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    Manoir de Canapville par M. Le Courtois Du Manoir

     

    Manoir de Canapville
    par
    M. Le Courtois Du Manoir
    Ancien président de la Société des Antiquaires de Normandie

    ~*~

    La présente édition, entièrement conforme à la première (1894),
    a été faite en mémoire de l'Auteur décédé le 9 octobre 1906.

     

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    L'été attire chaque année sur les côtes du Calvados, et surtout à Trouville, un grand nombre de baigneurs, de curieux et d'artistes.

    La plupart d'entre eux ne se contentent pas d'admirer les splendeurs de la mer et les élégantes villas qui la bordent, de Cabourg à Honfleur ; ils veulent connaître le pays où ils viennent chercher le repos et la santé, admirer ses sites gracieux, ses verdoyants paysages, étudier son industrie, ses moeurs, ses monuments, son histoire.

     

     

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    Aussi les voyons-nous parcourant en voiture les routes qui sillonnent la contrée, ou s'égarant à pied dans les sentiers ombreux, en quête de quelques traces d'un passé qui va chaque jour s'effaçant.

     

    Leurs regards sont particulièrement attirés par ces vieilles maisons en colombages dont les formes irrégulières et bizarres, dont les minces murailles de bois et de terre, dont les toits en tuiles ou en paille forment un si frappant contraste avec les constructions modernes en pierre et brique aux formes carrées et solides, à l'intérieur confortable et qui auront bientôt partout remplacé les habitations originales et traditionnelles du pays d'Auge.

     

    splendide-CPA-Canapville-Ancien-Manoir-des-Eveques-de-Lisieux

     

    Cette transformation prouve les progrès accomplis par la richesse publique, le développement du bien-être étendu même à la classe ouvrière, et réjouit l'économiste et le moraliste.

     

     

    remarquable-CPA-Canapville-Manoir-ancienne-Residence-des-Eveques-de-Lisieux

    Mais l'artiste, l'antiquaire, le simple touriste lui-même, gardent au fond du coeur quelque regret de ce passé si pittoresque et qui semblait s'adapter si bien à ce cadre de verdure calme, où des boeufs lents et pesants protestent en quelque sorte contre l'activité, je voudrais presque dire la nérvosité moderne.

     

     

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    L'un des restes de cette ancienne architecture normande les plus faciles à visiter est le vieux Manoir de Canapville, situé sur le bord de la grande route de Pont-l'Évêque à Trouville, à peu prés à égale distance de ces deux villes.

     

     

     

     

    Aussi beaucoup de promeneurs s'arrêtent-ils en passant, les uns pour jeter un coup d'oeil à ces vieilles murailles branlantes, les autres pour les dessiner, les autres enfin pour les étudier et en reproduire quelques motifs dans les plans de villas modernes qu'ils se proposent d'élever plus tard dans nos élégantes watering-places.

     

    Photo du Monument Historique Manoir des Evêques de Lisieux situé à Canapville

     

     

    Ce Manoir de Canapville date du milieu du XVe siècle. Il en est fait mention dans les termes suivants dans un acte de vente passé en 1448 entre Benoît de
    Launoy et Guillaume de Berteville. « A tous ceux qui ces lettres verront ou oiront Iehan le Conte vicomte d'Auge salut, savoir faisons que par devant lehan Mauvoisin clerc tabellion juré et établi en ladite vicomté et siège du Pont-lévesque ainsi qu'il nous a témoigné fut présent Benest de Launoy conseiller en cour laye, demeurant à Clermont, lequel vendit et transporta afin d'héritage à Guillaume de Berteville demeurant audit lieu de Pont-lévesque, c'est à savoir une franche vavassorerie séante en la paroisse de Canapville avec l'hostel, la cousture dauprès ledit hostel et toutes les autres terres labourables, plantays et pasturages et les preys au-dessous y celui hostel qui furent appartenant à feu Loys Despassans et qui par ledit Benest ont été acquis tant par décret que autrement au deça du Moustier dudit lieu de Canapville au costé devers Pont-lévesque au-dessous du quemin passant devant le dit Moustier et l'hostel ..., avec toutes autres dignités, franchises, libertés, rentes, reliefs treisiemes, hommes, hommaiges et autres revenues à icelle vavassorerie et hostel appartenant sans aucune réservation et retenue et fut la vente faite par le prix de deux cent soixante livres tournois....

     

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    Ce fut fait et passé le huitième jour d'avril l'an de grace 1448 avant Pâques Presents ; Guillaume Vipart, écuyer, Estienne du Fossey et maistre Guillaume Gamare, syrurgien, témoings. »

    Deux ans plus tard, le 19e jour d'avril 1450, avant Pâques, Guillaume de Berteville vendit et transporta à vénérable et discrète personne, maistre Jehan du Fossey, maistre ès arts et bachelier en laye, tout et tel droit d'acquisiiion comme il en avait acquis de Benest de Launoy, de Clermont, de l'hostel, terre, vavassorerie et domaine assis en la paroisse de Canapville, qui fût et appartint à feu Loys Despassans, dont plus ample desclaration est faite aux lettres de ce faites et baillées audit maistre Jehan pour annexer se mestier est. Cette vente est faite par le prix et somme de 300 livres tournois.

    Un peu plus tard, Jehan du Fossey, par suite de lots et arrangements de famille, céda et abandonna à son frère Estienne, écuyer, la vavassorerie de Canapville, qualifiée aussi de vavassorerie de Manneville. Le 26 juin 1484, Estienne du Fossey, âgé de plus de soixante ans, obtint du roi Charles VIII des lettres patentes pour le dispenser de venir en personne prêter en ses mains ou en celles de son chancelier les foi, hommage et serment de fidélité dont il était tenu pour ladite vavassorerie, et il fut autorisé à prêter ledit serment aux mains du bailli de Rouen ou de son lieutenant en la vicomté d'Auge. La vavassorerie, domaine et manoir de Canapville passèrent successivement à Jean du Fossey, fils d'Estienne ; à Pierre, fils de Jean, et à Jacques, fils de Pierre.

    Le 20 septembre 1565, Jacques du Fossey déposa entre les mains de Jean Aymar, écuyer, sieur de la Roche, commissaire député par monseigneur le duc de Montpensier, pair de France, pour recevoir les foi, hommage et serment de fidélité des seigneurs, gentilshommes et autres tenants de la vicomté d'Auge, son aveu signé et scellé du scel de ses armes pour la noble et franche vavassorerie de Canapville, mais ledit aveu ne fut reçu que sous réserve et à charge, par ledit Jacques du Fossey, d'apporter le dénombrement et les preuves de ses prétentions. Or, le 12 septembre, aux assises tenues à Pont-l'évesque par le Doulcet, lieutenant du bailly de Rouen en ladite vicomté pour le Roy, et pour monseigneur le duc de Montpensier, propriétaire de la vicomté d'Auge, lesdites preuves furent apportées tant par titres que par témoins, et, après une longue et minutieuse enquête, l'aveu de Jacques du Fossey fut reconnu bon et valable, et toutes ses prétentions furent admises et tenues pour justifiées.

    Entre autres choses, il est établi par l'enquête que les du Fossey de père en fils habitaient leur manoir de Canapville, et se faisaient enterrer dans l'église de la paroisse. On cite même cette particularité que Pierre du Fossey et sa femme Marie Pierre de Montpongnant décédèrent et furent inhumés le même jour et mis dans la même fosse. Il est établi aussi qu'ils jouissaient de droits importants dans la forêt de Touques, qu'ils acquittaient de nombreuses charges et impositions, et notamment qu'ils durent payer la redevance d'un dixième de leur revenu pour la délivrance du roi François Ier ; enfin que la vavassorerie de Canapville avait toujours été appelée noble.

    Jacques du Fossey agrandit considérablement le domaine que son père avait laissé dépérir. Son fils Daniel lui succéda et continua à arrondir son domaine, notamment par l'achat de l'aînesse de la vavassorerie de la Fosse Monfort qui, depuis lors, n'a cessé d'appartenir aux seigneurs de Canapville ou à leurs cohéritiers.

    A Daniel succéda son fils Jean, dont la veuve, Esther du Quesnoy, vendit en 1648 pour le prix de 22.000 livres à François de Bailleul, sieur de Bellengreville, le domaine du Vey, propriété de feu son mari. Je cite ce détail pour montrer l'importance et l'opulence même des châtelains de Canapville, qui ne dédaignaient pas depuis deux siècles d'habiter un manoir dont se contente à peine aujourd'hui un gardien d'herbages. Déjà auparavant, le 8 juillet 1635, le capitaine Jehan du Fossey avait reçu du roi une commission pour lever et mettre sur pied cent hommes de guerre et les conduire au duc d'Epernon. Dans un acte du 17 novembre 1660, Esther du Quesnoy, dame de Canapville, se qualifie de veuve de Jean du Fossey, chevalier, seigneur de Canapville, et elle continue à agrandir ce domaine par des acquisitions tant en son nom qu'au nom de son fils Henri.

    Mais avec Henri du Fossey s'éteint cette famille, ou du moins la branche des seigneurs de Canapville. Il laisse, en effet, en 1677, pour seuls héritiers ses soeurs : 1° Esther, épouse de Louis le Cloustier, sieur de Bouthemont, et leurs enfants ; 2° Catherine, épouse d'Isaac de Varignon, écuyer, sieur de Grées, et leurs enfants ; 3° Judith, épouse de Nicolas de Carel, écuyer, sieur de Cresseveuilles ; 4° Jeanne, lesquelles acceptent, pour le règlement de leurs droits dans la succession d'Henri du Fossey, l'arbitrage de Daniel de Bras de Fer, écuyer, sieur de Fontenelle, et du sieur de Prétot, écuyer.

    Malgré cette convention, un accord parfait ne semble pas avoir régné dans la famille, et nous voyons les nombreux neveux de Henri du Fossey se partager et se repartager la succession de leur oncle jusqu'à ce qu'enfin le domaine de Canapville soit attribué pour une partie aux sieurs et demoiselle de Mathan, descendants de Catherine du Fossey, dame de Varignon, et, pour l'autre partie, à Nicolas-François de Costart, seigneur de la Chapelle et patron de Mery, descendant de Judith du Fossey, dame de Carel et de Cresseveuilles.

    En 1738, au mois de décembre, MM. Gabriel-Auguste de Mathan, chevalier, et Joseph de Mathan, écuyer, tant en leur nom qu'au nom de leur sieur, cédèrent à Nicolas-François de Costart tout ce qui leur était dévolu du domaine de Canapville. De la sorte, le domaine entier se trouva réuni dans la même main et demeura la propriété de M. de Costart, qui en bailla aveu le 5 mars 1749 au duc d'Orléans, et reconnut tenir de son Altesse Sérénissime une vavassorerie qui relève de plein relief par dix sols, nommée la vavassorerie de Canapville. Depuis lors, ce domaine est passé successivement par héritages, partages et rachats entre cohéritiers, dans les familles de Tesson, Subtil de Franqueville et Le Courtois du Manoir. Il appartient maintenant à Charles-Gaston Le Courtois du Manoir, treizième descendant d'Estienne du Fossey, frère de Jean du Fossey, l'acquéreur primitif de 1450.

    Après avoir passé en revue les propriétaires, que dirons-nous de l'habitation elle-même?

    Un dessin la fera mieux connaître que n'importe quelle description ; essayons cependant d'en dire quelques mots : le corps principal de logis se compose de deux bâtiments élevés à droite et à gauche d'une masse considérable de maçonnerie en pierre, qui consiste en trois cheminées colossales accolées les unes aux autres et en une tourelle d'escalier. A gauche de ce noyau central se trouve, au rez-de-chaussée, une cuisine avec ses dépendances et une de ces larges cheminées dans l'intérieur desquelles on s'assoit pour se chauffer. A droite, et légèrement en contre-bas du sol de la cour, se voit une cave spacieuse. Les murs de la cuisine en colombages s'appuient sur des fondations en pierre, élevées jusqu'à un mètre environ au-dessus du sol. Les murs de la cave, au contraire, sont en pierre jusqu'à la hauteur du premier étage, et présentent à leur partie supérieure cette particularité qu'ils sont formés d'un carrelage de carreaux blancs et rouges, disposés en damier. La cuisine et la cave sont surmontées chacune d'une grande chambre dont les murs sont en colombages. Ces deux chambres sont pourvues chacune de sa vaste cheminée, semblable à celle de la cuisine et s'y adossant. Au-dessus de la cave et de la chambre qui la surmonte, on remarque un second étage éclairé par une large lucarne formant fronton. Un grenier règne d'ailleurs sur tout l'édifice, à droite comme à gauche du noyau central de maçonnerie, mais à des hauteurs inégales.

    Cette partie de l'édifice me semble la plus ancienne, et doit remonter à la première moitié du XVe siècle. Ce doit être là l'hostel dont il est parlé dans l'acte de 1448.

    A ce logis primitif, du côté de la route (du quemin, comme on écrivait alors et comme on prononce encore aujourd'hui dans nos villages) se trouvait un pressoir ou du moins un bâtiment qui sert aujourd'hui de pressoir. Quel pouvait être l'usage de ce bâtiment à l'origine ? Je ne le sais. Ce qui est certain, c'est que l'édifice actuel, malgré son aspect si pittoresque et si original, est de date plus récente que la construction primitive. Avant la restauration que j'ai dû entreprendre il y a quatre ou cinq ans, il était facile, en regardant la charpente, de constater que le bâtiment primitif était beaucoup plus étroit que celui qui lui avait succédé, et qu'à une époque, que j'essaierai tout à l'heure de préciser, on avait remplacé l'ancienne façade par une nouvelle. On avait reporté celle-ci près de deux mètres en avant dans la cour, en raccordant tant bien que mal l'ancienne charpente avec la nouvelle, ce qui donnait à la toiture une forme étrange et curieuse. Dans la restauration rendue nécessaire par l'état de vétusté de la charpente, j'ai pu conserver la forme extérieure absolument intacte. La façade est identiquement la même que l'ancienne ; les quelques parties qu'il a fallu démonter, pour remplacer les tenons et les chevilles pourries, ont été replacées telles qu'elles étaient. A peine deux ou trois pièces importantes ont-elles été remplacées par des bois neufs taillés et moulés d'après les anciens, avec la plus grande exactitude. J'ai eu la chance de trouver dans la localité même, pour exécuter ce travail, un habile charpentier, M. Léon Moutier, qui a compris l'intérêt archéologique qui s'attachait à ce vieux reste de l'ancienne architecture locale. Malheureusement, ce qui a pu être fait pour la façade ne pouvait l'être pour la charpente intérieure. Les bois étaient tellement vermoulus et pourris qu'il était impossible de les conserver. On a dû faire une charpente neuve, en ayant soin toutefois de reproduire exactement la forme de l'ancien toit.

    A quelle époque ce pressoir a-t-il été construit avec son aspect et ses dimensions actuelles ? J'inclinerais à croire qu'il fut l'oeuvre de Jacques du Fossey, ou de son fils Daniel, qui travaillèrent avec persévérance à reconstituer un domaine que la négligence de Pierre du Fossey, faible d'esprit, dit-on, avait laissé dépérir. Cela ferait remonter cet édifice à la seconde moitié du XVIe siècle. Ce qui me le ferait croire encore, c'est le soin que mit Jacques du Fossey à faire valoir et reconnaître le droit qu'il avait de prendre, dans la forêt de Touques, du bois pour l'entretien de son domaine. Cela d'ailleurs ne s'accorderait-il pas avec la tradition qui fait remonter à cette époque le grand développement de la culture du pommier à cidre en Normandie.

    L'ensemble des bâtiments que nous venons de décrire présente une longue façade dont l'aspect a quelque chose de bizarre et d'étrange, surtout à raison des trois corps avancés qui en coupent la ligne droite à intervalles inégaux : la tourelle d'escalier en pierre, le porche en colombages qui donne accès dans la cave, et l'escalier en bois qui monte au grenier du pressoir. En face de ces bâtiments s'étend une cour carrée, défigurée aujourd'hui, malheureusement, par des constructions modernes qui lui ont enlevé beaucoup de l'intérêt qu'elle présentait encore dans mon enfance.

    Le long de la route et du côté du jardin, il ne reste presque plus rien d'ancien, si ce n'est dix ou douze mètres de cette singulière suite de logettes à volailles et à lapins qui jadis régnait sur tout un côté de la cour, le long du mur qui la séparait du jardin. Ces logettes, hautes de deux pieds environ, sont surmontées d'une sorte d'abri ou hangar dont l'épaisseur ne dépasse pas un mètre, et qui est supporté par une charpente assez prétentieusement travaillée, soutenue elle-même par une véritable colonnade en bois, formée de piliers s'espaçant à une distance irrégulière de un à deux mètres. Les quelques mètres qui restent encore de cette singulière construction permettent de se rendre compte de l'effet que produisait la colonnade entière.

    Le côté de la cour opposé à la route a conservé, au contraire, sa physionomie ancienne.

    A gauche, se voit encore une vieille grange sans caractère particulier ; mais, à droite de la barrière qui donne accès aux herbages, s'élève un bâtiment qui n'a qu'un rez-de-chaussée et un grenier. Celui-ci est éclairé par une lucarne formée de quatre baies ou fenêtres étroites, dont les parties supérieures sont à jour, mais dont les parties inférieures sont fermées par une sorte de croisillon en forme d'X qui donne à l'édifice un aspect relativement élégant.

    Aussi les gens du pays appellent-ils ce bâtiment la Vieille Maison. J'ai cependant beaucoup de peine à croire que ce soit la partie la plus ancienne du Manoir ; d'abord cela ne pouvait pas constituer une maison d'habitation à cause de son exiguïté : le grenier, malgré sa lucarne prétentieuse, n'a jamais pu être autre chose qu'un grenier fort étroit et sans accès ; enfin l'élégance même de la lucarne me porterait à lui attribuer plutôt une date postérieure.

    Quoi qu'il en soit de l'âge exact de la Vieille Maison, ce qui est certain, c'est qu'à une époque relativement récente, au XVIIe siècle je crois, les propriétaires y aménagèrent pour leur usage une petite salle ou salon avec une cheminée dont la décoration de bon goût a été conservée ou plutôt reproduite lors de la dernière restauration.

    Il ne me reste plus à parler que du colombier qui s'élève au milieu de la cour. Celui-ci est carré, les murs jusqu'à deux mètres et demi du sol sont en pierre, mais la partie supérieure est en colombages. Le toit, élevé et pointu, était naguère encore surmonté de deux élégants épis en faïence. M. de Franqueville les a enlevés il y a une quinzaine d'années, et les garde comme un souvenir de ce vieux domaine de ses aïeux dont il m'a abandonné sa part presque en totalité. Ce colombier ne doit pas remonter au delà du XVIe siècle.

    M. de Caumont s'est occupé, en passant, du Manoir de Canapville. Il ne lui attribue pas de date précise, que je sache, mais il le cite comme un type curieux des habitations rurales en Normandie aux XVe et XVIe siècles. L'artiste anglais qui en a publié une esquisse dans le n° du 22 mars 1890 de The Illustrated London News le considère également comme un spécimen caractéristique des manoirs franco-normands du XVIe siècle.

    C'est en somme à cette date qu'il faut, je crois, rapporter la construction de la presque totalité de cette résidence jadis seigneuriale, si l'on en excepte le corps principal de logis groupé autour du noyau central de maçonnerie comprenant la triple cheminée et la tourelle de l'escalier, qui existait déjà en 1448.

    Cette notice, beaucoup trop longue pour les curieux qui ne veulent que jeter un coup d'oeil rapide sur le pays à travers lequel ils passent, pour les artistes qui ne veulent que croquer un joli motif d'aquarelle ou d'eau-forte, intéressera peut-être quelque bon Normand du pays d'Auge qui, dans ses longs loisirs, au milieu du calme des champs et des prairies, voudra connaître ce que furent pendant quatre siècles la vie et des habitants et des habitations de son pays.

    LE COURTOIS DU MANOIR.


    Manoir de Canapville, pl.1 Manoir de Canapville, pl.2 Manoir de Canapville, pl.3

     


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    table des auteurs et des anonymes 

     

    SOURCES

     

    http://www.bmlisieux.com/normandie/manoir01.htm

     

     

     

     

     

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    HISTORIQUE

    1097 Construction d'une motte castrale et d'un château en bois par Robert II de Bellême pour Guillaume le Roux.
    1120 Robert de Chandos résiste à une attaque des seigneurs Normands.
    1123 Reconstruction du château (donjon en pierre) ordonnée par Henri Ier.
    1158 En attendant le mariage entre Marguerite de France, et le fils d'Henri II, le château est confié à la garde des Templiers.
    1160 Le château passe sous tutelle Anglaise.
    1193 Philippe Auguste prend le château et le fait remanier.
    1314 Sert de Prison au templiers et en particulier à Jacques de Molay, dernier grand Maître.
    1419 Pris par les Anglais pendant la Guerre de cent ans .
    1449 Charles VII reprend le château aux Anglais.
    1591 Le château est abandonné.
    1809 Acheté par la ville de Gisors .
    1851 Fouilles et restauration du château.
    1862

    Classé monument historique.

    XXe Destruction du logis royal.

     

     

     

     

     

     

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    Dans les pays industrialisés, une des transformations majeures dans les moeurs du XIXème siècle fut le changement de comportement aussi bien en terme de salubrité publique

    que d’un point de vue personnel.

     

    En effet il faut comprendre que pour les siècles précédents l'hygiène n'était pas une priorité.

     

    L'odeur émanant des rues était atrocement nauséabonde.

     

    Et pour cause : les déchets jonchaient ces rues, les pots de chambre étaient jetés par les fenêtres.

     

    Les rats, friands de la saleté, et porteur de maladies, vivaient en osmose avec l'Homme.

     

    Par ailleurs, jusqu’au XVIIème siècle, l’eau n’est pas considérée comme un élément "bienfaiteur" et on se trouve dans une logique de propreté sèche :

     

    on se lave les mains et le visage à l’aide de linges humides et parfumés. Parfum, maquillage et coiffure sont autant d’artifices permettant de masquer les odeurs et de pallier au manque d’hygiène.

     

    La propreté passe désormais par le changement régulier du linge de corps et par la blancheur des parties visibles de ce linge (col et manche).

    Le XIXème siècle, lui, est celui de la révolution hygiénique. On vante les vertus du bain, on rouvre les bains publics qui avaient disparus au XVIème siècle.

    Ce changement de comportement est aidé des travaux de Pasteur qui démontrent l’existence des microbes, ceux-ci proliférant sur un terrain non hygiénique, faisant le lit de nombreuses maladies.

    La propreté permettrait d’éradiquer les maladies.

    A la fin du XIXème siècle, le triomphe de la révolution sanitaire est maximal.

     

    Alors que l'on note deux épidémies de choléra durant le milieu du XIXème, ces épidémies deviennent de plus en plus rares, notamment grâce à l'apparition des vaccins, mais aussi, et surtout, grâce aux mesures d'asepsie qui sont désormais prises.

     

    La durée de vie augmente de façon radicale.

     

    De même une baisse de la mortalité infantile est observée en cette fin de siècle.

    Le grand gagnant de cette révolution sera le savon.

     

    Celui-ci est connu depuis longtemps mais il a connu un essor exceptionnel au XIXème siècle grâce d’une part à la révolution industrielle (de nouveaux procédés de fabrication sont mis au point par exemple) et à ces nouveaux comportements en matière de propreté.

    A partir de 1880, des manufactures sont capables de produire plus de

    12 500 tonnes de savon par an.

     

    L'hygiène au XIXème siècle

     

    Mais revenons à notre toilette individuelle : le XIXème remet donc l’eau au goût du jour.

     

    Cette eau tant méprisée par l’Eglise car permettant la luxure et le plaisir via notamment les étuves.

     

    Cette eau qui fait peur car elle véhiculerait les maladies en dilatant les pores de la peau.

    Bref, le Siècle des Lumières sera plus lucide et donnera une nouvelle vision du rapport à l’eau et imposera un retour à la nature. Exit les fards, les poudres et autres pommades parfumées.

    Retour aux ablutions dans le cabinet de toilette, à l’abri des regards et ce, dès le XVIIIème siècle.

     

     

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    La toilette devient une affaire en effet plus intime (n’oublions pas que Louis XIV allait « sur le trône » si je puis dire devant des privilégiés de la Cour !).

     

     

    L’aristocratie s’empare de ce renouveau du bain et les premiers cabinets de toilette apparaissent à Versailles. Les baignoires font leur apparition dans de nouvelles pièces dédiées à la propreté et au soin du corps.

     

    L'hygiène au XIXème siècle

    Au 19ème siècle, la salle de bain se démocratise dans les appartements bourgeois des villes. Une salle est dédiée entièrement aux ablutions. Les progrès technologiques (eau courante et gaz) vont accélérer cette progression. Soyons réaliste toutefois, la toilette se fait pour la plupart des gens, les moins aisés, les ouvriers, les employés, dans la chambre ou dans la cuisine pour avoir un peu de chaleur, avec une bassine et un broc ou dans un tub. Pas de salle de bains encore pour eux.

    La baignoire du XIXème siècle est en bois, en fer blanc ou en zinc, ; on commence à importer des USA la baignoire en fonte émaillée et de l’Agleterre la baignoire en terre cuite émaillée.

    Elle est encore profonde et étroite et surtout elle est mobile (on peut d’ailleurs louer une baignoire).

    Dans la mesure où elle est mobile, la baignoire n’a à cette époque ni robinet ni écoulement. On la dispose sur le tapis dans la chambre à coucher, près de la cheminée si possible. La femme de chambre fait chauffer l’eau, la transporte et la verse dans la baignoire.

    Ce nouvel engouement pour la baignoire va ainsi permettre durant la seconde partie du 19e siècle le développement de l’activité des porteurs d’eau : la baignoire à remplir dans les appartements parisiens (et en province). Le livreur transporte des seaux d’eau chaude sur une charrette, les monte à l’étage, redescend chercher l’eau froide dans la cour. « Il n’a pas le droit de rester dans l’appartement pendant le bain et se repose sur le palier ». Puis il vide l’eau sale dans la cour ; si par malheur, il renverse une goutte d’eau, il perd son pourboire.

    Ça c’est pour le remplissage et l’écoulement et la solution trouvée reste peu pratique. On va essayer de trouver autre chose mais il n’y a pas 36 solutions : il va falloir mettre de la plomberie autour de la baignoire ; elle va donc devenir immobile et on va devoir dorénavant lui trouver une place pérenne d’où l’invention de la salle de bain.

    Et là les architectes et industriels (anglais surtout) vont rivaliser d’imagination pour créer des pièces luxueuses avec motifs peints ou encastrés dans la boiserie avec tout le confort moderne : baignoire, lavabo, bidet, wc. Les Américains vont simplifier tout ça en adoptant un plan rationnel sur une surface réduite sans ornementations superflues : les pieds de la baignoire disparaisent, la plomberie du lavabo est englobée dans son support, carrelage au mur et au sol, couleur blanche. La salle de bain ne va malgré tout pas envahir les habitats populaires de suite. Elle reste un luxe réservé à des familles aisées.

    L'hygiène au XIXème siècle

    L'hygiène au XIXème siècle

     

    Quid maintenant du chauffage de l’eau ? On va chercher à chauffer l’eau sur place : un petit fourneau portatif à pétrole , gaz ou charbon est installé à proximité. On essaie aussi de placer des brûleurs à gaz sous la baignoire. En 1868 le geyser à gaz est inventé : l’eau est chauffée dans un réseau de circulation en serpentin).

    Ce qui reste curieux est que l’on va d’abord chercher à chauffer l’eau pour se laver avant de chauffer l’eau de la cuisine. En 1921 par exemple, les appartements ouvriers du Pré d’Ouchy à Lausanne disposent d’un chauffe eau à gaz dans la salle de bain tandis qu’il n’y a que de l’eau froide dans la cuisine !

    Il est à noter que César Ritz est le premier hôtelier à prévoir une salle de bain et un WC par chambre dans son tout nouvel établissement, le Ritz, place Vendôme à paris, ouvert en 1898. Comble du luxe à l’époque.

    Nous avons vu plus haut que la salle de bain était essentiellement réservée aux gens aisés. En 1954 par exemple, la moitié des logements français ont l’eau courante, mais seuls 25% d’entre eux possèdent une salle de bain. En 1962, le taux d’équipement des salles de bain passe à 30%, et en 1992, 93,4%. En 1973, 70% des logements ont un wc intérieur. Il faut attendre la fin des années 1980 pour que la quasi-totalité des Français bénéficie de l'eau courante à domicile.

    Mais qu’à cela ne tienne : pas besoin de salle de bain pour se laver ! Un manuel d’économie domestique « Chez nous » publié en 1933 précise : « il ne faut pas prétexter pour se dispenser de cette toilette qu’on a pas la douche ou le tub ou la chambre de bains nécessaire ! Pas besoin de tout cela. Il suffit d’une lavette trempée dans une cuvette pleine d’eau et passée rapidement sur tout le corps ».

    Le terme « rapidement » est là très important : on ne doit pas se laver n’importe comment, morale oblige !

    L'hygiène au XIXème siècle

    Et que dire du bidet ? Cette chose un peu bizarre et finalement peu utilisée de nos jours … Ce n’est que progressivement que le bidet va entrer dans les mœurs et ceci, grâce à deux catégories de personnes : les courtisanes (des plus raffinées aux maisons closes) et l’aristocratie.

    On retrouve dans les deux cas le même souci de l’hygiène de ce que l’on ne nomme pas à l’époque ou par périphrase : les parties honteuses, les parties à la base du corps, les parties réputées les plus sales...

     

    L'hygiène au XIXème siècle - 1

    La toilette intime ou la Rose effeuillée de Louis Léopold Boilly

    Mais attention, le bidet, en plus d’être un objet utile, nécessaire à l’hygiène, doit être un bel objet, aristocratie oblige …. Et bidet va progressivement trouver ses lettres de noblesse grâce à la révolution hygiénique/hygiéniste. Mais cela ne sera pas malgré tout du goût de tout le monde !

    Au XIXème siècle en effet le bidet semble entrer dans les mœurs : Napoléon lui-même en détient plusieurs spécimens, dont on trouvera mention dans le testament qu’il dresse à Saint Hélène.

    Mais s’’il devient évident qu’une bonne hygiène passe par le bain, celui des parties génitales reste encore un tabou.

    Ce sont les ouvrages qui traitent des relations du couple qui en parlent le plus. Ils sont spécialisés dans l’hygiène du mariage et prodiguent des conseils pour éviter la désunion. Parmi les raisons identifiées de celle-ci, la mauvaise hygiène des femmes : « Que de femmes ne doivent leur abandon qu’à cette négligence des soins du corps ! » (Dr Degoix, Manuel d’hygiène du mariage, vers 1850).

    Mais le bidet est décrié justement pour cet usage ! C’est dans les milieux conservateurs voire dévots que l’on y trouve ses plus ardents opposants. On trouve parmi les avis médicaux des affirmations relatives à la nocivité des rapports sexuels (le bidet est donc lié aux ablutions post-coïtales). Ces rapports, par la perte du liquide séminal, affaiblirait l’homme. Trop de rapports sont donc à proscrire. Et c’est là un des arguments les plus modérés à l’encontre de l’hygiène intime !

    L'hygiène au XIXème siècle

    Prenons l’éducation des jeunes femmes, confiées aux ordres religieux en bonne partie durant le premier XIXème siècle. Les anecdotes sont nombreuses, révélant que les jeunes filles ne se lavent quasiment pas et surtout pas les parties honteuses, même lorsqu’elles ont leurs menstrues. Par ailleurs, le bidet, par la toilette intime qu’il permet, est considéré comme un instrument de contraception et ce, dès le début. En effet, dans les maisons de charme, il est très rapidement imposé à chacune des pensionnaires.

    Mais ce dont on a surtout peur au XIXème siècle, c’est de l’onanisme, qui selon les règles de l’Église est un péché puisque le rapport sexuel n’a pour fonction que la reproduction. Le plaisir solitaire est donc le comble de la luxure. Les femmes sont, dans leur pratique hygiéniste, ici particulièrement visées puisque la position sur le bidet, les gestes nécessaires à la toilette développent envies et appétits… Pour conforter cette vision, on trouve dans la littérature érotique voire grivoise et plus populaire, nombreux récits mentionnant le bidet comme instrument érotique (scènes classiques de la toilette assistée par une servante ou une amie qui s’attarde plus que nécessaire..).

    Le bidet, plus qu’un objet, est finalement le révélateur des valeurs morales qui traversent la société.

    L’assiette au beurre ne s’y trompe pas, nous livrant une caricature de Jossot (1907), représentant un ecclésiastique en arrêt devant la vitrine d’un herboriste dans laquelle figure un bidet . Celui-ci s’exclame "Faut-il être sale pour se laver le derrière !".

    Dans le même temps les pouvoirs publics investissent dans de nouvelles infrastructures dédiées à l’hygiène du corps. Les établissements de « bain douches » se multiplient partout en France à l’initiative des municipalités ou d’entreprises paternalistes soucieuses de mettre à disposition de leurs ouvriers des lieux dédiés à la propreté. Sous la Deuxième République, l’hygiène est encore une notion balbutiante : les Français de l’époque goûtent encore rarement aux délices du bain, avec une immersion tous les… deux ans en moyenne. Mais l’hygiène publique est en effet l’affaire de tous. En témoignent les premières publicités pour le savon, la multiplication des manuels d’hygiène et l’instauration de cours d’hygiène obligatoires à l’école.





    L'hygiène au XIXème siècle un balayeur en 1900

     

    Les bains douche ne seront bien sûr pas suffisants.



    Dans sa Topographie médicale de Paris de 1822, le Dr Claude Lachaise suppose que « les émanations qui s’élèvent de rues étroites, bourbeuses et encombrées » et « l’accumulation de familles nombreuses dans la même maison, souvent dans la même pièce » sont des causes spécifiques à la ville susceptibles d’influer sur sa salubrité.



    Pour la première fois, on considère les cloaques à ciel ouverts que sont encore les égouts parisiens comme des problèmes sociaux et médicaux. C’est toute l’architecture et l’organisation des villes qui est à revoir (percement de grandes artères, tout à l’égout, eau courante …).

     

    Quid de l’hygiène buccale ? Les premières recommandations hygiéniques de la bouche apparaissent à partir du 18ème siècle ainsi que la production industrielle des eaux dentifrices et la diffusion de la brosse à dent. Celle-ci existe depuis 1498 mais il faut attendre le règne de Louis XV pour qu’elle fasse son apparition à la Cour. Elle va connaître un véritable essor grâce à Bonaparte qui se brossait régulièrement les dents et imposa la brosse à dents dans le paquetage des soldats en 1790, développant ainsi sa commercialisation.

     

    Mais ne nous y trompons pas, du 17ème au 19ème siècle, l’hygiène bucco-dentaire est réservée à une minorité de privilégiés. En 1800, à Paris seuls quarante dentistes reconnus sont recensés pour une population de 700 000 habitants.

    Comment les hommes se rasaient ?

    Se raser est un acte de propreté spécifiquement masculin qui porte le nom de pogonotomie, terme inventé par le créateur du rasoir à rabot, ancêtre du rasoir de sureté, Jean-Jacques Perret.

     

    L'hygiène au XIXème siècle





    Un nécessaire de toilette pour le rasage est composé d’un bassin ou d’un plat à barbe, d’une boîte à éponge, d’une boîte à savon, d’un blaireau, d’un rasoir et d’un cuir pour l’affûtage. On utilise une brosse pour appliquer le savon à barbe à partir du 18ème siècle.

    Le premier coupe-chou à lame pliante dans le manche serait apparu au 17ème siècle.

     

    À l'origine, le mot désignait un sabre court à lame pliable utilisé dans l'infanterie. Il deviendra l’instrument de rasage par excellence touchant toutes les classes sociales.

     

    En 1904, l’américain King Camp Gillette brevète un système plus hygiénique de rasoir à lame jetable.



    Le rasoir électrique quant à lui est mis au point par Jacob Schick dès 1928.

     

    En conclusion,

    L'hygiène au XIXème siècle

     

    Sources

    Le propre et le sale de Georges Vigarello

    Propre en ordre :

    habitation et vie domestique 1850-1930 :

    exemple vaudois de Geneviève Heller

     



    SOURCES



    http://magenealogie.eklablog.com/l-hygiene-au-xixeme-siecle-1-a126421650

    Le confident des dames de Julia Csergo et Roger Henri Guerrand

     

     

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