supposer que ces mêmes services fonctionnaires puissent être à l’affût d’informations sur le sujet depuis de longues décennies? Ou, pourquoi pas, que depuis de longs siècles un savoir ait été protégé sur ce sujet... puis qu’il se soit partiellement perdu... pour ressurgir à notre époque?...Ou encore que quelques personnages, soigneusement sélectionnés, aient été mandatés afin de poursuivre, engager ou enquêter sur ces affaires? Que ces personnages aient pu, selon leurs fonctions, disposer d’un savoir d’anticipation leur permettant de distancer, certains autres chercheurs, toujours d’une bonne longueur d’avance?.. et qu’il soit maintenant l’heure pour eux de rassembler les éléments épars de ce SAVOIR en d’anciennes caches comme... Rouen, Gisors, Falaise et enfin Salse et le secteur d’Opoul-Périllos via Rouen et Toulouse... oui, pourquoi pas?

    A Lazare des hasards de monsieur André Malraux

    Mais faute de réponses précises revenons sur quelques autres détails insolites de la vie d’André Malraux, et plus particulièrement dans ses ouvrages littéraires.
    En 1933 dans son extraordinaire ‘La Condition humaine’ (Prix Goncourt) son héros à pour nom KYO. On retiendra déjà l’étrange similitude entre ce nom et celui de l’expérience... KEO. Evidemment ce pourrait être là le seul fruit du hasard et il ne saurait être question de mystère sur un seul fait. Pourtant nous irons plus loin dans notre perplexité en lisant, dans ce livre, que la première compagne de KYO s’appelle MAY (le rendez-vous du voyage dans le temps est fixé au 1er mai!) Et surtout que son père a pour nom… GISORS! Ajoutons que 70 ans sépare cet ouvrage de l’affaire de Périllos et 30 ans d’intervalle avec celle de Gisors dans laquelle A. Malraux ministre en place, impliquera pour son ministère, et sans justification, l’action de l’armée... De plus ce roman essentiellement politique se déroule à Chang-hai en 1927. Or si Kyo peut, à la rigueur, être pris pour un prénom asiatique il n’en ait rien pour May et pire encore pour Gisors qui est très loin d’être un prénom commun en extrême orient! Prémonition? Savoir d’initié?… Le hasard?… ou… ‘Lazare’ et son symbole de résurrection?
    Autre surprise: sur ce registre nous ajouterons qu’en 1974 André Malraux signera un ouvrage intitulé LAZARE… Un critique dira à ce sujet que « la réussite du roman d’A. Malraux tient à un jeu subtil entre l’illusion réaliste et les références symboliques ».

    Des trésors et une énigmes oubliés

    Toujours est-il que ce ministre des Affaires Culturelles s’intéressa principalement, et bien curieusement, à l’archéologie et à l’Histoire de nos trois sites : Gisors, Rouen et Salses. Une rumeur persistante relate que lors des fouilles sous le château de Gisors, contrairement à l’affirmation du ministère en fonction, les militaires aient découvert quatre coffres dont le contenu aurait servi, alors, au Général de Gaulle pour s’acquitter d’une dette vis-à-vis des Etats-Unis... Selon Réju et Hutin, André Malraux aurait été appréhendé depuis longtemps par une poignée de ‘dirigeants discrets’, puis nommé ministre afin d’être lancé sur les traces d’un fabuleux ensemble comprenant un colossal trésor monétaire agrémenté d’un savoir inexprimable et d’un secret capable de déstabiliser l’ordre du monde... Si le trésor monétaire de Gisors pouvait être celui du Temple, qu’en était-il de celui de Rouen et enfin de celui de Salses et Opoul-Périllos? Ce dernier contiendrait-il un mortel secret lié à la religion ?...
    Tout porte à penser que monsieur Malraux eut accès, par sa fonction et ses pouvoirs, à d’exceptionnelles informations. Rouen ne pouvait qu’être le prolongement logique de l’affaire de Gisors. Mais cette fois il semblerait que ‘certaines personnes’ l’aient précédé et mis en sécurité (hélas hors d’atteinte des chercheurs) des éléments pouvant déboucher sur des découvertes ‘trésoraires’ et historiques hors paire ou très gênantes. Peut-être ces éléments d’archives pouvaient permettre la découverte du trésor des huguenots, celui de Chilpéric I, de la couronne d’Arthus, du secret des épées de Jeanne d’Arc, de celui des Gouliards, de celui de l’Ordre du Temple... ou d’un autre savoir les dépassant tous. Avec sans doute, ce que nous ne saurons jamais sur ces mystères, Rouen et Gisors se refermèrent sur ses formidables énigmes.
    Il restera enfin à souligner cet étrange détail concernant d’autres écrits d’André Malraux. En effet on peut se demander ce qu’il voulait sous entendre dans ses ‘Antimémoires’ et ‘La corde et les Souris’ lorsqu’il fait dire, par le récit d’un vieux moine, que le ‘Christ-Jésus’ (et non Jésus-Christ!!!) aurait voulu naître en Espagne... et d’ajouter qu’au dessus des victimes de l’injustice en cette région envié par Jésus s’élèverait une étoile jusque là jamais vue. De quelle métaphore, ou de quelle étoile André Malraux voulait faire état dans cet écrit???

    Le lecteur, s’il engage des recherches, aura la surprise d’éprouver de grandes difficultés à retrouver les informations ayant servi à ce présent travail. De toute évidence bien des personnes supposaient suffisante la clôture du dossier ‘Lazare’ en 1965, et l’effacement de toutes ses traces dès 1977. C’était sans compter sur les travaux de Daniel Réju et surtout Serge Hutin. De plus ce dernier avait des raisons majeures de s’intéresser à cette action. C’est par ces deux personnes que nous obtenions les copies des documents qui resteront bizarrement ‘mal aiguillés’ tout au cours de l’instruction fantôme de ce curieux dossier. D’autre part, il reste des informations, non effacées, sur l’intérêt de Monsieur A. Malraux, en son temps ministre des Affaires culturelles, à propos de Salses. C’est depuis ce dernier dossier qu’actuellement se prépare un travail qui pourrait prochainement éclairer l’énigme de Rouen sous un jour nouveau, cette fois sans aucun risque d’effacement ou d’égarement. Nous saurons, alors, les raisons finales du dossier ‘Lazare’ et ses diverses ramifications dans plusieurs domaines de plus en plus d’actualité…
    Enfin, au moment de conclure il reste à donner une dernière information qui peut prendre toute son importance ici. Rouen fut le berceau de Maurice Leblanc (1864-1941) auteur des célèbres romans ‘d’Arsène Lupin’; il engagea une correspondance avec deux personnes de Rivesaltes S. Baso et M. Pounet) et demanda de nombreux détails historiques et archéologiques sur le Roussillon et Salses! M. Leblanc disposait-il d’informations sur le sujet Lazare-Rouen-Roussillon ? Tout porterait à le croire, de plus il semble que personne ne songea à en effacer les détails ni les correspondances. Car pour une fois il est possible que… ce ne soit pas une autre histoire mais celle que l’on tente de nous dissimuler depuis de nombreux siècles.
    Mais au fait… que cherchait monsieur André Malraux près d’une certaine madame veuve Kikoff, à Rennes-le-Château… qui savait une importante partie du secret de Marie Denarnaud contenu, à l’époque de Bérenger Saunière, paraît-il dans une partie du faux-plafond de la chambre de l’abbé ??? Une histoire de l’Histoire ?

    André Douzet
    Le 5 juillet 2007

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    De Bosch à Bruegel : les bonnes mauvaises mœurs

     

     

    Des textes obscènes, de l’alcool qui coule à flots, des gens qui se disputent, des organes génitaux tracés sur les murs, des plaisanteries grivoises et autres pitreries tirées de la vie quotidienne au XVIe siècle.

     

     

     

     

    À l’automne 2015, la grande exposition

     

    « De Bosch à Bruegel » présente des peintures et des gravures représentant des scènes d’où les « bonnes manières » sont absentes.

     

    C’est la toute première fois qu’une exposition rassemblant des chefs-d’œuvre de la fin du Moyen Âge est organisée sur ce thème.

     

    "On ne peut pas regarder Bruegel sans au moins sourire"

     

     

    C’est un monde peuplé de paysans festoyant gaiement, de mendiants visitant des prostituées et de charlatans perdant leurs gains au jeu, sous l’œil amusé de bouffons au premier plan ou à l’arrière-plan.

     

    L’exposition De Bosch à Bruegel présente une sélection de peintures et de gravures « politiquement incorrectes » du plus haut niveau artistique.

     

    Une quarantaine de peintures et autant de gravures du XVIe siècle, issues de collections privées ou de musées, sont réunies durant quelques semaines sous un même toit à Rotterdam.

     

    Dès l’automne 2015, le Musée Boijmans Van Beuningen à Rotterdam est ainsi le premier musée au monde à organiser une exposition consacrée à la peinture de genre, un thème nouveau à cette époque, qui pour la première fois se détache des sujets mystiques, religieux et des portraits.

     

     

    Cette sélection d’œuvres sur bois et sur papier est complétée par quelques objets et manuscrits.

     

    Les conservateurs Friso Lammertse et Peter van der Coelen le disent d’une seule voix : « On ne peut pas regarder Bruegel sans au moins sourire ».

    ‘Le Chariot de foin’ de Jérôme Bosch de retour aux Pays-Bas après des siècles d’absence

     

     

    Après 450 ans d’immobilité, Le Chariot de foin de Jérôme Bosch quitte pour la première fois l’Espagne pour se rendre aux Pays-Bas, où il est exposé pendant près de six mois. Grâce à un partenariat exceptionnel le public aura l’opportunité unique d’admirer l’imposant triptyque, œuvre clé dans la carrière de l’artiste.

     

     

    Le Chariot de foin est l'une des pièces maîtresses de la collection du Musée du Prado à Madrid.

     

    Fervent collectionneur d’œuvres de Bosch, le roi Philippe II d'Espagne avait fait l’acquisition du triptyque en 1570 pour sa collection particulière.

     

    Le tableau, superbement restauré, révèle un peintre au sommet de son art, maniant son pinceau avec une audace et une virtuosité incomparables.

     

    Il est aussi l'une des premières peintures de l'histoire de l’art à représenter des scènes de la vie quotidienne.

     

    Un cortège de gens suit un chariot de foin, métaphore du matérialisme, et se dirige tout droit vers l'enfer.

     

    Au premier plan, des motifs populaires du Moyen Âge comme les moines avinés, les arracheurs de dents, les joyeux musiciens et les diseurs de bonne aventure.

     

    Un couple d'amoureux est assis sur le chariot, encadré de part et d'autre par un ange et une petite créature diabolique, au croisement des traditions anciennes et modernes. Le tableau sera exposé à partir du mois de février 2016 à Bois-le-Duc, pour la rétrospective

    « Jheronimus Bosch – Les visions d’un génie » au Het Noordbrabants Museum.

     

     

    De Bosch à Bruegel au Musée Boijmans van Beuningen à Rotterdam du 10 octobre au 17 janvier 2016

     

     

     

    http://www.holland.com/fr/presse/article/de-bosch-a-bruegel-les-bonnes-mauvaises-murs.htm

     

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    Une histoire connectée de l’Antiquité,

    entre Empire romain et Empire han chinois.

    De Rome à la Chine, sur les Routes de la Soie au temps des Césars,

     

    Jean-Noël Robert


    Publié pour la première fois en 1997 ,

    le livre du latiniste Jean-Noël Robert revêt une tonalité originale au regard des travaux d’histoire romaine.

     

    L’ambition de l’ouvrage est en effet de connecter les histoires du monde romain et de l’empire han chinois.

     

    Le parti pris de l’auteur est en effet moins de s’intéresser aux conditions techniques des expéditions qu’aux mentalités et à l’imaginaire qui baignent ces voyages.

     

    Le questionnement porte sur les savoirs réciproques que Romains et Chinois nourrissent les uns sur les autres.

     

    L’accent est donc mis sur une double perspective: d’une part, la nature des représentations sur les hommes des confins, de l’autre les conséquences commerciales et culturelles des échanges sur la vie quotidienne des deux empires, han et romain.

     

    Le regard sur l'Autre: du côté des romains...


    Jean-Noël Robert s’attache d’abord à saisir la vision que pouvait avoir un citoyen romain depuis Rome sur les contrées lointaines.

    La «quête de l’Eldorado» s’accompagne évidemment de croyances erronées et de représentations binaires. La plus répandue, développée par Ammien Marcellin  (Histoire de Rome, XXIII, 64-68) consiste à penser que le fil de soie est produit par un arbre.

    Les Sères (Chinois) arrosent fréquemment leurs sombres forêts pour obtenir un délicat duvet (sericum) dont la récolte nécessite le plus grand soin. Ammien Marcellin dépeint les Sères comme des hommes honnêtes, modérés et épris de justice.

     

    Leur mode de vie est frugal et la guerre leur est étrangère.

     

    Du point de vue physique, les fantasmes romains les décrivent comme des hommes dont les cheveux sont rouges, les yeux bleus et la voix horrible.

     

    Surtout, une constante est qu’ils ne parlent jamais aux étrangers et font commerce d’une curieuse manière: ils déposent leur marchandise dans un lieu à l’écart et l’acheteur prend ce qui lui convient hors de leur présence.

     

    Cette analyse conduit l’auteur à se demander si la Sérique dont parlent les Romains correspond à la Chine actuelle.

     

    L’argument de poids qui pèse en faveur de l’identification à une région au moins très proche est celui de la qualité de la soie.

     

    Pour Jean-Noël Robert, laserica ne peut désigner que la soie chinoise. Il s’agit de la seule soie qui puisse supporter et fixer la teinture des foulons romains.

     

    Toutefois, le type indo-européens (yeux bleus, barbe châtaine, peau claire, visage long) livré par les textes au sujet des Sères invite plutôt à voir en eux des habitants voisins de la Bactriane –aux confins de l’Afghanistan, du Pakistan et de la Chine– et du monde indien.

     

     

    Du COTE des CHINOIS....
     
    En retour, les Chinois se forgent une vision précise des Romains en les nommant par analogie avec des populations voisines.

    L’auteur montre que le véritable tournant en matière de représentations chinoises s’inscrit en 165 ap. J.-C., au moment où le commerce et l’affairisme parthe sont ruinés par le saccage romain des villes mésopotamiennes de Ctésiphon et Séleucie. Cet affaiblissement de la route terrestre conduit en effet les marchands syriens et romains à privilégier la route maritime et à prolonger leur voyage jusqu’au golfe du Bengale. En 166 ap. J.-C., l’empereur An-toun (Marc Aurèle), souverain du Ta-T’sin, la «Grande Chine» –ainsi qu’est dénommé l’empire d’Occident par les Chinois– envoie une ambassade romaine à Houan-ti, l’empereur des Han, dans sa capitale Xian.

    Les Annales chinoises, en particulier le Heou Han Chou, précisent que jusqu’alors, les Romains n’ont pu entrer directement en relation avec la Chine à cause des Parthes, soucieux de garder jalousement le monopole du commerce des soies chinoises.

    Dans ce récit, le nom de Ta-T’sin pour désigner l’empire d’Occident est ainsi justifié: les Romains sont des hommes de grande taille dont la physionomie et les mœurs évoquent les hommes du T’sin, région du nord-ouest de la Chine.

     

    Les Chinois voient dans les Romains des hommes honnêtes dans leurs transactions, parce que leurs prix restent stables et les mêmes pour tous.

     

    Pour Jean-Noël Robert, ces «ambassadeurs» n’étaient en fait que des marchands qui, en se réclamant de ce statut, ambitionnaient d’être reçus au plus haut niveau.

    La question parthe


    Dans l’idéologie romaine de la domination de l’univers, la conquête orientale revient fréquemment dans les conversations.

    Cela s’explique par un point d’achoppement hautement sensible dans l’opinion romaine: la question parthe. L’auteur insiste sur l’importance dans l’imaginaire romain de la défaite des armées de Crassus face aux armées des Parthes à Carrhae (Turquie) en 53 av. J.-C.

     

    Outre l’affront symbolisé par la perte des enseignes romaines (les fameux aigles), les Romains craignent la tentation parthe de la restauration de l’empire des Achéménides. Dans le discours augustéen, la venue d’ambassadeurs provenant de Sérique est en ce sens interprétée comme un acte d’allégeance au peuple romain.

     

    Dans son testament politique, les Res Gestae Divi Augusti(Hauts faits d’Auguste divinisé), Auguste déclare:

     

    «Vers moi sont venus souvent des ambassadeurs des rois de l’Inde, ce qu’aucun chef romain n’avait vu jusque là». Il fait ici allusion à l’ambassade indienne rencontrée à Samos en 20 av. J.-C., épisode relaté par Strabon((XV, 1)).

     

    Les Indiens avaient présenté à Auguste une lettre écrite en grec par leur roi disant combien grande était l’amitié qu’il portait à l’empereur.

     

    En guise de preuve de cette insigne affection, il offrait à Auguste huit indiens dont les corps embaumaient les senteurs indiennes, ainsi que des immenses serpents et une tortue géante.

    Les rivalités entre Parthes et Romains dissuadent ces derniers de franchir les bornes de l’empire romain. Jean-Noël Robert insiste sur l’importance des deux «portes orientales» de l’empire: Palmyre et Alexandrie.

     

    Ces cités constituent des «verrous» entre l’Orient et l’Occident.

     

    Elles sont le point d’arrivée du voyage des commerçants du monde romain. Palmyre devient progressivement, au détriment d’Antioche, la nouvelle plaque tournante des échanges entre les Parthes de Mésopotamie et la Méditerranée. Ce statut est entériné par l’octroi du statut de «ville libre» par Hadrien en 129 (liberté de la fixation des impôts) puis par l’exemption de l’impôt foncier par Caracalla.

     

     

    Aux Palmyréniens revient alors la lourde tâche de prendre en main les convois de marchandises vers les contrées orientales.

     

    La préparation de la caravane est supervisée par le synodiarque (chef de la caravane).

     

    Ce personnage est commandité par un patron, riche marchand qui ne participe pas lui-même à l’expédition. Il charge le synodiarque de réunir les chameaux, l’eau et les vivres pour les hommes et les bêtes, et des traducteurs pour les relations diplomatiques. Il s’occupe aussi de réunir des archers palmyréniens pour lutter contre les brigands parthes. 

     

    Ces milices locales, formées exclusivement de citoyens de Palmyre, revêtent l’allure de groupes de «cavaliers des steppes» habillés de vêtements qui les situent entre chasseurs et guerriers (jambières, poignards, épées).

     

    Une fois arrivée à destination, la caravane est dissoute, les animaux sont vendus sur place et les hommes rentrent seuls à Palmyre.

     

    Les marchandises passent alors aux mains de marchands parthes ou indiens.

     

    La ville d’Alexandrie est la seconde porte orientale de l’empire: le port intérieur que constitue le lac Maréotis est tourné vers l’intérieur du pays et communique avec le Nil par des canaux d’où proviennent les produits en provenance d’Inde et de Chine.

     

    Sur les routes de la soie


    L’auteur souligne toutefois qu’il existe quelques rares figures d’audacieux marchands, prêts à braver bien des dangers, qui parcourent de bout en bout le chemin par voie terrestre, jusqu’en Chine et en Inde. Ainsi, au Ier siècle ap. J.-C., le commerçant syrien Maes Titianos forme le vœu de briser le monopole parthe en envoyant ses agents commerciaux reconnaître la route de Chine.

    L’aventure, relatée par le géographe Marin de Tyr à Ptolémée qui tente d’évaluer la distance entre la Méditerranée et la Sérique, est celle d’un macédonien issu d’une puissante famille de marchands d’Antioche, capitale de la Syrie romaine.

     

     

    L’expédition traverse l’Euphrate à Hiérapolis (à l’est d’Alep), puis suit la célèbre route du Khorassan jusqu’à Bactres avant de rejoindre le lieu-dit de la «Tour de Pierre» (Bactriane), et de poursuivre jusqu’au pays des Sères. D’après les calculs de Jean-Noël Robert, le simple aller de ce voyage dura au moins un an. 

    Cependant, dès le Ier siècle, une autre route est connue, celle de la mer Érythrée, dont l’étymologie renvoie à la «mer rouge», comprise comme la Mer Rouge élargie à la mer d’Oman jusqu’à l’Océan indien. Pline, dans son Histoire Naturelle (VI, 24, 84-91), raconte en effet

    l’anecdote d’Annius Plocamus qui prend place à l’époque du principat

    de Claude (41-54 ap. J.-C.).

     

     

    Ce marchand avait pris à ferme les taxes de la mer Erythrée pour le compte du trésor royal. L’un de ses affranchis, alors qu’il navigue au large de l’Arabie, est emporté par les vents qui font dériver son bateau quinze jours durant jusqu’à Taprobane, c’est-à-dire Ceylan. Après qu’il eut appris la langue du pays, Plocamus revint à Rome accompagné de l’ambassadeur indien Rachias. Il enseigne aux Romains que, dans son pays, il n’y a ni tribunaux ni procès, et que le peuple y élit un roi pour éviter toute tentation dynastique. Son peuple ignore tout de la vigne mais pratique ardemment la chasse à la tortue. Pour l’auteur, cet épisode fondamental est la trace d’un premier voyage maritime fortuit vers Ceylan, d’une première traversée directe vers l’Inde.

    L'apport indien: la sophistication d'une manière de vivre

    Les échanges avec la Chine transforment la vie quotidienne des Romains. Jean-Noël Robert montre que les marchandises en provenance de Chine et d’Inde sont des produits de luxe.

     

    La spécificité de ce commerce réside dans le fait que Rome importe des matières premières coûteuses et les réexportent en Orient sous la forme de produits manufacturés.

     

    Les dames de la haute société achètent le «Parfum royal», élaboré à partir de senteurs indiennes: huile de ben, de costus, anome, cannelle, suc de noix de comaque, cardamome, myrrhe, nard à épis.

     

    Le poivre connaît un succès tel qu’une rue près du forum de Trajan est nomméePiperatica, «rue aux poivres». Le chic suprême est de consommer du vin miellé au poivre. Cette boisson est exportée vers l’Orient sous le nom de «vin poivré d’Italie». 

    Du point de vue vestimentaire, le coton (mousseline) est porté par les riches romaines de l’aristocratie auxquelles la texture vaporeuse suggère le nom de nebula. La soie chinoise, trop lourde à porter, doit être retravaillée et retissée en la mélangeant de lin et de coton pour être rendue plus légère.

     

    L’intérêt majeur du tissu de soie est qu’il peut être teint et brodé au fil d’or. Il devient un tissu de luxe que les hommes eux-mêmes aiment porter. Ils sont alors jugés efféminés, raison pour laquelle Tibère tente d’en interdire le port masculin. En outre, les pierres précieuses et semi-précieuses (diamant turquoise, saphir, lapis-lazuli, onyx), mais aussi les perles sont l’expression d’une appartenance à tout ce que Rome compte de femmes de bien. Pline (XXXVII, 17) affirme que l’ambition d’une Romaine désargentée est de porter ne serait-ce qu’une perle à une seule oreille. 

    Selon lui, cela fait autant d’effet que d’être précédée d’un licteur. Cependant, l’impact réciproque des échanges entre l’empire romain et la Chine ne saurait se résumer à l’aspect commercial: ce sont aussi des techniques artistiques et des préceptes religieux qui se greffent aussi bien en Sérique que dans le monde romain.Un syncrétisme culturel étonnant

    En effet, l’auteur s’appuie, dans son chapitre «Les chemins de l’esprit», sur les découvertes de l’archéologue britannique Marc Aurel Stein pour montrer que les artistes voyagent entre les deux mondes.

     

    A la lisière du désert du Lob-Nor, le sanctuaire de Mirân est décoré d’une frise continue d’Amours nus et de jeunes Génies à bonnets pointus iraniens munis d’une épaisse guirlande. Les fresques sont signées d’une inscription en brahmi du IIIe siècle ap. J.-C.:

     

    «Cette fresque est l’œuvre de Tita qui lui a été payée trois mille bhammakas». Le nom Tita est une forme indianisée du prénom romain Titus.

     

    Deux hypothèses sont proposées: soit Tita est né en Asie centrale et a été formé par des artistes occidentaux provenant du monde romain, soit il est né dans ce monde romain et a exporté son art au Lob-nor.

     

    A Rome, dans les cercles intellectuels, l’Inde est à la mode avec un intérêt croissant pour la doctrine des brahmanes. En 217, l’exégète Hippolyte de Rome, dans sa Réfutation de toutes les hérésies, décrit les brahmanes comme une secte de végétariens qui affirme que le corps n’est qu’une enveloppe dans laquelle «la guerre règne».

     

    Cela a pour conséquence un combat permanent contre les désirs et les convoitises. Cet affrontement, qui place la Chine au centre du débat, en fait une référence incontournable, tout à la fois lieu d’adhésion et lieu repoussoir.

    Marianne BERAUD

     

    [1] L’apport de cette nouvelle édition réside dans l’ajout d’une annexe consacrée au possible voyage des légionnaires de Crassus en Chine. 

     

    Sources

    http://www.slate.fr/tribune/87293/nf-des-romains-en-chine

     

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  • 70 ans de réflexion

    par PA Gillet 26 Juin 2012, 10:05 À part ça

     

    ... Il y a deux ans du côté de Pigalle, un appartement parisien a été réouvert pour la première fois... après 70 ans.

    Capsule temporelle vers le passé, cet écrin hermétique appartenait à Madame de Florian qui l'avait quitté précipitemment pour aller se réfugier dans le sud alors que les troupes d'Adolf Hitler avançaient sur Paris.

    Et jamais elle ne revint.

     

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    Images © Corbis

     

    Ce n'est qu'à sa mort à 91 ans en 2010 qu'il fut fait un état des lieux de ses possessions et que sa famille découvrit l'existence de cet appartement à deux pas de l'église de la Trinité à Paris.

     

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    Sous une épaisse couche de poussière attendait patiemment un trésor. Œuvres d'art, jouets d'époque, témoignages intacts d'une vie figée en un instant dans l'éternité, mis sous cloche, en sommeil.

     

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    140 mètres carrés restés figés dans leur jus. Et le plus étonnant est que bien qu'elle ne soit jamais revenue dans cet appartement, on découvrit plus tard que chaque mois, Madame de Florian payait ses charges consciencieusement. Depuis 70 ans.

     

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    Mais l'une des découvertes majeures fut un tableau encore inconnu de Giovanni Boldini, peintre italien du XIXe, souvent comparé à Sargent pour la grande qualité de ses portraits.

     

    L'un des maîtres de la Belle Epoque. En robe de mousseline rose pose une femme superbe, feignant la timidité tout en dénudant une épaule, doigts balladeurs et graciles, buste avancé dans une posture à mi-chemin entre l'offrande et le retrait. Un portrait de Marthe de Florian, de son vrai nom Mathilde Baugiron, quel joli nom, née en 1875 et grand-mère de la propriétaire décédée.

     

    Marthe de Florian était actrice, courtisane, bref une "demi-mondaine" comme on les appelait et fut un temps muse de l'artiste puis de nombreux autres hommes de l'époque dont un ministre et futur "Tigre" : Georges Clemenceau. L'expert en charge pensa immédiatement à Boldini mais ce tableau n'ayant jamais été exposé, il n'était répertorié nulle part dans le catalogue de l'artiste. En poursuivant son exploration dans l'appartement, il découvrit un mot d'amour manuscrit du peintre, le confortant dans l'idée qu'il tenait un tableau inédit de Boldini. Ce n'est qu'après de longues recherches qu'il trouva une référence dans un livre publié en 1951 par la veuve de l'artiste, indiquant qu'il avait été peint en 1898 alors que Marthe de Florian avait 24 ans.

     

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    Bien avant sa petite-fille, Marthe de Florian habita cet appartement toute sa vie. On y retrouva toutes les correspondances enflammées de ses courtisans de l'époque gardées bien précieusement, entourées de rubans de couleurs différentes pour chacun. Le tableau de la belle endormie fut finalement vendu par la famille quelque temps plus tard.

     

    Mise à prix à 300 000 euros, il s'envola à 2,1 millions d'euros, nouveau record pour un Boldini. Mais le plus fabuleux trésor, c'est cette bulle restée intacte, un retour vers le futur dans le passé comme il en existe peu. Et une bien jolie histoire.

     

    Plus d'infos sur le tableau sur le site de Drouot ici : link. Et si vous aimez les beaux bordels comme cet appartement, allez jeter un œil ici : Le Bordel du Vendredi. Et retrouvez Après La Pub sur Twitter @ApresLaPub.

     

     

     

     

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  • Histoire de l'Hygiène au moyen âge



    L'hygiène n'est pas un bienfait des temps modernes.

     

    C'est un art qui connut ses heurs et malheurs.

     

    Un art que le siècle de Louis XIV méprisa mais que le Moyen Age, en dépit de sa mauvaise réputation, cultivait avec amour.

      

    L'eau était alors un élément sacré, un remède, et surtout, un immense plaisir.


    On pourrait imaginer, à en juger par le manque de propreté corporelle qui caractérisait les moeurs, il n'y a pas si longtemps encore, que les hommes et les femmes du Moyen Age ne prenaient guère soin de leur corps ; et on pourrait croire que l'hygiène - l'art de bien se porter est une notion récente.



    C'est injuste ! Le Moyen Age avait inventé l'hygiène, et bien d'autres civilisations avant lui... Mais là n'est pas notre sujet. En tout cas, dès le 12e siècle, les sources qui nous révèlent que l'eau faisait partie du plaisir de vivre sont innombrables.

      

    Et notamment certains documents tels que les traités de médecine, les herbiers, les romans profanes, les fabliaux, les inventaires après décès, les comptes royaux et princiers. Les enluminures des manuscrits nous permettent également de saisir le geste de l'homme en son environnement et en son temps.



    L'enluminure, ou miniature, reste le document irremplaçable, dans la mesure oÙ la gestuelle correspond bien souvent au climat psychique ou moral de l'époque qu'elle dépeint ; elle nous livre ainsi une clef parmi d'autres des mentalités de ces hommes et de ces femmes du passé. Comme nous allons le voir, on se lavait fréquemment, non seulement pour être propre, mais aussi par plaisir.

     

      Sortie du bain

      

    Le petit d'homme est lavé plusieurs fois par jour, ce qui ne sera plus le cas à partir du 16e siècle.

      

    Des milliers de manuscrits illustrent ce bain et de nombreux textes en parlent. Ainsi, Barthélemy l'Anglais, Vincent de Beauvais, Aldébrandin de Sienne, au 13e siècle, par leurs traités de médecine et d'éducation, instaurent une véritable obsession de la propreté infantile.

     



    Le bain est donné "quand l'enfant ara assez dormi, ci le doit-on laver trois fois par jour".

      

    Les cuviers sont bâtis aux dimensions d'un nouveau-né allongé ; généralement ils sont ovales ou circulaires, faits de douelles de bois. Dans les milieux princiers, ils peuvent être métalliques.

      

    Ainsi, dans les Chroniques de Froissart, en 1382, il est écrit que, en pillant le mobilier du comte de Flandres, on trouva une "cuvelette où on l'avait d'enfance baigné, qui était d'or et d'argent".

      

    Certains cuviers possèdent un dais, sorte de pavillon de toile nouée au sommet d'une perche de bois qui surmonte la cuve, afin de protéger l'enfant des courants d'air ; ce raffinement est réservé aux milieux aristocratiques.



    Dans la plupart des miniatures, on voit toujours la mère ou la servante tâter l'eau avant d'y tremper l'enfant car elle doit être "douce et de moyenne chaleur".

      

    On ne donne pas le bain à l'enfant sans prendre quelques précautions : le cuvier est placé devant la cheminée où flambe un bon feu ; la sortie de bain est assez grande pour bien envelopper le bambin. Elle est toujours à fond blanc même si, parfois, des rayures et des franges l'agrémentent.

    Un moment important de la journée : le bain de l'enfant. La servante vérifie de la main la température de l'eau, qui doit être "douce et de moyenne chaleur".

      

    Fresque de Menabuoi, Padoue, baptistère.

      

    La fréquence des bains s'explique par les valeurs curatives qu'on leur attribue. "On le baigne et oint pour nourrir la chair nettement", dit Barthélemy l'Anglais, auteur du Livre des propriétés des choses qui fut diffusé jusqu'au 17e siècle avant de sombrer dans l'oubli.

      

    A l'instar des coutumes de l'Antiquité, le premier bain de la naissance est un rite de reconnaissance par la communauté familiale.

      

    A l'époque chrétienne, on peut dire que le baptême de l'enfant nouveau-né a repris à son compte la gestuelle de l'hygiène néonatale à cette différence près qu'il s'agit de débarrasser l'enfant non plus de ses mucosités, mais du péché originel.

      

    De toute façon, que l'usage en soit symbolique ou matériel, l'eau est considérée sous l'aspect bienfaisant et purificateur.

      

    A l'âge adulte, les bains semblent tout à fait intégrés à la vie quotidienne, surtout à partir du 14e siècle.

     



     

    Dans les centres urbains, au bas Moyen Age, chaque quartier possédait ses bains propres, avec pignon sur rue. Il était plus facile, pour la plupart des gens, d'aller aux étuves que de se préparer un bain chaud chez soi. Au point du jour les crieurs passaient dans les rues pour avertir la population que les bains étaient prêts :

      

    " Seigneurs, venez vous baigner et étuver sans plus attendre...

      

    Les bains sont chauds, c'est sans mentir " (fin du 13e siècle). Le souvenir de l'importance des étuves dans les moindres villes d'Europe subsiste encore, aujourd'hui, dans le nom de certaines rues. A Paris, en 1292, la ville compte 27 étuves inscrites sur le Livre de la taille ; elles existaient avant cette date puisque Saint Louis essayait déjà de réglementer le métier en 1268.

      

    On ne sait pas exactement à quel moment se sont créés les premiers bains. Seraientils un avatar des thermes romains ? On sait qu'à l'époque carolingienne, les palais renfermaient des bains, ainsi que les monastères.

     

    Il semble cependant plus vraisemblable que la mode des bains ait été remise en honneur en Occident par l'intermédiaire des croisés, qui avaient découvert avec émerveillement l'Empire romain d'Orient et ses habitudes d'hygiène héritées de l'Antiquité romaine. Ayant pris goût à la relaxation du bain, ils rapportèrent en Occident cette pratique de bien-être. Aux 14e et 15e siècles, les étuves publiques connaissent leur apogée : Bruxelles en compte 40, et il y en a autant à Bruges. Bade, en 1400, en possède une trentaine.

      

      

    En France, en dehors de Paris, on sait, grâce à des études faites

    par J. Garnier et J. Arnoud, que Dijon, Digne, Rouen, Strasbourg sont équipées de bains. Une petite ville comme Chartres en a cinq. Ces établissements sont extrêmement florissants et rapportent beaucoup d'argent. Dans plusieurs villes de France, certains d'entre eux appartiennent au clergé !

      

    A l'origine d'ordre essentiellement hygiènique, il semble qu'au fil des ans cette pratique ait pris un caractère plaisant prétexte à toutes sortes d'agréments galants. Etuves publiques.



    Des couples, après avoir festoyé autour d'une table, installée dans un imense cuvier rempli d'eau, se dirigent vers les chambres à coucher. La prostitution, malgré les nombreux édits qui l'interdisent, sera l'une des causes de la disparition progressive des étuves. Manuscrit de Valerius Maximus.
     
     
     



     
     

    Bains chauds, bains tièdes et bains de vapeur

    Au 13e siècle, on se contentait de s'immerger dans de grandes cuves remplies d'eau chaude. A la fin de ce siècle seulement, semble-t-il, apparaissent les premiers bains saturés de vapeur d'eau. En 1258, Etienne Boileau, prévôt de Paris sous Saint Louis et auteur du Livre des métiers, qui codifie les usages corporatifs, fait déjà la différence entre les bains et les étuves dites sèches et humides.

      

    Il y avait deux manières pour créer de la vapeur dans un lieu clos : chauffer celui-ci soit par l'extérieur, en envoyant un courant d'air chaud (étuve sèche), soit en y faisant pénétrer la vapeur d'eau (étuve humide).



    Les prix des bains d'eau chaude et des étuves n'étaient pas les mêmes. A Paris, nous savons, par l'ordonnance des métiers de 1380, que le prix du bain de vapeur est de deux deniers, celui du bain d'eau tiède de quatre deniers ; mais s'estuver et se baigner coûte huit deniers.

      

    Si deux personnes vont ensemble au bain, elles paieront douze deniers pour s'estuver et se baigner, donc moins cher.



    Le bain de vapeur est économique parce qu'il ne nécessite que quelques pierres placées et un seau d'eau.

      

    A cela, il faut ajouter un denier pour un drap.

      

    A titre comparatif, rappelons que, à la même époque, une grosse miche de pain se vendait un denier.



    L'établissement thermal de Pouzzoles, en Italie. Sur la gauche, la cabine de déshabillage; sur la droite, la piscine collective. Là aussi, hommes et femmes prennent le bain ensemble.

      

    Les eaux sont un lieu de cure mais aussi de rencontre, comme elles le seront au XIXè siècle. Manuscrit de Pierre d'Eboli.



    Les étuviers sont constitués en corps de métiers, et leurs prix sont fixés par le prévôt de Paris. Il leur incombe d'entretenir leurs étuves : dans leurs statuts, il est écrit que "les maîtres qui seront gardes du dit métier, pourront visiter et décharger les tuyaux et les conduits des étuves, et regarder si elles sont nettes, bonnes et suffisantes, pour les périls et les abreuvoirs où les eaux vont".

      

    Cet édit est très intéressant, dans la mesure où il nous prouve qu'on avait tout à fait conscience, au Moyen Age, des dangers qu'une eau polluée pouvait faire courir à la population.



    Les statuts interdisaient d'accueillir les malades, principalement les lépreux, mais aussi les prostituées.

      

    Déjà, dans le règlement de Saint Louis, en 1268, ce sujet est abordé :

      

    "Que nul du dit mestier ne soutienge en leurs étuves, bordiaux de jour et de nuit."

      

    Cela démontre bien que, déjà à cette date, les bains commençaient à attirer les débauchés. Il est bien évident qu'au début les gens y allaient pour se laver et se relaxer.



    On n'ignorait pas le côté prophylactique des bains ; tous les médecins répétaient que cette pratique aidait à se conserver en bonne santé, et cela dès le 1le siècle : Aldébrandin de Sienne, dans son traité de médecine, écrit :



    "Li baigners en eau douce fait en étuve et en cuve, et en eau froide, fait la santé garder."

    Si l'eau est froide, il faut être prudent et ne pas y séjourner trop longtemps, juste le temps nécessaire pour renforcer et stimuler la chaleur interne. Mais pour nettoyer correctement le corps, seul le bain chaud peut "expulser l'ordure que la nature cache par les pertuis de la chair".





    Baignoire médiévale. Musée de Cluny. Photo de LYDIA

    (http://notabene.forumactif.com/t7981-l-hygiene-au-moyen-age)



    Barthélemy l'Anglais, au 13e siècle, conseille, lui aussi, de se laver souvent la peau, les cheveux et la bouche. Il y a tout un environnement social qui pousse les gens, surtout en ville, à prendre soin de leur corps. De plus, les produits de toilette ne manquaient pas.

      

    Le savon existait - à Paris, un décret de fabrication rend obligatoire l'apposition d'un sceau sur le savon.



    Si on n'avait pas de savon on se servait de plantes, comme la saponaire, une herbacée à fleur rose et odorante dont le suc, dissous dans l'eau, mousse. Il y avait trois sortes de savon : le gallique, le juif et le sarrasin, selon qu'il était fabriqué avec de l'huile ou de la graisse animale mélangée à de la potasse.





    Dentifrice, shampooing et déodorant

    Se laver la tête ne pose pas plus de problème.

     

    Un herbier du 13e siècle conseille le jus de bette pour éliminer les pellicules et les feuilles de noyer ou de chêne pour obtenir une belle chevelure.

      

    Dans ce même herbier, on préconise, pour éviter la "puanteur" de s'arracher les poils et de laver les aisselles avec du vin, associé à de l'eau de rose et à du jus d'une plante appelée casseligne. Pour se blanchir les dents, il faut se les frotter avec du corail en poudre ou de l'os de seiche écrasé.



    Bref, tant que les établissements de bain étaient modestes, on y allait pour se laver, bien sûr, mais aussi pour discuter, retrouver ses amis.

     

    Encore au début du 12e Siècle, la simplicité un peu rude des moeurs faisait que l'on ne voyait pas malice à se mettre nu et qu'on s'accommodait très bien d'une liberté des sens que notre propre morale réprouverait aujourd'hui.



    On prenait les bains en commun, et nus. Ne dit-on pas que saint François d'Assise (1180-1226) prêcha nu devant ses fidèles, en signe de dépouillement !

      

    Aurait-on pu imaginer cela un siècle plus tard ?Baignoires, tables bien garnies, chambres à coucher, tout est en place pour le plaisir des sens. Avec la croissance des villes, due à la reprise économique en Europe, les étuves deviennent de grands établissements et les coutumes changent.



    La ville attire de plus en plus d'étrangers et de vagabonds, et la prostitution se développe. Les bains sont mis sous la surveillance de chirurgiens-barbiers. J. Garnier nous propose une bonne description d'un établissement de la rue Cazotte, à Dijon, au 14e siècle.



    D'abord, un rez-de-chaussée sur cave où on plaçait deux énormes fourneaux en brique (en airain, dans les maisons princières). Ce rez-de-chaussée était divisé en deux grandes pièces avec une antichambre commune.

      

    La première pièce est une vaste salle de bain, possédant en son milieu une spacieuse cuve en bois et, sur les côtés, de nombreuses baignoires en bois pour une ou deux personnes.



    La seconde pièce est la salle d'étuve, rappelant le laconicum romain (pièce la plus chaude), dont le plafond est constitué par une massive maçonnerie se terminant en coupole, percée de trous au travers desquels s'échappe l'air chaud. Autour, des sièges et des gradins pour se relaxer.

     

    Aux étages supérieurs, des chambres à coucher, ce qui favorisait la prostitution.

    "On oyait crier, hutiner, saulter..."

    Parmi les miniatures représentant ces pratiques, peu nous montrent l'aspect purement hygiénique. Deux miniatures issues du manuscrit La Bulle d'or de Charles IV, roi de Bohême (fin du 14e siècle) l'illustrent cependant : on voit le roi Venceslas en train de se faire laver les cheveux par une servante ou fille de bain, charmante personne tout à fait plaisante dans sa robe transparente.

     

     

    Le signe de profession de ces jeunes femmes étaient le houssoir (plumeau à crins ou à plumes) qui servait à frotter le client ou la cliente, et aussi le baquet d'eau chaude pour laver les têtes.



    Etuves publiques. Ici les cuviers sont plus raffinés, réduits à la dimension d'un couple et garnis d'un baldaquin.

      

    sur la gauche une jeune femme semble se défendre contre les avances d'un barbon.

      

      

    Manuscrit de Valerius Maximus.Les autres miniatures, plus tardives (15e siècle) révèlent principalement le côté libertin.



    La plupart ornent les nombreux manuscrits de Valerius Maximus. Dans ces petits tableaux, qui nous dévoilent l'ambiance dans ces étuves, tous les objets sont en place pour le plaisir des sens.

      

      

    Dans les grandes cuves se tiennent des couples nus, auxquels on sert de véritables festins ; les servantes s'affairent autour d'eux, chargées de collations.

      

    Toutes ces miniatures montrent à peu près les mêmes scènes - tables bien garnies dressées à l'intérieur d'immenses cuviers et couples enlacés, assis autour de la table, toujours à l'intérieur du cuvier, et se caressant sans aucune retenue.

      

    On aperçoit parfois les chambres à coucher où les couples vont prendre leur divertissement.









    La scène la plus étonnante représente le moment où, après avoir bien festoyé, les couples se lèvent de table, se tenant par la main, à la recherche d'une chambre libre pour leurs ébats.

      

    Quelquefois, dans l'encadrement d'une porte, on remarque la présence de deux chirurgiensbarbiers occupés à surveiller.

      

    Les règlements qui répètent avec obstination, surtout à partir de la moitié du 14e siècle, que l'accès aux bains doit être interdit aux bordiaux semblent bien inefficaces.



    Au début du 15e siècle un grand nombre d'étuves commencent à instaurer la séparation des sexes ; ainsi à Dijon, en , une ordonnance prescrit que, sur quatre étuves, deux seront réservées exclusivement aux femmes et deux autres, exclusivement aux hommes, sous peine d'avoir à payer une amende de 40 sols.



    En 1412, une autre ordonnance décide que les étuves seront réservées aux femmes le mardi et le jeudi, et aux hommes le mercredi et le lundi. Les autres jours, les vendredi, samedi et dimanche, les étuves se transforment en lieux de plaisirs en tout genre.

      

    Cette seconde ordonnance démontre bien que la juridiction du pouvoir municipal, à laquelle étaient soumises les étuves, avait du mal à faire appliquer ses décisions et était obligée de tergiverser.


    Cependant, à la fin du 15e siècle, les procès se multiplient ; le voisinage supporte de plus en plus mal la présence de "baigneries". On peut lire dans les minutes du procès intenté à Jeanne Saignant, maîtresse des étuves, cette phrase :

      

    "On oyait crier, hutiner, saulter, tellement qu'on était étonné que les voisins le souffrissent, la justice le dissimulât, et la terre le supportât." Beaucoup d'étuves étaient en même temps des bordels, mais ce n'était pas là un phénomène récent.

     

    On peut donc se demander pourquoi, soudain, on cesse de le tolérer. Alors qu'on sait que, en pleine épidémie de peste, au milieu du 14e siècle, un médecin parisien nommé Despars faillit être lapidé par le peuple, pour avoir conseillé de les fermer par prudence...

      

    Lorsqu'on sait, aussi, qu'en 1410 la reine de France récompensait les artisans travaillant pour elle en leur offrant un "abonnement" aux étuves.



    La fermeture des étuves s'explique-t-elle par l'apparition de la syphilis qui touche le monde occidental ? Par le trop grand nombre d'étrangers qui envahissent la ville et que les autorités de la cité n'ont plus les moyens de contrôler, notamment dans les lieux publics, où ils sèment l'agitation ? Ou par un retour à la moralisation des moeurs, la notion de péché envahissant de plus en plus les consciences en cette fin de siècle ?





    Pique-niques sur tables flottantes

    Une miniature du début du 16e siècle illustre une scène où des prostituées se lavent en attendant le client. L'aspect ludique a disparu ; ici l'eau n'est plus source de plaisir, mais moyen d'hygiène banal : les cuviers sont de dimensions si réduites qu'on ne peut s'y laver que les pieds ou les cheveux. Finis les bains d'immersion, voici venue l'ère des ablutions.

    Le temps des " bordiaux ", où les prostituées et les clients s'aspergeaient copieusement, est bel et bien révolu. On l'a déjà dit, l'eau n'est pas réservée au seul plaisir. On est convaincu, dès le 11e siècle, qu'elle a des vertus thérapeutiques.

    Dans tous les traités de santé du temps, on vante les bienfaits des eaux thermales. L'établissement thermal de Pouzzoles, en Italie : le bain de vapeur. Un curiste est allé chercher de l'eau avec une amphore préalablement chauffée sur les pierres brulantes disposées sous le plancher.Déjà Galien, au 2e siècle après Jésus Christ, avait décrit les bienfaits des cures thermales, pour la santé. On commence à les redécouvrir grâce à la venue d'empereurs comme Frédéric de Hohenstaufen en Italie, grands amateur d'eaux. Le poète Pierre d'Eboli, attaché à la cour de Frédéric, au début siècle, en chante les louanges, et la plupart des miniatures que nous possédons proviennent des manuscrits représentant les thermes et les curistes.L'eau bouillante qui pugnest les morts Je vous di que celle meisme Malades vifs rent saints et fors Vous qui n'avez denier ne maille Et qui voulez estre garis Garis serez aus bains...



    Ce sont principalement les sources de Pouzzoles, de Cumes, et Baïes en Campanie, qui sont vantées, pas seulement par Pierre d'Eboli mais aussi par Barthélemy l'Anglais ; ces miniatures nous montrent les piscines et le comportement des curistes. On y voit aussi les cabines de déshabillage. Selon les textes, hommes et femmes prenaient ensemble leur bain, mais les images ne sont guère révélatrices. En 1345, aux bains de Prorecta, il est conseillé de rester un jour sans se baigner pour s'habituer à l'air du pays et se reposer des fatigues du voyage.



    Puis le malade doit passer au moins une heure dans le bassin de pierre empli d'eau tiède, avant de boire, jusqu'à ce que le bout des doigts se crispe. Ce bain ne fatigue nullement, au contraire ; il mûrit les humeurs diverses dans tout le corps et les prépare à être évacuées. Nous avons un témoignage assez étonnant sur les bains de Baden, écrit par Le Pogge, humaniste italien, en 1415. Au centre de cette ville d'eau, "se trouve une place très vaste, entourée de magnifiques hôtelleries dont la plupart possèdent leur piscine particulière. Dans les bains publics s'entassent, pêle-mêle, hommes et femmes, jeunes garçons et jeunes filles, et tout le fretin environnant.



    Dans les piscines privées hommes et les femmes sont séparés par une cloison, criblée de petites fenêtres qui permettent aux baigneurs et aux baigneuses de prendre ensemble des rafraîchissements, de causer et, surtout, de se voir. Le costume des hommes consiste en un simple caleçon et celui des femmes en un léger voile de lin ouvert sur les côtés, qui ne voile d'ailleurs ni le cou, ni la poitrine, ni les bras". D'après ce témoin, les femmes faisaient souvent "ces repas en pique-nique, servis sur des tables flottantes, dans les bassins, auxquels les hommes sont invités".



    On peut imaginer qu'il y avait dans ces lieux de véritables malades, mais surtout des gens bien portants qui venaient là pour conserver la santé d'autant plus que ces eaux chlorurées sodiques sont excellentes, de toute manière, et aussi pour se divertir, pour y trouver des moments de détente et de bonheur, enfin pour y faire des rencontres. Une baigneuse (nue mais toujours coiffée). "Miséricorde" (petite console en bois sculpté placée sous la sellette à abattement d'une stalle de choeur) de Villefranche-de-Rouergue.En France aussi, à la même époque, les stations thermales sont très fréquentées. Ainsi Flamenca, roman du 13e siècle, fait état des bains de Bourbon-l'Archambault aux vertus bienfaisantes.



    "Il y avait de nombreux établissements où tous pouvaient prendre des bains confortablement. Un écriteau, placé dans chaque bain, donnait des indications nécessaires. Pas de boiteux ni d'éclopé qui ne s'en retournât guéri. On pouvait s'y baigner dès qu'on avait fait marché avec le patron de l'hôtel, qui était en même temps concessionnaire des sources. Dans chaque bain jaillissaient de l'eau chaude et de l'eau froide.

     

    Chacun était clos et couvert comme une maison, et il s'y trouvait des chambres tranquilles où l'on pouvait se reposer et se rafraîchir à son plaisir."



    Le seigneur du lieu, le compte d'Archambault, mari jaloux, fréquente ces lieux, puisqu'il y amène son épouse pour la distraire et qu'il reste en faction devant la porte pour la surveiller. Il est vrai qu'il la conduit dans l'établissement le plus cher et le plus luxueux de la ville afin qu'elle recouvre prétendument la santé...

     

    Pour elle, il est ordonné de laver soigneusement la cuve et d'y renouveler l'eau. Ses servantes y apportent les bassins, les onguents et tout ce qui est utile au bain. Grâce à ce roman, on apprend que les hôteliers exagèrent toujours leurs prix et qu'il faut souvent marchander. Les plus belles chambres sont " à feu ", et fort bien décorées.A la fin du 15e siècle ce qui était purification devient souillure, et le bain un danger pour l'âme comme pour le corps.





    Les stations thermales, on l'a dit, attirent une clientèle variée. Mais il semble que beaucoup de curistes venaient s'y régénérer, dans l'espoir d'une nouvelle jeunesse. Ce mythe de la fontaine de jouvence, souvent attesté par les manuscrits des 14e et 15e siècles, parcourt toutes les civilisations et le lien entre les vertus médicinales et la vertu fécondante de l'eau explique ces cérémonies religieuses au cours desquelles on plonge la Vierge Marie dans un bain rituel, pour la régénérer.

     

    Au Moyen Age, on immergeait aussi les saints, le Christ. Cependant, à la fin du 15e siècle, se profile un changement complet dans les mentalités, qui s'étalera sur plusieurs siècles. L'eau estime-t-on - est responsable des épidémies et des maladies, croyance non dénuée de fondement en cette fin de Moyen Age où les tanneurs, les teinturiers, les bouchers jettent leurs déchets dans les rivières et les polluent.





    Par réaction, les médecins commencent à penser que le bain lui-même est malfaisant pour le corps, que les miasmes de la nature pénètrent d'autant plus facilement à l'intérieur du corps, que les pores sont dilatés sous l'effet de la chaleur, laissant un libre passage aux maladies.

     

    Plus question de chanter les louanges du bain :

     

    il faut se méfier de l'eau et n'en user que très modérément.

     

    Dans un tel climat, ne subsisteront des pratiques antérieures que celle des pèlerinages aux sources guérisseuses, en tout cas en France. L'Allemagne, en effet, ne se privera pas totalement du recours à ses bains.



    Cette disparition de l'hygiène dans notre pays va de pair avec une évolution de l'Eglise romaine, qui tend de plus en plus vers une rigidité morale niant le corps. L'ère de la crasse commence, et elle durera jusqu'au 20e siècle.





    SOURCES : Madame Monique CLOSSON

    - lien http://medieval.mrugala.net/Bains/Bains.htm

    photos google

     

    sources D.R.

     

     

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    LEXIQUE (Moyen Âge)

     

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    Adoubement:

    acte cérémoniel par lequel l’impétrant est fait chevalier et reçoit ses armes. A partir du XIIe siècle, l’Église s’empare du cérémonial et c’est monsieur l’évêque lui-même qui procède au sacrement, à la bénédiction de l’épée ainsi qu’à la grande messe.

     

    Alains:

    peuplade nomade issue probablement de la région iranienne. L’un de ses groupes migre vers l’Europe de l’Ouest pour venir se mêler au nombre des tribus barbares qui envahiront par la suite les anciens territoires de l’Empire romain (Gaule, Espagne, Italie, Portugal et même Afrique du Nord).

     

    Alamans:

    peuplade germanique originaire de Scandinavie et du Jütland. Au Ve siècle les Alamans se pressent eux aussi aux portes de la Gaule défendues par un empire romain agonisant. Ils finissent par s’établir en Alsace et dans une majeure partie de la Suisse.

     

    Albigeois:

    mouvement religieux qui, aux XIIe et XIIIe siècle, répand dans le sud de la France, et en particulier dans la région d’Albi, la doctrine des cathares répandue dans certaines régions d’Europe. L’Eglise lance contre les Albigeois, en 1209, une croisade, et ensuite les foudres de l’inquisition. Elle ne parvient à anéantir l’hérésie cathare dans le sud de la France qu’à la fin du XIIIe siècle.

     

    Alchimie:

    science, un brin ésotérique, qui puise ses racines dans l’Antiquité. Le but avoué est de fabriquer des métaux précieux (argent ou or) en imitant le processus naturel mais à une vitesse d’élaboration surmultipliée. L’opération finale ou grand oeuvre débouche sur la création de la pierre philosophale, facteur primordial de la transmutation des métaux. Derrière cette transmutation matérielle il y a certainement la recherche de la transmutation de l’individu qui éprouve le besoin de se sentir supérieur à ce qu’il est réellement.

    Enfin bref, la recherche d’une philosophie transcendantale voire d’une quête d’immortalité!

    En tous les cas les travaux des achimistes découcheront sur des avancées scientifiques réelles à l’Epoque moderne.

    On prête à des savants comme Newton (1642-1727) une formation d’alchimiste ou du moins des connaissances en alchimie.

     

    Alleu:

    terre libre, non soumise à l’autorité d’un seigneur.

    L’alleu roturier est la propriété de l’homme non-noble qui possède la terre et généralement la cultive. Il peut aussi être la propriété d’un noble (souvent un chevalier à cette époque) ou être un bien de l’Église dans ce cas il s’apparente à un fief.

    Si l’alleu est souverain, son propriétaire y exerce la justice.

     

    Alexiens:

    nom donné en France, en Hollande ou en Allemagne aux lollards qui sont des prédicateurs anglais obéissant aux doctrines de John Wyclif (1330-1384). Les Alexiens et les Lollards se regroupent en communautés de laïcs, affichent un costume de pénitent et une vie austère. Ils se font entre autres les fossoyeurs des pauvres gens.

     

    Angles:

    peuplade germanique qui va essentiellement jeter son dévolu sur l’Angleterre lors des grandes invasions barbares de la fin du Ve siècle. Les Angles s’installent surtout dans le nord-est de l’Angleterre.

     

    Antipape:

    pape se faisant désigner contrairement aux règles du droit canonique (majorité des membres de l’Église).

     

    Apanage:

    fief donné aux fils cadets du roi afin qu’ils renoncent à la succession au trône (revient au fils aîné).

     

    Arianisme:

    doctrine professé par Arius (V.256-336), prêtre d’Alexandrie, dans les années 300, par laquelle il nie l’existence de la Trinité (le Père, le Fils et le Saint Esprit) car, selon lui le fils, création du Père, n’est pas de toute éternité et ne peut donc être de même nature que le Père (élémentaire mon cher Watson!). Pas pour le concile de Nicée qui, en 319, déclare hérétiques les vues d’Arius.

     

    Augustins:

    ordre des Augustins, ordre mendiant fondé en 1256 par Alexandre VI. En fait des moines se réclament de Saint Augustin d’Hippone (354-430) depuis le Ve siècle (la règle de Saint Augustin n’est officiellement reconnue par les autorités ecclésiastiques qu’en 1215 au concile du Latran), mais les communautés d’ermites qu’ils forment n’ont que peu de liens les unes avec les autres. Alexandre VI en fait donc un ordre cohérent et organisé dont les membres cessent d’être des ermites pour aller conquérir le monde urbain et y prêcher ce qu’ils estiment être leur bonne parole. Les chanoines réguliers de Saint Augustin et les religieuses augustines (qui suivent aussi la règle de Saint Augustin) se joindront aux Ermites de Saint Augustin (ou Frères augustins) au sein des principaux représentants de l’ordre des augustins.

     

    Austrasie:

    royaume franc qui doit son existence au partage de celui de Clovis (465-511) (les 2 autres grands royaumes sont la Neustrie et la Burgondie). Les trois royaumes dureront jusqu’à l’avènement de Pépin le Bref (715-768) en 751. L’Austrasie comprend (en gros) la région de la Meuse et de la Moselle, l’actuel Pas-de-Calais et le département du Nord pour s’avancer de l’autre côté du Rhin au delà de Cologne et de Bonn.

     

    Avars:

    peuplade de cavaliers originaires des steppes de l’Asie centrale. Les Avars tentent de s’implanter dans la région bulgare puis poussent en direction de la Bavière. Charlemagne les bat en 796. Ils sont quasiment anéantis au IXe siècle (pour ceux qui se sont aventurés en Europe) par les Moraves.

     

    Avoué:

    laïc chargé des tâches militaires et judiciaires (qui sont interdites aux religieux) sur les terres d’une abbaye ou d’un évêché.

     

    Bailli:

    successeurs des Missi dominici d‘abord chargés d‘une mission de contrôle dans les provinces, ont ensuite la charge (milieu du XIIIe siècle) de la circonscription provinciale mais aussi juridiction royale nommée bailliage.

     

    Banalité:

    droit du seigneur (qui découle du droit de ban) à obliger ses censitaires à utiliser ses installations (four, pressoir, moulin, etc.).

     

    Banquier:

    désigne originellement celui qui procède au change des monnaies.

     

    Basilique:

    église (au sens d’édifice) des premiers temps de la chrétienté qui s’inspire sur le plan architectural des basiliques romaines , tribunal et lieu de rendez-vous, qui étaient des constructions rectangulaires (se terminant généralement en abside) et que des rangées de colonnes découpaient en nef.

     

    Beffroi:

    tour d’une construction municipale qui peut abriter l’horloge de la ville ainsi que son coffre et son sceau. Est généralement le symbole d’une municipalité urbaine autonome.

     

    Béguinage:

    communauté des béguines, femmes qui se soumettent à la vie monastique sans en prononcer les voeux perpétuels.

     

    Bénédictins:

    religieux (ses) qui suivent la règle de Saint Benoît de Nursie (v. 480- 547). Ordre fondé au début du VIe siècle.

     

    Bernardins:

    religieux (ses) de l’ordre de Cîteaux après qu’il ait été transformé par Saint Bernard de Clairvaux.

     

    Bonne ville:

    désigne à la fin du Moyen Âge, toute ville fortifiée ou chef-lieu à qui le roi accorde le droit de bourgeoisie ainsi que l’affranchissement de la taille. Afin de s’assurer généralement de la fidélité et de la loyauté de celle-ci.

     

    Bourdon:

    Bâton de pélerin.

     

    Bulles:

    Textes officiels du pape, en caractères gothiques, sur parchemin, et auxquels des boules de plomb (d’où le nom) sont attachées.

     

    Burgondie:

    royaume franc à la suite du partage du royaume originel de Clovis. Correspond à l’est de la France, ainsi qu’une partie allemande et suisse. Donnera son nom à la Bourgogne.

     

    Capitation:

    au Moyen Âge, désigne une taxe par tête due au seigneur.

     

    Capitulaire:

    ordonnance des souverains carolingiens classées par chapitres. En général les capitulaires sont promulgués oralement avant d’être écrits.

     

    Carolingiens:

    dynastie des Carolingiens, fondée par Charlemagne (768-814)

     

    Carmes:

    ordre de Notre Dame du Mont Carmel fondé en 1207 ou 1209 au mont Carmel. Les Carmes sont astreints à un ascètisme qualifié de rigoureux. Les Carmélites appartiennent à la fraction féminine de l’ordre des Carmes qui a été fondée en 1451.

     

    Cénobite:

    Moine qui vit en communauté. Ce terme est essentiellement employé dans le christianisme des premiers temps, alors qu’il exite nombre de moines qui vivent seuls (les anachorètes) afin de les différencier.

     

    Chanoine:

    membre du clergé qui sert (célèbre l’office) dans une cathédrale (église de l’évêque) ou dans une collégiale (église qui, bien que n’étant pas celle du siège de l’évêque comprend néanmoins un collège de chanoine). Le chanoine (de la première règle en 755) est soumis à une règle monastique (dortoirs et réfectoires communs). A partir du synode de Rome de 1059, les chanoines se divisent en chanoines séculiers et chanoines réguliers. Les chanoines séculiers adoptent le même mode de vie que le reste du clergé, séculier. Les chanoines réguliers mènent, eux, une vie monastique, renoncent à tous biens matériels et suivent la règle de Saint Augustin d’Hippone. Certaines cathédrales et certains chapitres de cathédrale régulariseront leur chapitre (la communauté des chanoines) mais dans l’essentiel cette régularisation des chanoines se fait par la création de nouvelles congrégations ou par la réforme de certaines communautés déjà existantes. Les chanoines réguliers de Saint Augustin ne formeront qu’une composante de l’ordre des augustins avec les Ermites de Saint Augustin (dits aussi Frères augustins) et avec les religieuses augustines.

     

    Chapitre:

    le groupe des chanoines d’une cathédrale ou d’une collégiale.
    Mais aussi


    _ l’assemblée de moines (voire de moniales ou de chanoines) qui délibèrent des affaires dont ils ont la charge.


    _ le lieu où se font ces réunions dans un monastère parce qu’elles commencent originellement par la lecture d’un chapitre de leur règle.


    _ Chapitre cathédral: le groupe de religieux qui conseille l’évêque, et assure « l’intérim » en cas d’empêchement de ce dernier.


    _ Chapitre collégial: même fonction que le chapitre cathédral mais dans une église.

     

    Charte:

    acte juridique qui réglemente des intérêts ou accorde des privilèges:

    1. Charte de franchise: Charte qui précise à une communauté ses devoirs vis-à-vis du seigneur. Les bourgeois y gagnent en liberté et les serfs sont affranchis. Cela débouche parfois sur la création par ces bourgeois d’une administration municipale.
    2. Charte de communes: Accorde d’entrée l’autonomie au corps municipal, formé des échevins, par lequel la ville se gère elle-même.

     

    Chartreux:

    ordre des Chartreux fondé en 1084 par Saint Bruno (v. 1035-1101) au massif de la Grande Chartreuse.

     

    Cens:

    redevance due au seigneur par le détenteur d’une terre non-noble.

     

    Censive territoire non-noble soumis au cens envers un seigneur. Le tenancier, propriétaire utile de sa terre est soumis à la propriété dite éminente du seigneur. D’où redevances envers le seigneur.

     

    Chevalerie:

    ordre des chevaliers qui oblige à un code de conduite le soldat cavalier. La Chevalerie apparaît à la fin du Xe siècle. L’Eglise peu à peu impose à la chevalerie ses règles.

     

    Cisterciens:

    ordre des cisterciens fondé en 1098 à Cîteaux par Saint Robert de Molesme (1027-1111).

     

    Cité:

    territoire dont le chef-lieu est une ville sous l’Empire romain et au début du Haut Moyen Âge. La Cité s’efface peu à peu face au diocèse.

     

    Clarisses:

    ordre féminin des clarisses fondé en 1212 par Sainte Claire (1193-1253).

     

    Cluny:

    ordre de Cluny fondé vers 910 par Saint Bernon (850-927).

     

    Collégiale:

    église d’un couvent de chanoines réguliers.

     

    Commenda:

    contrat par lequel un commerçant qui voyage, s’engage à développer le capital qu’un sédentaire lui a remis.

     

    Complant:

    contrat passé entre un propriétaire et un paysan par lequel le paysan cultive les terres du propriétaire et en garde la moitié des revenus pour lui.

     

    Concile:

    assemblée d’évêques et de théologiens où sont abordés les points de doctrine qui posent problème ou les points de discipline religieuse.

     

    1. Concile provincial: Assemblée des évêques d’une province ecclésiastique.
    2. Concile national: Assemblée des évêques d’un pays.
    3. Concile général ou oecuménique: Assemblée convoquée par le pape.

     

    Confessio:

    endroit d’une église (généralement le chevet) où sont exposés les reliques d’un saint.

     

    Confrérie:

    association de laïcs qui s’associent dans un but religieux qui est généralement celui de vivre en commun leur foi.

     

    Coquillards:

    les pélerins de Saint-Jacques de Compostelle, mais aussi les malfaiteurs qui se font passer pour tel, animés qu’ils sont de desseins nettement moins recommandables.

     

    Coutumes:

    lois orales le plus souvent issues du droit barbare qui sont en vigueur dans telle ou telle province (moins fréquente dans le sud essentiellement régi par le droit romain ou ce qu‘il en reste).

     

    Convers:

    religieux qui est plus particulièrement destiné aux tâches matérielles dans un monastère ou une abbaye et qui est déchargé d’une bonne partie des obligations religieuses auxquelles sont astreints les autres moines (contrairement à eux, il n’est pas prêtre). Frère convers.

     

    Croisade:

    expédition militaire, pélerinage guerrier destiné à délivrer les lieux désignés saints du côté de Jérusalem, par la chrétienté, et qui sont passés entre les mains des musulmans. Désigne par la suite toute expédition guerrière déclenchée contre des mouvements dits hérétiques.

     

    Débite:

    Impôt ecclésiastique, en Normandie, d’un denier par habitant de la paroisse. Il est institué au XIe siècle.

     

    Décime:

    impôt dû au roi ou au pape et touchant les revenus ecclésiastiques. N’est levé, au Moyen Âge, qu’extraordinairement.

     

    Dîme:

    dixième partie de la récolte qui revient au clergé dans le cadre d’une paroisse. L’Etat carolingien à partir des années 585 transforme cet impôt religieux en en une pratique civile étendue à la société toute entière et en assure si besoin est, le bon fonctionnement.

     

    Diocèse:

    circonscription administrative, mise en place à la fin du IIIe siècle par l’empereur Dioclétien (245-313)et qui comprend plusieurs provinces. Le terme désigne ensuite la circonscription ecclésiastique de l’évêque ou de l’archevêque.

     

    Dominicains:

    ordre religieux dits des Prêcheurs (la prédication est leur première fonction) fondé en 1214 à Toulouse par Saint Dominique dans le but de faire se propager la foi et dans celui de lutter contre les hérésies.

     

    Droit de ban:

    pouvoir économique, judiciaire et militaire dont disposent le seigneur sur ses vassaux ou sur ses censitaires. Ce pouvoir peut être partagé entre plusieurs seigneurs sur un même lieu.

     

    Droit de dépouille:

    droit du roi à s’approprier les biens d’un évêque qui vient de décéder.

     

    Écorcheurs:

    membres de la soldatesque qui ont exercé sous les règne de Charles VI (1368-1422) et de Charles VII (1403-1461) le pillage de plusieurs provinces de France et ce jusqu’à la fin de la Guerre de Cent ans

     

    Échevins:

    auxiliaires qui participent à la justice seigneuriale avant de devenir des magistrats municipaux

     

    Échiquier: deux définitions.

    1. Tapis quadrillé qui sert au banquier pour établir ses comptes. Devient ainsi le nom désignant le ministère des Finances en Grande-Bretagne.
    2. Cour de justice des ducs de Normandie qui juge en dernier ressort. Quand Philippe Auguste (1165-1223) annexe la Normandie à la Couronne de France en 1204, il conserve cette cour qui prend le nom d’Échiquier de Normandie. Sous François 1er(1494-1547), elle devient le Parlement de Rouen.

     

    Ecuyer:

    apprenti du chevalier qui le sert durant toute cette période. Devient à partir du XIII e un titre de noblesse (dernier échelon).

     

    Enclosure:

    clôture des terres qui met fin à la pratique des terres mis au service de la communauté villageoise.

     

    Evêque:

    l’ecclésiastique qui dirige le diocèse. L’archevêque, lui, dirige une province ecclésiastique (plusieurs diocèses). L’archevêque est aussi appelé évêque métropolitain car la ville où il siège est la métrople, le « chef-lieu » juridictionnel d’une province ecclésiastique

    Famuli:

    les laïques qui travaillent dans un monastère.

     

    Fabrique:

    conseil qui gère les biens d’une église et qui est formé par des laïcs. Cette institution prend corps au XIIe siècle alors que les chantiers d’église sont légions.

     

    Fédérés:

    barbares engagés par Rome dans ses légions afin de défendre l’Empire contre les autres barbares. Ils y gagnent des terres et le droit d’exercer leurs us et coutumes.

     

    Fibule:

    agrafe, broche ou boucle en bronze ou en métal précieux qui sert à attacher les vêtements. Du moins jusqu’au XIe siècle. Que se passe-t-il au XIe siècle? On invente le bouton!

     

    Fief:

    domaine ou partie d’un domaine (cela peut aussi être un bien quelconque) cédé par un seigneur à un vassal. Domaine noble.

     

    Finage:

    Territoire sur lequel un seigneur, ou une ville, exerce sa juridiction.

     

    For ecclésiastique:

    droit que possède l’Église de juger ses membres. Et qu’elle perdra peu à peu.

     

    Fosterage:

    désigne le fait de confier un jeune noble à un autre seigneur afin de l’éduquer.

     

    Franciscains:

    ordre des Franciscains (ordre dit mineur: ses membres ne sont pas ordonnés prêtres) fondé vers 1210 par Saint François d’Assise (1182-1226). Les Franciscains sont aussi appelés Cordeliers. Aux Temps modernes, l’ordre des Franciscains se fractionnera en plusieurs branches: les Cordeliers (les Observantins qui suivent la « règle » officielle de l’ordre) et des groupes dits de la « stricte observance » comme les Capucins ou encore les Récollets qui entendent observer la « règle » de Saint François telle qu’elle a été originellement conçue et non comme elle a été « reformée ».

     

    Francs:

    diverses tribus de la rive droite du Rhin inférieur qui s’unissent au IIIe siècle en une ligue guerrière (franci) contre l’empire romain.

     

    Freda:

    tiers des amendes judiciaires qui va au roi sous les Carolingiens.

     

    Geste:

    ensemble des poèmes épiques qui chantent les exploits souvent légendaires des héros ou des monarques. La geste de … ou encore chanson de geste.

     

    Goth:

    première peuplade germanique à s’installer dans l’empire romain (IIIe et VIe siècle).

     

    Gothique:

    style architectural en vogue du XIIe au XVIe siècle en Europe et qui caractérisent les églises tout en hauteur, inondées de lumière et de décorations et qui ont nécessité l’introduction de techniques nouvelles comme l’arc brisé, la voute sur croisée d’ogives ou encore l’arc-boutant.

     

    Grand Schisme:

    schisme qui divise l’Église de 1378 à 1414 où plusieurs papes sont élus en même temps et se font concurrence. Résolu par le Concile de Constance (1414-1418).

     

    Grandes Compagnies:

    troupes de mercenaires levées pour combattre durant la Guerre de Cent ans et qui se livrent le plus souvent au pillage durant les périodes de trêves.

     

    Guerre folle:

    nom donné à la révolte des nobles qui se soulèvent contre le pouvoir royal durant la régence (1483-1491) assurée par Anne de France (1460-1522).

     

    Guilde:

    association où se rassemblent les membres d’une corporation ou d’un groupe ayant des intérêts équivalents (marchands, artisans, métiers des arts, etc.).

     

    Haubert:

    chemise de maille avec des plaques rigides aux endroits du corps jugés les plus vulnérables et qui remplace vers le XIIe siècle la cotte de maille.

     

    Heaume:

    casque qui protège entièrement la tête (seules des fentes au niveau des yeux sont percées) et qui repose sur les épaules du chevalier.

     

    Hérésie:

    au sein de l’Église catholique se dit d’une doctrine qui va à l’encontre d’un point fondamental de la foi tel qu’il est professé officiellement.

     

    Honneur:

    bien immobilier en guise de salaire pour l’exercice d’un poste ou d’une charge politique. Quand la personne quitte sa charge, elle ne dispose plus de ce bien.

     

    Horloge:

    Les premières horloges mécaniques datent du XIIIe siècle et sont installées en haut des clochers ou des beffrois. Avec la miniaturisation du principe, la montre, elle, apparaît à la fin du XVe siècle.

     

    Hospitaliers:

    Ordres religieux qui se donnent pour mission le soin et l’assistance des personnes dans le besoin. on trouve notamment:


    _ L’ordre des chevaliers de l’Hôpital ou des hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem fondé après la création du royaume latin de Jérusalem (Croisades) vers 1113 afin de porter secours et assistance aux pélerins. Cet ordre uniquement charitable au départ devient par la suite aussi un ordre de religieux combattants chargé de la défense des Etats latins de Terre sainte à l’instar des Templiers.


    _ L’ordre des hospitaliers de Saint-Antoine-du-Viennois ou des antonins, du nom de l’abbaye fondatrice de Saint-Antoine-du-Viennois (de la ville de Vienne en Isère), fondé vers 1070. Cet ordre uniquement charitable se destine à l’acceuil et le soin, dans des maladrerie, des lépreux ou des personnes atteintes de zona

    (« le feu de Saint-Antoine »).


    _ L’ordre des hospitaliers du Saint-Esprit, fondé à Montpellier en 1198. Ordre uniquement charitable dont la principale fonction est la tenue d’hospices ou d’hôpitaux.

     

    Hôtel-Dieu:

    Etablissement hospitalier ou hospice placé sous la direction de l’évêque.

     

    Huns:

    peuplade d’origine turco-mongole, nomade, qui est à l’origine des grandes invasions des IVe et Ve siècle.

     

    Indulgence:

    rémission totale et partielle qu’accorde l’Église vis-à-vis des péchés qui mériteraient des peines temporelles. Ce qui va déboucher sur un véritable commerce. Les nantis se voyant , moyennant finances, accordés facilement des indulgences. Ce contre quoi s’élèvera principalement Luther (1483-1546).

     

    Inquisition:

    institution judiciaire au service de la papauté chargée de pourchasser, juger et condamner (le plus souvent) les personnes soupçonnées d’hérésie. Les dominicains en sont les principaux maîtres d’oeuvre.

     

    Jacquerie:

    nom donné à la révolte des paysans (les Jacques) de l’Île de France, du Beauvaisis et de la Brie en mai-juin 1358.

     

    Jubilé:

    origine hébraïque désignant la corne du … bélier dans laquelle on sonnait le début de la nouvelle année. L’Eglise catholique, par l’intermédiaire de son pape Boniface VIII (1235-1303) reprend ce terme à son compte en 1300 afin de désigner les années où les fidèles bénéficient de l’indulgence ecclésiastique vis-à-vis de leur vilaines actions s’ils se rendent en pélerinage dans les 4 principales basiliques du Vatican. L’intervalle entre 2 jubilés est défini depuis l’an 1475 à 25 ans.

     

    Jutes:

    peuplade germanique du Jütland qui va peupler une petite partie du sud-est de l’Angleterre (Kent).

     

    Lige:

    Homme lige, vassal lié à son seigneur par un serment de fidélité

     

    Limes:

    frontières fortifiées de l’Empire romain: limes de Germanie ou de Bretagne (frontière entre l’Angleterre et l’Écosse connue aussi sous le nom du Mur d’Hadrien).

     

    Lollards:

    disciples de John Wyclif (1328-1384), théologien et « pré-réformateur » anglais condamné comme hérétique. Le nom de lollard vient du verbe lollen qui signifie marmonner comme leur façon de chanter leurs psaumes. Leur principale caractéristique est un mode de vie austère.

     

    Livello:

    contrat d’une durée de 29 ans, renouvelable, par lequel un propriétaire cède son droit de propriété à un paysan libre.

     

    Loge:

    pièce, local où se rassemblent les tailleurs de pierre qui se transmettent leur savoir. Vous savez désormais d’où vient le vocable loge maçonnique.

     

    Lotharingie:

    royaume qui revient à Lothaire 1er (795-855) suite au traité de Verdun en 843 et qui comprend initialement les Pays-Bas, l’Alsace, la Lorraine, la Bourgogne, la Provence et une partie de l’Italie. Pour ne plus être former que de la Lorraine qui doit justement son nom à la Lotharingie.

     

    Mall:

    tribunal royal que préside le comte (époque mérovingienne et carolingienne).

     

    Maire du palais:

    intendant du palais à l’époque mérovingienne. Devient à la fin de cette époque le gouverneur quasi-officiel du royaume

     

    Manse:

    le manse est l’unité d’exploitation qui est institué à partir des Carolingiens. Il comprend la maison et ses dépendances, le jardin et la quantité de terre cultivable par une famille (10 à 20 hectares). On distingue trois sortes de manses:

     

    1. manses serviles: détenus par les serfs.
    2. manses lidiles: détenus par les affranchis.
    3. Manses ingénuiles: détenus par les paysans libres.

     

    Marche:

    zone tampon aux frontières d’un royaume ou d’un État afin de le prémunir contre les invasions ennemis.

     

    Matricule:

    registre des pauvres soutenus par une église ou un monastère.

     

    Ménestrel:

    poète, chanteur ou musicien au sein d’une cour.

     

    Mense:

    la mense est le revenu destiné à l’entretien d’une personne ou d’une communauté religieuse. La mense d’un évêché est composée de la mense épiscopale qui revient à l’évêque et de la mense capitulaire qui revient aux chanoines et qui est divisée en autant de prébendes que de membres. Au niveau monastique, la mense abbatiale revient à l’abbé alors que la mense conventuelle revient aux moines.

     

    Mérovingiens:

    dynastie des Mérovingiens, fondée par Mérovée (?-458) le papa de Clovis

     

    Minimes:

    ordre des minimes fondé vers 1450 par Saint François de Paule (1416-1507).

     

    Missi dominici ou Vassi dominici: sous les Carolingiens, envoyés du roi dans les provinces afin de rendre compte de la conduite des comtes dans les provinces.

     

    Moines blancs:

    désignent les chanoines qui suivent une règle et les cisterciens .

     

    Moines noirs:

    désigne les bénédictins (VIe siècle) .

     

    Moniale:

    nom qui désigne les religieuses, l’équivalent de moine au féminin.

     

    Monnaie:

    le denier hérité de la monnaie romaine, est la seule pièce en circulation. Charlemagne impose le système de deux monnaies de compte, la livre (240 deniers) et le sou (12 deniers). On paye donc avec des deniers en sou et en livre. Ce système dans ses grands principes va perdurer jusqu’à la Révolution.

     

    Motte:

    désigne le plus souvent une tour en bois entourée d’une palissade, le tout situé sur une butte de terre (motte) elle-même protégée par des fossés remplis d’eau ou non, et servant de fortification jusqu’au XIe siècle, date de l’apparition des donjons de pierre puis des châteaux forts.

     

    Moulin:

    le moulin à eau existe depuis l’Antiquité. Au Moyen Âge, on l’utilise pour moudre, tanner, aiguiser ou encore pour brasser (bière). Le moulin à vent n’apparaît dans le royaume de France que fin XIIe – début XIIIe siècle.

     

    Neustrie:

    royaume franc suite au partage du royaume de Clovis. Correspond à l’ouest de la France, hormis la Bretagne (on est les descendants d‘Astérix ou on ne l‘est pas!).

     

    Nicolaïsme:

    désigne les prêtres qui vivent en ménage avec la personne de leur choix.

     

    Oblats:

    enfants que les parents confient (ou abandonnent) aux moines afin qu‘ils les éduquent et en fassent l’un des leurs.

     

    Office divin:

    Ensemble des prières et des cérémonies religieuses, seulement suivies en toute rigueur par les moines, en fonction des heures de la journée, des jours de la semaine et des différentes saisons. En ce qui concerne l’office bénédictin, ces « heures canoniales » peuvent être ainsi et sommairement présentées:


    _ Matines: Première heure canoniale et partie de l’office célèbrée avant la levée du jour.


    _Laudes: Deuxième heure canoniale célébrée à la levée du jour.


    _ Prime: troisième heure canoniale et « première heure » du jour (ou « petites heures »).


    _ Tierce: quatrième heure canoniale et « toisième heure » du jour.


    _ Sexte: cinquième heure canoniale et « sixième heure » du jour (dans les environs de midi)


    _ None: sixième heure canoniale et « neuvième heure » du jour (la dernière des « petites heures »), célébrée avant le premier repas (le seul, les jours d’hiver)..


    _ Vêpres: septième heure canoniale, partie de l’office célèbrée à la tombée de la nuit, le soir.


    _ Complies: huitième heure canoniale et partie finale de l’office célébrée avant le coucher ou avant le second repas, l’été.

     

    Officialité:

    tribunal d’Église créé pour règler les différends au sein de l’institution.

     

    Ordalie:

    épreuve judiciaire par l’eau ou le feu, imposée au suspect sur qui on ne peut réellement se prononcer. C’est le jugement de Dieu, celui qui en triomphe est acquitté.

    Ordres mendiants:

    ordre religieux implantés dans les villes à partir du XIIIe siècle: franciscains (1210), dominicains (1215), Carmes (1156), Augustins (1256), Clarisses (1212), Minimes (1474)…. Leur principale mission est de convertir les personnes à la foi chrétienne telle qu’elle est prêchée par l’Eglise catholique romaine.

     

    Praguerie:

    révolte des nobles qui se soulèvent en 1440 contre Charles VII (1403-1461) et à laquelle participe activement son fils, le futur Louis XI (1423-1483).

     

    Pagus:

    autre nom du comté à l’époque mérovingienne, devient une subdivision du comté avec les Carolingiens.

     

    Plaid:

    sous les Carolingiens et dans les territoires germaniques, réunion annuelle ou bi-annuelle des hommes libres réunis par le roi afin de partir en guerre ou afin de prendre des décisions importantes.

     

    Portulan:

    recueil compilés par les navigateurs de la fin du Moyen Âge et du début de la Renaissance et qui comprend les informations nécessaires à la navigation, la position des ports et aussi des cartes des côtes.

    Pouillé:

    registre des bénéfices d’un diocèse ou plus généralement d’une circonscription ecclésiastique.

     

    Prébende:

    part de la mense qui revient à un et un seul chanoine (séculier) pour son entretien.

     

    Prévôt:

    désigne au départ un intendant domanial, puis un agent royal.

     

    Prieur:

    Supérieur d’un prieuré. Et, dans le cas d’une abbaye, le second de l’abbé.

     

    Prieuré:

    monastère sous la dépendance d’une abbaye mère. La définition, là encore, n’est que générale dans certains ordres comme celui des augustins le prieuré est parfois un monastère indépendant au sein de cet ordre. Dans le cas du prieuré, le prieur ne dépend pas d’un abbé, il en est le seul chef.

     

    Primat:

    titre donné à l’archevêque d’une métropole plus illustre que les autres.

     

    Reliques:

    objet ou reste d’un saint conservé pieusement dans certaines églises et qui sont parfois sources de pélérinage au même titre que les tombeaux de saints ou devant lesquelles les pélerins se recueillent alors qu’elles sont sur la route ou proche de la route du lieu de leur pélerinage.

     

    Révolte des maillotins:

    révolte des Parisiens qui se soulèvent suite à la promulgation d’un nouvel impôt indirect en 1382. On les surnomme les maillotins car ils sont armés de maillets.

     

    Roman:

    style architectural qui essaime l’Europe occidentale et centrale aux XIe et XIIe siècle. Il est l’héritier de l’architecture des basiliques romaines et des églises carolingiennes, avec des chapiteaux richement décorés et nombre de fresques.

     

    Rotation:

    terme agricole qui désigne l’alternance sur une même terre de plusieurs cultures ainsi que d‘une période de mise en jachère: rotation biennale (sur 2 ans) ou triennale (sur 3 ans). L’Assolement, lui, désigne la division des terres d’un village en quartiers ou soles, avec obligation pour tous les cultivateurs de pratiquer la même culture sur un même quartier. L’assolement suppose une rotation mais l’inverse n’est pas obligatoire.

     

    Saxons:

    peuplade germanique qui envahit l’Angleterre à partir du Ve siècle (sud de l‘île).

     

    Scolastique:

    Système philosophique et pédagogique qui entre dans les écoles puis dans les universités vers le XIIe siècle et qui privilégie l’argumentation, la rationnalitation de la pensée au détriment du mysticisme.

     

    Scots:

    Peuplade celte d’Irlande qui peuple la côte ouest de l’Écosse au VIe siècle.

     

    Scriptorium:

    atelier de copie des manuscrits. A l’époque carolingienne et durant une grande partie du Moyen Âge, ce travail est uniquement l’œuvre des monastères.

     

    Sénéchal:

    officier de la maison du roi sous les Mérovingiens, chargé d’apporter les plats. Puis, sous les Carolingiens et les premiers Capétiens, le principal officier de la Couronne. Il devient à la fin du Moyen Âge et sous l’Ancien Régime, l’officier royal qui, dans les provinces du sud, revêt les pouvoirs du bailli.

     

    Seigneurie:

    souveraineté du seigneur sur les terres dont il est le propriétaire et sur ses habitants.

      

    La seigneurie peut être divisée en 3 types:

     

    1. Seigneurie domestique: pouvoir que le seigneur exerce sur ses gens, ses domestiques, les non-libres, les serfs.

     

    1. Seigneurie foncière: propriété du seigneur qui comprend la réserve seigneuriale (ou domaine) qui est exploitée directement en sa faveur et les tenures paysannes nommées Manses ou Censives qui sont des unités d’exploitation permettant d’assurer la subsistance d’une famille.

     

    1. Seigneurie banale: le seigneur en échange de sa protection militaire, et de son exercice de la Justice reçoit en contrepartie des services et la perception de droits divers. Sont concernés les habitants de sa seigneurie foncière, mais aussi ses vassaux et encore les alleutiers qui sont des petits propriétaires libres, là où l’alleu est autorisé (Midi, Auvergne…).

     

    Pour les droits seigneuriaux, voir Temps Modernes/Glossaire.

     

    Septimanie:

    Clovis (465-511) roi des Francs ne peut ravir aux Wisigoths certaines cités du sud-est: Carcassonne, Béziers, Agde, Lodève, Nîmes, Uzès et Elne. Ces cités, au nombre de sept, se regroupent pour former la Septimanie.

     

    Sergent:

    désigne un agent de second ordre au sein de la gestion domaniale.

     

    Servage:

    condition du serf indissociablement lié à la terre qu’il cultive et dépendant en quasi-totalité du seigneur à qui elle appartient.

      

    La servitude comprend plusieurs conditions:

     

    • Taillable à merci:
    • Redevable de la Taille
    • Corvéable à merci:
    • Astreint à la corvée
    • formariage:
    • Si le serf épouse une femme libre ou qui appartient à une autre seigneurie, il lui communique sa servitude.
    • Droit de suite ou de poursuite:
    • Le seigneur peut faire rechercher le serf où qu’il aille.
    • Mainmorte:
    • En règle générale (grande variation, là encore selon les endroits), les biens du serf, ne peuvent être légués à ses descendants que s’ils vivent avec lui, sinon tout (ce qui entre dans la mainmorte selon qu’elle soit de biens meubles et immeubles ou foncière ou seulement de meubles ou, pour finir, d’héritages (seulement les biens serviles)) revient au seigneur (c’est l’échute).

     

    Simonie:

    commerce de pouvoirs spirituels ou de charges ecclésiastiques.

     

    Slaves:

    peuple d’une partie de l’Europe centrale et orientale. Grosso modo, de la Pologne à la Russie européenne.

     

    Suèves:

    peuplade germanique originaire d’Europe centrale qui participe aux côtés des Alains et des Vandales aux grandes invasions .

     

    Système Féodal
    :
    Exemple pris dans le duché de Normandie (principauté territoriale de pointe (en matière féodale) aux X
    e
    – XII
    e
    siècle).

     

    Le Duc
     
    Prince territorial est le suzerain (seigneur en chef) du duché, qui a lui-même pour suzerain le roi de France.

     

    Le fief de chevalier encore appelé fief de haubert
     
    C’est l’unité de base de la féodalité: un fief destiné à un chevalier au service du duc (vassal) et qui doit lui fournir assez de revenus pour mener un train de vie conforme à son rang et pour financer ses frais de guerre puisqu’il doit à son suzerain l’ost (service militaire fixé en général à 40 jours tous les ans ou plus si les « heures sup » sont payées). Un fief de chevalier peut aller de 200 à 600 hectares.

     

    La vavassorie
     
    Est une sous-unité du fief de chevalier, destiné au « vassal du vassal », le vavasseur. Les vavasseurs forment l’arrière-ban de l’armée du prince. Ils sont astreints à un équipement militaire moindre que les vassaux directs (barons ou tenants d’un fief de chevalier) du prince.

     

    la baronnie ou Grande seigneurie
     
    C’est l’unité supérieure. Elle est généralement composée de plusieurs fiefs de chevalier. Les barons forment l’aristocratie de la principauté. Une baronnie peut être ecclésiastique. Le seigneur ecclésiastique doit alors au prince le service d’un certain nombre de chevalier.

     

    L’aide
     
    C’est un service que doit le vassal à son suzerain. L’aide se divise en plusieurs obligations, dont:

     

    • L’Ost. Le service d’Ost est donc un service militaire d’une quarantaine de jours. Parmi les diverses obligations militaires, on trouve aussi le service d’escorte ou encore le service de garde par lequel le vassal prend part à la garde des châteaux de son suzerain

     

    • l’aide judiciaire.
    • Le vassal répond pour son suzerain si besoin.
    • L’aide financière. Dans certains cas (demande de rançon (seigneur captif), chevalerie du fils aîné, ou bien mariage de la fille ainée du seigneur, départ pour les croisades, etc.), le vassal doit financièrement venir au secours de son suzerain.
    Le conseil
     
    le vassal doit à son seigneur un service de cour, donne son avis (conseil), participe au tribunal qui exerce la justice telle qu’elle est impartie au suzerain

     

    les comtes et vicomtes
     
    Vestiges de l’époque mérovingienne, le comte est remplacé par le vicomte. Le vicomte est le fonctionnaire au service du prince qui exercent les fonctions administratives, judicaires et policières en son nom (d’anciens comtés subsistent dans leur fonction et appelation d’origne parallèlement aux vicomtés). Après le XIIe siècle, le vicomte va être supplanté par le Bailli, officier qui administre plusieurs vicomtés.

     

    Templiers:

    ordre du Temple ou des templiers, fondé vers 1119 à Jérusalem.

    Ordres de religieux combattants (voir Templiers).

     

    Tonlieu:

    taxes sur les marchandises au passage d’un pont, d’un fleuve ou de l’entrée d’une ville.

     

    Tenure:

    Biens (terre, maison…) cédés par un seigneur.

     

    1. Tenure en bourgage: tenure proposée par le seigneur lors de la création d’un nouveau village ou d’un nouveau bourg. Les charges sont sensiblement plus légères que les tenures en censive traditionnelles et ce pour attirer de nouveaux habitants.

     

    1. Tenure en censive: Le tenancier possède la terre contre paiement de redevances seigneuriales. Tenure non-noble.

     

    1. Tenure en fief: Tenure noble, le seigneur la cède à un vassal.

     

    1. Tenure en franc-alleu: Le tenancier possède la terre en franchise (n’est pas sujette à la dépendance ni aux redevances seigneuriales). Concernent essentiellement les provinces du sud (Languedoc, Dauphiné, Gascogne, Guyenne ou Auvergne).

     

    Tournoi:

    combat, pour ne pas dire rituel, devant une assistance et selon des règles bien établies entre chevaliers ou groupe de chevaliers.

     

    Trois ordres:

    les trois ordres, division sociale entre ceux qui prient (les religieux), ceux qui combattent (les chevaliers) et ceux travaillent (le restant et la grande majorité).

     

    Troubadour:

    poète occitan des XIIe et XIIIe siècle qui chante les vertus de l’amour courtois et de l’idéal chevaleresque du défenseur de la veuve et l’orphelin. Son équivalent nordiste est le trouvère.

     

    Université:

    communauté d’étudiants et d’enseignants (maîtres) qui comporte généralement 4 facultés (arts, théologie, droit et médecine) et qui fonctionne selon le même principe que les corporations sauf qu’elle est seulement dépendante de l’Église et principalement du pape.

     

    Vandales:

    peuplade germanique orientale qui participe aux grandes invasions et ne s’arrête qu’en Afrique du nord.

     

    Vaudois:

    mouvement chrétien mais hérétique fondé en 1173 par Pierre Valdo (v. 1140- v. 1217) en 1173 à Lyon. Les pauvres de Lyon se séparent de l’Église car ils reprochent à cette dernière son attachement aux biens matériels. Ils se basent essentiellement sur le Nouveau Testament et ils sont comme les Albigeois excommuniés et pourchassés. Comme eux ils se sont implantés dans le sud de la France (ainsi qu’en Espagne et en Italie). Ils tiennent jusqu’à l’avènement de la Réforme en France en 1532. Une partie d’entre eux émigrera ensuite en Uruguay ou en Argentine. L’autre restera en Europe où elle parviendra à se maintenir.

     

    Vicaire:

    l’assistant du curé de la paroisse.

     

    Vikings:

    navigateurs scandinaves qui quittent leurs terres à partir de la fin du VIIIe siècle jusqu’au XIe siècle et pillent les pays côtiers qu’ils visitent, parfois y font du commerce et parfois encore s’y installent.

     

    Wisigoths:

    peuplade germanique affiliée aux Goths qui s’en va envahir l’Italie et le sud de la Gaule (Aquitaine). Clovis (465-511) les repoussent en Espagne.

     

    http://lionelcoutinot.club.fr/moyenage/lexique.html

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    Traduction du mot Templier dans toutes les Langues

     

     

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    Allemand
    Templier = Templer

    Anglais
    Templier = Templar

    Arabe
    Templier = الداوي فرسان الهيكل

    Bulgare
    Templier = Тамплиер

    Catalan
    Templier = Templer

    Chinois (simplifié)
    Templier = 武士

    Chinois (traditionnel)
    Templier = 武士

    Coréen
    Templier = 템플

    Croate
    Templier = Student

    Danois
    Templier = Templar

    Espagnol
    Templier = Templario

    Finnois
    Templier = Templar

    Grec
    Templier = Του Ναού

    Hébreu
    Templier = היכל

    Hindi
    Templier = टमप्लर

    Indonésien
    Templier = Kelenteng

    Italien
    Templier = Templare

    Japonais
    Templier = テンプル騎士団

    Letton
    Templier = Templiešu

    Lituanien
    Templier = Tamplierius

    Néerlandais
    Templier = Templar

    Norvégien
    Templier = Templar

    Polonais
    Templier = Templariusze

    Portugais
    Templier = Templário

    Roumain
    Templier = Templierilor

    Russe
    Templier = Храмовник

    Serbe
    Templier = Студент

    Slovaque
    Templier = Templářské

    Slovène
    Templier = Študent

    Suédois
    Templier = Templar

    Tchèque
    Templier = Templářské

    ukrainien
    Templier = Храмовнік

    vietnamien
    Templier = Đền

     

     

     

     

     
     
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    Né à Taverny, à la lisière de la forêt de Montmorency, coin bourré de souvenirs historiques et biberonné dès l’enfance par la lecture de Walter Scott, les aventures d’Ivanhoé et de Robin des bois, le médiéviste Jacques Rossiaud explore ce qu’il se passait dans la chambre à coucher de nos lointains aïeux dans son dernier livre, "Sexualités au Moyen Age".
     
     
    L'auteur Guillaume Roche
     
     

    Pourquoi vous intéressez-vous au Moyen Âge ?


    J’ai choisi la période médiévale comme champ de recherche car elle est à la fois proche et distante : on comprend mieux les gens du Moyen-Âge que ceux de l’Antiquité car c’est moins éloigné dans le temps. Il y a aussi un dépaysement car cette époque est celle du merveilleux, des fées, des nains et des gnomes.

     

    Et comment avez-vous découvert les mœurs sexuelles de cette époque ?


    J’ai fait de l’archive urbaine le long du Rhône et de la Saône, travaillé à propos des bateliers, les sociétés du fleuve et tout ce qui concerne les faits de la jeunesse, de mœurs.

     

    Et il se trouve que je me suis intéressé à la prostitution en tombant sur des séries d’archives exceptionnelles à Dijon.

     

    J’ai ensuite écrit des articles sur la prostitution médiévale.

     

    Puis la prostitution est aussi une affaire de sexualité

    et cela intéresse tout le monde !

     

    Est-ce facile de retranscrire l’atmosphère d’une époque, ses mœurs ?


    Non, ce n’est pas facile ! Connaître une époque nécessite de très longues lectures et une pénétration des œuvres médicales, littéraires et théologiques pour restituer les manières de penser des hommes.

     

    Pourquoi l’Église s’est intéressée à la sexualité ?


    Le Christianisme s’est préoccupé des questions sexuelles par réaction à l’Orient et à des sectes qui prônaient une très grande liberté de mœurs.

     

    La pensée chrétienne s’est aussi développée à un moment où nous pensions que les temps étaient courts et que le jour du Jugement dernier allait arriver.

     

    Comment était la sexualité durant l’Antiquité ?


    A Rome, elle est fondée sur une morale très austère depuis le Ier siècle. La prostitution est tolérée, une place est faite à la bisexualité.

     

    Par contre, les choses étaient rigoureuses pour le mariage.

     

    Les considérations sur le comportement sexuel s’expliquent durant l’Antiquité païenne par des raisons médicales et elles ont été transférées dans la sphère de la morale, du bien et du mal, au temps du christianisme.

     

    Pourquoi au Moyen Âge l’acte amoureux doit s’accomplir avec parcimonie ?


    L’éjaculation fatigue le corps parce que le sperme est un produit qui vient, pense-t-on, du cerveau ou du sang. Éjaculer équivaut à une saignée.

     

    Donc si nous sommes excessifs, on risque de tomber malade.

     

    Il fallait respecter une certaine modération.

     

     

    L’acte sert juste à perpétuer l’espèce humaine à cette époque, le plaisir n’a pas sa place ?


    C’est la doctrine, la théorie, c’est ce que l’Église enseigne, mais tout le monde sait que l’écrasante majorité des gens font l’amour non pas pour la reproduction, mais pour le plaisir !

     

    Quel regard est porté sur l’homosexualité au Moyen Age ?


    Il y a une certaine tolérance selon le rôle de la personne.

     

    Le rôle féminin, par exemple, dans un acte homosexuel est toléré et pardonné quand l’acteur est jeune.

     

    Très jeune, même, à la limite de l’enfance et de l’adolescence ; ensuite c’est tout de même sévèrement condamné.

     

    Le clitoris de la femme est le grand perdant dans votre livre, non ?


    On admet une grande liberté sexuelle masculine qui est refusée aux femmes.

     

    La morale est double :

    ce qui est admis pour les hommes ne l’est pas pour les femmes.

     

    On pense que l’homme a besoin de diversité alors que c’est strictement interdit pour une femme, sauf les prostituées.

     

    Le lesbianisme n’est pas pris au sérieux d’ailleurs !


    C’est condamné, mais c’est moins grave que l’homosexualité masculine.

     

    On pense que si une femme s’abandonne entre les bras d’une autre, c’est circonstanciel, à cause d’un manque d’hommes.

     

    Et dès qu’elle le peut, elle en retrouvera forcément un.

     

    La prostitution se porte bien au Moyen Age, que pouvez-vous nous dire à son propos ?


    C’est vraiment toléré dans la société. Il y avait beaucoup de bordels : maison de tolérance, établissement privé et même public géré par la ville. La chose est carrément institutionnalisée.

     

    Puis à partir de la fin du XVème et lors de la première moitié du XVI, cela dépend des régions, mais celles touchées par les réformes protestantes et catholiques deviennent répressives, sévères, vis à vis de la prostitution.

     

    Les prêtres fréquentent beaucoup ces maisonnées dédiées aux plaisirs ?


    Ils n’y vont pas tous, mais la hiérarchie ecclésiastique préfère que les prêtres fréquentent de temps à autre une prostituée plutôt qu’une concubine.

     

    Le mariage des prêtres a été interdit lors de la Réforme grégorienne au XIème siècle.

     

    Il y a toujours eu des courants favorables au mariage, mais ils étaient très faibles.

     

    A partir de la fin du XIème et du XIIème siècle, il n’y a pratiquement plus de prêtres mariés, sauf certains qui vivent en concubinage dans les contrées éloignées et mal surveillées.

     

    Certaines positions sont interdites au Moyen Age, laquelle est la plus réprouvée ?


    La sodomie : aussi bien hétérosexuelle qu’homosexuelle. Le coït anal est réprouvé par l’Église car il n’a pas pour finalité la reproduction.

     

    Mais il est difficile de pénétrer dans les demeures et les particuliers en prennent à leur aise avec ce qui est permis ou pas : 

    les préliminaires, mêmes poussés, sont tolérés.

     

    Finalement : la sexualité c’était mieux au Moyen Age ou maintenant ?


    C’était mieux avant le Sida ! Il n’y a pas de doutes.

     

    Au Moyen Age, il y avait des maladies comme la chaude-pisse, puis la syphilis et la grosse vérole sont apparues en 1496 et se sont développées au début du XVIème siècle.

     

     

    Auparavant les maladies vénériennes étaient des maladies bénignes et c’est pour cela aussi que tout était un peu toléré.

     

    Cela compte.

    Les mœurs sexuelles de nos jours sont totalement libres, mais elles sont sous la menace de maladies !!

     

    et comment !

     

     

    Par Guillaume Roche

     

    SOURCES 

     

    La sexualité au Moyen Age, c'était comment ?

    http://fluctuat.premiere.fr/Livres/News/La-sexualite-au-Moyen-Age-c-etait-comment-3677854

     

     

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    Vie quotidienne des Templiers

     

     

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    « Car de notre vie vous ne voyez que l’écorce qui est par dehors… mais vous ne savez pas les forts commandement qui sont dedans. »

      

      

    Extrait de la Règle de l’Ordre du Temple.

     

    La vie quotidienne des frères de l’ordre était partagée entre les temps de prières, les temps de vie collective (repas, réunion), l’entraînement militaire, l’accompagnement des pèlerins, la gestion de leurs biens et le contrôle du travail des paysans sur leurs terres, sans oublier le combat. La vie en Occident, hormis en Espagne et au Portugal, était pacifique. La vie des templiers en Orient et dans la péninsule ibérique, était militairement active

    Les temps de prière

    La vie des Templiers était rythmée par les temps de prière, qui comprenaient des récitations, des chants et des célébrations de la messe. Les heures suivantes sont données à titre indicatif car elles variaient selon la période solaire de l’année :

    Les Templiers vouaient un culte particulier à la Vierge Marie. Dans la chapelle, les frères se tenaient debout pour entendre les offices de matines à laudes et toutes les heures (prières) à Notre-Dame. Ils devaient s’asseoir pour chanter le psaume Venite, le premier de l’office de matine, appelé l’Invitatoire. Ils devaient dire leur oraison en silence, simplement. À la fin des psaumes, ils devaient se lever, se courber pour chanter le Gloria Patri en l’honneur de la Sainte-Trinité tandis que les faibles et les malades qui ne se levaient pas, pouvaient simplement baisser la tête. (articles 13 et 14 de la Règle)

     

    Les frères qui ne pouvaient assister aux offices, devaient réciter des patenôtres à l’endroit où ils se trouvaient. Les frères souffrants étaient dispensés de suivre l’office de matines à minuit, mais devaient dire treize patenôtres.

     

     

     

     

    Pour les frères morts

    Après le prologue de la règle française, le deuxième sujet traité concerne les frères morts ce qui indique l’importance qu’on pouvait leur accorder. » Là où se trouve le corps, tous les frères qui sont présents doivent dire cent patenôtres durant les sept jours qui suivent. » Et deux cents pour la mort d’un maître.

    Les frères mourants devaient se confesser et recevaient l’extrême onction par un chapelain de l’ordre.

    Par charité et en souvenir du mort, un pauvre devait être nourri pendant quarante jours (Article 11). Les templiers se faisaient enterrer dans leur propres cimetières près de leurs chapelles, et de la manière la plus humble, le corps enroulé d’un linceul et déposé dans un trou à même le sol. Tout l’équipement du chevalier templier était restitué au couvent et réattribué à ses frères.

    La guerre Sainte se déroulait en Orient et en Espagne. Les frères du Temple savaient qu’ils s’engageaient à mourir pour la mémoire du Christ en protégeant les pélerins chrétiens pendant leur pélerinage en Palestine : transport des pélerins, sécurité des routes, protection des lieux saints et croisades. Pour cela, ils acceptaient et même souhaitaient mourir.

     

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    Ainsi, l’article 12 de la règle explicite :

     

    « De jour comme de nuit, avec le grand courage donné par la profession, que chacun puisse se comparer avec le plus sage des prophètes qui dit : « Calicem salutaris accipiam« , c’est-à-dire : « je prendrai la calice du salut », qui est encore, « je vengerai la mort de Jésus Christ par ma mort. »

     

    Comment les frères devaient manger

    Six articles de la règle française sont consacrés aux grandes lignes des us et coutumes de la table complétés par de nombreux articles des retraits.

    Les templiers comme religieux, avaient droit à deux repas par jour, le midi (dîner) et le soir (souper), sauf les jours de jeûnes où un seul repas était servi. Ils étaient pris dans le réfectoire de la commanderie, appelé le « palais », en commun et dans le silence. Un frère lisait à voix haute des passages des textes sacrés, saintes paroles et saints commandements. Les templiers disposaient d’une seule écuelle pour deux et mangeaient avec les doigts comme les gens de leur époque. Chacun avait un couteau de table personnel.

    A la fin du repas, les frères rendaient grâce à Dieu.

     

    Les jours gras

    L’article 17 stipule quels étaient les jours de « chair », c’est-à-dire les jours où était servie de la viande rouge (porc, agneau), car il n’en fallait pas quotidiennement pour ne pas corrompre le corps. Les venaisons étaient défendues, comme l’était la pratique de la chasse (article 46).

     

    Les plats sans viande étaient constitués de légumes, légumineuses et de soupes avec du pain, base de l’alimentation médiévale. De nombreux jours de fêtes étaient marqués par un repas carné : Noël, la Toussaint, les fêtes de la Vierge, celles de chacun des douze apôtres. Le détail des jours de fête ou de jeûne est donné à l’article 74. Deux repas de viande étaient servis chaque dimanche, sauf pour les sergents et les écuyers.

     

    Le jeûne

    Les jours maigres correspondaient aux jours ou périodes de jeûne. Le vendredi était le jour de la nourriture de Carême, viande blanche de poisson ou de volaille, provenant des élevages templiers. Le jeûne durait de la Toussaint jusqu’à Pâques, soit plus de cinq mois, en excluant les fêtes précitées (article 20). Les templiers comme militaires ne devaient pas être affaiblis par le jeûne, aussi celui-ci n’était-il jamais sévère.

     

    Le vin et le pain

    Le vin était servi à part égale pour tous dans la proportion quotidienne vraisemblable d’une hémine de vin (Règle de Saint-Benoît). L’hémine est une unité de mesure du Moyen Âge équivalente à un quart de litre. Le repas était un moment de partage de la communauté et de charité. Le dixième du pain du repas ainsi que tous les pains entamés étaient donnés aux pauvres par l’aumônier de la commanderie.

     

    Les interdits

    L’article 294 des retraits nous apprend qu’il était interdit de se lever pendant le repas sauf dans deux circonstances d’urgence :

    • Lorsqu’un frère saignait du nez ;
    • Lorsque les frères entendaient un homme de la commanderie crier pour prévenir d’une ruade de chevaux ou d’un incendie.

    Une troisième situation n’est pas notifiée dans la règle de l’ordre :

    • Lorsqu’il y avait l’alerte pour prévenir d’une attaque ennemie.

    Les nourritures interdites étaient celles de tous les monastères : les venaisons provenant de la chasse (article 46), et les épices très utilisées dans la cuisine noble du Moyen Âge, parce « qu’ils chauffent le sang » et excitent les sens, et sont donc incompatibles avec la chasteté des religieux.

     

    La parole et le silence

    « Trop parler incite le pêché », « la vie et la mort sont au pouvoir de la langue » et « pour fuir le péché, on doit cesser et s’interdire de parler mal ». Ainsi, de nombreuses mises en garde étaient faites aux frères quant à la tenue de leur langage et leur devoir de silence, dans le souci de préserver l’harmonie fraternelle de la communauté et le bon déroulement « du travail de chevalerie ».

    La règle explique qu’il était nécessaire de savoir garder le silence à certains moments de la journée comme après complies, avant le coucher et pendant le repas. Les « paroles oiseuses » et les « vilains éclats de rire » étaient défendus. Chacun devait être capable de se contrôler et « ne pas inciter son frère au courroux, ni à la colère (…) » (Articles 15, 23, 24, 42, 46, 51 et 67.)

     

    Les frères malades et les vieux frères

    Les frères malades devaient être traités « en paix et avec soins » selon l’article 50 de la règle. Le frère infirmier avait obligation de pourvoir aux besoins de soin des malades, notamment par l’administration de nourritures « qui rendent la santé ». Les retraits du frère infirmier aux articles 190 à 197 donnent des informations sur l’infirmerie templière. Les frères sains pouvaient s’y faire saigner et s’y reposer. On y apprend le nom de quelques maladies et maux communs : fièvre quarte, dysenterie (maladie commune des armées à cette époque, dont est d’ailleurs mort Saint Louis), mauvaise blessure, vomissement et frénésie.

    La lèpre était une maladie incurable et très répandue. Le roi de Jérusalem, Baudoin IV (1174-1184) en était atteint. Les templiers lépreux étaient invités à se rendre dans une léproserie de l’ordre de Saint-Lazare, sans que ce soit une obligation. S’ils ne le souhaitaient pas, ils pouvaient rester dans leur ordre mais y vivraient à l’écart de leurs frères. (articles 444 et 445 des retraits)

    Les vieux frères devaient également être traités et honorés avec tous les égards (article 59 de la règle).

     

    Le vêtement

    Six articles de la Règle portent sur le sujet. Il était important que les frères soient habillés de façon réglementaire : manteaux blancs pour les frères chevaliers, manteaux bruns pour les frères sergents. Les robes fournies par le drapier de l’ordre, devaient être sans superflu, sans fourrures, ni ornements, ni trop longues, ni trop courtes. Le trousseau templier comprenait également chemises, braies, chausses, ceintures. Il était donné aux écuyers et aux sergents les vieilles robes, quand elles n’étaient pas offertes aux pauvres. (articles 27, 28, 29, 30, 31, 32)

     

    Le rapport aux femmes

    « La compagnie des femmes est chose périlleuse », rappelle la règle et « nous croyons qu’il est chose périlleuse à toute religion de regarder les femmes en face. »

    Il était interdit d’embrasser une femme quelqu’elle soit (même sœur ou tante, indique la règle) afin de

    « demeurer perpétuellement devant Dieu avec pure conscience et une vie sûre. » (articles 53 et 68)

     

    L’entraînement militaire

    Les historiens n’ont aucune information sur ce point. Cependant, l’article 95 des retraits de la règle indique que le combat à la lance, c’est-à-dire la joute, était pratiqué avec autorisation du maître.

     

    La justice au sein de l’Ordre du Temple

    L’ordre du Temple possédait une justice interne comme tout seigneur sur ses terres.

    Cette justice était principalement rendue lors des chapitres généraux ou provinciaux. Le chapitre de l’ordre n’avait pas pour première mission de rendre la justice à l’intérieur de la maison mais de traiter les affaires courantes. Il avait donc un rôle de conseil de discipline concernant les problèmes d’ordre judiciaire.

    Lorsque le chapitre ne pouvait statuer sur le cas d’un frère de l’Ordre, il pouvait le faire remonter au niveau supérieur et même jusqu’au pape.

     

    Le cérémonial

    Lors d’une séance du chapitre et lorsqu’il fallait rendre la justice, le frère templier concerné pénétrait dans la salle d’audience pour confesser sa ou ses fautes et « crier merci » à l’ensemble de l’ordre. Il se retirait ensuite pour laisser le temps de la délibération puis entrait à nouveau pour entendre la sentence qui lui était infligée.
    De plus, si le templier ne confessait pas sa faute, il pouvait se faire dénoncer par un autre frère mais seulement si le fautif avait refusé de parler lui-même devant le chapitre.

     

    Classification des fautes

    Les fautes possédaient des punitions échelonnées selon leur gravité.

    • Perte de la maison ou expulsion définitive de l’Ordre du Temple,
    • Perte de l’habit : ce qui correspond à une expulsion temporaire d’une durée de un an et un jour au maximum,
    • Perte de l’habit sauf Dieu : le frère avait droit à un sursis,
    • Pénitence (d’un jour, de deux à trois jours, du vendredi,…),
    • Nourris au pain et à l’eau pendant un jour,
    • Sermons administrés publiquement après la prière.

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Les Chevaliers du Temple

     Le Vendredi 13 ! Jour maudit!

     

     

     

     

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    L’Ordre des Pauvres Chevaliers du Temple de Jerusalem

     

     

    Source: Templiers.org, évidemment c’est mieux de visiter l’original que de lire l’article sur cette page!

    Tout commence dans les années qui suivent la première croisade en Terre Sainte (1096-1099).

     

    Malgré la prise de Jérusalem par les croisés (le 15 Juillet 1099), la sécurité des pèlerins n’est pas assurée. Entre les brigands locaux et les croisés aux buts peu louables, les pèlerinages deviennent parfois tragiques.

    Hugues de Payns (Hugues de Payens, de la Maison des comtes de Champagne) et Geoffroy de Saint-Omer vivant sous la Règle des chanoines de saint-Augustin choisissent d’assurer la garde du défilé d’Athlit, le chemin d’accès le plus dangereux pour les pèlerins.

     

    Ce dernier deviendra plus tard le Château-pèlerin.

     

    Et c’est en 1118 que l’Ordre des Pauvres Chevaliers du Christ voit le jour …

     

     

    Revenant près des Lieux Saints, Baudoin II, roi de Jérusalem, leur octroie une partie de son palais, à l’emplacement du Temple de Salomon.

    Ils deviennent alors très rapidement les Chevaliers du Temple ou Templiers du fait de cet emplacement symbolique (bâti en 961 avant Jésus-Christ, le Temple de Salomon fut détruit par les Chaldéens en 587 avant Jésus-Christ, reconstruit et définitivement détruit en 135 par l’empereur Hadrien).

     

     

    Ils se font alors assister par sept autres chevaliers français : André de Montbard (neveu de Saint-Bernard), Gondemare, Godefroy, Roral, Payen de Montdésir, Geoffroy Bisol et Archambaud de Saint-Agnan. L’Ordre du Temple prend forme en 1119 par ces neuf chevaliers désirant protéger les chrétiens en pèpèlerinage à Jérusalem.

     

     

    C’est au concile de Troyes (14 Janvier 1128), à la demande de Saint-Bernard (Bernard de Clairvaux) que l’Ordre est véritablement créé. L’Éloge de la Nouvelle Milice est un témoignage capital de l’importance de Saint-Bernard dans la création de l’Ordre du Temple. Il aurait lui-même écrit la Règle qui régit le fonctionnement complet de l’Ordre.

     

     

    C’est seulement en 1147 que le pape octroie la croix pattée rouge aux Templiers. Auparavant, les chevaliers étaient seulement vêtus d’un manteau blanc et les sergents d’un manteau brun. Cette croix est cousue sur l’épaule gauche de leur vêtement. De nombreux dessins ou illustrations sont trompeurs à ce sujet …

     

    De plus, chaque époque a adapté leur apparence à son style : le XVIIème siècle, par exemple présente le grand maître avec un chapeau, portant une plume d’ornement, ce qui semble plutôt anachronique au temps des croisades !

     

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    Pendant près de deux siècles, les Templiers vont accroître leur aura pour revenir en Occident en 1291 après le chute de Saint-Jean d’Acre.

     

    Leur mission de protection des pèlerins avait bien évolué et de nombreuses dérives eurent lieu.

     

    La prise d’Ascalon (Août 1153) est un exemple de l’ambition de certains grands maîtres à l’égard du pouvoir temporel.

    Le grand maître en fonction, Bernard de Trémelay, avait en effet cherché à bloquer l’entrée aux autres Francs dès l’ouverture d’une brèche dans les murs de la ville pour laisser le champ libre aux chevaliers du Temple …

     

    Leur lutte continue avec les Chevaliers de l’Hopital provoque souvent des tensions dans les camps des croisés et ne facilite pas la cohésion des Francs en Terre Sainte.

     

    Leur retour ne pouvait pas plaire à tout le monde, d’autant plus que l’Ordre du Temple ne faisait que s’enrichir au fil du temps : donations, achats, intérêts des prêts accordés, … tout semblait donner à l’Ordre une puissance lui permettant de bouleverser l’organisation féodale …

     

     

    Philippe le Bel, envieux vis-à-vis des Templiers, du fait de leurs richesses et de leur puissance a cherché par plusieurs moyens à les utiliser à ses fins. Cherchant au départ à en devenir le grand maître tout en restant roi de France, il joua un jeu de trahison qui finit par l’arrestation, le Vendredi 13 Octobre 1307 au matin, de tous les Templiers du royaume.

     

    Les Templiers étaient devenus trop puissants et ils menaçaient de dépasser les rois en fonction. Banquiers (Henri III d’Angleterre, Saint-Louis, Philippe Auguste, … y firent appel) , milices protectrices, ils avaient pourtant bien aidé Philippe le Bel en le protégeant par exemple des émeutes à Paris qui faillirent lui coûter la vie !

     

     

    Un procès inique suivra cette arrestation bien orchestrée. Pendant sept années, les Templiers en liberté chercheront à se justifier auprès du pape, le seul à qui ils devaient théoriquement des comptes. Menacé par Philippe le Bel et ses sbires, ce dernier ne les écoutera souvent même pas ! Le 22 Mars 1312, le pape Clément V abolit l’Ordre du Temple.

     

     

    Le 18 Mars 1314, Jacques de Molay et Geoffroy de Charnay furent livrés aux flammes d’un bûcher dressé dans l’île de la cité de Paris. Jacques de Molay, dernier grand maître du Temple (et vingt-deuxième) lança alors l’anathème «Clément, juge inique et cruel bourreau, je t’assigne à comparaître, dans quarante jours, devant le

    tribunal de Dieu ! Et toi aussi, roi Philippe !».

     

    De fait, Clément V et Philippe le Bel moururent respectivement le 20 Avril et le 29 Novembre de la même année …

    Nombreux sont les mouvements sérieux ou non qui se sont attribués l’héritage des Templiers et ce thème est figure parmi ceux qui ont suscité le plus thèses et antithèses : le trésor des Templiers, l’ésotérisme des Templiers, la puissance des Templiers, … tous les ingrédients semblent rassemblés pour déchaîner les passions et les

    extrapolations parfois osées !

     

     http://www.nouvelordremondial.cc/les-chevaliers-du-temple/

     

     

     

     

     

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    Amélie Ermenault, chef de rubrique cuisine et décoration à www.plurielles.fr nous retrace ici l’Histoire de la baignoire.

     

    Nous devons beaucoup des charmes et des pensées de notre civilisation à la période de l’Antiquité.

      

    Ce sont en effet les Grecs et les Romains de l’époque qui nous ont légué les baignoires qu’eux-mêmes aimaient en pierre, en métal ou, pour les plus riches, en grès, en marbre ou en argent.

     



    La baignoire arrive
    chez nous, depuis les Romains de l’Empire oriental, par l’intermédiaire des Croisés qui en ramènent le concept. Au Moyen Âge, la baignoire a été remplacée par une grosse cuve en bois qui était le plus souvent réalisée dans un simple tonneau.

     

     

      

      

    Mais il serait injuste d’attribuer aux mœurs du Moyen Âge l’abandon de la baignoire !

    Les gens allaient souvent aux étuves pour prendre des bains publics et ce n’est que par la suite que ces endroits sont devenus des lieux de débauche et de pauvres.

     

     

      

    Véritables nids à microbes et à maladies, ces bains publics sont fermés.

      

    On préfère aux bains désormais les ablutions.

      

    Seuls les riches du XVIe siècle offrent des bains privés à leurs invités et en font un cérémonial des sens à grand renfort d’huiles et d’encens !



    Les bains et baignoires sont délaissés
    et Louis XIV, s’il est célèbre pour avoir été un grand roi, l’est aussi pour ne jamais prendre de bain. Il faut dire que l’époque le voulait ainsi : on ne s’essuyait les parties visibles du corps qu’avec un linge sec.

     



    Ouf, Louis XVI remet à la mode
    les salles de bains et les baignoires en cuivre. Jusqu’au XIXe siècle, moment où l’hygiène devient plus exigeante, on se baigne encore dans les rivières.

      

      

    Les bains publics ouvrent à nouveau et les bains médicamenteux se développent en même temps que les stations thermales.

      

    C’est seulement à partir du deuxième tiers du XXe siècle que les salles de bains et baignoires se démocratisent et que les maisons commencent à en abriter.

     

     

     

    http://www.ma-baignoire.com/tag/au-moyen-age/

     

     

     

     

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    Charlemagne,ou le premier empereur de l'Occident médieval

     

     

      

      

    Charles Ier, dit « le Grand » (en allemand Karl der Große, en latin Carolus Magnus d'où Charlemagne)1, né en 742, 747 ou 748 et mort le 28 janvier 814 à Aix-la-Chapelle3 d'une affection aiguë qui semble avoir été une pneumonie, est le membre le plus éminent de la dynastie franque à laquelle il a donné son nom alors qu'il n'en est pas le fondateur : les Carolingiens.



    Fils de Pépin le Bref, il est roi des Francs à partir de 768, devient par conquête roi des Lombards en 774 et est couronné empereur à Rome par le pape Léon III le 25 décembre 800, relevant une dignité disparue depuis l'an 476 en Occident.



    Monarque guerrier, il agrandit notablement son royaume par une série de campagnes militaires, en particulier contre les Saxons païens dont la soumission a été très difficile et très violente (772-804), mais aussi contre les Lombards en Italie et les Musulmans d'Espagne.



    Souverain réformateur, soucieux d'orthodoxie religieuse et de culture, il protège les arts et les lettres et est à l'origine de la « renaissance carolingienne ».



    Son œuvre politique immédiate, l'empire, ne lui survit cependant pas longtemps. Se conformant à la coutume successorale germanique, Charlemagne prévoit dès 806 le partage de l'Empire entre ses trois fils5. Après de nombreuses péripéties, l'empire ne sera finalement partagé qu'en 843 entre trois de ses petits-fils (traité de Verdun).


    Le morcellement féodal des siècles suivants, puis la formation en Europe des États-Nations rivaux condamnent à l'impuissance ceux qui tentent explicitement de restaurer l'empire universel de Charlemagne, en particulier les souverains du Saint-Empire romain germanique, d'Otton Ier en 962 à Charles Quint au XVIe siècle, voire Napoléon Ier, hanté par l'exemple du plus éminent des Carolingiens6.

    La figure de Charlemagne a été l'objet de déchirements en Europe, notamment l'enjeu politique entre le XIIe et XIXe siècles entre la nation germanique qui considère le Saint-Empire romain comme le successeur légitime de l'empereur carolingien et la nation française qui en fait un élément central de la continuité dynastique des Capétiens.

      

    Pourtant, il peut être considéré comme le « Père de l'Europe »7,8,9, pour avoir assuré le regroupement d'une partie notable de l'Europe occidentale, et posé des principes de gouvernement dont ont hérité les grands États européens10.

     



    Les deux principaux textes du IXe siècle qui dépeignent le Charlemagne réel, la Vita Caroli d'Éginhard et la Gesta Karoli Magni attribuée au moine de Saint-Gall Notker le Bègue, l'auréolent également de légendes et de mythes repris au cours des siècles suivants :

      

    « Il y a le Charlemagne de la société vassalique et féodale, le Charlemagne de la Croisade et de la Reconquête, le Charlemagne inventeur de la Couronne de France ou de la Couronne impériale, le Charlemagne mal canonisé mais tenu pour vrai saint de l'Église, le Charlemagne des bons écoliers

     

     

     

     

     

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    Cassini est surtout connu pour ses travaux d'astronomie.

     

     

     

    Giovanni CASSINI (1625-1712), astronome | chapters.marssociety.org

    Cassini Ier

     

    Jacques CASSINI (1677-1756), astronome | Wikipédia

    Cassini II

     

    César-François CASSINI (1714-1784), ca 1750 | Wikipédia

    Cassini III

     

    Jean-Dominique CASSINI (1748-1845), astronome, par Jean-Henri CLESS, 1801

    Cassini IV

     Cette dynastie d’astronomes et cartographes légua à la France la carte de l’Académie passée à la postérité sous le nom de « carte de Cassini ».

    Carte Postale Ancienne - Manchecourt (Loiret) - Méridienne de l'Observatoire de Paris | Delcampe - Cardiff

     

    L’échelle adoptée est d’une ligne pour cent toises, soit une échelle de 1/86400 (une toise vaut 864 lignes).

    Cette carte constituait pour l’époque une véritable innovation et une avancée technique décisive. Elle est la première carte à s’appuyer sur une triangulation géodésique dont l’établissement prit

    plus de cinquante ans.

     

    Ses recherches ont porté sur des domaines très divers, allant de la rotation des planètes à la lumière zodiacale ou aux comètes.

     

    On lui doit tout particulièrement la découverte de la division de l'anneau de Saturne qui porte aujourd'hui son nom.

     

     

     

     

     

    Cassini est également l'auteur de travaux de géodésie et cartographie, menés dans le cadre de ses fonctions à l'Académie des sciences et à l'Observatoire.

     

    Image illustrant la rubrique

     

     

     

    L'Observatoire au temps de Cassini


    Jean-Dominique Cassini a profondément marqué l'histoire de l'Observatoire de Paris.

    Il s'y installe très peu de temps après son arrivée en France, en 1669, alors que la construction est à peine achevée.

     

    Au sein de ce bâtiment, modifié selon ses instructions, Cassini effectue la majeure partie de ses travaux.

     

     

    Image illustrant la rubrique

     

     

    http://expositions.obspm.fr/cassini/pages/observatoire.php

     

     

     

    La carte de Cassini ou carte de l'Académie est la première carte générale et particulière du royaume de France.

      

    il serait plus approprié de parler de carte des Cassini, car elle fut dressée par la famille Cassini, principalement

     

     

    Afficher l'image d'origine  

    César-François Cassini (Cassini III) et

      

    son fils Jean-Dominique Cassini (Cassini IV) au XVIIIe siècle.

     

    Afficher l'image d'origine 

    L'échelle adoptée est d'une ligne pour cent toises, soit une échelle de 1/86 400 (une toise vaut 864 lignes).

    Cette carte constituait pour l'époque une véritable innovation et une avancée technique décisive.

     

     

      Citadelle de Lille

    Elle est la première carte à s'appuyer sur une triangulation géodésique dont l'établissement prit plus de cinquante ans.

      

    Les trois générations de Cassini se succédèrent pour achever ce travail.

      

    La carte ne localise pas précisément les habitations ou les limites des marais et forêts, mais le niveau de précision du réseau routier ancien est tel qu'en superposant des photos satellite orthorectifiées aux feuilles de la carte de la France, on obtient de spectaculaires résultats.

     

     

    Jean Dominique Cassini 1748

     

    Le travail des Cassini laissa même son empreinte sur le terrain où l'on trouve encore aujourd'hui des toponymes dits « Signal de Cassini », qui révèlent les lieux où s'effectuèrent les mesures de l'époque.

     

      

    Ces points de repères correspondent aux sommets des mille triangles qui formaient la trame de la carte de Cassini.

    De nos jours, les chercheurs consultent fréquemment les feuilles de la carte des Cassini, soit sa forme papier en salle de lecture du département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France, soit sa forme numérique en ligne (voir Liens externes).

     

    http://cassini.ehess.fr/cassini/fr/html/1_navigation.php

     

    Elle intéresse tout particulièrement les archéologues, les historiens, les géographes, les généalogistes, les chasseurs de trésors et les écologues qui ont besoin de faire de l'écologie rétrospective ou de comprendre l'histoire du paysage

      

      

     

     

    César-François dit Cassini III

    César-François Cassini de Thury (17 June 1714 – 4 September 1784)

     

    Opérations préalables

     

    La carte de Cassini est la première carte géométrique couvrant l'intégralité du royaume de France.

    Préalablement aux levés, il a fallu procéder à une triangulation du territoire.

    Objectifs

    Voici comment César-François Cassini (Cassini III) voyait la carte qu'il allait commencer :

    • « mesurer les distances par triangulation et assurer ainsi le positionnement exact des lieux » ;
    • « mesurer le Royaume, c’est-à-dire déterminer le nombre innombrable de bourgs, villes et villages semés dans toute son étendue » ;
    • « représenter ce qui est immuable dans le paysage ».

     

    Afficher l'image d'origine 

    Levés de la carte

    Les levés ont été effectués entre 1756 et 1789 et les 181 feuilles composant la carte ont été publiées entre 1756 et 1815.

    Mort en 1784, César-François Cassini ne verra jamais l'achèvement des levés. Son fils, Jean-Dominique finit les travaux de son père.

     

     

    Les départements de la Savoie, de la Haute-Savoie et une partie de celui des Alpes-Maritimes ne faisaient pas partie du Royaume de France à l’époque des levés opérés au XVIIIe siècle. Ils ne sont donc pas représentés sur la carte de l’Académie.

    De plus, l'île d'Yeu et la Corse ne seront jamais levées.

    La plupart des feuilles ont fait l'objet d'une nouvelle édition datée de 1815.

    Financement

    En 1756, Cassini de Thury fonde une société de cinquante associés afin de rassembler les fonds nécessaires pour finir les levés de la carte. Des personnalités de l'époque y participent. La plus célèbre d'entre elles est la marquise de Pompadour.

     

    Défauts et remplacement

    En 1808, Napoléon Ier décida l'établissement d'une carte destinée à remplacer celle de Cassini ; toutefois durant tout l'Empire, les ingénieurs-géographes qui devaient s'y attacher eurent à accomplir des travaux plus pressants : cartes des champs de batailles, travaux topographiques sur les frontières du Nord...

      

    Ainsi il fallut attendre la Seconde Restauration pour que la mise en œuvre de cette nouvelle carte puisse débuter avec les premiers travaux d'une triangulation appuyée sur la méridienne de Delambre et Méchain.

     

    Les travaux de cette carte s'étalèrent entre 1817 et 1866, en essayant plusieurs échelles différentes. Ce fut une carte à l'usage des militaires, la carte de l'État-Major, à l'échelle 1/80 000.

     

    Malgré l’existence de ces dernières cartes, bien plus exactes, les cartes de Cassini sont encore restées une source pour la cartographie du XIXe siècle.

      

    En témoigne la carte de France du Service du génie militaire de 1878 dont les tracés des cours d'eau et les noms des divers villes et villages reprennent les tracés et les graphies des cartes de Cassini.

     

    Utilisations contemporaines

    Ces cartes, bien que peu précises concernant les données paysagères, apportent - en complément d'autres sources - des informations intéressantes pour :

     

    Giovanni Domenico CASSINI (1625-1712), astronome, signature 

     

     

    sources wikipedia

    article :http://decouverte-bocage-gatinais.fr/cartographie.php

     

     http://vierville.free.fr/41-CartesPlans.htm

     

     

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    Les Goths.

      

      

    Les Goths, des Germains orientaux, seraient originaires de la
    péninsule de Jutland au Danemark actuel, et du sud de la Suède.

      

      

    Germains orientaux, les Goths auraient comme territoire d'origine la péninsule de Jutland et la région de Gôtaland en Suède.

      

      

    On retrouve leurs traces dans l'arrière-pays polonais et allemand pendant près d'un siècle.

      

     Au début du IIIe siècle, ils s'installent au bord de la mer Noire d'où ils délogeront des peuples d'origine iranienne, les Scythes, les Alains et les Sar-mates.

      

    Cinquante ans plus tard, les Wisigoths partent à l'ouest dans la région forestière qui s'étend entre le Danube et le Dniestr.

     

      

      

    Les Ostrogoths se fixent à l'est où, comme les Wisigoths, ils fondent un vaste État. Les Goths ont laissé d'importantes traces archéologiques regroupées sous le nom de la culture de Tchernjahov.

      

    Dans les sépultures, les défunts avaient soit la tête à l'ouest - ils étaient généralement des gens modestes - soit la tête au nord. Dans ce cas, ils étaient accompagnés d'un mobilier plus riche.

      

      

      

    Caractéristique principale des Goths :

    les hommes n'étaient jamais - ou très exceptionnellement- enterrés avec une arme.

     

     

     

    Les femmes portaient deux fibules, une sur chaque épaule, qui refermaient le col de leur manteau.

     

      

    Elles avaient suspendu à leur ceinture des peignes, des miroirs métalliques, des couteaux et d'autres objets.

     

     les Goths se seraient implan­tés en Poméranie au IIe s. Au IIIe s.

      

      

    Partis de Scandinavie, les Goths se seraient implan­tés en Poméranie au IIe s.

      

    Au IIIe s.,ils sont au bord de la mer Noire (Pont-Euxin).

      

    Sous la poussée des Huns, les Wisigoths
    partiront à l'ouest (Thrace), les Ostrogoths, eux, se fixant à l'est.

      

    Les habitats étaient généralement à proximité des cours d'eau sur le versant des vallées. Ils étaient toujours installés sur des terrains propices à l'agriculture.

      

    Au regard des outils agricoles mis au jour, les Goths avaient une technique de labourage évoluée parfaitement adaptée aux terres fertiles de la région.

      

    Ils cultivaient l'orge, le seigle, le millet, le chanvre, les pois et les lentilles.

      

    Chats et chiens partageaient les habitations et selon les régions, l'élevage était plus porté sur les porcs ou les chevaux.

      

    L'habitation comportait une ou deux pièces avec des murs en argile soutenus par une armature en bois ou en jonc.

      

    Les nombreuses amphores romaines qui devaient contenir du vin ou de l'huile prouvent que les Barbares importaient des objets de l'Empire et ne se contentaient pas de leur propre production.

      

    Au IVe siècle, les Goths regroupent une fédération de tribus - ils se sont alliés avec d'autres Barbares, germaniques et non germaniques, thraces et iraniens - devenue célèbre et puissante. Mais l'arrivée des Huns change tout.

      

    Lorsque les Wisigoths prennent la fuite en Thrace sous la protection de l'Empire, leurs témoignages archéologiques se raréfient, les populations ayant tendance à s'assimiler à la population locale romaine.

      

    En 377, les Wisigoths disparaissent presque en tant que peuple et deviennent un groupe social de guerriers.

      

    Les Ostrogoths, quant à eux, restent sous l'emprise des Huns et conservent leur artisanat, leur agriculture et leur commerce développé.

     

     

    http://www.lecerclemedieval.be/histoire/goths.html

     

     

     

     

     

     

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    La période féodale :

    l'ancien français

    (IXe - XIIIe siècle)

     


    Plan du présent article

    1. La naissance du français
    L'avènement des Capétiens
    Le premier «roi de France»
    L'expansion du français en Angleterre
    La langue du roi de France
    2. L'état de l'ancien français
    Le système phonétique
    La grammaire
    3. Les langues parlées en France
    4. La domination culturelle du latin
    La langue de prestige
    La création des latinismes
    Un phénomène ininterrompu de latinisation
    5. L'influence de la langue arabe
    Les emprunts au français
    Les chiffres arabes

     

     

    Les caractéristiques principales du régime féodal furent le morcellement et la fidélité. Afin de s'assurer la fidélité de ses vassaux, un suzerain (seigneur) accordait à chacun d'eux un fief (une terre) qui leur servait de moyen de subsistance; en retour, les vassaux s'engageaient à défendre leur seigneur en cas d'attaque extérieure.

     

    Quelles furent les conséquences politiques de ce système?

     

    Le morcellement du pays et la constitution de grands fiefs, eux-mêmes divisés en une multitude de petits fiefs; les guerres entre seigneurs étaient très fréquentes parce qu'elles permettaient aux vainqueurs d'agrandir leur fief. Chacun vivait par ailleurs relativement indépendant dans son fief, sans contact avec l'extérieur. Dans un tel système, la monarchie demeurait à peu près sans pouvoir.

     

    1 La naissance du français

    On situe la naissance du français vers le IXe siècle, alors qu'il faut attendre le Xe ou le XIe siècle pour l'italien, l'espagnol ou l'occitan.

     

     

      

    Mais ce français naissant n'occupait encore au IXe siècle qu'une base territoriale extrêmement réduite et n'était parlé que dans les régions d'Orléans, de Paris et de Senlis (voir les zones en rouge sur la carte) par les couches supérieures de la population.

      

    Le peuple parlait, dans le Nord, diverses variétés d'oïl: le françois dans la région de l'Île-de-France, mais ailleurs c'était le picard, l'artois, le wallon, le normand ou l'anglo-normand, l'orléanais, le champenois, etc. Il faut mentionner aussi le breton dans le Nord-Ouest. Les rois de France, pour leur part, parlaient encore le francique (une langue germanique) tout en utilisant le latin comme langue seconde pour l'écrit.

    À cette époque, les gens du peuple étaient tous unilingues et parlaient l'un ou l'autre des nombreux dialectes alors en usage en France. Seuls les «lettrés» écrivaient en «latin d'Église» appelé alors le «latin des lettrés» et communiquaient entre eux par cette langue.

    Dans le Sud, la situation était toute différente dans la mesure où cette partie méridionale du royaume, qui correspondait par surcroît à la Gaule la plus profondément latinisée, avait été longtemps soumise à la domination wisigothe plutôt qu'aux Francs.

      

    Les variétés d'oc, plus proches du latin, étaient donc florissantes (provençal, languedocien, gascon, limousin, etc.), surtout que l'influence linguistique wisigothe avait été quasiment nulle, sauf dans la toponymie. Dès le Xe siècle, le catalan se différencia de l'occitan par des traits particuliers; en même temps, le basque était parlé dans les hautes vallées des Pyrénées.

     

     

    Quant aux langues franco-provençales (voir le texte de Manuel Meune à ce sujet) du Centre-Est, elles correspondaient plus ou moins à des anciennes possessions des Burgondes, puis de l'empereur du Saint Empire romain germanique. Bref, à l'aube du Xe siècle, l'aire des grands changements distinguant les aires d'oïl, d'oc et franco-provençale étaient terminées, mais non la fragmentation dialectale de chacune de ces aires, qui ne faisait que commencer. Soulignons qu'on employait au singulier «langue d'oïl» ou «langue d'oc» pour désigner les langues du Nord et du Sud, car les gens de l'époque considéraient qu'il s'agissait davantage de variétés linguistiques mutuellement compréhensibles que de langues distinctes.

     

    1.1 L'avènement des Capétiens

      

    En mai 987, Louis V, le roi carolingien de la Francie occidentale était décédé subitement dans un accident de chasse en ne laissant aucun héritier direct. Le 1er juin, les grands seigneurs du royaume se réunir à Senlis pour élire un successeur au trône de la Francie occidentale. L'aristocratie franque élit Hugues Ier qui fut sacré quelques jours plus tard, le dimanche 3 juillet 987, dans la cathédrale de Noyon. Il fut surnommé aussitôt le «roi à chape» en raison de son titre d'abbé laïc qu'il détenait dans les nombreuses «chapes» ecclésiastiques — la chape (la «capa» ou cape) étant le manteau à capuchon que portaient les abbés —, d'où le terme Capet.

    Avant d'être couronné «roi des Francs» (rex Francorum), Hugues Ier était un puissant seigneur respecté; il était comte de Paris, comte d'Orléans, duc des Francs et marquis de Neustrie (nord-ouest de la France sans la Bretagne), et possédait de nombreuses seigneuries laïques et abbayes (Saint-Martin-de-Tours, Marmoutier, Saint-Germain-des-Prés et Saint-Denis). Ses alliances familiales avaient favorisé son élection comme «roi des Francs» par l'aristocratie: il était frère d’Othon (duc de Bourgogne), beau-frère de Richard (duc de Normandie), et gendre de Guillaume III Tête d’Étoupe (duc d’Aquitaine), depuis son mariage en 970 avec la princesse Adélaïde, la fille de Guillaume III.

     

    C'est avec l'avènement de Hugues Capet (en 987) que le premier roi de France (encore désigné comme le «roi des Francs») en vint à parler comme langue maternelle la langue romane vernaculaire (plutôt que le germanique), ce qui sera appelé plus tard comme étant le françois ou françoys (prononcé [franswè]).

     

    Dans le système féodal de l'époque, la France était dirigée par une vingtaine de seigneurs territoriaux, descendants de fonctionnaires ou de guerriers carolingiens, qui détenaient des pouvoirs considérables parfois supérieurs à ceux du roi, comme ce fut le cas, par exemple dans le Nord, avec les comtes de Flandre et les ducs de Normandie, à l'est avec les ducs de Bourgogne et, au sud, avec les ducs d'Aquitaine.

     

    En raison des invasions étrangères, ces seigneurs avaient obtenu du roi de vastes territoires en échange de leurs services. La légitimité de Hugues Capet état alors relativement fragile. Par exemple, lorsqu'il s'opposa à son vassal Adalbert de Périgord qui refusait de lever le siège de Tours, le roi lui lui demanda : «Qui t'as fait comte?» Et le vassal de lui répondre: «Qui t'as fait roi?»

    Hugues Ier sera le fondateur de la dynastie des Capétiens et s'appuiera sur des règles d'hérédité, de primogéniture (priorité de naissance) et d'indivisibilité des terres domaniales. C'est donc Hugues Capet qui remplaça la monarchie élective en vigueur sous les derniers Carolingiens en une monarchie héréditaire.

    D'ailleurs, Hugues Capet avait fait élire et sacrer son fils aîné Robert quelques mois après sa propre élection, soit le 25 décembre 987. La dynastie des Capétiens réussit à renforcer ainsi l'autorité royale et entreprit la tâche d'agrandir ses domaines. Contrairement aux rois précédents qui transportaient leur capitale d'une ville à l'autre, les Capétiens se fixèrent à Paris.

     

    1.2 Le premier «roi de France»

    Ce n'est qu'en 1119 que le roi Louis VI le Gros (qui régna de 1108 à 1137), un descendant de Hugues Capet, se proclama, dans une lettre au pape Calixte II «roi de France» (rex Franciai), plus précisément «roi de la France», non plus des Francs, et «fils particulier de l’Église romaine». C'est le premier texte où il est fait référence au mot France.

     

    D'où le mot français (et «françois» ou «françoys»). En réalité, c'est le mot françois ou françoys (prononcé [franswè]) qui était attesté à l'époque, le mot francien ayant été créé en 1889 par le philologue Gaston Paris pour faire référence au «français de l'Île-de-France» du XIIIe siècle, par opposition au picard, au normand, au bourguignon, au poitevin, etc.

     

    Mais il faut aussi considérer qu'au début du XIIIe siècle le terme françois ou françoys désignait autant la langue du roi que le parler de l'Île-de-France ou même toute autre variété d'oïl (picard, champenois, normand, etc.). Autrement dit, la notion de «françoys» recouvrait une réalité linguistique encore assez floue. Les mots France, Franc et françoys étaient souvent utilisés de façon interchangeable, que ce soit pour désigner le pays, le pouvoir ou la langue du pouvoir.

      

    Dans les conditions féodales, les divergences qui existaient déjà entre les parlers locaux se développèrent et s'affermirent. Chaque village ou chaque ville eut son parler distinct: la langue évolua partout librement, sans contrainte. Ce que nous appelons aujourd'hui l'ancien français correspondait à un certain nombre de variétés linguistiques essentiellement orales, hétérogènes géographiquement, non normalisées et non codifiées.

     

    Les dialectes se multipliaient et se divisaient en trois grands ensembles assez nettement individualisés, comme on les retrouve encore aujourd'hui (voir la carte de la France dialectale): l

    es langues d'oïl au nord, les langues d'oc au sud, le franco-provençal en Franche-Comté, en Savoie, au Val-d'Aoste (Italie) et dans l'actuelle Suisse romande. L'une des premières attestations de l'expression langue d'oc est attribuée à l'écrivain florentin Dante Alighieri (1265-1321. Dans son De Vulgari Eloquentia («De l'éloquence vulgaire») rédigé vers 1305 en latin, celui-ci classait les trois langues romanes qu'il connaissait d'après la façon de dire oui dans chacune d'elles (par exemple, oïl, oc, si), d'où la distinction «langue d'oc» (< lat. hoc) au sud et «langue d'oïl» (< lat. hoc ille) au nord, pour ensuite désigner les parlers italiens (sì < lat. sic).

      

    Le célèbre Florentin distinguait dans leur façon de dire «oui» les trois grandes branches des langues romanes (issues du latin) connues: «Nam alii Oc; alii Oil, alii Sì, affirmando loquuntur, ut puta Yispani, Franci et Latini», ce qui signifie «les uns disent oc, les autres oïl, et les autres si, pour affirmer, par exemple, comme les Espagnols, les Français et les Latins».

     

    On peut consulter aussi le texte «Les domaines d’oc, si et oïl, selon Dante» de MM. J. Lafitte et G. Pépin, en cliquant ICI, s.v.p.

     

    Bien que le français («françoys») ne soit pas encore une langue officielle (c'était le latin à l'écrit), il était néanmoins utilisé comme langue véhiculaire par les couches supérieures de la société et dans l'armée royale qui, lors des croisades, le porta en Italie, en Espagne, à Chypre, en Syrie et à Jérusalem.

     

    La propagation de cette variété linguistique se trouva favorisée par la grande mobilité des Français: les guerres continuelles obligeaient des transferts soudains de domicile, qui correspondaient à un véritable nomadisme pour les soldats, les travailleurs manuels, les serfs émancipés, sans oublier les malfaiteurs et les gueux que la misère générale multipliait. De leur côté, les écrivains, ceux qui n'écrivaient plus en latin, cessèrent en même temps d'écrire en champenois, en picard ou en normand pour privilégier le «françoys».

    Cette langue «françoise» du Moyen Âge ne paraît pas comme du «vrai français» pour les francophones du XXIe siècle. Il faut passer par la traduction, tellement cette langue, dont il n'existe que des témoignages écrits nécessairement déformés par rapport à la langue parlée, demeure différente de celle de notre époque. Les étudiants anglophones des universités ont moins de difficultés à comprendre cet ancien français que les francophones eux-mêmes, la langue anglaise étant bien imprégnée de cette langue! Voici un texte d'ancien français rédigé vers 1040 et extrait de La vie de saint Alexis. Dans ce document, Alexis renonce à sa femme, à sa famille et à la «vie dans le monde» pour vivre pauvre et chaste.

     

     

    C'est l'un des premiers textes écrits en ancien français qui nous soit parvenu. Il s'agit ici d'un petit extrait d'un poème de 125 strophes. Ce n'est donc pas une transcription fidèle de la langue parlée du XIe siècle, même s'il faut savoir que la graphie était relativement phonétique et qu'on prononçait toutes les lettres:


     

    Ancien français

    1. bons fut li secles al tens ancïenur
    2. quer feit iert e justise et amur,
    3. si ert creance, dunt ore n'i at nul prut;
    4. tut est müez, perdut ad sa colur:
    5. ja mais n'iert tel cum fut as anceisurs.
    6. al tens Nöé et al tens Abraham
    7. et al David, qui Deus par amat tant,
    8. bons fut li secles, ja mais n'ert si vailant;
    9. velz est e frailes, tut s'en vat remanant:
    10. si'st ampairet, tut bien vait remanant
    11. puis icel tens que Deus nus vint salver
    12. nostra anceisur ourent cristïentet,
    13. si fut un sire de Rome la citet:
    14. rices hom fud, de grant nobilitet;
    15. pur hoc vus di, d'un son filz voil parler.
    16. Eufemïen -- si out annum li pedre --
    17. cons fut de Rome, des melz ki dunc ieret;
    18. sur tuz ses pers l'amat li emperere.
    19. dunc prist muiler vailante et honurede,
    20. des melz gentils de tuta la cuntretha
    21. puis converserent ansemble longament,
    22. n'ourent amfant peiset lur en forment
    23. e deu apelent andui parfitement:
    24. e Reis celeste, par ton cumandement
    25. amfant nus done ki seit a tun talent.

    Français contemporain

    1. Le monde fut bon au temps passé,
    2. Car il y avait foi et justice et amour,
    3. Et il y avait crédit ce dont maintenant il n'y a plus beaucoup;
    4. Tout a changé, a perdu sa couleur:
    5. Jamais ce ne sera tel que c'était pour les ancêtres.
    6. Au temps de Noé et au temps d'Abraham
    7. Et à celui de David, lesquels Dieu aima tant.
    8. Le monde fut bon, jamais il ne sera aussi vaillant;
    9. Il est vieux et fragile, tout va en déclinant:
    10. Tout est devenu pire, bien va en déclinant (?)
    11. Depuis le temps où Dieu vint nous sauver
    12. Nos ancêtres eurent le christianisme.
    13. Il y avait un seigneur de Rome la cité:
    14. Ce fut un homme puissant, de grande noblesse;
    15. Pour ceci je vous en parle, je veux parler d'un de ses fils.
    16. Eufemïen -- tel fut le nom du père --
    17. Il fut comte de Rome, des meilleurs qui alors y étaient
    18. L'empereur le préféra à tous ses pairs.
    19. Il prit donc une femme de valeur et d'honneur,
    20. Des meilleurs païens de toute la contrée.
    21. Puis ils parlèrent ensemble longuement.
    22. Qu'ils n'eurent pas d'enfant; cela leur causa beaucoup de peine.
    23. Tous les deux ils en appellent à Dieu parfaitement
    24. «Ô! Roi céleste, par ton commandement,
    25. Donne-nous un enfant qui soit selon tes désirs.»

     

    Pour un francophone contemporain, il ne s'agit pas d'un texte français, mais plutôt d'un texte qui ressemble au latin. Pourtant, ce n'est plus du latin, mais du français, un français très ancien dont les usages sont perdus depuis fort longtemps.

     

    1.3 L'expansion du français en Angleterre

    Au cours du Xe siècle, les rois furent souvent obligés de mener une vie itinérante sur leur petit domaine morcelé et pauvre. Incapable de repousser les envahisseurs vikings (ces «hommes du Nord» — Northmans — venus de la Scandinavie), Charles III le Simple leur concéda en 911 une province entière, la Normandie. Le traité de Saint-Clair-sur-Epte cédait au chef Rollon le comté de Rouen, qui deviendra le duché de Normandie. En échange, Rollon s'engageait à bloquer les incursions vikings menaçant le royaume des Francs et demeurait vassal du roi et devenait chrétien en 912 en la cathédrale de Rouen sous le nom de Robert (Robert Ier le Riche).

     

    - L'assimilation des Vikings

    Les Vikings de Normandie, comme cela avait été le cas avec les Francs, perdirent graduellement leur langue scandinave, le vieux norrois apparenté au danois. Dans leur duché, désormais libérés de la nécessité de piller pour survivre, les Vikings devinrent sédentaires et fondèrent des familles avec les femmes du pays. Celles-ci parlaient ce qu'on appellera plus tard le normand, une langue romane qu'elles ont apprise naturellement à leurs enfants. On estime que le langue des Vikings, encore vivante à Bayeux au milieu du

     

    Xe siècle, n'a pas survécu bien longtemps au-delà de cette date. Autrement dit, l'assimilation des vainqueurs vikings s'est faite rapidement et sans trop de problèmes. L'héritage linguistique des Vikings se limite à moins d'une cinquantaine de mots, presque exclusivement des termes maritimes: cingler, griller, flâner, crabe, duvet, hauban, hune, touer, turbot, guichet, marsouin, bidon, varech, homard, harfang, etc.

     

    Moins d'un siècle après leur installation en Normandie, ces anciens Vikings, devenus des Normands, prirent de l'expansion et partirent chercher fortune par petits groupes en Espagne en combattant les Maures aux côtés des rois chrétiens du Nord (1034-1064), ainsi qu'en Méditerranée, en Italie du Sud et en Sicile, jusqu’à Byzance, en Asie mineure et en «Terre Sainte» lors des croisades. Partout, les Normands répandirent le français hors de France.

     

    - Les prétentions à la couronne anglaise

    De plus, le duc de Normandie devint plus puissant que le roi de France avec la conquête de l'Angleterre. Rappelons que les Normands étaient depuis longtemps en contact avec l'Angleterre; ils occupaient la plupart des ports importants face à l’Angleterre à travers la Manche.

     

    Cette proximité entraîna des liens encore plus étroits lors du mariage en 1002 de la fille du duc Richard II de Normandie, Emma, au roi Ethelred II d'Angleterre. À la mort d'Édouard d'Angleterre en 1066, son cousin, le duc de Normandie appelé alors Guillaume le Bâtard — il était le fils illégitime du duc de Normandie, Robert le Magnifique, et d'Arlette, fille d'un artisan préparant des peaux — décida de faire valoir ses droits sur le trône d'Angleterre.

     

    C'est par sa parenté avec la reine Emma (décédée en 1052) que Guillaume, son petit-neveu, prétendait à la couronne anglaise. Selon les anciennes coutumes scandinaves, les mariages dits en normand à la danesche manere («à la danoise») désignaient la bigamie pratiquée par les Vikings implantés en Normandie et, malgré leur conversion officielle au christianisme, certains Normands avaient plusieurs femmes. Or, les enfants nés d'une frilla, la seconde épouse, étaient considérés comme parfaitement légitimes par les Normands, mais non par l'Église. Autrement dit, Guillaume n'était «bâtard» qu'aux yeux de l'Église, car il était légalement le successeur de son père, Robert le Magnifique (v. 1010-1035).

     

    - La bataille de Hastings (14 octobre 1066)

    Avec une armée de 6000 à 7000 hommes, quelque 1400 navires (400 pour les hommes et 1000 pour les chevaux) et... la bénédiction du pape, Guillaume II de Normandie débarqua dans le Sussex, le 29 septembre, puis se déplaça autour de Hastings où devait avoir lieu la confrontation avec le roi Harold II. Mais les soldats de Harold, épuisés, venaient de parcourir 350 km à pied en moins de trois semaines, après avoir défait la dernière invasion viking à Stamford Bridge, au centre de l'Angleterre, le 25 septembre 1066.

    Le 14 octobre, lors de la bataille de Hastings, qui ne dura qu'une journée, Guillaume réussit à battre Harold II, lequel fut même tué. Le duc Guillaume II de Normandie, appelé en Angleterre «William the Bastard» (Guillaume le Bâtard), devint ainsi «William the Conqueror» (Guillaume le Conquérant). Le jour de Noël, il fut couronné roi en l'abbaye de Westminster sous le nom de Guillaume Ier d'Angleterre.


     

    - Les nouveaux maîtres et la langue

    Le nouveau roi s'imposa progressivement comme maître de l'Angleterre durant les années qui suivirent. Il évinça la noblesse anglo-saxonne qui ne l'avait pas appuyé et favorisa ses barons normands et élimina aussi les prélats et les dignitaires ecclésiastiques anglo-saxons en confiant les archevêchés à des dignitaires normands.

     

    On estime à environ 20 000 le nombre de Normands qui se fixèrent en Angleterre à la suite du Conquérant. Par la suite, Guillaume Ier (1066-1087) exerça sur ses féodaux une forte autorité et devint le roi le plus riche et le plus puissant d'Occident. Après vingt ans de règne, l'aristocratie anglo-saxonne était complètement disparue pour laisser la place à une élite normande, tandis qu'il n'existait plus un seul Anglais à la tête d'un évêché ou d'une abbaye. La langue anglaise prit du recul au profit du franco-normand.

     

    Guillaume Ier d'Angleterre et les membres de sa cour parlaient une variété de français appelé aujourd’hui le franco-normand (ou anglo-normand), un «françois» teinté de mots nordiques apportés par les Vikings qui avaient, un siècle auparavant, conquis le nord de la France. À partir ce ce moment, le mot normand perdit son sens étymologique d'«homme du Nord» pour désigner un «habitant du duché de Normandie».

     

    La conséquence linguistique de Guillaume le Conquérant fut d’imposer le franco-normand, considéré comme du «françois» plus local, dans la vie officielle en Angleterre. Alors que les habitants des campagnes et la masse des citadins les plus modestes parlaient l’anglo-saxon, la noblesse locale, l’aristocratie conquérante, ainsi que les gens d'Église et de justice, utilisaient oralement le franco-normand, mais le clergé, les greffiers, les savants et les lettrés continuaient pour un temps d'écrire en latin.

     

    Le françois de France, pour sa part, acquit également un grand prestige dans toute l'Angleterre aristocratique. En effet, comme tous les juges et juristes étaient recrutés en France, le «françois» de France devint rapidement la langue de la loi et de la justice, sans compter que de nombreuses familles riches et/ou nobles envoyaient leurs enfants étudier dans les villes de France.

     

      Le premier roi de la dynastie des Plantagenêt, Henri II, du fait de son mariage avec Aliénor d'Aquitaine en 1152, englobait, outre l'Irlande et l'Écosse, plus de la moitié occidentale de la France. Bref, Henri II gouvernait un royaume allant de l'Écosse aux Pyrénées: c'était la plus grande puissance potentielle de l'Europe. Par la suite, Philippe Auguste reprit aux fils d'Henri II, Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre, la majeure partie des possessions françaises des Plantagenêt (Normandie, Maine, Anjou, Touraine, Poitou, Aquitaine, Limousin et Bretagne).

    À ce moment, toute la monarchie anglaise parlait «françois», et ce, d'autant plus que les rois anglais épousaient uniquement des princesses françaises (toutes venues de France entre 1152 et 1445). Il faut dire aussi que certains rois anglais passaient plus de temps sur le continent qu'en Grande-Bretagne. Ainsi, Henri II passa 21 ans sur le continent en 34 ans de règne.

    Lorsque, en 1259, Henri III d’Angleterre renonça officiellement à la possession de la Normandie, la noblesse anglaise eut à choisir entre l'Angleterre et le Continent, ce qui contribua à marginaliser le franco-normand au profit, d'une part, du français parisien, d'autre part, de l'anglais.

     

    1.4 La langue du roi de France

    Au cours du XIIe siècle, on commença à utiliser le «françois» à l'écrit, particulièrement dans l'administration royale, qui l'employait parallèlement au latin. Sous Philippe Auguste (1165-1223), le roi de France avait considérablement agrandi le domaine royal: après l'acquisition de l'Artois, ce fut la Normandie, suivie de la Touraine, de l'Anjou et du Poitou. C'est sous son règne que se développa l'administration royale avec la nomination des baillis dans le nord du pays, des sénéchaux dans le Sud.

    Mais c'est au XIIIe siècle qu'apparurent des œuvres littéraires en «françois». À la fin de ce siècle, le «françois» s'écrivait en Italie (en 1298, Marco Polo rédigea ses récits de voyages en françois), en Angleterre (depuis la conquête de Guillaume le Conquérant), en Allemagne et aux Pays-Bas. Évidemment, le peuple ne connaissait rien de cette langue, même en Île-de-France (région de Paris) où les dialectes locaux continuaient de subsister.

      Lorsque Louis IX (dit «saint Louis») accéda au trône de France (1226-1270), l 'usage du «françois» de la Cour avait plusieurs longueurs d'avance sur les autres parlers en usage. Au fur et à mesure que s'affermissait l'autorité royale et la centralisation du pouvoir, la langue du roi de France gagnait du terrain, particulièrement sur les autres variétés d'oïl. Mais, pour quelques siècles encore, le latin gardera ses prérogatives à l'écrit et dans les écoles.

    De fait, après plusieurs victoires militaires royales, ce françois prit le pas sur les les autres langues d'oïl (orléanais, champenois, angevin, bourbonnais, gallo, picard, etc.) et s'infiltra dans les principales villes du Nord avant d'apparaître dans le Sud. À la fin de son règne, Louis IX était devenu le plus puissant monarque de toute l'Europe, ce qui allait assurer un prestige certain à sa langue, que l'on appelait encore le françois.

     

     

    A l'époque de l'ancien français (françois), les locuteurs semblent avoir pris conscience de la diversité linguistique des parlers du nord de la France. Comme les parlers d'oïl différaient quelque peu, ils étaient généralement perçus comme des variations locales d'une même langue parce que de village en village chacun se comprenait.

     

    Thomas d'Aquin (1225-1274), théologien de l'Église catholique, donne ce témoignage au sujet de son expérience: «Dans une même langue [lingua], on trouve diverses façons de parler, comme il apparaît en français, en picard et en bourguignon; pourtant, il s'agit d'une même langue [loquela].» Cela ne signifie pas cependant que la communication puisse s'établir aisément. De plus, les jugements de valeur sur les «patois» des autres étaient fréquents. Dans le Psautier de Metz (ou Psautier lorrain) rédigé vers 1365, l'auteur, un moine bénédictin de Metz, semble déplorer que les différences de langage puisse compromettre la compréhension mutuelle:

    En françois d'époque

    Et pour ceu que nulz ne tient en son parleir ne rigle certenne, mesure ne raison, est laingue romance si corrompue, qu'a poinne li uns entent l'aultre et a poinne puet on trouveir a jour d'ieu persone qui saiche escrire, anteir ne prononcieir en une meismes meniere, mais escript, ante et prononce li uns en une guise et li aultre en une aultre.

    En traduction

    [Et parce que personne, en parlant, ne respecte ni règle certaine ni mesure ni raison, la langue romane est si corrompue que l'on se comprend à peine l'un l'autre et qu'il est difficile de trouver aujourd'hui quelqu'un qui sache écrire, converser et prononcer d'une même façon, mais chacun écrit, converse et prononce à sa manière.]

     

    Conon de Béthune (v. 1150-1220) est un trouvère né en Artois et le fils d'un noble, Robert V de Béthune. Il a participé aux croisades et a tenu à son époque un rôle politique important. Il doit surtout sa renommée aux chansons courtoises qu'il a écrites. Lors d'un séjour à la cour de France en 1180, il chanta ses œuvres devant Marie de Champagne et Adèle de Champagne, la mère du roi Philippe Auguste. Le texte qui suit est significatif à plus d'un titre, car Conon de Béthune oppose deux «patois», le picard d'Artois et le «françois» de l'Île-de-France:

    La roine n'a pas fait ke cortoise,
    Ki me reprist, ele et ses fieux, li rois,
    Encor ne soit ma parole françoise;
    Ne child ne sont bien apris ne cortois,
    Si la puet on bien entendre en françois,
    S'il m'ont repris se j'ai dit mots d'Artois,
    Car je ne fui pas norris à Pontoise.
    [La reine ne s'est pas montrée courtoise,
    lorsqu'ils m'ont fait des reproches, elle et le roi, son fils.
    Certes, mon langage n'est pas celui de France,
    mais on peut l'apprendre en bon français.
    Ils sont malappris et discourtois
    ceux qui ont blâmé mes mots d'Artois,
    car je n'ai pas été élevé à Pontoise.]

     

    Si le poète considère que ses «mots d'Artois» constituent une variante légitime du français, le roi et la reine estiment que l'emploi des picardismes est une façon de ne pas respecter le bon usage de la Cour et qu'il faut adopter une langue plus proche de celle du roi, ce qu'on appelle alors le «langage de France», c'est-à-dire la «langue de l'Île-de-France». Déjà à cette époque, les parlers locaux sont perçus de façon négative. Dans le Tournoi de Chauvency écrit en 1285, le poète Jacques Bretel oppose le «bon françois» au «valois dépenaillé» (walois despannei):

    Lors commença a fastroillier
    Et le bon fransoiz essillier,
    Et d'un walois tout despannei
    M'a dit: «Bien soiez vos venei,
    Sire Jaquemet, volontiers.»
    [Il commença alors à baragouiner
    et à massacrer le bon français,
    dans un valois tout écorché
    il me dit: «Soyez le bienvenu,
    Monsieur Jacquemet, vraiment!»]

     

     

    Dans d'autres textes, on parle du «langage de Paris». Ce ne sont là que quelques exemples, mais ils témoignent éloquemment que le «françois» parlé à la Cour du roi et à Paris jouissait dans les milieux aristocratiques d'un prestige supérieur aux autres parlers. Ainsi, la norme linguistique choisie devient progressivement le «françois» de l'Île-de-France qui se superposa aux autres «langages», sans les supprimer.

     

    Mais il faut faire attention, car la langue nationale qui commence à s'étendre au royaume de France n'est pas le «langage de Paris», plus précisément le parler des «vilains», c'est-à-dire celui des manants, des paysans et des roturiers, mais c'était le «françois» qui s'écrivait et qui était parlé à la Cour de France, donc la variété cultivée et socialement valorisée du «françois». Voici un témoignage intéressant à ce sujet; il provient d'un poème biblique (1192) rédigé par un chanoine du nom de Evrat, de la collégiale Saint-Étienne de Troyes:

    Tuit li languages sunt et divers et estrange
    Fors que li languages franchois:
    C'est cil que deus entent anchois,
    K'il le fist et bel et legier,
    Sel puet l'en croistre et abregier
    Mielz que toz les altres languages.
    [Toutes les langues sont différentes et étrangères
    si ce n'est la langue française;
    c'est celle que Dieu perçoit le mieux,
    car il l'a faite belle et légère,
    si bien que l'on peut l'amplifier ou l'abréger
    mieux que toutes les autres.]

     

     

    Selon ce point de vue, le «françois» est ni plus ni moins de nature divine! C'est la plus belle langue, après le latin, et après le grec et l'hébreu, les trois langues des Saintes Écritures. Mais ce français c'était également le «françois» de l'Administration royale, celui des baillis et des sénéchaux, qui devaient être gentilshommes de nom et d'armes, ainsi que de leurs agents (prévôts, vicomtes, maires, sergents, forestiers, etc.).

     

    Ce personnel administratif réparti dans toute la France exerçait au nom du roi tous les pouvoirs: ils rendaient la justice, percevaient les impôts, faisaient respecter la loi et l'ordre, recevaient les plaintes des citoyens, etc. Ces milliers de fonctionnaires — déjà 12 000 vers 1500 — étaient bilingues et pouvaient s'exprimer dans un «françois» assez normalisé. Près du tiers des commis de l'État se trouvait à Paris, que ce soit au Parlement, à la Chambre des comptes, à la Chancellerie, à la Cour du trésor, à la Cour des aides, etc.

     

    À la fin du Moyen Âge, on trouvait partout en France des gens pouvant se faire comprendre en «françois». Dans son Esclarcissement de la langue francoyse écrit en anglais (1530), John Palsgrave apporte ce témoignage: «Il n'y a pas non plus d'homme qui ait une charge publique, qu'il soit capitaine, ou qu'il occupe un poste d'indiciaire, ou bien qu'il soit prédicateur, qui ne parle le parfait françois, quel que soit son lieu de résidence.» D'ailleurs, dès 1499, une ordonnance royale exigeait que les sergents royaux sachent lire et écrire le «françois».

    T

     

    ous ces gens écrivaient et produisaient en français des actes, procès-verbaux, comptes, inventaires, suppliques, pétitions, etc. C'est ainsi que la bureaucratisation a pu jouer un rôle primordial dans l'expansion de la «langue du roi». À partir du XIIe siècle, on s'est mis à écrire des chansons de geste, des chansons de trouvère, des fabliaux, des contes, des ouvrages historiques, des biographies de saints, des traductions de la Bible, etc., le tout en «françois du roi». Avec l'apparition de l'imprimerie dès 1470 en France, le français du roi était assuré de gagner la partie sur toute autre langue dans le royaume.

    En même temps, les paysans qui constituaient quelque 90 % de la population, continuaient de pratiquer leur langue maternelle régionale. Parfois, des mots du «françois» pouvaient s'implanter dans leur vocabulaire, mais sans plus. Dans les écoles, on enseignait le latin, quitte à passer par le «françois» ou le patois pour expliquer la grammaire latine. Avec le temps, les écoles des villes se mirent à enseigner la langue françoise.

     

    À la fin du Moyen Âge, la majorité des citadins pouvait lire le «françois», sans nécessairement l'écrire. Dans les campagnes, l'analphabétisme régnait, mais beaucoup de paysans pouvaient lire en «françois» des textes simples comme des contrats de mariage, des testaments, des actes de vente, des créances, etc.

    2 L'état de l'ancien français 

    L'ancien français a transformé considérablement la langue romane au point de la rendre méconnaissable.

     

    2.1 Le système phonétique

     

    L'ancien français présentait un système phonétique de transition très complexe, qui ne devait pas durer. Il possédait de nombreux sons ignorés aussi bien du latin et du roman que du français moderne. Cet ancien français du XIIe siècle se caractérise par la surabondance au plan phonétique. Il s'agit bien de surabondance plutôt que de richesse fonctionnelle, car si le nombre des voyelles et des consonnes demeure élevé, leur rendement phonologique s'avère faible.

     

    - La prononciation des consonnes

    En finale de mot, la règle était de prononcer toutes les consonnes écrites. Cependant, les lettres n'avaient pas la même valeur qu'on leur donne actuellement. Ainsi, le -t final s'est prononcé [θ] (comme le th sourd de l'anglais) jusqu'à la fin du XIe siècle, dans des mots comme aimet, chantet et vertut; toutefois, ce [θ] constrictif est tombé en désuétude et il devait être rare dès le début du XIIe siècle.

     

    Contrairement à ce qui se passe en français moderne, tous les -s du pluriel se faisaient entendre. Par exemple, chevaliers et les omes (hommes) se prononçaient [tchëvaljèrs] et [lèzom-mës]. La lettre finale -z des mots tels amez (aimez), chantez, dolz (doux) avait la valeur de l'affriquée [ts]. Enfin, la lettre -l était mouillée (palatalisée) en [λ] en fin de mot: il = [iλ], soleil = [sòlèλ], peril = [periλ].

     

    Rappelons que la période romane avait introduit la prononciation d'un [h] dit «aspiré» dans des mots d'origine francique comme honte, haine, hache, haïr, hêtre, héron. etc. Cette prononciation du [h] s'est atténuée au cours de l'ancien français, qui finira par ne plus écrire le h initial dans la graphie. Par exemple, le mot « homme» du français moderne s'écrivait ome (du latin hominem) en ancien français. Le h graphique a été réintroduit dans les siècles suivants soit par souci étymologique (p. ex. ome < lat. hominem > homme) soit pour interdire la liaison (p. ex. harnais, hutte, etc.).

     

    L'un des traits caractéristiques de cet état de langue ancien résidait dans la présence des consonnes affriquées. Au nombre de quatre, elles correspondaient aux sons [ts], [dz], [tch] et [dj]comme dans djihad. Dans la graphie, elles étaient rendues respectivement par c (devant e et i) et -z en finale, par z à l'intérieur du mot, par ch, et par g (devant e et i) ou j (devant a, o, u). Le graphème ë correspond au son [e] neutre comme dans cheval ou chemin; en finale de mot, les e se prononçaient tous: cire, place, argile, d'où le [ë] dans le tableau ci-dessous.

     

    Lettres Son Ancien français Prononciation Français moderne
    c + i
    c + e

    -z

    [ts]

     

     

    cire
    place

    amez
    marz

    [tsirë]
    [platsë]

    [amèts]
    [marts]

    cire
    place

    aimez
    mars

    -z- [dz]
    treize
    raizon
    [treidzë]
    [raidzon-n]
    treize
    raison
    g + e
    g + i

    j + a
    j + o
    j + u

    [dj]

     


    gesir
    argile

    jambe
    jorn
    jugier

    [djézir]
    [ardjilë]

    [djam-mbë]
    [djòrn]
    [djudjjèr]

     

    gésir
    argile

    jambe
    jour
    juger

    ch-

    [tch]

     

    chief
    sache
    riche
    [tchièf]
    [satchë]
    [ritchë]
    chef
    sache
    riche

     

    Dans certains mots, les consonnes nasales [m] et [n], comme on les connaît en français contemporain, avaient déjà perdu leur articulation propre à la finale dans des mots comme pain, faim, pont, blanc, brun, etc. En fait, la consonne nasale était combinée avec la voyelle qui la précède et on ne la prononçait plus, et ce, même si elle était conservée dans la graphie: pain , bon, faim, etc.

     

    En général, en ancien français, les consonnes nasales pouvaient garder leur articulation propre et n'étaient pas nasalisées avec la voyelle précédente (comme aujourd'hui): on prononçait distinctement la voyelle nasale ET la consonne nasale. Par exemple, on prononçait les mots bien, bon, jambe, sentir, rompre, etc., en faisant bien sentir la consonne [n] ou [m].

     

    Par exemple, dans l'adjectif bonne, non seulement la consonne était prononcée (comme aujourd'hui), mais la voyelle [ò] était nasalisée (ce qui n'est plus le cas) et la voyelle finale, prononcée: [bon + n + në], [bien + n], [djam + bë], [sen + tir], [rom + m + prë]. Il faudrait noter aussi la chute de [s] devant une consonne sourde: hoste > hôte; maistre > maître; teste > tête; coustume > coutume; forest > forêt.

     

    - La prononciation des voyelles

    Comparé au système consonantique, le système vocalique (voyelles) est encore plus complexe en ancien français du

     

    XIIe siècle. En fait, on à peine à imaginer aujourd'hui cette surabondance des articulations vocaliques dont était caractérisée l'ancienne langue française. De plus, il est difficile de déterminer si ces articulations étaient toutes des phonèmes ou si plusieurs de celles-ci correspondaient plutôt à des variantes combinatoires; certains spécialistes n'hésitent pas à croire qu'il s'agissait d'un système phonologique plutôt que simplement phonétique.

     

    Les voyelles de l'ancien français étaient les suivantes:

     

    - 9 voyelles orales: [i], [é], [è], [a], [o], [ò], [ou], [u], [ë]

    - 5 voyelles nasales: [an], [ein], [in], [oun], [un]

    - 11 diphtongues orales: [ie], [ue], [ei], [òu], [ai], [yi], [oi], [au], [eu], [èu], [ou]

    - 5 diphtongues nasalisées: [an-i], [ein-i], [i-ein], [ou-ein], [u-ein]

    - 3 triphtongues: [ieu], [uou], [eau]

     

    Ce système donne un total impressionnant de 33 voyelles. Le français moderne en compte maintenant 16 et, par rapport aux autres langues, on peut considérer que c'est déjà beaucoup. Il s'agit là d'un système que l'on pourrait qualifier d'«anormal» dans l'histoire; d'ailleurs, il sera simplifié au cours dès le XIIIe siècles.

     

    Au début du XIIe siècle, les voyelles notées avec deux lettres correspondaient à des diphtongues. On en comptait 16, dont 11 orales et 5 nasales. Autrement dit, toutes les lettres écrites se prononçaient. Le groupe oi était diphtongué en [oi], comme dans le mot anglais boy que l'on transcrirait phonétiquement [bòj] ou [bòi]; par exemple, roi se prononçait [ròj] (ou [ròi]. Pour les autres diphtongues, il fallait prononcer en une seule émission les deux «parties» de la voyelle: [ie], [ue], [ei], etc.

     

    Voici des exemples d'anciennes diphtongues dont on retrouve les traces encore dans la graphie d'aujourd'hui: fou, voir, feu, sauver, saut, douleur, chaise, causer, truite, etc. La diphtongue [au] était prononcée [ao] plutôt que [au], et elle est demeurée diphtonguée durant tout le début du Moyen Âge dans des mots comme saut, sauver, etc. Elle se réduira à [o] au cours du XVIe siècle.

    L'ancien français possédait aussi des triphtongues: [ieu], [uou], [eau]. On en retrouve des vestiges dans des mots contemporains en [eau] comme oiseau, beau, drapeau; en ancien français ces mêmes voyelles étaient triphtonguées, plus du tout aujourd'hui.

     

    Au cours des XIIIe et XIVe siècles, l'ancien français continuera d'évoluer. Ainsi, la graphie oi est passée de la prononciation en [oi] comme dans boy à [oé], puis [oè] et finalement [wè]: des mots comme roi, moi, loi, toi, etc., étaient donc prononcés [rwè], [mwè], [lwè], [twè], etc. La prononciation en [wa] était déjà attestée au XIIIe siècle, mais elle n'était pas généralisée. Certains critiquaient cette prononciation en [wa], car elle était surtout employée par les classes modestes; elle triomphera à la Révolution française.

     

    Il est difficile de se faire une idée de ce qu'était, au XIIIe siècle, la prononciation de l'ancien français. En guise d'exemple, prenons ce vers tiré de la Chanson de Roland:

     

    des peaux de chievres blanches
    [des peaux de chèvres blanches]

     

    À cette époque, l'écriture était phonétique: toutes les lettres devaient se prononcer. Par rapport à la prononciation actuelle [dé-po-t'chèvr' blanch], on disait donc alors, en prononçant toutes les lettres: dé-ss péawss de tchièvress blan-ntchess. Ce qui donne 26 articulations contre 13 aujourd'hui, où l'on ne prononce plus les -s du pluriel. C'est donc une langue qui paraîtrait rude à plus d'une oreille contemporaine, sans compter la «truculence verbale» courante à l'époque.

    À cet égard, on aura intérêt à lire le petit extrait du Roman de Renart (fin du XIIIe siècle) reproduit ici:

     

    Fin XIIIe siècle

    1. Dame Hermeline ot la parole
    2. Respond li comme dame fole
    3. jalouse fu & enflamee
    4. q'ses sires lavoit amee
    5. & dist : ne fuce puterie
    6. & mauvestie & lecherie
    7. Grant deshonor & grant putage
    8. Felstes vos & grant outrage
    9. q'ant vos soufrites monbaron
    10. Q'vos bati vostre ort crepon.

    Traduction contemporaine

    1. Dame Hermeline prit la parole,
    2. Elle lui répond en femme folle;
    3. elle était jalouse et enflammée
    4. parce que son mari Hersant l'avait possédée.
    5. Et elle dit : ne fut-ce conduite de putain
    6. et mauvaiseté et dévergondage?
    7. Un grand déshonneur et une grande putinerie,
    8. voilà ce que vous avez fait avec grand outrage
    9. quand vous avez laissé mon mari
    10. vous frotter votre sale croupion.

     

    4.2 La grammaire

    Au plan morpho-syntaxique, l'ancien français conservait encore sa déclinaison à deux cas (déclinaisons) et l'ordre des mots demeurait assez libre dans la phrase, généralement simple et brève. Jusqu'au

     

    XIIIe siècle, les deux cas de l'ancien français sont les mêmes que pour la période romane: le cas sujet (CS) et le cas régime (CR) issu de l'accusatif latin.

     

    Déclinaison I: CS (cas sujet)
    CR (cas non sujet)
    li murs (le mur)
    le mur
    (le mur)
    li mur (les murs)
    les murs
    (les murs)
    Déclinaison II: CS (cas sujet)
    CR
    (cas non sujet)
    li pere (le père)
    le pere
    (le père) 
    le pere (les pères)
    les peres
    (les pères)
    Déclinaison III: CS (cas sujet)
    CR
    (cas non sujet)
    li cuens (le comte)
    le comte
    (le comte)
    li comte (les comtes)
    les comtes
    (les comtes)

     

    De façon générale, c'est le cas régime (autre que sujet) qui a persisté en français, car la déclinaison à deux cas a commencé à s'affaiblir dès le XIIIe siècle et, à la fin du XIVe siècle, le processus était rendu à son aboutissement: il ne restait plus qu'un seul cas, le cas régime. C'est sur celui-ci que repose la forme des mots français d'aujourd'hui.

     

    - L'article

    Une autre innovation concerne l'apparition de l'article en ancien français, alors que le latin n'avait pas d'article, son système sophistiqué de déclinaison pouvant se passer de ce mot outil. Le français a développé un système d'articles à partir des démonstratifs ille/illa/illud, qui ont donné les déterminants appelés «articles définis». Les articles en ancien français se déclinaient comme les noms en CS et CR, au masculin comme au féminin. Alors qu'en français moderne, on a l'opposition le / la / les, l'ancien français opposait li / le (masc.), la (fém.) et les (plur.).

     

    Article
    défini
    MASCULIN FÉMININ
      Singulier Pluriel Singulier Pluriel
    CS li li la les
    CR le les

     

    Pour l'article indéfini, ce sont les formes uns / un (masc.) et une (fém.), alors que le pluriel était toujours marqué par uns (en français moderne: des).

     

    Article
    indéfini
    MASCULIN FÉMININ
      Singulier Pluriel Singulier Pluriel
    CS uns uns une unes
    CR un

     

     L'emploi du genre

    De façon générale, la marque du genre se trouvait en latin dans la désinence des noms et des adjectifs, c'est-à-dire dans leur terminaison. Dans l'évolution du latin vers l'ancien français, les marques du genre ont perdu leurs caractéristiques d'origine. Pour simplifier la description, on peut indiquer les grandes tendances suivantes:

     

    1) La déclinaison féminine en -as a donné des mots du genre féminin en français: rosam > rose / rosas > roses.

    2) Les pluriels neutres latins en -a ont également donné des mots au féminin en français: folia > feuille; arma > arme.

    3) Les mots masculins latins en -is sont devenus masculins en français: canis > chien; panis> pain; rex/regis > roi.

    4) Les noms latins terminés en -er sont aussi devenus masculins: pater > père; frater > frère; liber > livre.

     

    Pendant la période romane, le latin a perdu le neutre qui a été absorbé par le masculin; par exemple, granum > granus > grain (masc.). Du neutre latin, granum et lactis sont passés au masculin en français; du masculin latin, floris est passé au féminin en français; par contre, gutta et tabula sont restés au féminin; mais burra (bure) a conservé le féminin du latin pour passer au masculin lorsqu'il a désigné le «bureau» en français.

     

    Cependant, beaucoup de mots d'ancien français ont changé de genre au cours du Moyen Âge. Ainsi, étaient féminins des mots comme amour, art, évêché, honneur, poison, serpent; aujourd'hui, ces mots sont masculins. À l'opposé, des mots aujourd'hui féminins étaient alors masculins: affaire, dent, image, isle (île), ombre, etc.

     

    - La féminisation

    L'ancien français semble une langue moins sexiste que le français contemporain, du moins si l'on se fie à certaines formes qui existaient à l'époque. Voici une liste de mots au masculin et au féminin:

     

    Notons aussi l'opposition damoiselle (fém.) / damoisel (masc.) ou damoiselle/damoiseau pour désigner les jeunes nobles (femmes ou hommes), qui n'étaient pas encore mariés; au cours des siècles, seul le mot demoiselle est resté dans la langue, alors que les formes masculines damoisel/damoiseau sont disparus. Après tous ces changements, on ne se surprendra pas qu'on en soit arrivé à une répartition arbitraire des genres en français moderne.

    Dans le Guide Guide d’aide à la féminisation des noms (1999), les auteurs rapportent des exemples de termes féminisés tirés du Livre de la Taille de Paris de l’an 1296 et 1297 :

     

     

    aiguilliere, archiere, blaetiere, blastiere, bouchere, boursiere, boutonniere, brouderesse, cervoisiere, chambriere, chandeliere, chanevaciere, chapeliere, coffriere, cordiere, cordoaniere, courtepointiere, couturiere, crespiniere, cuilliere, cuisiniere, escueliere, estuveresse, estuviere, feronne, foaciere, fourniere, from(m)agiere, fusicienne, gasteliere, heaulmiere, la(i)niere, lavandiere, liniere, mairesse, marchande, mareschale, merciere, oublaiere, ouvriere, pevriere, portiere, potiere, poulailliere, prevoste, tainturiere, tapiciere, taverniere, etc.

     

    - La numération

    Il faut mentionner également le système de numération qui a profondément été modifié en ancien français. Les nombres hérités du latin correspondent aux nombres de un à seize. Le nombre dix-sept, par exemple, est le premier nombre formé d'après un système populaire (logique) qui sert pour tous les nombres suivants: 10 + 7, 10 + 8, 10 + 9, etc. En ce qui concerne les noms des dizaines, le latin possédait un système décimal; ainsi, dix (< decem) vingt (< viginti), trente (< tringinta), quarante (< quadraginta), cinquante (< quinquageni) et soixante (< sexaginta) sont d'origine latine.

      

    Il en est de même pour les formes employées en Belgique et en Suisse telles que septante (< septuaginta > septante), octante (< octoginta) ou huitante (< octoginta > oitante) et nonante (< nonaginta) dans septante-trois, octante-neuf (ou huitante-neuf), nonante-cinq, etc.

    Mais, l'ancien français a adopté dès le XIIe siècle la numération normande (d'origine germanique) qui était un système vicésimal, ayant pour base le nombre vingt (écrit vint ou vin). Ce système était courant chez les peuples d'origine germanique. Selon ce système, on trouvait les formes vingt et dix (écrites vins et dis) pour 30, deux vins pour 40, trois vins pour 60, quatre vins pour 80, cinq vins pour 100, six vins pour 120, dis vins pour 200, quinze vins pour 300, etc. Encore au XVIIe siècle, des écrivains employaient le système vicésimal. Ainsi, Racine écrivait à Boileau: «Il y avait hier six vingt mille hommes ensemble sur quatre lignes.»

    Le système de numération du français standard est donc hybride: il est à la fois d'origine latine et germanique. Quant à un numéral comme soixante-dix, c'est un mot composé (soixante + dix) de formation romane populaire; il faudrait dire trois-vingt-dix pour rester germanique (normand). Le numéral quatre-vingt-dix est également d'origine normande auquel s'ajoute le composé populaire [+ 10].

    C'est l'Académie française qui, au XVIIe siècle, a adopté pour toute la France le système vicésimal pour 70, 80, 90, alors que le système décimal (avec septante, octante, nonante) étaient encore en usage de nombreuses régions; d'ailleurs, ce système sera encore en usage dans certaines régions en France jusque qu'après la Première Guerre mondiale.

     

    - Les verbes

    Au Moyen Âge, plusieurs verbes avaient des infinitifs différents de ceux d'aujourd'hui. Ainsi, au lieu de l'infinitif en -er (issu du latin des verbes en -are, par exemple dans cantare > chanter), on employait celui en -ir: abhorrir, aveuglir, colorir, fanir, sangloutir, toussir, etc. On trouvait aussi des infinitifs tout à fait inexistants aujourd'hui: les verbes tistre (tisser), benistre (bénir) et benire (bénir). De plus, de très nombreux verbes, fréquents au Moyen Âge, sont aujourd'hui disparus: ardoir (<ardere: brûler), bruire (<*brugere: faire du bruit), chaloir (<calere: avoir chaud), doloir (<dolere: souffrir), enfergier (<en fierges: mettre aux fers), escheler (<eschiele: monter dans une échelle), ferir (<ferire: combattre), nuisir <nocere: nuire), oisever (<*oiseus : être oisif), plaisir <placere: plaire), toster <*tostare: rôtir), vesprer < vesperare: faire nuit).

     

    L'ancien français a fait disparaître certains temps verbaux du latin: le plus-que-parfait de l'indicatif (j'avais eu chanté), le futur antérieur (j'aurais eu chanté), l'impératif futur (?), l'infinitif passé (avoir eu chanter), l'infinitif futur (devoir chanter).

      

    En revanche, l'ancien français a créé deux nouvelles formes: le futur en -rai et le conditionnel en -rais. Le latin avait, pour le futur et le conditionnel, des formes composées du type cantare habes (mot à mot: «tu as à chanter»: chanteras), cantare habebas (mot à mot: «tu avais à chanter»: chanterais). Fait important, l'ancien français a introduit le «que» pour marquer le subjonctif; il faut dire que la plupart des verbes étaient semblables au présent et au subjonctif (cf. j'aime / il faut que j'aime).

     

    Enfin, la conjugaison en ancien français ne s'écrivait pas comme aujourd'hui. Jusqu'en moyen français, on n'écrivait pas de -e ni de -s à la finale des verbes de l'indicatif présent: je dy, je fay, je voy, je supply, je rendy, etc.

      

    De plus, l'emploi du futur n'a pas toujours été celui qu'il est devenu aujourd'hui. Beaucoup écrivaient je priray (prier), il noura (nouer), vous donrez (donner), j'envoirai (envoyer), je mouverai (de mouver), je cueillirai (cueillir), je fairai (faire), je beuvrai (boire), je voirai (voir), j'arai (avoir), je sarai (savoir), il pluira (pleuvoir).

     

    - Le participe passé

    Le participe passé (avec avoir et avec être) existait en ancien français, mais il n'y avait pas de règles d'accord systématique. On pouvait au choix faire accorder le participe passé avec être ou sans auxiliaire, mais on n'accordait que rarement le participe avec avoir.

     

    anc. fr.: Passée a la première porte.
    fr. mod.: Elle a passé la première porte.

     

    En général, le participe passé ne s'accordait pas avec un nom qui le suivait: Si li a rendu sa promesse.

     

    Néanmoins, cette langue restait encore assez près du latin d'origine. En fait foi cette phrase, extraite de la Quête du Graal de 1230, correspondant certainement à du latin francisé: «Sache que molt t'a Notre Sire montré grand débonnaireté quand il en la compagnie de si haute pucelle et si sainte t'a amené.» Pour ce qui est de l'orthographe, elle n'était point encore fixée et restait très calquée sur les graphies latines.

     

    - La phrase

    La phrase de l'ancien français ressemble relativement à celle du français moderne dans la mesure où elle respecte l'ordre sujet + verbe + complément avec certaines différences, alors que l'ordre des mots en latin pouvait être plus complexe. En voici un exemple tiré de La Mort du roi Arthur, rédigé vers 1120-1240 par un auteur anonyme:

     

    "Sire, fet Agravains, oïl, et ge vos dirai comment." Lors le tret a une part et li dist a conseill : "Sire, il est einsi que Lancelos ainme la reïne de fole amour et la reïne lui. Et por ce qu'il ne pueent mie assembler a leur volenté quant vos i estes, est Lancelos remés, qu'il n'ira pas au tornoiement de Wincestre ; einz i a envoiez ceus de son ostel, si que, quant vos seroiz meüz ennuit ou demain, lors porra il tout par loisir parler a la reïne." [«Oui, sire, dit Agravain, je vais vous expliquer comment.» Il l'entraîna à l'écart et lui dit à voix basse : «Sire, la situation est telle que Lancelot et la reine s'aiment d'un amour coupable. Comme ils ne peuvent pas se rencontrer à leur aise quand vous êtes là, Lancelot est resté chez lui et n'ira pas au tournoi de Wincestre; mais il y a envoyé ceux de sa maison, si bien qu'après votre départ, ce soir ou demain, il aura tout le loisir de parler avec la reine.»]

     

    3 Les langues parlées en France

     

    Dans la France de cette époque, les locuteurs du pays parlaient un grand nombre de langues. Généralement, ils ignoraient le latin d'Église, à moins d'être instruits, ce qui était rarissime. Ils ignoraient également le «français du roy», sauf dans la région de l'Île-de-France, d'où allait émerger une sorte de français populaire parlé par les classes ouvrières.

     

       

    Pour résumer rapidement la situation linguistique, on peut dire que les habitants de la France parlaient, selon les régions:

     

    - diverses variétés de langues d'oïl: françois picard, gallo, poitevin, saintongeais, normand, morvandiau, champenois, etc.

    - diverses variétés des langues d'oc (gascon, languedocien, provençal, auvergnat-limousin, alpin-dauphinois, etc.) ainsi que le catalan;

    - diverses variétés du franco-provençal: bressan, savoyard, dauphinois, lyonnais, forézien, chablais, etc., mais aussi, en Suisse, genevois, vaudois, neuchâtelois, valaisan, fribourgeois et, en Italie, le valdôtain.

    - des langues germaniques: francique, flamand, alsacien, etc.

    - le breton ou le basque.

     

    Bref, à cette époque, le français n'était qu'une langue minoritaire parlée dans la région de l'Île-de-Francemme langue maternelle) et en province par une bonne partie de l'aristocratie (comme langue seconde)

    4 La domination culturelle du latin

     

    Pendant la période féodale, le prestige de l'Église catholique en Europe était immense. Le pape agit comme un véritable arbitre supranational à qui devaient obéissance les rois et l'empereur du Saint Empire romain germanique.

     

    4.1 La langue de prestige

    Non seulement le latin était la langue du culte, donc de tout le clergé et des abbayes, mais il demeurait l'unique langue de l'enseignement, de la justice et des chancelleries royales (sauf en France et en Angleterre, où l'on employait le français pour les communications entre les deux royaumes); c'était aussi la langue des sciences et de la philosophie. Il faudra attendre le

     

    XIIIe siècle pour voir apparaître timidement les premiers textes de loi en «françois». Sous Charles IV (1322-1328), une charte sur dix seulement était rédigée en «françois». Sous Philippe VI (1328-1350), le latin dominait encore largement au début de son règne, mais à la fin les trois quarts des chartes étaient rédigées en «françois».

     

    Les gens instruits devaient nécessairement se servir du latin comme langue seconde: c’était la langue véhiculaire internationale dans tout le monde catholique. Hors d'Europe, le turc, l'arabe, le chinois et le mongol jouaient un rôle analogue. C'est pourquoi les princes du royaume de France se devaient de connaître le latin. Le poète Eustache Deschamps (v.1346-v.1407) affirme, par exemple, qu'un roi sans lettres (comprendre «illettré» ou «sans latin» était un «âne» couronné:

     

    Roy sanz lettres comme un asne seroit
    S'il ne sçavoit l'Escripture ou les loys,
    Chacun de ly par tout se moqueroit;
    Thiés doivent savoir, latin, françoys,
    Pour miex garder leurs pas et leurs destrois
    Et sagement à chascun raison rendre.
    [Un roi illettré serait comme un âne
    s'il ne connaissait l'écriture ou les lois,
    car partout chacun se moquerait de lui ;
    les Allemands doivent connaître le latin et le français,
    pour mieux conserver leurs droits et leur juridiction
    et que chacun rende justice avec sagesse.]

     

    Néanmoins, malgré cette exigence du latin chez les aristocrates de haut rang, les faits ont souvent démontré que la maîtrise du latin demeurait souvent un voeu pieux. C'est pourquoi beaucoup de nobles, qui qui avaient des connaissances rudimentaires de latin, embauchaient des traducteurs. S'il est difficile de savoir le degré de connaissance du latin de l'aristocratie française du Moyen Âge, il est par contre plus aisé de supposer que l'aristocratie occitane ait pu maintenir un plus grand bilinguisme.

     

    4.2 La création des latinismes

    De fait, le Moyen Âge fut une époque de traduction des oeuvres rédigées en latin. Or, ces traductions furent très importantes, car elles ont introduit une quantité impressionnante de mots savants issus du latin biblique, surtout à partir du XIIe siècle. Ainsi, des noms de peuples juifs ont été francisés: israelite, philistin, sodomite, etc.

      

    De nombreux mots grecs sont passé au français dans les traductions du Nouveau Testament: ange, cataracte, Christ, eglise, synagogue, holocauste, orphelin, paradis, patriarche, prophete/prophetesse, psaume, psautier, scandale, etc. Les latinismes passent au français par les traductions de la Vulgate: abominer, abomination, abominable, adorer, arche, circoncision, confondre, confusion, consommer, consommation, contrition, convertir, deluge, etc.

    Dans la Bible historiale completee (vers 1380-1390) de Guyart des Moulins, on peut relever plusieurs doublets pour traduire un même mot latin, l'un provenant du latin biblique (lingua latina), l'autre du «françois» vulgaire (lingua gallica):

     

    arche
    iniquité
    misericorde
    omnipotent
    opprobe
    redempteur
    terner
    huche
    felunie
    merci
    tout puissant
    reproce
    rachateor
    assayer

     

    Autrement dit, dès l'apparition du plus ancien français, la langue puisa directement dans le latin les mots qui lui manquaient. Il était normal que l'on songe alors à recourir au latin, langue que tout lettré connaissait. Dans de nombreux cas, le mot emprunté venait combler un vide; dans d'autres cas, il doublait, comme on vient de le voir, un mot latin d'origine et les deux formes (celle du latin populaire et celle de l'emprunt savant) coexistèrent avec des sens et des emplois toujours différents. Commençons avec les mots nouveaux qui ne viennent pas doubler une forme déjà existante.

     

    Afin de combler de nouveaux besoins terminologiques, l'Église catholique a elle-même donné l'exemple en puisant dans le vocabulaire latin pour se procurer les mots qui lui manquaient: abside, abomination, autorité, discipline, glorifier, majesté, opprobe, pénitence, paradis, quotidien, résurrection, humanité, vérité, virginité, etc. La philosophie a fait de même et est allée chercher des mots comme allégorie, élément, forme, idée, matière, mortalité, mutabilité, multiplier, précepte, question, rationnel, substance, etc.

      

    Nous devons aux juristes des termes comme dépositaire, dérogatoire, légataire, transitoire, etc. Mais c'est du domaine des sciences que l'ancien français a dû puiser le plus abondamment dans le fonds latin: améthiste, aquilon, aromatiser, automnal, azur, calendrier, diurne, emblème, équinoxe, fluctuation, occident, solstice, zone, etc. Les emprunts au latin classique comptent sûrement quelques dizaines de milliers de termes.

     

    4.3 Un phénomène ininterrompu de latinisation

     

    En fait, cet apport du latin classique n'a jamais cessé d'être productif au cours de l'histoire du français. Le mouvement, qui a commencé même un peu avant le IXe siècle, s'est poursuivi non seulement durant tout le Moyen Âge, mais aussi à la Renaissance et au XVIIIe siècle pour se perpétuer encore aujourd'hui.

    C'est au cours de cette période de l'ancien français que commença la latinisation à l'excès et qui atteindra son apogée au XVe siècle, avec le moyen français. L'expression «escumer le latin» est apparue au début du XIIe siècle.

      

    Elle désignait les latiniseurs qui «volaient» ou «pillaient» les ressources du latin, à l'exemple des pirates qui écumaient les mers. Les savants latiniseurs avaient développé un procédé lexical efficace qui consistait à ajouter une désinence «françoise» à un radical latin (savant).

     

    Dans ces conditions d'usage intensif du latin par les savants du Moyen Âge, il était préférable d'écrire dans cette langue pour acquérir un prestige supérieur à celui qui n'écrivait qu'en «françois» (ou en tudesque), car le latin écrit était une langue européenne internationale permettant de communiquer avec l'ensemble des autres savants de l'époque.

      

    Qui plus est, une œuvre écrite en français pouvait être traduite en latin afin d'atteindre la célébrité. Cependant, à la fin du XIIIe siècle, la production latine sera en baisse auprès de la Cour et aura tendance à se replier vers l'école et les sciences, sauf en Angleterre qui avait déjà tourné le dos au latin et qui considérait que le français était aussi une langue de vulgarisation scientifique.

     

    5 L'influence de la langue arabe

    C'est grâce à la diffusion de l'islam que la langue arabe s'est répandue après le VIe siècle. Cette langue, l'arabe littéraire ou coranique, fut codifiée et acquit alors le statut de langue savante, ce qui n'était pas le cas du français de l'époque. Puis le rayonnement de la langue et de la culture arabes progressa lors des conquêtes territoriales pendant tout le Moyen Âge.
      
    Les villes saintes de La Mecque et de Médine devinrent des centres religieux et intellectuels très importants. C'est par les ouvrages traduits en arabe que les intellectuels chrétiens d'Occident découvrirent la philosophie grecque ainsi que les sciences et les techniques des Anciens.
      
    Par exemple, les œuvres du mathématicien Euclide, de l'astronome Ptolémée, des médecins Hippocrate et Galien, du philosophe Aristote. De cette façon, les Arabes transmirent également les cultures indienne, perse et grecque, notamment en algèbre, en médecine, en philosophie, en alchimie, en botanique, en astronomie et en agronomie. Il faut comprendre qu'avec les œuvres se sont aussi transmis les mots.

      

    5.1 Les emprunts au français

    De fait, la langue arabe a donné quelques centaines de mots au français, notamment au cours des XIIe et XIIIe siècles, mais encore au XIVe siècle. Ainsi, les savants arabes fournirent au français, directement ou par l'intermédiaire d'autres langues (le latin médiéval et l'espagnol), des termes d'origine arabo-persane tels que échec (jeu), jasmin, laque, lilas, safran ou timbale.

      

    C'est ainsi que le français emprunta à l'arabe des mots liés aux sciences, aux techniques et au commerce : abricot, alambic, alchimie, algèbre, almanach, ambre, azur, chiffre, coton, douane, girafe, hasard, épinard, jupe, magasin, matelas, nénuphar, orange, satin, sirop, sucre, tare. N'oublions pas qu'au XIe siècle les plus grands noms de la littérature, de la philosophie et de la science sont arabes.

      

    La science moderne, particulièrement la médecine, l'alchimie, les mathématiques et l'astronomie, est d'origine arabe. Dans ces conditions, il était normal que la langue arabe exerce une influence importante sur les autres langues. Cependant, l'arabe n'a transmis directement au français qu'un petit nombre de mots; la plupart des mots arabes nous sont parvenus par l'intermédiaire du latin médiéval, de l'italien, du provençal, du portugais et de l'espagnol.

      

    De plus, les Arabes avaient eux-mêmes emprunté un certain nombre de mots au turc, au persan ou au grec. Comme on le constate, les mots «voyagent» et prennent parfois de longs détours avant de s'intégrer dans une langue donnée. En voici quelques exemples de l'arabe ayant passé auparavant par le grec, le portu8gais, le latin, l'italien, l'espagnol, etc.:

     

    abricot (port.)
    alambic (grec)
    alchimie (grec)
    alcool (lat.)
    alezan (esp.)
    algarade (esp.),
    algèbre (lat.)
    algorithme
    amiral
    arabesque (it.)
    arsenal (it.)
    assassin (it.)
    azimut
    balais (lat.)
    bédouin

    calife (it.)
    carafe (it./esp.),
    cheik
    chiffre (it.)
    coton (it.),
    couscous
    douane (it.)
    échec (persan)
    élixir (grec)
    épinard (lat.)
    estragon (grec)
    fakir
    gazelle,
    gilet (esp.)
    girafe (it.)
    goudron
    guitare (esp.)
    hachisch
    harem
    iman (turc)
    jarre (prov.)
    jupe (it.)
    laquais (esp.)
    laque (prov.)
    lilas (it.)
    matelas (it.)
    minaret (turc)
    moka
    momie
    mosquée (it.)
    nénuphar (lat.)
    orange (prov.)
    raquette (lat.)
    récif (esp.)
    safran (persan)
    satin (esp.)
    sofa (turc)
    sorbet (it.)
    sucre (it.)
    talisman (grec)
    tamarin (lat.)
    timbale (esp.)
    zénith
    zéro (it.)

      

    Les emprunts à l'arabe ont surtout été faits entre les XIIe et XIXe siècles, mais les XVIe et XVIIe siècles ont été particulièrement productifs. Après 1830, c'est-à-dire après la conquête de l'Algérie par la France, d'autres mots arabes (une cinquantaine environ) ont pénétré dans la langue française: zouave, razzia, casbah, maboul, barda, kif-kif, toubib, bled, matraque, etc.

     

     

    5.2 Les chiffres arabes
     

    C'est la langue arabe qui a permis au français, comme à bien d'autre langues, de découvrir la numérotation en «chiffres arabes». Les Arabes avaient eux-mêmes emprunté à l'Inde ce système de numérotation qu'ils nommaient «chiffres hindîs». En France, un moine mathématicien et astronome du nom de Gerbert d'Aurillac (938-1003) avait découvert les chiffres arabes lors de ses études en Catalogne (Barcelone).

      

    À cette époque, les monastères catalans possédaient de nombreux manuscrits de l'Espagne musulmane; Gerbert s'initia à la science arabe, étudiant les mathématiques et l'astronomie. Il se rendit vite compte des avantages de la numérotation décimale, même s'il ignorait encore le zéro. Il fut l'un de ceux qui favorisa l'élection de Hugues Capet comme roi de France en juin 987.

      

    Devenu pape en 999 sous le nom de Sylvestre II (le premier pape français), il employa toute son autorité pour promouvoir la numérotation arabe, ce qui lui valut le surnom de «pape des chiffres». L'érudition de Sylvestre II était si considérable qu'il fut considéré comme l'un des plus grands savants de son temps, puis il tomba dans l'oubli.

     

    Cependant, dans leur forme actuelle avec le zéro, les chiffres arabes furent introduits en Europe par le mathématicien italien Leonardo Fibonacci (v. 1175 - v. 1250). En 1202, celui-ci publia son Liber abaci (« Le livre des calculs »), un traité sur les calculs et la comptabilité basé sur le système décimal à une époque où toute l'Europe recourait encore aux chiffres romains.

      

    Ce sont des clercs, qui au retour des croisades, furent les véritables diffuseurs de la numérotation arabe en France. Bien que les chiffres arabes soient plus performants que la notation romaine, ils ne se sont pas imposés très rapidement.

      

    Le système fut même mal reçu, en raison notamment du zéro, qui désignait alors le néant ou le vide, une notion familière aux hindous, mais étrangère aux Occidentaux. En 1280, Florence interdit même l’usage des chiffres arabes par les banquiers.

      

    En réalité, le conservatisme des Européen en la matière faisait en sorte que les chiffres romains furent perçus comme l'un des «piliers de la civilisation» occidentale. Se considérant les fidèles héritiers de l'Empire romain, beaucoup d'Européens croyaient qu'ils ne pouvaient utiliser que les chiffres romains ou les chiffres grecs, pourtant très peu pratiques en matière de calcul.

      

    Il faudra attendre le XIVe siècle pour que les chiffres arabes soient acceptés grâce à l'influence de mathématiciens comme Chuquet, Viète et Stevin; ce fut la Révolution française qui généralisa en France l'emploi systématique de cette numérotation.

     

     

     

    L'époque de l'ancien français a fait faire des pas de géant à la langue française. Mais le français n'était pas encore une langue de culture et ne pouvait rivaliser ni avec le latin ni même avec l'arabe, dont la civilisation était alors très en avance sur celle des Occidentaux. On comprendra pourquoi le latin de l'Église se perpétua: il n'avait pas de rival. Cependant, le français allait encore s'affranchir de ce qui lui restait du latin lors de la période du moyen français.

     

     

     

    SOURCES : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/francophonie/HIST_FR_s3_Ancien-francais.htm

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    La TERRE et les PAYSANS

      

    La terre et les paysans

     

     

    Théorie :

    "Taillables et corvéables à merci", telle est l'expression qui vient immédiatement à l'esprit lorsqu'il s'agit d'évoquer les paysans à l'époque médiévale. Mais cette image correspond-elle à la réalité historique ?



    Alleu, tenure et réserve

    Au Moyen Âge, la grande majorité de la population vit à la campagne et cultive la terre. En contrepartie de leur protection, les seigneurs exigent des paysans un certain nombre de services et de redevances. Les terres cultivables sont réparties en 3 catégories : l'alleu, la tenure et la réserve. L'alleu est une terre qui n'appartient pas au seigneur. Elle est la pleine propriété du paysan et clé sa famille et est libre de tous droits seigneuriaux. Toutefois, le paysan peut être soumis à certaines obligations.

    Mais la grande majorité de la terre appartient au seigneur qui la divise en tenures et en réserve. Les tenures sont louées à des paysans libres qui les cultivent, moyennant l'acquittement d'une location, le cens, et de divers services et redevances, le tout payable en nature ou en argent. Quant à la réserve, elle est constituée des terres qui appartiennent directement au seigneur.

     

    Elle est culti­vée la plupart du temps par les domestiques et les serviteurs du château. Les produits de la récolte sont stockés dans les greniers et les celliers du seigneur et servent à le nourrir, lui, sa famille et son entourage. Les surplus éventuels sont vendus, ce qui procure au seigneur une source de profit supplémentaire. A certaines époques de l'année, les autres paysans de la seigneurie sont astreints à des travaux agricoles sur la réserve. L'ensemble de ces obligations en nature constitue les corvées.


    Paysans libres et serfs

    Dans les campagnes, on distingue généralement les serfs des vilains. Les serfs sont des paysans totalement dépendants du seigneur. Ils sont attachés à la terre qu'ils cultivent; si la terre est vendue, ils sont vendus avec elle. En outre, ils ne peuvent quitter leur maître. Pour se marier en dehors de la seigneurie ils doivent s'acquitter d'une taxe, le formariage. Ce ne sont cependant pas à proprement parler des esclaves, tels que l'on en rencontrait durant l'Antiquité. Contrairement à une idée reçue, les serfs sont minoritaires parmi l'ensemble de la paysannerie.

    Les paysans libres, appelés vilains, sont moins étroitement soumis au seigneur, même si, comme les serfs, ils sont également astreints à toute une série clé droits seigneuriaux : cens, taille, corvées, obligations d'utiliser le four banal, le moulin banal... En plus de ces taxes, redevances et services, les paysans sont soumis à la dîme, un impôt versé au profit de l'Église et qui représente environ un dixième des récoltes.

      



    Semailles et moissons

    Le seul engrais connu au Moyen Âge est le fumier. Or, les paysans ont peu de gros bétail. La terre, qui n'est donc pas correctement enrichie, devient stérile après quelques années de culture. Pour remédier à cette situation, on développe la jachère. Les surfaces cultivées doivent être laissées au repos l'année suivan­te. Il en découle une rotation des cultures, la moitié des terres étant tour à tour ensemencées puis mises en jachère un an sur deux.


    C'est l'assolement bien­nal. L'inconvénient majeur de cette technique est une déperdition d'environ 50% de la production de la surface agricole. Peu à peu, une autre méthode va être développée : l'assolement triennal. Les champs sont divisés en 3 zones ou soles. Une seule est laissée en jachère tandis que la production est répartie sur les deux zones restantes, où l'on alterne la culture du blé avec celle d'autres céréales ou de légumes qui épuisent moins le sol (seigle, avoine, lentilles, choux, haricots...).

    Parallèlement, les XIe et XIIIe siècles sont une période d'intenses défrichements. De nouvelles terres cultivables sont gagnées sur les forêts, les taillis, les marécages. Nombre de villages sont créés durant cette période. Les seigneurs encouragent ces défrichements, car ils leur permettent d'augmenter leurs revenus. Ils proposent aux paysans de venir s'implanter sur ces espaces et leur concèdent certains avantages et libertés. La condition des paysans, et notamment des serfs, s'en trouve améliorée.

     

     

    En effet, les défricheurs reçoivent du seigneur un lot de terres ainsi que la liberté complète, s'ils sont d'origine servile.

    L'attrait de la liberté fait, dès lors, affluer les paysans vers ces régions défrichées.

    L'étude de la toponymie renseigne sur ce mouvement et l'importance des nouvelles installations humaines.

    Ainsi, les localités comportant, par exemple, des noms en -sart, -rode, -hout ou la terminologie «neuville» évoquent ces déboisements et ces récentes implantations.



    Cependant, malgré les défrichements, les famines restent une menace très présente et régulièrement, des régions entières sont frappées par ce fléau.

      

     

    Eté

    C'est le foin que l'on fauche en premier, puis vient la moisson.
    Les épis sont coupés à la faucille. Les tiges sont laissées sur place pour servir de pâture. Les chaumes seront brûlés afin de fertiliser la terre.

    La récolte des épis est déposée sur l'aire puis battue au fléau ou piétinée par les mulets. Pendant les mois suivants, le grain sera moulu en fonction des besoins.

     



    Les innovations technologiques

    Entre le XIe et le XIIIe siècle, on assiste à de grands progrès dans le domaine de l'agriculture. Jusqu'à cette époque, les paysans disposent d'outils rudimentaires (houe, araire construits en bois) pour cultiver le sol. Enfouies à faible profondeur, les semences ne donnent qu'un faible rendement.

    Peu à peu, l'usage du fer se développe, ce qui rend possible l'usage d'instruments métalliques plus perfectionnés : la charrue à soc en fer qui retourne la terre, la herse qui brise les mottes et enfouit les grains ou la faux qui coupe les foins. Mieux mis en valeur, les champs et terres de cultures produisent une récolte plus abondante.

    Parmi les autres innovations technologiques, on peut citer l'amélioration de la traction et des procédés d'attelage plus performants : utilisation plus fréquente du cheval (dont les sabots sont ferrés) recours au collier d'épaule, apparition du joug frontal et de l'attelage en file pour les boeufs.



    Agriculture et alimentation

    L'alimentation est essentiellement composée de céréales : blés d'hiver (froment, épeautre, mil, seigle...) ou de printemps (orge et avoine) utilisés pour confectionner le pain, les galettes, la cervoise et la bouillie. Le pain, blanc pour les nobles et les nantis, est la nourriture de base. Cet aliment a, en outre, une haute valeur symbolique : le pain consacré représente le corps du Christ; partager le pain, en famille, c'est manifester son appartenance à la communauté chrétienne.

     

    Les légumineuses (pois, fèves, raves, «herbes» et «racines») viennent en complément, en accompagnement. On les consomme sous formes de bouillies ou de soupes. Les laitages et les œufs s'ajoutent à cette alimentation quotidienne. Les fruits (noisettes, noix, fraises, framboises...) sont rares et essentiellement issus de la cueillette.

    Le développement des échanges favorise la culture de la vigne. Celle-ci s'étend progressivement vers le nord de l'Europe, depuis les côtes méditerranéennes jusqu'à nos régions. Mais les techniques de vinification étant rudimentaires, le vin est peu alcoolisé. On le coupe alors d'eau et on lui ajoute des épices.

    De même, les modes de conservation sont peu développés. Le vin se conserve dans des tonneaux et devient souvent imbuvable au bout d'une année. La consommation de viande est exceptionnelle, sauf à la table des seigneurs, grands amateurs de gibier. Porcs, moutons, volaille et bétail sont élevés pour leur viande, mais également pour les multiples ressources qu'ils procurent (laine, œufs, animaux de trait...).

    Automne
    En octobre la terre est travaillée à nouveau pour recevoir les semailles d'hiver qui germeront au printemps suivant.

    C'est aussi le temps de la vendange.
    A l'automne la forêt donne ses fruits : miel, glands pour engraisser les porcs, noisettes, châtaignes (dont on fait une farine qui remplace le blé pour les plus pauvres).
    Dans les clairières on fabrique le charbon de bois.

     

     

    Les techniques agricoles

     

    Les rendements sont généralement de 1 pour 2.

    On calcule que en général 1 à 1,5 ha étaient nécessaires pour subvenir aux principaux besoins d'une personne. Dans les meilleures périodes (fin du Moyen Age plutôt) le rendement passa à 1 pour 5.

     

    Assolement triennal :


    1° année : céréales d'hivers
    2° année : céréales de printemps
    3° année : jachère

     

    Cheptel peu développé => peu de fumier

     

     

     

    Hiver

     

     

    La terre gelée est au repos et les paysans se font bûcherons ou artisans.
    Le bois sert à tout : à la construction, à la cuisine et au chauffage, à fabriquer des charrettes et des outils (râteaux, herses, fourches).

    Sont aussi confectionnés des paniers, est tanné le cuir pour les chaussures et les harnais. Si le seigneur est un abbé, il demandera des peaux de moutons pour ses parchemins.

     

     

      


    Textes

    La tenure au XIIe siècle
    «... Guichard, bon paysan, qui doit en service :
    - à Pâques, un agneau;
    - à la fenaison, six pièces de monnaie;
    - à la moisson, un repas (avec plusieurs associés) et un setier d'avoine;
    - aux vendanges, douze deniers;
    - à Noël, douze deniers, trois pains, un demi-setier de vin;
    - à Carême-entrant, un chapon;
    - à la Mi-Carême, six pièces de monnaie...».
    G. Duby, L'Economie rurale et la vie des campagnes, livre III, Paris, Aubier, 1962, p. 650.
    Rotation des cultures en 1178


    «(L'abbaye du Neufmoustier doit remettre à l'ancien détenteur de la dîme entre Champion-Seraing et Seraing-le-Château) trois muids d'épeautre, l'année des blés d'hiver (...), rien qu'un muid d'épeautre l'année de l'orge et de l'avoine; mais la troisième année, pendant laquelle la terre vide reste en jachère, le cou­vent de Huy ne devra rien».

    J.-P. Rorive, «Un cas précoce d'assolement triennal en Hesbaye hutoise (1178)», Bulletin de l'Institut archéologique liégeois, t. XC, Liège, 1978, p. 3.

    Concession de terres à des paysans à l'occasion d'un défrichement

    (charte du 10 août 1161)


    «Moi Thierry, par la grâce de Dieu, comte de Flandre, et aussi mon fils Philippe, nous avons donné à cultiver à des paysans, moyennant un cens annuel, les friches de Reninge (Renninghelst, localité près d'Ypres), qui appartiennent spécialement à notre domaine (...). A tous ceux qui voudraient y demeurer, s'ils sont retenus par leurs obligations dans une autre seigneurie, nous prendrons soin de leur faire donner la permission de venir vers nous.

     

    Qu'il soit donc connu aux hommes présents et futurs, que nous avons accordé et donné pour toujours, non seulement à ceux qui demeurent à présent sur cette terre mais à tous ceux qui y demeureront plus tard, une telle liberté qu'ils ne soient en aucune façon soumis aux lois, aux justices ou aux causes de la communauté du pays de Fûmes (...); mais qu'ils soient toujours libres et indépendants, soit de tous les services, demandes, tailles, soit de toutes les autres exactions quelconques, auxquelles sont astreints les autres habitants de notre terre, (...)».

    P. Bonenfant, F. Quicke, L. Verniers, Lectures historiques. Histoire de Belgique, t. I, Bruxelles, 1937, pp. 142-143.

    Une famine à Liège en 1197


    «Une multitude de pauvres gens est morte de faim. On mangeait les cadavres des animaux crevés et presque personne n'avait conservé l'espoir, tant la misère menaçait tout le monde. (...) Les pauvres gisaient dans les rues et mouraient; ils étaient couchés devant les portes de nos églises, lorsqu'on chantait les matines, moribonds et gémissants, attendant l'aumône que l'on faisait à la première lueur du jour. Cette année, le blé nous manqua dès l'Epiphanie (...). Quant à la bière, elle nous fit défaut toute l'année (...)».

     


    P. Bonenfant, F. Quicke et L. Verniers, op. cit., pp. 140-141.

    http://lecerclemedieval.frbb.net/

     

     

     

     

     

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    Les REDEVANCES SEIGNEURIALES

     

      

      

    Les redevances que doit un paysan à son seigneur sont doubles :

    foncières et banales.


    Les redevances foncières sont en quelque sorte le prix de la location des terres cédées aux paysans ; elles sont payables en argent, c'est à proprement parler le cens, ou en nature. Elles comprennent également un certain nombre de journées par an, voire même par semaine, réservées au travail des terres non affermées de la seigneurie.


    Les redevances banales sont variées : obligation, pour les paysans, d'utiliser, en payant, le moulin banal, le four banal, le pressoir banal ; "corvée", c'est-à-dire réquisition des paysans pour l'entretien du château, des routes, l'abattage des forêts, etc. Et souvent, sous prétexte de se faire aider, le seigneur exige le paiement arbitraire d'une "taille".



    Les principales ressources nobiliaires sont les suivantes :


    - la taille : impôt direct sur les roturiers,
    - la gabelle : impôt sur le sel,
    - les fouages : redevance par maison ou par feu,
    - les taxes sur le fonctionnement du four banal, du moulin, sur le travail du bouilleur de cru,
    - les droits de passage sur les ponts,
    - les jours de corvée.

    Aucun noble ne pouvant se payer le prix d'une jacquerie, pour que les manants ne soient pas enclins à la révolte face à ces impôts, les seigneurs, en accord avec l'église, accordent de nombreux jours fériés où le peuple fête ses saints patrons, le venue du printemps ou la salaison du cochon.



    Revenus royaux

    1179 : 20.178 livres pour 41 prévotés
    1180 : 20.000 Livres Tournoi
    1185 : 24.607 Livres pour 52 prévotés
    1200 : 35.000 Livres Tournoi
    1203 : 34.719 pour 62 prévotés
    1355 : octroi spécial accordés par les pays du nord et du sud : 5.400.000 livres de subsides pour une armée de 30.000 hommes pour un an. (= 5% des transactions nationales).
    1360 : 1.500.000 Ecus
    1423 : octroi spécial accordés par les pays du nord et du sud : 1.300.000 livres tournois.
    1426 : octroi spécial accordés par les pays du nord et du sud : 1.182.000 livres tournois.
    1439 à 1444 : octroi spécial : 2.698.000 livres tournois (oil : 918.000, oc : 1.800.000).
    1460 : 1.800.000 Livres Tournoi
    1461 : 1.800.000 Livres Tournoi dont 1.200.000 pour la Taille
    1481 : 4.600.000 Livres Tournoi pour la taille
    1483 : 100.000 Livres Tournoi pour le domaine (5.500.000 Francs de 1914)

    655.000 Livres Tournoi pour aide et gabelle (36.000.000 Francs de 1914)
    3.900.000 Livres Tournoi pour la taille (214.500.000 Francs de 1914)
    1490 : 3.900.000 Livres Tournoi pour la taille (214.500.000 Francs de 1914)

    Voirie

    "Denier de la chaussée" : impot pour l'entretien de la voirie à Troyes dès 1270.
    "Droit de Chaussage" : impot pour l'entretien de la voirie à Reims.

    Impots pour la voirie à Dijon en 1428 :

    16 deniers tournois par mine de blé à moudre,
    20 sous par queue de vin déchargée dans l'agglomération.
    6 deniers par boeuf entrant ou sortant,
    3 deniers par vache entrant ou sortant,
    2 deniers par porc entrant ou sortant,
    1 denier par ovin/caprin entrant ou sortant,
    et sur les chariots en fonction du nombre de roues et du ferrage.

    Impots pour la voirie à Dijon en 1374 :

    1 gros tournoi d'argent par an par toise de mur ou jardin de la maison au propriétaire (devant, derrière ou sur les cotés).
    1 gros viez d'argent/an au locataire.
    1 denier tournoi / roue ferrée.
    1 obole tournoi / roue non ferrée.
    1 denier tournoi par cheval, jument, mule, mulet, ane, anesse, boeuf, vache, porc ou truie qui entre dans la ville.
    1 obole (1/2 denier) pour les autres bêtes à 4 pattes.

    Impots pour la voirie à St Omer depuis 1320 :

    2 deniers par chariot à 4 roues,
    1 denier par charrette à 2 roues,
    1 maille par cheval de bat.



    Les impots pour la voirie rapportent :

    5 livres à Moulins en 1421
    3 livres à Moulins en 1423
    70 livres à Blois en 1475
    182 livres à Rennes en 1418
    324 livres à Rennes en 1460
    431 à 534 livres à Rennes de 1450 à 1500.

    La ferme des chaussées de Troyes rapporte 420 livres en 1416-17.
    Taxe pour les ordures à Nantes en 1487 : 1 denier par maison par semaine.

    Les impots ne taxent pas beaucoup les riches en ville :

    0,4% des revenus des riches
    1% des revenus des moyennement aisés
    0% des revenus des pauvres

    Les impots rapportent à Rennes :

    les taxes sur le vin : 51,21% des rentrées d'argent,
    les taxes sur le textile : 21% des rentrées d'argent,
    le pavaige : 8% des rentrées d'argent,
    les taxes sur les peaux et laines : 7,25 des rentrées d'argent,
    les taxes sur la mercerie : 4,25% des rentrées d'argent.

    Les impots rapportent à Nantes :

    les impots pour la voirie : 2,5% des recettes,
    les taxes sur le vin au détail : 41,5% des recettes,
    le "méage" et le "denier par livre" rapportent : 38% des recettes.

    Amendes

    Pour vendre son vin en dehors des périodes permises : 60 sous d'amende
    On a une amende si on utilise un four personnel au lieu du four seigneurial.
    Pour avoir fait du mauvais platre : 5 sous d'amende (2 à une chapelle, 2 au maitre du métier, 1 à celui qui aura mesuré le platre).


    Si un marchand veut quelquechose de mauvaise qualité, il risque une amende de 5 à 20 sous sous St Louis.
    A Nantes en 1468, si on jette ses ordures là ou c'est interdit :

    prison + 60 sous au chef de famille,
    prison + 7 sous 6 deniers aux autres.

    A Nantes en 1468, si on ne nettoye pas devant chez soi : 60 sous d'amendes.
    A Troyes, au 15eme, si on a une arme sur soi, elle est confisquée et on a 10 sous d'amende.


    Rançons
    Rançons du roi Jean Le Bon :


    1ere : le Sud-Ouest (le Poitou), l'hommage de Bretagne, 4.000.000 Ecus
    2eme : Touraine/Anjou/Maine/Normandie
    3eme : Aquitaine/Loire au Massif Central/Pyrenees (1/3 du royaume), Calais + marches, Ponthieu + Guines, 3.000.000 d'Ecus payés en 3 ans (13,5 Tonnes d'or)

    Rançon de Du Guesclin : 100.000 F
    Rançon de Charles d'Orléans en 1440, 400.000 écus d'or
    Rançon d'une noble dame en 1438, 1400 écus.

    Louis XI paie à Edouard IV 75.000 écus pour qu'il ne fasse pas la guerre en France, avec une rente de 50.000 écus.

    Taxes

    Pour faire du pain : sous St Louis un boulanger paie 43 deniers par an pendant 4 ans.
    En Septembre 1436, un hotteur paie une taxe de 2 blancs pour entrer dans Paris, une charette de cuves de vignes : 8 blancs, 2 charettes : 16 blancs ; 3 charettes : 8 sous parisis.


    Vers 1436, les garnisons au alentour de Paris taxent les vignerons de 8 à 10 queues de vin pour la saison.


    Taxe de pont en Mai 1441 à Paris : une charette pleine paie 6 doubles, un chariot plein paie 12 doubles.


    La taxe sur la bière rapporte 26400 F en Janvier 1429 à Paris.
    La taxe sur le vin rapporte 2200 F en Janvier 1429 à Paris.

    La douane des ports Carolingiens (Dorestad, ...) taxe de 10% toute marchandise qui y transite (avec des exceptions pour certain).

    La location d'un étal à la foire de Reims, coute 6 deniers à partir de 1345 ; rien si l'étal est mobile.
    En 1411, il coute 2 à 16 sous, à la tête.
    En 1412, à Reims, un étal de 7 pieds de long paie 12 deniers.

      

    Plus de 7 pieds de long paie 2 sous parisis. Si on refuse de payer, l'amende est de 40 sous parisis.
    L'amende pour un étal non autorisé est de 22 sous 6 deniers en 1428 à Reims.
    En 1428, à Reims, un étal portatif ne paie pas de taxe ;


    un étal de cordonier, retingotier, quincailler, de moins de 7 pieds de long, paie 6 deniers parisis ; plus de 7 pieds de long, paie 12 deniers parisis ;
    un étal de boucher de moins de 7 pieds, paie 12 deniers ; un étal de boucher de plus de 7 pieds de long paie 24 deniers.

    Au 12ème siècle, à Cologne, un paysan paie 6 marks à l'intendant et 3 au prieur de la cathédrale comme taxes annuelles.

    Au 12ème siècle, sur le domaine de Rommersheim, les taxes annuelles à l'abbaye sont par manse :

    1 porc de 20 pfennigs
    1 livre de lin
    3 poulets
    18 oeufs
    1/2 chargement de vin en Mai et en Octobre
    5 charretées de fumier
    5 javelles d'écorce d'arbre
    12 charretées de bois
    du travail au fournil et à la brasserie
    le transport de 50 planches ou 100 bardeaux à l'abbaye pour le toit de l'église
    garder les cochons 1 semaine dans la forêt
    travailler 3 arpents de terre 3 jours par semaine
    livrer 5 boisseaux de grains de 40 km de distance
    surveiller la grange
    entretenir une plate bande du jardin
    les femmes doivent coudre les culottes Lorsque l'abbé vient en visite, les paysans doivent fournir collectivement 4 boeufs et 1 chariot pour les déplacements.

    Taxe sur les juifs par Philippe Auguste :
    en 1202, elles rapportent 1200 livres
    en 1217, elles rapportent 7550 livres

     

     

    SOURCES DR

     

     

     

     

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    complémentaires.

     

    SalutationLes origines de la famille carolingienne

    Par Numa-Denys Fustel de Coulanges

     

     

    Historien français (1830-1889), auteur de la Cité antique et de l'Histoire des institutions politiques de l'ancienne France.

     

     

    Origines de la famille carolingienne.

    – Qu’elle ne représente ni le sang ni l’esprit germanique.

     

     

    Avant d'étudier le gouvernement des Carolingiens, il est utile d'étudier la famille carolingienne.

    Il s'est fait de grandes théories sur l'événement de 753 qui a substitué Pépin le Bref aux Mérovingiens. Les uns ont supposé qu'il y avait eu là une révolution politique, c'est-à-dire le triomphe d'une classe d'hommes sur la royauté, et l'établissement d'institutions nouvelles.

    D’autres ont présenté l’avènement des Carolingiens comme le résultat d'une nouvelle invasion germanique. Suivant cette opinion, fort en vogue aujourd'hui, il y aurait eu une seconde invasion de Germains au VIIIe siècle, et Charles Martel en aurait été le principal chef. La dynastie mérovingienne aurait été écartée comme devenue trop romaine, et les Carolingiens auraient été élevés au trône pour faire prévaloir les idées, l'esprit, le sang germaniques.

      

    Ainsi suivant les uns l'avènement des Carolingiens est une révolution, suivant les autres une invasion.

     

     

     

     

    Nous avons à chercher si ces théories sont conformes à la vérité. Nous ne le chercherons pas par des raisonnements et des considérations, mais par la simple observation des faits. Il est nécessaire d'observer d'abord les origines de cette famille et ses antécédents. Ce sera le moyen le plus sûr de nous faire une idée juste de l'acte de 753.

     

     

    1° Les Carolingiens font partie de l’aristocratie mérovingienne.

    Le premier point à constater est que cette famille n'a pas surgi tout à coup; elle n'est pas apparue brusquement au VIIIe siècle pour prendre la royauté. Elle ne sortait pas non plus, à ce moment, de la Germanie. Elle n'était pas apportée sur le sol de la Gaule par un nouveau flot de Germains. Elle était déjà depuis deux siècles riche et puissante. Elle faisait partie de l'aristocratie mérovingienne. C'est de la société mérovingienne qu'elle est sortie, et c'est là qu'elle a eu ses racines.

    Remontons la filiation. Avant Pépin le Bref il y a Charles Martel, avant Charles Martel son père Pépin dit d'Héristal. Ici la ligne se dédouble. Ce Pépin est fils d'Anségise et de Begga; Anségise est fils d'Arnulf et Begga est fille d'un premier Pépin qui lui-même est fils d'un certain Carloman. Arnulf et Carloman sont les deux ancêtres. Tous les deux sont des hommes du VIe siècle, et les Carolingiens sont la réunion de ces deux familles.

    Observons d'un peu plus près cette généalogie. Du premier Carloman nous ne savons rien que son nom. On admet généralement qu'il était un duc, c’est-à-dire un fonctionnaire du roi d'Austrasie. Il était lui-même un Austrasien. Il est tout à fait vraisemblable qu'il était un Franc de race et un pur Germain. Son fils Pépin, très vraisemblablement aussi, était de pure rare franque. Mais ici se présente un fait qui n'aurait pas dû être négligé: ce Pépin se maria avec une femme du midi de la Gaule, avec une riche propriétaire Aquitaine.

    Ce fait nous est attesté par son biographe: «La femme de Pépin, dit-il, la vénérable Itta, était issue d'une clarissime noblesse d'Aquitaine.»

      

    Or le biographe, bien qu'il ne fût qu'un moine, était particulièrement instruit sur ce point; car son couvent possédait une charte de donation de propriétés que cette femme avait faite en sa faveur. Apparemment, cette charte portait avec le nom d'Itta le nom de son père et quelques indications sur sa famille.

      

    Le moine pouvait donc «savoir sûrement» qu'elle était d'une «clarissime noblesse d'Aquitaine».

     

     

    Or la population de l'Aquitaine n’était pas une population germanique. Les Wisigoths n'y étaient pas restés; les Francs ne s'y étaient pas établis. Elle obéissait aux rois francs et à des fonctionnaires royaux qui étaient plus souvent des Romains que des Francs. Nous avons même constaté plus haut qu'il y était resté un assez bon nombre de riches familles de l'aristocratie impériale.

     

    L'expression clarissima nobilitas qu'emploie le biographe était précisément l'expression consacrée pour désigner les familles de cette aristocratie où le titre de clarissime ou de sénateur était héréditaire. L'employait-il sciemment, l'avait-il trouvée dans la charte d'Itta? nous l'ignorons; mais cette expression ne laisse pas d'être significative.

      

    Quant à ce mariage entre un Germain du nord de la Gaule et une Romaine du Midi, il n'a rien qui doive nous surprendre. Pareilles unions étaient fréquentes. Nous savons d'ailleurs que l'Aquitaine faisait partie du même royaume que l’Austrasie. Les rapports entre les deux pays étaient incessants.

     

    Le mélange des races, surtout par mariage entre les Germains et les riches héritières romaines, est un des faits les plus incontestables de l'époque mérovingienne. C'est donc d'un mariage de cette sorte que naquit Begga, laquelle se trouva ainsi fille d'un Germain et d'une Romaine.

     

    Regardons maintenant l'autre ligne, celle d'Arnulf. Nous possédons deux biographies de ce personnage. Les deux auteurs vantent sa haute naissance et sa noblesse. Le premier s'exprime sous celle forme:»Il était né d'une grande famille des Francs; noble par ses parents, il fut encore plus noble par sa foi dans le Christ.» Il n'en dit pas plus, ne nous fait pas connaître le nom de son père, et nous laisse ignorer quelle était cette «grande famille des Francs».

      

    Or on se heurte ici à une difficulté. Il n'y avait pas, au VIe siècle, de familles nobles chez les Francs. Il n'existait pas chez eux de caste nobiliaire. Jamais il n'est fait mention dans les documents de cette époque d'une seule famille franque qui possédât une noblesse héréditaire.

     

    Qu'on lise Grégoire de Tours qui met si bien sous nos yeux les mœurs de ce siècle, on y verra en maints passages une noblesse romaine, qu'il appelle la noblesse sénatoriale; on n'y verra pas une seule fois une noblesse franque, bien que Grégoire ait fort bien connu les plus grands personnages parmi les Francs.

     

    Que veut donc dire l'auteur de la Vie de saint Arnulf quand il parle de prosapia Francorum? Il faut noter que la plupart des Vies de saints de cette époque commencent par vanter la noblesse du personnage. En général ils se servent des expressions nobilis genere, nobilibus parentibus ortus, ortus nobili progenie, ortus inclyta prosapia. Mais parfois ils remplacent ces expressions par celle-ci: Ex nobili Francorum prosapia genitus.

      

    Mais si l'on compare entre elles les Vies où sont employées ces diverses expressions, on voit qu'aucune idée spéciale ne s'attachait à l'une d'elles et que dans la langue fort prétentieuse des hagiographes elles étaient synonymes.

     

    Toutes, également et avec le même vague, voulaient dire que le saint n'était pas de basse naissance. Mais aucun de ces hagiographes ne songeait précisément à la race franque ou à la race romaine.

      

    Pas une fois, en effet, dans un tel nombre de Vies de saints, nous ne voyons que l'auteur oppose les deux races l'une à l'autre, ni même qu'il paraisse connaître deux races.

    Pour comprendre ces mots prosapia Francorum que six ou sept hagiographes emploient, et seulement à partir du VIIe siècle, il faut songer que le mot Franci n'avait pas un sens ethnique et qu'il désignait tous les sujets du royaume des Francs. Il est impossible d'avoir lu les textes sans être frappé de cette vérité.

      

    Les mots rex Francorum ne signifiaient pas que le roi ne régnât que sur les Francs de race; si Francorum avait ici son sens ethnique, il en résulterait que le roi mérovingien n'aurait eu aucun titre qui indiquât son autorité sur les hommes de race romaine.

     

    Nous rencontrons fort souvent l'expression palatium Francorum ou proceres Franci; or nous savons par de nombreux exemples que beaucoup d'hommes de race romaine figuraient dans les plus hauts rangs du Palais et parmi les proceres:

      

    On trouve cent fois l'expression exercitus Francorum; or nous savons que ces armées comptaient, au moins en Neustrie, plus de Romains que de Francs; nous savons aussi que le service militaire était obligatoire pour tous indistinctement, et qu'il y eut même des Romains qui commandèrent les armées.

     

    L'armée était donc un mélange de races, et pourtant on l'appelait toujours exercitus Francorum; cela ne signifiait pas autre chose que l'armée du pays ou du royaume des Francs. Dans ces expressions, comme dans beaucoup d'autres, le mot Francus avait perdu son sens ethnique. On était un Francus dès qu'on était un membre du royaume des Francs. Francorum est synonyme de Franciæ.

     

    Lors donc que l'auteur de la Vie de saint Arnulf dit que cet homme était d'une grande famille des Francs, il n'est nullement certain qu'il entende par là qu’Arnulf appartint à la race franque, ni qu'il descendit d'un compagnon de Clovis. Vraisemblablement il se sert d’une expression vague et ne songe pas à chercher si son héros est un Franc ou un Romain. — Il ne nous dit pas quel était son père.

     

    Peu de temps après, Paul Diacre parle d'Arnulf, dans son Catalogue des évêques de Metz, et il en parle, comme l'auteur précédent, sans remonter à son père.

     

     

    2° Que les carolingiens peuvent être rattachés à la noblesse romaine

    Mais un autre hagiographe écrit la Vie de saint Clodulf, fils de cet Arnulf, et il pense à donner la généalogie de la famille. Arnulf, dit-il, était «d'une ancienne race de sénateurs ». Ce terme de sénateur qui apparaît ici est digne d'attention. Le mot est fréquent dans Grégoire de Tours. Seulement, il s’applique toujours à des Romains, jamais à des Francs.

      

    Il désigne des familles de l'ancienne aristocratie impériale, familles où le titre de sénateurs avait été héréditaire sous l'Empire et était resté héréditaire sous les Mérovingiens, au moins jusqu'à la fin du VIe siècle. C'est ainsi que Grégaire de Tours nous apprend qu'un certain Gundulf, duc en Austrasie, était de famille sénatoriale, genere senatorio; et nous voyons en effet que ce Gundulf appartenait à la famille toute romaine des Florentins Géorgius.

     

    Que ce fils des Florentius ait porté le nom de Gundulf, il n'y a rien là qui doive surprendre. Beaucoup de Romains prenaient des noms germaniques, surtout quand ils devaient se placer au service du roi. Les noms n’étaient pas héréditaires, et les formes germaniques avaient la vogue.

     

     

    Arnulf était donc, suivant l'hagiographe, d'une ancienne famille de sénateurs. Son père, ajoute-t-il, s'appelait Arnoald ou Ansoald, et le père de celui-ci s’appelait Ansbert. De cet Ansbert on parlait très peu; mais on vantait beaucoup ses frères, qui furent presque tous évêques.

      

    Ils s'appelaient Déotarius, Firminus, Agiulfus, Gamardus père de Goéric, et enfin Ragenfrid père du patrice Mummolus et du patrice Hector. Ce mélange de noms romains et de noms germaniques entre des frères n'avait rien qui étonnât à cette époque.

    Les renseignements fournis par la Vie de saint Clodulf sont confirmés par d'autres documents. On trouve dans plusieurs manuscrits du Xe et du XIe siècle des tableaux généalogiques de la famille carolingienne.

      

    On peut ne pas attribuer une foi absolue à des tableaux généalogiques. Toutefois il faut songer que dans l'époque mérovingienne les grandes familles avaient leurs archives. Nous avons montré cela par les chartes et les formules.

     

    Un tableau généalogique n'est donc pas nécessairement une œuvre de fantaisie. Chaque famille possédait le sien. Précisément parce qu'il n'existait pas de noms héréditaires, chaque famille était soucieuse de conserver les preuves écrites de sa filiation.

     

    Cinq manuscrits contiennent une Généalogie de la famille carolingienne ; dans un sixième nous trouvons un poème en vers sur cette même généalogie. Ces six manuscrits ne se ressemblent pas; ils ne dérivent donc pas d'un manuscrit unique. Ils s'accordent parfaitement entre eux sur le fond.

      

    Tous sont en conformité avec la Vie de saint Clodulf. Tous établissent la même filiation: Ansbert, Arnoald, Arnulf. Tous mentionnent les mêmes frères d'Ansbert, et notamment Firminus. Tous enfin signalent cette famille comme sénatoriale, et quelques-uns ajoutent expressément qu'elle est romaine.

     

    Une Vie de saint Goéric confirme, sans que l'auteur y ait pensé, cette généalogie. Elle nous apprend que Goéric, dont le second nom était:Abbo, était un Aquitain, qu'il appartenait à une grande famille, et qu'il était parent d’Arnulf.

      

    Or il se trouve en effet que les Généalogies nous présentent un Goéric fils de Gamardus, et dont Arnulf était le cousin germain par son père.

     

     

    Tout ce que les Généalogies nous apprennent sur Ansbert, et surtout sur ses frères, marque bien que cette famille résidait en Aquitaine. Or une seconde Vie de saint Arnulf, qui d'ailleurs n'a été écrite qu’au IXe siècle, rapporte en effet que le père d'Arnulf était Aquitain.

      

    Cela encore concorde avec les Généalogies, car il n’est pas douteux que l'hagiographe en parlant ainsi n’eût dans l'esprit la famille toute aquitaine d'Ansbert et de ses frères. Lui aussi, il mentionne Goéric, qu il dit être cousin d'Arnulf, et qui vint d'Aquitaine s'établir à Metz.

     

     

    Toutes ces Généalogies s’arrêtent à Ansbert, dont on peut placer l'existence aux environs de l'année 500. Aucune d'elles ne remonte à son père. Aucune ne nous explique comment il se fait qu'un homme nommé Ansbert soit «d’une famille de sénateurs». Mais il se trouve qu'un des frères d'Ansbert, Firminus, fut évêque, devint un saint, et eut ainsi son biographe.

      

    Or cet auteur nous dit quel était le père de Firminus et par conséquent d'Ansbert; il s’appelait Ferréolus; il était un des grands personnages de la Narbonnaise: il était le descendant des Ferréolus, l'une des grandes familles sénatoriales de la Gaule.

     

     

    Cette Vie de Firminus est surtout digne d'attention. On ne soupçonnera pas que l'auteur écrive pour louer les Carolingiens; il ne paraît pas les connaître. Ce n'est pas non plus de lui-même, ni de parti pris, qu'il nomme Ferréolus; dans son premier chapitre, il se contente de dire vin quidam. Mais plus loin il raconte, apparemment d'après quelque source ou quelque tradition plus ancienne, comment le jeune Firminus se présenta à l’évêque Roricius pour obtenir d'entrer en cléricature; il rapporte à ce sujet un dialogue. «Qui es-tu? demande l'évêque.

      

    — Je suis né à Narbonne, répond l'enfant, mon père s'appelle Ferréolus et ma mère Industria »

    C'est par ce trait naïvement inséré dans le récit hagiographique que nous savons la descendance de Firminus et d'Ansbert. Or ce trait de la Vita Firmini est confirmé par un détail que nous donnent les Généalogies: à savoir qu'Ansbert eut un fils qui portait ce même nom de Ferréolus.

      

    On sait que les grandes familles romaines, sans que l'hérédité du nom fût une règle chez elles, aimaient à transmettre les noms du père au fils, ou tout au moins du grand-père au petit-fils. Les Généalogies qui nous fournissent le nom du petit-fils Ferréolus concordent donc avec la Vita Firmini qui nous fournit le nom du grand-père.

      

      

    Cette famille des Ferréolus, qui avait été l'une des plus grandes de la Gaule et qui avait fourni à l'Empire des prêtes du prétoire au Ve siècle, paraît avoir eu un moment d'éclipse sous la domination des Wisigoths.

      

      

    Sa grandeur sous les rois francs s'explique si l'on fait attention à certains détails. Nous devons songer, en effet, que la cité de Narbonne à laquelle les Ferréolus appartenaient, continua, même après la bataille de Youglé, à faire partie du royaume des Wisigoths pendant tout le VIe siècle; mais nous voyons les hommes de cette famille quitter Narbonne.

     

    Or cela coïncide avec une expédition du roi d'Austrasie Théodebert (553), qui conquit sur les Goths, non pas Narbonne, mais les cités voisines, Uzès et Alais. Nous remarquons que, peu après, l'évêché d'Uzès est donné à un membre de cette famille nommé Roricius, puis à un fils de Ferréolus, Firminus, et enfin à un fils d'Ansbert, Ferréolus.

     

    On sait qu'à cette époque les rois disposaient aisément des évêchés. Quant à Alais, nommé alors Arisitum, les rois d'Austrasie qui s'en étaient emparés en firent une circonscription indépendante de la cité de Nîmes et y installèrent un fils de Ferréolus, Déotarius, puis un fils d'Ansbert, Modéric.

      

    En même temps, Agiulfe, fils de Ferréolus ou peut-être d'Ansbert, fut assez en faveur auprès du roi d'Austrasie pour en obtenir le siège épiscopal de Metz. Tous ces faits permettent du nous représenter cette famille comme ayant quitté Narbonne et le royaume des Goths vers 533 pour se lier à la fortune des Francs.

     

     

    Elle rendit apparemment de très grands services, car elle reçut en récompense trois évêques. Ansbert servit-il comme soldat, ou comme diplomate, ou comme administrateur, nous l'ignorons; mais son zèle parut assez grand et l'appui de cette grande famille du Midi parut assez précieux pour qu'un roi mérovingien lui donnât une de ses filles en mariage.

      

    Ce fait est attesté par des documents de diverse nature, et nous n'avons pas le droit de le rejeter. Il n'a rien d'ailleurs qui est invraisemblable. Il est au contraire en pleine conformité avec la grande faveur dont cette famille a joui au VIe siècle.

     

     

    Il semble donc bien résulter de tout ce qui précède que la famille carolingienne se rattachait, par Arnulf et Ansbert, aux Ferréolus, et qu’elle était ainsi, en partie, de sang romain.

     

     

    Mais ces documents méritent-ils une pleine confiance ?

    Ce n'est pas sur des raisons de pure vraisemblance ou des raisons subjectives que nous avons à nous décider. Sans doute, ceux qui se figurent a priori que la population romaine dut être écrasée par les barbares, dépouillée, opprimée, réduite au néant, rejetteront cette généalogie comme une fable; ni la richesse d'Ansbert, ni surtout son mariage avec une fille d'un Mérovingien n'entreront dans leur esprit.

     

    Mais ceux qui n'ont pas ces idées préconçues, ceux qui savent que les Romains restèrent riches, qu'il, servirent les rois, qu'ils parvinrent aux fonctions les plus hautes, que plusieurs d'entre eux prirent, par mode, des noms germaniques, qu’enfin les mariages entre les deux races étaient infiniment fréquents, ceux-là ne seront pas arrêtés par des raisons d'invraisemblance.

      

    Au fond, cette généalogie ne doit pas être jugée d'après les diverses préventions qu'on a dans l'esprit. C'est à la valeur seule des documents qu'un esprit critique doit regarder.

     

    D'une part, on peut dire en leur faveur qu'ils sont nombreux. La Vie de saint Clodulf, trois tableaux généalogiques qui viennent de source différente et qui pourtant concordent, le petit poème sur Ansbert, la seconda Vie de saint Arnulf, la Vie de saint Goéric, enfin la vie de saint Firmin, voilà un total de huit textes.

      

    C'est beaucoup d'avoir huit textes sur un seul fait. Ce qui ajoute à leur valeur, c'est que ces différents auteurs ne paraissent ni s'être entendus entre eux, ni s’être copiés, ni avoir copié un modèle commun. La Vie do saint Clodulf et la Vie de saint Firmin n'ont aucun rapport entre elles.

     

    La première ignore tout ce qui concerne Firminus; la seconde ignore tout ce qui concerne Ansbert et les Carolingiens; c'est par d'autres documents que nous savons que Firmin et Ansbert sont la même famille et que nous pouvons associer les deux biographies. Aucune règle de critique ne permet de rejeter de pareils textes ni l'accord qui résulte pour nous de leur rapprochement.

     

     

    Mais, d'autre part, aucun de ces textes n'est très ancien. La Vie de saint Clodulf est, à mon avis, du règne de Pépin le Bref. Une des Généalogies est du même règne ; les autres sont du temps de Charlemagne ou de ses fils, puisque le nom de Charlemagne y figure, méme celui de Louis le Pieux et de Lothaire. Le petit poème sur Ansbert a été adressé à Charles le Chauve.

      

    La Vie de saint Firmin et celle de saint Goéric sont d'époque inconnue. Lors donc que ces documents mentionnent Ansbert et à plus forte raison Ferréolus, personnages du VIe et même du Ve siècle, ils sont loin d'être des documents contemporains.

     

     

      

    Le principal argument contre cette Généalogie n'est pas que les écrits qui nous la fournissent datent seulement du VIIIe siècle; car nous savons que les familles riches avaient alors des archives domestiques, et il n'était pas fort difficile de retrouver la série des six ascendants d'un homme.

      

    L'argument le plus fort est que les documents qui nous l'ont conservée ont été écrits au temps où régnaient les Carolingiens et peut-être dans le but de les louer.

      

    — Ainsi une chose est certaine, c'est que ces tableaux généalogiques ont été dressés au VIIIe siècle.

     

    Une chose fait question, c'est de savoir s’ils ont été dressés d'après des pièces et des actes qui se trouvaient dans la famille d’Arnulf, ou s'ils ont été fabriqués par pure imagination.

     

    Cette question ne peut pas être résolue scientifiquement. Chacun à son gré peut admettre l'une ou l'autre alternative. On peut croire à cette généalogie, comme on peut la rejeter.

     

    Seulement, si on la rejette comme fabriquée, il faudra se demander pour quel motif Charlemagne ou ses contemporains auraient imaginé et fabriqué une généalogie qui, au lien de le faire descendre des Germains, le rattachait à une famille romaine.

     

     

    De deux choses l'une: ou la généalogie est vraie, et alors Charlemagne descendait, en partie, d'une grande famille de l'aristocratie romaine; ou la généalogie est fausse, et alors Charlemagne prétendait ou croyait en descendre.

      

    Dans le premier cas, il y a un fait réel, qui est curieux. Dans le second, il y a une opinion, une prétention, une conception d'esprit qui serait plus curieuse que le fait lui-même et qui aurait encore plus d'importance.

     

     

    Quant à nous, nous n'avons pas voulu négliger ces documents, comme ont fait les historiens allemands. Nous ne croyons pas qu'on doive construire sur eux une théorie. Ils doivent seulement nous mettre en garde contre la théorie qu'on a faite.

      

    Quand on a dit que la famille carolingienne représentait le sang et l'esprit germaniques, on a dit une chose que ces documents contredisent et qu'aucun autre document ne confirme.

     

    Nous ne concluons pas de ces documents que la famille de Charlemagne soit romaine; mais on est encore moins en droit de dire qu'elle soit exclusivement germaine.

      

    Si l'on veut absolument introduire ici la question des races, il faut dire que cette famille en représente le mélange. Le mieux est d'écarter de notre étude cette question de races, à laquelle ni les rois ni les peuples d'alors ne pensaient.

     

     

    Notons que si l'on admet que Charlemagne descende d'Ansbert et des Ferréolus, on ne sera pas en droit d'en conclure qu’à travers ces sept générations cette famille soit restée romaine de sang et romaine d'esprit.

      

    Elle a vécu constamment dans le Nord et dans l'Est. Elle s'est mêlée par mariage à des familles germaines. Ses intérêts n'ont cessé d'être mêlés à ceux des rois d'Austrasie, puisqu'elle les servait et grandissait par eux.

     

    Nous devons même admettre que cette famille mit quelque soin et même quelque affectation à se confondre avec les Francs, puisque tous ses membres, depuis Ansbert, eurent des noms de forme germanique.

      

    Si les Carolingiens descendent d'une famille romaine, c'est d'une famille qui par ambition ou habileté avait eu soin de se franciser.

      

    Elle avait mis de côté sa descendance romaine et était devenue l'une des premières familles franques.

     

     

    3° Les Carolingiens sont une famille d’évêques et de saints.

    Mais cette théorie des races une fois mise de côté, il reste dans cette généalogie plusieurs renseignements que nous devons en dégager et mettre en lumière.

     

    La société que vise notre étude avait deux traits caractéristiques: dans la vie morale, une dévotion extrême, et plutôt aux saints qu'à Dieu; dans l'existence matérielle, la grande influence de la richesse foncière.

      

    Or il ressort de cette généalogie ces deux choses: que la famille carolingienne fut, de toutes les familles de la Gaule, celle qui comptait le plus de saints, et celle aussi qui possédait le plus de terres.

     

    Pour les saints, à la première génération, parmi les frères d’Ansbert, nous trouvons: Déotarius, qui fut évêque d’Alais et devint un saint après sa mort ; Firminus, qui fut évêque d'Uzès et devint aussi un saint des plus vénérés ; Agiulfe, qui fut évêque de Metz; Gamardus, qui ne fut pas évêque, mais qui fut père d'un évêque et d'un saint, saint Goéric.

     

    A la seconde génération, les fils d'Ansbert furent: Arnoald, qui, après avoir vécu dans les dignités laïques, finit sa vie sur le siège épiscopal de Metz ; Ferréolus, qui fut vingt-huit ans évêque d'Uzès et y fut honoré après sa mort comme un saint; Modéric, qui mourut évêque d'Alais «et sur le tombeau duquel Dieu opère beaucoup de miracles »; enfin leur sœur, Tarsitiu, devint aussi une sainte: «tous les jours la puissance du Christ se manifeste pour ses mérites, et l'on rapporte méme qu'elle a ressuscité un mort ».

     

     

    A la troisième génération, nous avons Arnulf, qui, après avoir été un grand seigneur de la cour d'Austrasie, fut évêque de Metz; plus tard, il se fit moine à Remiremont, ce qui augmenta le prestige de son nom aux yeux des hommes.

      

    On en fit donc un grand saint. Son fils Clodulf devint évêque de Metz; ces évêchés d'Uzès et d'Alais dans le Midi, de Metz dans le Nord, étaient comme la propriété héréditaire de cette famille. Mort, il fut un saint.

     

     

    Cela fait un total de neuf évêques, de sept saints, et d'une sainte, dans une même famille. Pépin le Bref et Charlemagne descendaient d'évêques et de saints.

      

    Si nous entrons dans les idées des hommes de ce temps-là, nous jugeons quelle force c'était pour une famille d'avoir des ancêtres qui faisaient des miracles.

      

    Longtemps encore après Charlemagne, les peuples croyaient que ces saints continuaient à veiller sur leurs descendants.

     

     

    4° Les carolingiens sont une famille de grands propriétaires.

    C'était en même temps la famille la plus riche. Le premier Carlomun était un grand propriétaire du pays de Liège ; son fils, Pépin de Landen, déjà riche, épousa en Aquitaine une riche héritière qui lui apporta un grand nombre de domaines. D'autre part, les auteurs des Généalogies nous disent qu’Ansbert était très riche.

      

    C'est un trait qu'ils ne négligent pas. Le biographe de saint Arnulf commence aussi par nous dire qu'il était «très opulent en biens du siècle ». Un mariage unit les deux familles de Pépin et d'Arnulf et confondit les deux fortunes sur une seule tête, Pépin d'Héristal.

     

     

    Aucun document ne nous donne la liste ou le nombre des domaines possédés par cette famille. Mais nous pouvons peut-être en juger par le nombre des donations de terres que nous voyons qu'elle a faites.

      

    Elle possédait dans l'Ardenne un castrum Ambra dont elle fit donation, la villa Germigny dans le pays de Reims ; elle donne à l'église de Metz une villa Nugaretum située dans le diocèse de Verdun.

     

    Elle donne aux monastères fondés par saint Rémacle un domaine dans le Hasbain et un autre dans l'Ardenne ; au monastère de Saint-Trudon, deux domaines ; au couvent de Lobbes une grande forêt située dans le basin de la Sambre.

     

    Nous savons d'ailleurs qu'elle a possédé dans le pays de Verdun le Parrois et Cominières ; dans la vallée de la Moselle un domaine appelé Palatiolum ; dans le diocèse de Trèves la villa Bollumvilla ou Bollumdorf ; deux autres propriétés dans le pays de Maestricht ; dans le diocèse de Liège, deux grands domaines, dont chacun était le chef-lieu de plusieurs propriétés ; dans l'Ardenne, le domaine de Lethernau, qui commandait lui-même à quatre autres domaines.

     

    Elle a fait donation de plusieurs terres dans le Midi. Dans la Neustrie, nous voyons la famille faire don à l'abbaye de Fontenelle de huit domaines situés dans le Vexin et le Beauvaisis.

      

    Ces dix-huit ou vingt propriétés sont peu de chose; mais nous devons calculer, d'abord, que nous sommes loin d'avoir la liste complète des donations de la famille; ensuite, que ces donations qui ne l'ont jamais appauvrie n'ont certainement porté que sur une petite partie de sa fortune.

     

    C'était tout au plus la dîme de sa richesse foncière. Or on était en un temps où la richesse foncière faisait toute la force des familles.

      

    C'était elle qui procurait des serviteurs, des amis, des guerriers. Par elle on était indépendant, et par elle on commandait.

     

     

    Ainsi, il y avait dans cette famille, d'une part une longue série d'évêques, de saints, d'intercesseurs auprès de Dieu, d'auteurs de miracles, de l’autre une accumulation de domaines épars dans toutes les parties de la Gaule, et surtout au nord-est. Voilà la double origine de la grandeur carolingienne.

     

    A quoi bon imaginer qu'elle ait représenté les appétits d'une race et dirigé une invasion, puisque les documents ne disent rien de cela? La vérité est qu'elle était la famille la plus riche en saints et la plus riche en terres. Nous allons voir qu’elle acquit avec cela la mairie du Palais, puis, par la mairie, la royauté.

     

      

      

    SOURCES :

    BLOG LIEN - LE CERCLE MEDIEVAL

    http://www.lecerclemedieval.be/histoire/

    Les-origines-de-la-famille-carolingienne.html

    photos google

     

     

     

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      Fin de la lignée directe capétienne (1314-1328)
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    La descendance de Philippe IV le Bel

    Le roi Philippe le Bel a eu quatre enfants qui atteindront tous l'âge adulte :

    • Louis X, l'aîné, avait un caractère difficile qui lui valut le surnom de "Hutin" : il épousera Marguerite de Bourgogne, fille de Robert de Bourgogne et d'Agnès, elle-même fille de Saint Louis. Altière et un rien frondeuse, cette jolie jeune femme aimait la vie.
    • Philippe V le Long, prince intelligent, épousera Jeanne d'Artois, fille d'Othon IV de Bourgogne et de Mahaut d'Artois.
    • Charles IV le Bel a une personnalité plus effacée : il épousera Blanche, la soeur de Jeanne d'Artois, plus frivole que cette dernière et facilement influencée par sa belle-sœur Marguerite.

    Ces jeunes femmes donnaient à la cour un air de gaieté très apprécié, qui contrastait avec l'austérité du roi et de son entourage.

    • Isabelle de France (surnommée la Louve de France), seule fille de Philippe IV le Bel, épousera le roi d'Angleterre Édouard II mais n'aura pas une vie conjugale enviable : elle est délaissée par son époux (qui préférait les jeunes pages), et vivra au vu et au su de tous avec son amant, le baron Roger Mortimer.

      La mort du roi anglais en 1327 et le trop jeune âge de son fils Édouard III lui permettront d'exercer avec son amant une régence de fait. Mais en 1330, Édouard III reprend le pouvoir, fait exécuter Mortimer et reléguera sa mère au château de Norfolk où elle mourra en 1358.


    Sophie Marceau joue le rôle d'Isabelle dans le magnifique film "Braveheart" de Mel Gibson

    L'affaire de la Tour de Nesles

    Le drame éclate au printemps 1314 : le roi Philippe le Bel a 46 ans, se sent décliner dangereusement et voit l'avenir de la monarchie d'un œil pessimiste.

    Les princesses adultères :

    La fille de Philippe le Bel, Isabelle, reine d'Angleterre, indique au roi qu'elle a vu deux chevaliers, les frères d'Aunay, arborer les aumônières qu'elle avait offert à ses belles-soeurs. Elle affirme que ces derniers passent leur temps avec les princesses.


    Plaque indiquant l'emplacement
    de la Tour de Nesles Quai Conti

    Le roi décide de faire mener l'enquête : les épouses de ses trois fils, Marguerite de Bourgogne, reine de Navarre, Jeanne et Blanche de Bourgogne, les deux soeurs mariées à Philippe et Charles, sont vite reconnues coupables d'adultère. Il apparaît qu'elles avaient coutume de se livrer à la débauche en plein Paris, dans la Tour de Nesles, au bord de la Seine.

    Le scandale blesse cruellement l'amour-propre de ce roi profondément pieux qui, d'après le témoignage des contemporains, restera chaste après la mort de son épouse Jeanne de Navarre, survenue 9 ans plus tôt.

    Qu'est-ce que "la Navarre" ? Situé dans l'actuel département des Pyrénées-Atlantique, ce territoire sera rattachée à la France en 1284.

    Le sort des princesses :

    Les 3 princesses sont jugées en avril et les châtiments sont les suivants :

    • Marguerite, 24 ans, est condamnée à être tondue, vêtue d'une robe grossière et emprisonnée à Château Gaillard : elle occupera une cellule ouverte à tous vents au sommet du donjon, et décédera peu après.
    •  
    • Blanche, 18 ans, subira le même sort que Marguerite, mais sera un peu mieux traitée dans un cachot "enfoncé dans la terre" : elle sera ensuite transférée à Gavray, en Normandie, et obtiendra l'autorisation de prendre l'habit de religieuse. Elle meurt en 1326, à l'abbaye de Maubuisson.
    •  
    • Jeanne, 20 ans, est déclarée moins coupable du fait qu'il lui aurait été délicat de dénoncer sa soeur et sa belle-sœur. Elle est enfermée au château de Dourdan.

    La Tour de Nesles

    L'affaire d'adultère des brus de Philippe le Bel est souvent appelée à tort "Scandale de la tour de Nesles".

    L'hôtel de Nesles a bien existé : il a été offert en 1319 à Jeanne par Philippe V le Long, mais n'a pas été le théâtre de ces événements. Jeanne l'occupera seulement après la mort de son époux.

     

     


    Cette gravure montre la Tour de Nesles telle qu'elle était juste avant sa démolition en 1665. Elle a laissé place à l'Institut de France et à la bibliothèque Mazarine

    Le sort des amants :

    Les frères d'Aunay sont aussitôt arrêtés et subissent "la question" :

    ils avouent sans tarder et après un rapide jugement à Pontoise pour crime de lèse-majesté, ils sont exécutés dans le foulée en place publique. Leur supplice est épouvantable :

    dépecés vivants, leur sexe tranché et jeté aux chiens, ils sont finalement décapités, leurs corps traînés puis pendus au gibet. Dans le mouvement, quelques valets, accusés de complicité, sont également sacrifiés.

     

    Au-delà de l'affront fait à la famille royale, ce crime était une atteinte aux institutions du royaume plus encore qu'à la morale: il mettait tout simplement en péril la dynastie capétienne.

    • quelles auraient été la légitimité et l'autorité d'un futur souverain dont on aurait pu mettre en doute la royale paternité ?
    • comment sacrer et donner l'onction divine à un roi qui n'aurait pas été, sans équivoque possible, le fils du roi précédent ?

    Les implications politiques étaient si graves que le châtiment se devait d'être exemplaire.

     

     

    Les Rois Maudits

    Cet enchaînement de drames à la cour royale a fait l'objet d'une célèbre traduction romanesque par Maurice Druon, sous le titre "Les Rois Maudits" :

    • Le Roi de Fer (Philippe le Bel)
    • La Reine Étranglée et Les Poisons de la Couronne (sous le règne de Louis X)
    • La Loi des Mâles (décrit l'impuissance des jeunes pour accéder à la couronne)
    • La Louve de France et Le Lis et le Lion (Philippe VI de Valois vaincu par Edouard III d'Angleterre)
    • Quand un Roi perd la France (le Prince Noir d'Angleterre fait prisonnier le roi de France Jean II le Bon)

    A propos de ce roman historique, l'auteur dit avoir pour maxime "de ne jamais transiger avec la vérité historique mais de prendre hardiment parti dans l'hypothèse".

    L'affaire de la Tour de Nesle est devenue une légende sulfureuse au fil des ans : un mythe renforcé encore par le destin des trois héroïnes.

      

    Les derniers capétiens directs

     

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    • Louis X le Hutin succède à la mort de Philippe IV le Bel en 1314, juste après l'affaire de la Tour de Nesles : il avait déjà eu une fille avec Marguerite de Bourgogne, Jeanne (future reine de Navarre et mère de Charles le Mauvais).

    • La mort rapide de Marguerite dans sa prison (probablement une exécution) permet à Louis X de se remarier avec Clémence de Hongrie. Il manque d'envergure dans l'exercice du pouvoir et ne parvient pas à juguler les revendications des grands féodaux frustrés par la monarchie absolue qu'était parvenu à imposer Philippe le Bel. Il cède en rétablissant de nombreuses "bonnes coutumes" de Saint Louis, comme lui demandait son oncle Charles de Valois. Il doit son qualificatif à son mauvais caractère, "Hutin" signifiant "querelleur".

    • Il n'y aura qu'un enfant posthume, Jean 1er, qui ne vivra que 5 jours, le règne le plus court de l'histoire de France !

    La condamnation d'Enguerrand de Marigny :

    Il a été l'un le plus fidèle conseiller financier de Philippe le Bel, mais suite à des hausses de prix, les nobles se révoltent.

      

    Louis X opte pour la négociation et fait habilement porter la responsabilité de la situation sur Enguerrand de Marigny : il est jugé sans avoir le droit de prendre la parole pour se défendre et sera pendu dans la foulée au gibet de Paris en 1315

      

    (Charles le Valois ne souhaite sans doute pas qu'il évoque ses dettes). Des voleurs descendront son cadavre pour le dépouiller, mais il sera "re-pendu" ... et y restera exposé 2 ans selon la coutume !

    Après la mort de Louis X, sa mémoire sera réhabilitée et il sera dignement inhumé. En 1475, le roi Louis XI élève même un mausolée sur son tombeau, qui sera profané à la Révolution.

    • Philippe V le Long succède à son frère Louis X Le Hutin en 1316. Il doit évincer son oncle Charles de Valois qui s'était auto-proclamé régent, et n'a pas de mal à utiliser l'affaire d'adultère pour écarter sa nièce Jeanne de la succession au trône.
    •  
    • Il se justifie par une interprétation erronée de la loi salique interdisant aux femmes de coiffer la couronne de France.
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    • Il est énergique et se distinguera en organisant des assemblées ou états généraux dans le but pacifier le royaume.

    • Jeanne d'Artois, son épouse réhabilitée, ne lui donnera "que" trois filles et aucun garçon. Il est atteint de fièvres en août 1321 et se consume lentement avant de mourir 5 mois plus tard.
    • Charles IV le Bel monte à son tour sur le trône à la mort de son frère en 1322 : attaché à Blanche, malgré l'affront, il vit douloureusement sa disgrâce.
    •  
    • Les deux époux s'accordent sur l'obligation politique d'annuler le mariage.
    •  
    • Charles se souvient que la mère de son épouse, Mahaut d'Artois, était sa marraine et, par là même ... sa "mère spirituelle" : son épouse Blanche était donc en quelque sorte "sa soeur" !
    •  
    • Cette clause de parenté spirituelle étant un motif de nullité prévu par le droit canonique, il peut se remarier avec Marie de Luxembourg.
      Mais cette 2ème épouse, enceinte, meurt prématurément et Charles épouse Jeanne d'Évreux, sa cousine : nécessité faisant loi, il faut bien que le Ciel s'accommode de cette autre parenté !!!
       
    •  
    • Le roi, qui meurt en 1328, n'aura pas plus de chance avec cette 3ème épouse : elle lui donne une fille qui meurt prématurément puis une fille posthume. Sa personnalitémédiocre fera dire que "ce roi régna grand temps sans rien faire".

      

    Ainsi troublées furent les destinées conjugales des derniers représentants des Capétiens directs :

      

    si Marguerite de Bourgogne n'avait pas si gravement fauté, peut-être aurait-elle donné un fils à Louis X, assurant ainsi la continuité de la dynastie !

    Ces événements permettent également à Charles de Valois, oncle des monarques, de s'immiscer dans les affaires du royaume et d'octroyer aux grands vassaux certaines prérogatives ôtées par son frère Philippe le Bel.

     

    La fin des capétiens directs : une grave crise de succession

    A la mort de Charles IV en 1328, faute d'héritier mâle en ligne directe, trois compétiteurs se disputent la succession :

    • Philippe comte d'Evreux, roi de Navarre : petit-fils de Philippe III et neveu de Philippe le Bel.
      Il a épousé sa cousine Jeanne de Navarre (fille du roi Louis X) : il revendique la couronne au nom des droits de sa femme qu'on a jadis écarté du trône au nom de la Loi Salique. Mais cette loi ayant été entérinée comme loi successorale en France, Philippe ne peut qu'être écarté !
    • Edouard III, roi d'Angleterre : fils d'Edouard II et d'Isabelle de France, fille de Philippe-le-Bel.
      A la mort de Charles IV, il est le plus proche héritier mâle de la couronne de France et donc celui qui a objectivement les droits les plus valables.
      Mais le patriotisme français refuse un roi anglais, bien que : Philippe, comte de Valois : petit-fils de Philippe III, fils du comte Charles de Valois et neveu de Philippe le Bel.
      • la noblesse anglaise soit de langue et de culture française,
      • il soit descendant des normands avec Guillaume le Conquérant et des angevins (d'Anjou) avec les Plantagenêts.

    • Prenant la suite de son père, il est le chef de file des grands féodaux pairs de France.

    (En vert les prétendants au trône et en bleu les derniers rois capétiens)

    Les capétiens valois

    La noblesse du royaume donnera le trône au représentant de la branche cadette des Valois : le neveu de Philippe le Bel (cousin du dernier roi) deviendra roi sous le nom de Philippe VI de Valois.

    Ainsi naîtra la branche des Capétiens Valois qui durera jusqu'en 1589 avec la mort d'Henri III : suivra ensuite la branche des Bourbons avec Henri IV, qui se maintiendra jusqu'en 1791 avec la déposition de Louis XVI.

    Cela excitera la rancoeur du roi d'Angleterre Edouard III, à l'origine de la guerre de Cent Ans !

     

     

    La suite ...
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